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Des sacrifices de l'affection - Grindelwald

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Belladone Raven
Belladone Raven
Âge : 28 ans
Sang : Sang-Pur
Nationalité : Anglaise
Patronus : Un corbeau
Épouvantard : Lavande recroquevillée au sol, le visage baigné de larmes, qui implore son aide, personnification de son impuissance à combattre les Forces du Mal
Reflet du Riséd : Lui même sauvant Lavande à son bras, des étincelles flamboyantes jaillissant encore de sa baguette, provenant de la bataille qu'il vient de gagner
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeMar 29 Sep - 16:05



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

Grindelwald semblait s’arracher au torrent bouillonnant de souvenirs éthérés, trop vieux, presque oubliés à force de négligence. Il émergeait brutalement, comme extirpé d’un seau d’eau glacé par la voix tendre de Belladone, émaillée par l’hésitation, l’incertitude apeurée dissimulée sous un voile de bravoure feint et qui ne duperait sans doute pas le célèbre Legilimens. Et pour sûr son trouble s’était perçu, parce que la dichotomie du regard amusé du mage noir se tourna vers lui, et, lorsque ses lèvres pâles s’entrouvrirent, ce fut pour lui rappeler la stature de sa désormais position, dans une invective qui se voulait encourageante mais non dénuée d’un paternalisme certain. Il y’avait un peu de cela, en réalité. Aucune relation ne pouvait trouver un équilibre parfait, et toujours la balance penchait plus d’un côté ou de l’autre. Nul doute que leur relation amicale restait dominée par le charisme de Gellert, son assise certaine à laquelle l’âge avait conféré une aura de plus, auquel le docile Belladone se soumettait avec plus de facilité qu’avec quelqu’un d’autre. Et le sourire de Gellert, taquin, un brin attendri à l’encontre de son cadet, semblait confirmer cette hypothèse, à laquelle le jeune homme adhérait sans amertume. Il avait toujours été plutôt suiveur, et pouvait-il en être autrement face à un mage de telle envergure ?

- C’est vous qui avez raison. Ce sera quand vous voulez, donc.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Les longues jambes de Gellert Grindelwald amorcèrent la première enjambée, toujours drapées du noir sempiternel dont il avait fait un uniforme, despotique et insolent, à l’image du sorcier terrible qu’il avait incarné des années durant. Belladone le suivit, et put entendre au bruissement agacé des capes qui voletaient autour des feuilles sèches que les Aurors faisaient de même, ulcérés sans doute de l’ingratitude de la tâche qui leur était conférée. Suivre comme son ombre un Gellert Grindelwald devenu Professeur à Poudlard, engeôlé presque sous la surveillance étroite de son ancien amant, n’avait de fait rien de gratifiant ou d’exaltant. Les Aurors représentaient l’élite sorcière, la fine fleur des duellistes et combattants magiques qui défendaient le monde sorcier du mal et des fauteurs de trouble tels qu’avaient été son désormais ami. Un sourire brusque, aveu coupable d’une joie franche, vint illuminer le sourire de Belladone, à s’imaginer la tête de Narcisse si d’aventure il s’était vu confier une telle tâche. Le jeune homme réprima un rire, tandis que lui, Gellert et les Aurors s’enfonçaient au cœur des crocs béants de la Forêt Interdite.

Les mains dans le dos, roide et l’air tranquille, Gellert semblait très satisfait de sa petite escapade imprévue. Les serres acérées des bois sépulcraux, à la manière de tentacules, tissaient leur toile autour de leurs ombres fugaces, éthérées, les nimbant de la chape obscure d’une nuit sans lune en plein jour. Belladone resserra autour de lui les pans de son manteau, enfonçant un peu plus son menton au creux de son écharpe. Le vent semblait se lever à mesure que la nuit s’épaississait. Gellert continuait de s’égarer à l’aveugle, et le jeune homme n’osait l’interrompre, craignant d’être raillé une fois de plus pour son couardise. Pourtant il lui semblait là qu’il s’agissait de la prudence la plus élémentaire. S’enfoncer ainsi à l’aveuglette dans les tréfonds obscurs d’un lieu inconnu d’eux deux n’était guère rusé, et l’idée d’attendre le lever du jour au creux de l’hostilité de ses bois ne séduisait guère Belladone, fut-ce accompagné par la puissance désarmée de son ami.

Pourtant, aucune crainte ne semblait animer le visage d’albâtre de Gellert, dont la blancheur brillait à travers le sépulcre des tréfonds de la Forêt Interdite, à l’instar de la Lune qui perçait une nuit d’encre. Non. Une allégresse étrange, un enthousiasme juvénile, une candeur assumée qui régissait sa longue foulée grâcieuse qui avançait, avançait, au mépris de la nuit et de l’hésitation mutique de Belladone. Il semblait incroyablement heureux de cette échappatoire salutaire, comme épris d’une liberté que l’on réprimait en le tenant cloîtré au creux de quatre murs, lui qui, toujours, avait virevolté à sa guise à travers les contrées, répondant à sa volonté seule, aujourd’hui prisonnier et répondant de tout. D’une voix légère, il répondit tardivement à la question que le jeune homme avait posé à l’orée du bois. Un Cocatris ? Gellert était bien optimiste. Voici plusieurs dizaines d’années que ces créatures avaient disparu de la circulation, à tel point que, comme le soulignait Gellert, le plus sérieux et renommé magizoologiste contemporain, Newt Scamander, n’avait pas pris la peine de le mentionner dans son ouvrage qui faisait référence dans le monde de la sorcellerie. L’allusion aux Pitiponks, pourtant, eut l’effet d’esquisser un sourire sur les lèvres inquiètes de Belladone. Grindelwald avait été plus proche d’une de ses petites créatures qu’il ne le pensait. Avec un sourire, tâchant de ne pas s’alarmer de ce que son ami semblait vérifier que sa baguette était bien dégainée, Belladone répondit, avec un léger élan d’entrain :

- Je crois malheureusement que vous pouvez rayer les Cocatris de votre liste, et je n’en suis pas fâché. La mention la plus récente que j’ai lue à leur sujet date de 1792. La créature faisait partie d’une épreuve du Tournoi des Trois Sorciers qui a dégénéré. Les trois Directeurs des Ecoles participantes auraient été blessés. Quant aux Pitiponks, j’en possède un spécimen en ce moment même dans mon bureau. C’est pour le faire étudier à mes troisièmes années. Vous passez quand vous voulez, même s’ils sont plus intéressants à l’état sauvage, je vous l’accorde.

Belladone lui offrit un sourire, de moins en moins rassuré cependant. Le vent hurlait à travers la cime des arbres, sifflant un air sinistre, menaçant, qui nimbait la forêt d’un sombre présage. Le jeune homme aurait bien aimé rebroussé chemin, à présent qu’ils s’étaient enfoncés à l’aveugle et que la nuit semblait tomber pour de bon. Le jeune homme déglutit un instant. Une branche craqua sous son pied, et, au beau milieu de l’encre des taillis semblaient s’agiter quelques feuilles. L’air s’obscurcissait de plus en plus, et en plus de l’aigreur du vent, il devenait difficile de discerner le moindre bruit suspect, la moindre ombre menaçante. Cette fois-ci Belladone se racla la gorge, prenant son courage à deux mains :

- Hum, vous savez Gellert, c’est que je ne suis jamais allé dans cette Forêt, tout comme vous d’ailleurs. Il n’est guère prudent de s’aventurer ainsi à l’aveugle, d’autant que la nuit va tomber. Je ne serais d’aucun secours pour retrouver notre chemin. Sauf si vous souhaitez passer la nuit ici…

Belladone eut un ricanement embarrassé. Quant à lui, l’idée le révulsait. La forêt, hostile, ne semblait guère encline à abriter leurs âmes pour ces longues heures qui les séparaient de l’aube, et l’appel du confort sécurisé des draps blancs chauffés à la lueur de l’âtre encourageaient Belladone à ne pas s’attarder.

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Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeMer 30 Sep - 12:09



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

La Forêt Interdite dégageait indéniablement une aura pesante et malsaine. Le Mal semblait empreindre chaque écorce de chaque arbre, jusqu’au bout de chaque feuille. Le vent n’avait rien de doux, ne caressait pas le sommet des cheveux et n’apportait pas la sérénité de la brise qui soufflait sur les rives du Lac Noir. Non, il avait là des échos lugubres, presque sépulcraux quand il passait entre les branches distordues de la Forêt Interdite. Grindelwald avait cette étrange impression qu’elle était à la fois maudite et vivante, à l’instar d’autres bois d’Europe comme Sherwood, Brocéliande ou celle d’Hoia, en Roumanie. Des forêts peuplées de légendes moldues sûrement témoins de phénomènes n’appartenant pas à leur monde. Gellert appréciait cette ambiance. Quelque part, cela le ressourçait, même s’il savait que cela n’avait rien de raisonnable. La magie noire, utilisée fréquemment, laissait d’indélébiles stigmates sur le corps des usagers. Le visage sans aucune pigmentation de Grindelwald en était la preuve. Telle une drogue pourtant, les forces obscures semblaient pourtant constamment l’appeler, comme pour le remettre sur ce chemin sombre et macabre qu’il avait choisi d’emprunter auparavant. Si le froid et l’humidité du Mal effleurait sa peau et caressait sa nuque avec douceur, Gellert savait qu’il se devait de refuser définitivement cette invitation.

Pourtant, il se sentait chez lui au milieu des troncs noirs qui empêchaient le moindre rayon crépusculaire du soleil de passer. À moins que la nuit ne soit déjà tombée. Il était impossible de le deviner mais cela n’avait aucune importance. Grindelwald se moquait bien du nombre d’heures qu’il passerait à errer entre les arbres, appréciant seulement la simplicité de cette promenade dans un lieu qui ne s’y prêtait pas. Tournant le dos à Belladone, Gellert ferma les yeux pour simplement apprécier l’odeur de la mousse humide sur le tronc qui n’avait rien à envier à celle d’Azkaban. Le climat là-bas privait les résidents de la prison de leur sens. Si l’eau contre la pierre pouvait faire émaner des vapeurs agréables, il n’avait aucune odeur dans la prison pour sorciers. Seulement celle de la folie, un mélange entre transpiration et puanteur, masquant les embruns salés de l’océan. Là, aussi malveillante pouvait être la végétation, elle dégageait néanmoins cette odeur de nature humide, renforcée certainement par la saison automnale. Quoiqu’on pût lui en dire, Gellert appréciait déjà ce lieu. L’ombre, les ténèbres qui y régnaient, il les trouvait apaisantes et réconfortantes, loin de tout et tout le monde. Il était seul, comme au début et à la fin de tout.

Belladone lui rappela pourtant sa présence et le tira hors de ce début de méditation pour lui indiquer tristement que les Cocatris avaient disparu de la circulation depuis des siècles. Tournant toujours le dos à son jeune collègue, Gellert eut une moue déçue. Aussi dangereux qu’étaient ces créatures, elles n’en demeuraient pas moins splendides et c’était un comble qu’elles soient présumées disparues. L’anecdote sur le Tournoi des Trois Sorciers le fit sourire, se rappelant également que, plus jeune, il avait rêvé de participer à un tel évènement au cours duquel il aurait certainement écrasé toute concurrence. Il ne s’en serait certainement pas servi pour se prouver sa propre valeur mais pour prévenir le monde de sa puissance. Belladone enchaîna sur le Pitiponk qu’il annonça détenir dans son bureau, information que Gellert ne remit pas du tout en question. Mais, point commun qu’il partageait certainement à Scamander, il préférait largement voir les créatures dans leur habitat naturel, là où ils étaient en confiance et en pleine possession de leur capacité. Un Pitiponk n’ayant personne à guider avec sa lanterne n’avait rien d’intéressant. Le spectacle devait même être triste et incroyablement inoffensif. Non, cela ne le tentait pas d’aller observer le spécimen de plus près dans le bureau de Belladone.

Le temps passait tandis que les ténèbres semblaient devenir de plus en plus profondes. Curieux de voir jusqu’où l’obscurité pouvait aller, Gellert ne prit pas la peine de créer un orbe de lumière afin de voir où ils allaient mettre les pieds. Pourtant, il sentait Belladone être de plus en plus tendu derrière lui. Si ce dernier avait si peur, il était libre de rebrousser chemin ou de produire un Lumos. Par ailleurs, le jeune professeur ne tarda pas à faire part à son ami de ses craintes de passer la nuit dans la Forêt Interdite avec un ricanement nerveux, prétextant que cela était la première fois qu’il y mettait les pieds. Cette affirmation était fausse. Et Grindelwald se sentit incroyablement déçu et trahi que Raven puisse lui mentir délibérément ainsi. Quel était le but de lui cacher le fait qu’il était effectivement déjà rentré dans le bois autour de Poudlard ? Était-ce en rapport avec Lavande qui était à ses côtés à ce moment-là ? Une foule de questions plus désagréables les unes que les autres se bousculèrent dans son esprit qui n’avait plus rien de curieux ni d’espiègle. Belladone venait de faire une très grosse erreur et il ne s’en était probablement pas rendu compte.

— Le problème avec le mensonge c’est qu’il fait perdre instantanément toute crédibilité à son auteur quand l’interlocuteur détient déjà la vérité.

Se redressant de son inspection mutique de la flore de la Forêt, il plaça machinalement ses mains dans son dos avant de se retourner vers Belladone. L’œil torve et le visage froidement impassible, il regardait celui qu’il considérait comme son ami droit dans les yeux. Le jeune professeur venait de trébucher dans un endroit qu’il ne semblait pas apprécier le moins du monde en présence de l’homme réputé pour être le plus dangereux de la communauté sorcière. Avec un calme glacial, Grindelwald reprit de sa voix grave :

— Pourquoi me mentir, Belladone ? Qu’est-ce que cela t’apporte de me cacher que tu es déjà rentré dans la Forêt ?

Il soupira et baissa le regard avec un air presque désolé avant de s’avancer vers celui qu’il avait considéré comme son ami. Lui qui avait été étrangement si peiné de n’avoir eu aucun contact avec lui pendant une dizaine de jours, lui qui avait été si guilleret d’avoir l’espoir de pouvoir nouer une amitié qui ne serait pas éclaboussée par un drame, le voilà de nouveau avec ce puissant sentiment de trahison.

— Je t’ai fait confiance. Par bonté, par générosité et par gage de ma bonne foi et de mes bonnes intentions à ton égard, je t’ai raconté mon passé. Je t’ai tout dit, avoué des choses que je n’avais dites encore à personne. Et tu me remercies de la sorte ? En me mentant sur un détail si futile ?

Moins d’un mètre séparait désormais les deux hommes qui étaient tristement seuls au milieu des silhouettes menaçantes des arbres. Cela faisait plusieurs dizaines de minutes que les Aurors avaient perdu leur trace, manœuvre pourtant involontaire du mage noir mais qui l’arrangeait bien dans cette situation.

— Maintenant dis-moi, Belladone, parce que je t’ai vu. Qu’as-tu fait à Lavande ?

Gellert voulait bien croire qu’il ne s’agissait que d’une maladresse de la part de celui qui demeurait pourtant son ami. Que rien ne néfaste ne s’était passé entre l’élève et son professeur. Pourtant l’image de l’épouvantard du benjamin Raven n’avait pas été oubliée par le mage noir. S’il avait cru à la bonne foi de son collègue sur le moment, ce simple et ridicule mensonge faisait germer un doute dans l’esprit du mage noir dont les deux hommes se seraient bien passés. Oui, Gellert était menaçant. Il n’appréciait pas ce que venait de faire Belladone, lui qui s’était confié à cœur ouvert, sans pudeur à ce sorcier aux faibles pouvoirs magiques mais qu’il avait doté d’une force politique pouvant faire vriller à la fois Dumbledore et Grindelwald. Il n’hésiterait pas à utiliser la Légilimancie si besoin était.
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeMar 6 Oct - 11:34



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

L’air se rafraîchissait plus encore, à mesure que le jour agonisait. Les doigts engourdis par les frimas du crépuscule, Belladone rabattit un pan de son écharpe sur sa gorge, dans un geste frileux, presque inconscient. Il n’attendait plus désormais que l’aval de Grindelwald pour s’en retourner sur ses pas, tourner le dos à l’hostilité glaciale de cette forêt qui semblait un monstre avide, dévoreuse d’humains à l’âme trop tendre que le sillage de plus courageux avaient traîné de gré ou de force jusqu’à ses fourbes embuscades, terrées sous la traîtrise obscure de ce voile d’encre qui semblait posé sur la cime des arbres. En son for intérieur, pourtant, Belladone savait bien que le salut ne viendrait pas de l’impétueux mage noir, dont le courage et la force n’étaient plus à prouver et qui, même désarmé, aurait à n’en pas douter l’aplomb d’affronter n’importe laquelle des plus sombres créatures qui s’aventureraient jusqu’à leurs pas. Belladone en voulait pour preuve sa déception quant à la quasi nullité de chance de faire l’infortunée rencontre d’un Cocatris. Le jeune homme et son instinct de survie se gardait bien d’un tel désir. Les gravures de ses ouvrages poussiéreux restaient une illustration amplement suffisante à la hardiesse qu’il ne lui manquait que trop, parfois.

Aussi c’est devant cette obstination ignorante du danger et cette légère indifférence d’enfant fasciné que Belladone se décida à prendre les devants, encourageant un Gellert Grindelwald enthousiasmé par cette promenade sauvage au clair de Lune à rebrousser un chemin qu’ils ne connaissaient ni l’un ni l’autre. Le jeune homme avait suivi d’un pas aveugle le sillage titubant de la jeune fille qui vacillait à chaque fois, et il lui semblait qu’il ne s’agissait pas là du même chemin qu’ils avaient emprunté, la seule fois qu’il avait mis les pieds au cœur de ces bois, berceau des contes et légendes les plus horrifiques et les plus merveilleux. Et si Grindelwald affichait toujours ce visage muet et impassible, Belladone aurait juré voir ces traits d’albâtre roidir à la lueur de la Lune, qui auréolait sa chevelure presque blanche, comme saluant leur blondeur jumelle.

Un pressentiment funeste glaça les os de Belladone, comme les tambours annoncent la fanfare mortifère d’une oraison funèbre, et lorsque Grindelwald prit la parole, tout d’abord il ne comprit pas le reproche dont le calme glacial avait l’accalmie menaçante des prémices d’une tempête. C’est qu’en réalité l’escapade -dont il avait suivi, docile, les pas vacillants mais opiniâtres de son élève-, avait été si irréelle, si hors du temps et si étonnamment merveilleuse qu’il ne semblait devoir l’avouer à quiconque. C’était comme s’il se risquait à se réveiller trop vite d’un trop doux rêve, comme s’il s’effrayait que l’on brise là la brume sacrée de ce qu’il espérait ne pas avoir seulement imaginé. C’était un instinct qui lui venait du plus profond de son cœur trop tendre. Divulguer l’instant en briserait la magie. Le taire au monde le rendait sacré, inviolable, invincible. Il n’y avait eu aucune volonté de mensonge dans la bouche de Belladone. Simplement la protection naturelle du secret de Lavande et de cet entracte hors du temps et de l’espace qu’il aurait voulu inaccessible au monde.

Gellert ne l’entendait pas de cette oreille. C’est qu’on ne mentait pas impunément au plus grand Legilimens de son époque. Mais Belladone était si piètre menteur qu’il ne s’y serait même pas essayé. Il n’avait pas cherché à mentir, simplement il avait voulu taire cette escapade merveilleuse, honorer la confiance que la solitaire et taciturne Lavande lui avait offert, être digne des étoiles qui avaient luit dans l’émeraude de ses yeux et qui avaient fait vibrer sa petite voix un peu cave, à force d’être inusitée. Mais voilà, Gellert se sentait trahi. Et en réalité Belladone pouvait comprendre ce sentiment, pour ce néophyte des relations affectives, son succès basé sur une crainte, une admiration et un respect qui souvent s’étiolaient dès que se franchissaient les barrières de l’intimité.

Belladone se serait excusé, platement, si seulement Gellert lui en avait laissé l’occasion. Il lui aurait dit à quel point Lavande était seule, il lui aurait dit à quel point il voulait être digne d’une telle confiance qu’elle n’avait sans doute accordé à personne, et qui demeurait si précieuse à ses yeux d’encre. Mais Grindelwald s’approchait déjà, et sous le joug de son regard hétérochrome et de sa présence auguste qui le dominait, Belladone ne dit rien. Il le prenait par les sentiments, et touchait le pauvre jeune homme en plein cœur, plongeant dans les abîmes de culpabilité qui n’avaient nullement besoin d’un tiers pour flageller cet esprit trop perclus d’empathie pour le monde et les autres, qui, eux se fichaient de ses états d’âme :

- Mais je...

C’était injuste, ce n’était pas vrai. Belladone n’avait pas voulu mentir à son ami, et à l’idée qu’il regrettait déjà cette confession qui avait bouleversé et touché le jeune homme plus que de raison, il s’en fallut de peu qu’une larme ne vienne gonfler sa paupière lourde de sommeil et de chagrin. Pourtant Grindelwald n’avait pas fini. Et l’accusation tomba comme un couperet terrible, qui glaça l’échine d’un Belladone qui avait le regard sec désormais, écarquillé sur la haute stature qui le dominait de tout son aplomb. C’était donc cela. Il avait eu raison de ne rien vouloir en dire. Déjà la pureté du doux rêve mélancolique s’altérait sous les ignominies d’un tiers, sous la rudesse implacable d’un monde qui croyait toujours au pire. Alors, oui, c’est vrai, inconsciemment, Belladone avait menti. Mais c’était audacieux, en réalité, de pointer du doigt cette petite menterie sans conséquence, quand le jeune homme venait lui pardonner une trahison qu’il avait eu la délicatesse de ne pas mentionner, gardant pour lui la honte cuisante des réprimandes du mage déçu chez lequel il aurait le plus aimé susciter l’admiration.  Alors l’accuser d’en faire de même, quand il ne faisait que taire un secret savamment conservé durant six années, quand il n’imitait pas cette traîtrise fugace qui avait animé ses lèvres d’albâtre cet après-midi-là, dans le bureau d’Albus Dumbledore, c’était un peu trop, même pour Belladone.

Pourtant là n’était pas le nœud du problème. Il fallait au peu hardi jeune homme une bien plus bouillonnante source d’indignation pour oser se révolter ainsi devant le mage noir le plus effrayant encore en vie, au beau milieu de la Forêt Interdite, soumis à sa haute stature et à son courroux. Pourtant l’affront était de taille. La première fois qu’il l’avait accusé de faire du mal à Lavande, ils ne se connaissaient guère, et la manifestation de son Epouvantard s’était révélée dans l’atrocité terrible des douleurs sempiternelles que la pauvre jeune fille subissait au quotidien. Aussi Belladone avait compris, admis la méprise, surtout lorsqu’elle venait de la seule personne avec lui qui s’inquiétait du sort funeste de cette élève au visage de fantôme. Mais là, maintenant, à présent qu’il s’osait à fustiger les démonstrations d’amitié de Belladone, à présent qu’il s’insurgeait contre une confiance qu’il croyait mutuelle, à présent qu’il avait été le despote et l’assassin le plus craint du monde sorcier, Gellert Grindelwald faisait encore l’affront au tendre Belladone de le croire bourreau d’une élève de dix-sept ans. Ses yeux restaient écarquillés sur la haute stature, dans une insolence qu’il n’aurait pas eue face à ces courroux légendaires en temps normal. Mais l’injure était bien grande, pour quelqu’un qui se prétendait un ami. Le jeune homme indigné resserra un peu plus les pans de son écharpe, ses doigts crispés sur la laine bleue et argent, rendus gourds par le froid et l’injure qu’il essuyait non sans mal :

- Vous me faites confiance à tel point que pouvez imaginer un instant que je sois un bourreau de jeune fille ? Moi aussi je vous ai fait confiance. J’ai épanché mes craintes relatives au sort de cette élève auprès de vous, j’ai souligné à quel point ses tourments me préoccupaient. Et à présent vous m’accusez de lui vouloir du mal, et vous m’en faites sans doute plus que vous ne l’imaginez. De plus, vous avez vu de vos yeux l'explosion du couloir. Me croyez-vous seulement capable de pouvoir  faire du mal à une telle sorcière ? Je ne vous ai pas menti sciemment, ou même par plaisir, mais Lavande m’a fait découvrir un joli endroit de cette Forêt dans lequel elle se réfugie, et voulait que je garde le secret. C’est là tout le mal que je lui ai fait.

Cette fois-ci pourtant, Belladone baissa les yeux. Il était plus blessé encore que ses mots ne pouvaient l’exprimer, et son visage restait rivé sur les feuilles mortes qui parsemaient le petit sentier de terre. Ces réconciliations s’achevaient sur une note bien amère. Il avait froid, il avait mal et il voulait rentrer. Décidément, il avait raison. Ce monde altérait bel et bien la pureté de ces petits instants qu’il se faisait une loi de conserver comme des reliques sacrées, leur révélation en étiolant la pureté sous les regards accusateurs de ceux qui ne le comprenaient pas. Le froid sévissait, Belladone leva le regard un moment :

- J’aimerais rentrer à présent, si vous le permettez.


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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeJeu 8 Oct - 11:24



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Les mots de Grindelwald avaient été durs, il en était conscient. Il n’avait cependant pas pour habitude de ménager ces interlocuteurs, surtout quand le mage noir avait un doute envers leur sincérité. Belladone était un être timide et effacé, il était vrai, mais Gellert avait ce côté presque paranoïaque qui le forçait à ne faire confiance à absolument personne. Après tout, il se savait lui-même versatile et profondément manipulateur, caressant ses proies dans le sens du poil pour mieux les faire tomber dans sa toile. Dumbledore était pareil. Raven pouvait très bien cacher habilement son jeu depuis plusieurs semaines, se rapprochant des sorciers les plus puissants pour s’assurer un avenir confortable. Pourtant, malgré tout, Gellert ne pouvait s’empêcher que cette accusation qu’il portait envers celui qui demeurait son seul ami malgré tout était ridiculement erronée. Belladone ne pouvait être l’individu sombre qu’il l’accusait d’être. Il ne pouvait être l’homme mauvais qui aurait profité et abusé de la détresse d’une adolescente, peu importe la puissance magique et la dangerosité de celle-ci. Gellert l’avait peut-être jugé vite, oui, mais il avait aussi appris que n’importe qui pouvait se cacher derrière un visage d’apparence innocente. Lui-même avait subtilisé une identité pendant des semaines, à New York.

Belladone ne tarda pas à se défendre, d’une voix tremblante d’indignation. Le jeune homme avait visiblement été blessé. Durant son monologue visant à réparer son honneur que le mage noir venait de bafouer, l’ancien élève de Serdaigle n’avait pas hésité à affronter le regard asymétrique de celui qui venait de lui manquer de respect. Un comportement qui surprit ce dernier. Lors de leur rencontre houleuse lors du dîner de rentrée, Grindelwald n’avait pas ménagé ses mots envers ce jeune Sang-Pur inoffensif et qui semblait profondément bienveillant. Il avait baissé ses yeux en larmes devant les insinuations insultantes du mage noir et avait réitéré devant l’épouvantard, une nouvelle fois, courbant l’échine devant le courroux du Bavarois. Cette fois-ci, non, il l’affrontait d’égal à égal alors que leurs puissances n’avaient rien de comparable. Grindelwald aurait pu le tuer, sans témoin et l’enterrer dans la Forêt et Belladone n’aurait rien pu y faire pour lutter contre son funeste destin. Mais visiblement, l’affront que lui avait fait le mage noir était au-delà d’une éventuelle mort. Pousser un peu plus le terrible sorcier dans sa colère était risqué et dangereux mais visiblement, les accusations qu’il portait au jeune professeur méritaient justification et réparation. Au fond de lui, Gellert était fier que Belladone s’affirme désormais avec franchise et cran, surtout devant la plus grande menace de la communauté sorcière.

Belladone, avec une faveur que Grindelwald ne lui connaissait pas, indiquait que jamais il n’avait voulu faire du mal à Lavande, se sachant trop faible pour se défendre et ne se priant pas pour également avouer que les mots du mage noir l’avaient blessé et qu’il se sentait trahi. Face à cette accusation, Gellert releva fièrement le menton mais le laissa respectueusement terminer sa tirade. Le jeune collègue continua donc, révélant que Lavande lui avait montré un endroit un peu secret dans la Forêt et qu’elle avait voulu qu’il en garde le secret. Le mage noir eut une moue agacée. Il n’aimait pas les secrets. Ego probablement surdimensionné, il ne tolérait pas que les badauds puissent oser lui cacher des éléments de leur vie. Pourtant, c’était on ne peut plus normal que de ne pas tout dire à un inconnu, peu importe s’il avait été despote ou non. Il n’était ni divin, ni souverain, et il n’avait aucun droit d’omnipotence sur qui que ce soit à Poudlard. La justification de Belladone se tenait donc parfaitement mais Gellert, par fierté, ne voulait avouer son erreur. Non il ne s’excuserait pas. Quand l’ancien élève de Serdaigle baissa les yeux, le mage noir soupira et lui tourna le dos pour s’éloigner.

Un silence s’installa entre les deux hommes, silence rendu plus pesant encore par l’atmosphère lugubre de la Forêt Interdite. Au fond de lui, derrière cet orgueil qui étranglait sa gorge, Gellert s’en voulait d’avoir ainsi vexé Belladone. Le mage noir dont plus de quarante ans de sa vie n’avaient été régis que par la colère et la haine, avait encore du mal à croire que certaines personnes pouvaient être mués par une bienveillance pure. Pourtant, il en avait rencontré, des personnes profondément bonnes. Peut-être n’était-il qu’un vestige d’être humain, aigri par la rancœur, consumé par la culpabilité qu’il portait tel un fardeau brûlant, étouffé par sa fierté. Grindelwald semblait encore trop tenir la bride sur lui-même et le monde sorcier, voulant se convaincre que le monde était comme il l’imaginait lui-même alors qu’il se fourvoyait à ce sujet une nouvelle fois. Il baissa la tête. Désirait-il vraiment l’effort de s’intégrer de façon durable et positive dans le paysage de Poudlard ? Ou voulait-il continuer à se nourrir des ombres ? Dans tous les cas, une paix avec lui-même devait être faite et annihiler ses remords. Belladone indiqua alors vouloir rentrer au plus vite à Poudlard, en demandant la permission à Gellert. Celui-ci, d’une voix éteinte et neutre, dit :

— Et bien rentre. Je ne suis pas ton maître et tu n’es pas mon valet, tu n’as pas à me demander la permission.

Il lui tournait toujours le dos et regardait les feuilles d’un buisson s’agitait avec le vent. Il en avait presque oublié qu’ils étaient au milieu de la forêt et que Belladone n’était probablement pas assez puissant pour se défendre tout seul. En réalité, avec l’aplomb qu’il venait de démontrer face au mage noir, il était fort bien capable de se protéger des éventuels dangers, s’il avait suffisamment confiance en lui. Mais l’esprit de Grindelwald était tourné vers une toute autre idée. Une idée complètement folle et surréelle qu’il aurait bien voulu mettre à exécution tout de suite. Cependant, il avait une personne d’une troisième personne et il se voyait mal demander à Dumbledore de remplir ce rôle. Il fallait donc trouver une autre « victime », le candidat idéal, à condition que Belladone soit d’accord. C’était peut-être la meilleure façon d’avouer leur confiance si trébuchante entre les deux hommes. Ils voulaient exactement la même chose mais ne parvenaient à se comprendre pleinement, créant des litiges et des malentendus inutiles comme précédemment. Jamais Belladone n’accepterait cependant. Plus raisonné, moins hardi, il honorerait sûrement l’appartenance jadis à la maison Serdaigle dont il portait encore haut les couleurs. La proposition de Grindelwald était téméraire et insolite mais il n’avait pas meilleure preuve de sa sincérité et, quelque part, de ses excuses.

— Avant que tu ne partes.

Il se retourna vers lui et fixa son regard avec sérieux.

— Faisons un Serment Inviolable. Jurons-nous de protéger Lavande.

Son ton était ferme, même s’il ne voulait rien imposer à Belladone. Il savait que le prix a payé été très cher si l’un d’eux venait à rompre ce contrat. C’était un pari risqué mais Grindelwald avait été trop habitué au goût du danger pour pouvoir pleinement en être sevré désormais. Se tenant toujours droit dans cette Forêt où il voulait rester encore se promener quelques dizaines de minutes, voire jusqu’à l’aube, il resta pourtant immobile et solennel, démontrant une certaine franchise malgré ses excuses implicitement formulées par cette proposition osée.
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Belladone Raven
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeMar 13 Oct - 15:31



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

Un certain courage était né de l’injure dont le célèbre mage noir avait giflé Belladone. Un courage improbable, sur lequel personne n’aurait parié, qui trouvait ses origines dans l’injure à la violence de soufflet qui se mêlait à la brise d’automne, glaçant de concert les joues mangées de barbe du sorcier fébrile, frileux, dont les membres semblaient trembler de froid autant que des retombées de sa propre audace. C’était l’élan inconscient d’une témérité contraire à sa frêle nature, insufflée par l’indignation d’une accusation telle qu’elle horrifiait sa nature tendre, laissant s’étioler la pureté merveilleuse du souvenir de la clairière qui retombait en lambeaux que dépouillés par les médisantes ignominies de Grindelwald. Gellert avait-il vraiment osé ? Quand Belladone avait la délicatesse de ne pas souligner les réminiscences de ses crimes d’antan, quand Belladone s’essayait à offrir sa main tendue dans le chemin semé d’ornières et de crevasses de la longue repentance de l’auguste despote, à laquelle il voulait croire ? Son prétendu ami ignorait-il à quel point il était aisé de toucher en plein dans son cœur trop tendre ? Blessé plus que de raison peut-être, parce que les malheurs de Lavande le tourmentaient beaucoup trop, Belladone s’osait enfin à lever son regard d’encre plein de reproches vers la glace hétérochrome du mage le plus craint du siècle.

Une moue contrariée, fugace, traversa comme une ombre le visage de cire de Grindelwald. L’intraitable despote n’était pas mort tout à fait, et subsistait encore chez le mage noir repenti des sourdes envies de contrôle et d’obsessionnels désirs de tenir entre ses mains roidies par les crimes les fils de chaque âme qu’il voulait diriger à sa guise, pantins serviles à la merci du moindre caprice qui agitait son visage d’albâtre. Et la pudeur de Belladone se refusait à ce contrôle total d’une intimité qui n’appartenait qu’à lui, tenait au secret d’émotions qu’il savait inaptes à ce monde de brutes, gardait comme une relique au creux de son cœur ce qu’il avait pu trouver beau, et ce qui continuait de le bouleverser. Mais non. Gellert malmenait même le plus joli de ses souvenirs, et le brutalisait encore en le lui arrachant de son âme pudibonde qui s’était forgé un écrin de velours pour garder jalousement l’image de ses grands yeux tristes qui semblaient se fondre dans le feuillage vert sombre de l’idyllique clairière.

Rien. Hormis le souffle du vent aigre qui agitait le tapis de feuilles mordorées qui tourbillonnaient à leurs pieds, rien n’agitait la sombre clairière et ses crocs béants qui restaient calmes, apaisés, comme repus d’un sang et d’une violence qui offrait un répit à ce pauvre Belladone dont les dents commençaient à s’entrechoquer. Aucun éclair de lumière, aucun cri, aucune serre d’albâtre qui empoignait l’écharpe bleu et argent, dans la menace brutale de représailles envers son jeune ami qui ne pouvait rien contre lui. L’audace avait-elle payé ? Le jeune homme n’eut pas à s’en repentir. Gellert finit par lui tourner le dos, dans le silence obstiné de celui qui sait être allé trop loin mais qui se refuse, à la manière d’un enfant boudeur, à assumer le mal qu’il avait causé. Car Belladone avait eu mal, plus que sa litanie audacieuse mais bredouillante ne le trahissait, bien plus que Gellert Grindelwald lui-même pouvait sans doute l’imaginer.  

Et c’est le dos tourné que la voix de Gellert se mêla au vent client, pour asséner cette réplique cinglante à celui qui avait pourtant avoué sa crainte enfantine et somme toute un peu irrationnelle de déambuler dans la pénombre de la célèbre et légendaire Forêt Interdite. Belladone se retourna, prêt à partir, accusant l’ingratitude et l’indifférence du mage noir qui le laissait se dépêtrer dans ses craintes, fussent-elles infondées. Tant pis. Le jeune homme n’allait pas perdre la face une fois de plus devant l’ingratitude de son ami qui l’abandonnait là. Il n’allait pas s’humilier à la supplication de l’accompagner, ou à suivre l’ombre de celui qui venait de le rejeter avec la froide indifférence que l’on voue à un étranger.

Son soulier fit craquer les feuilles mortes qui gisaient sous ses pieds, et il amorçait le retour solitaire au sein de l’école qu’il regrettait soudain amèrement d’avoir quitté pour suivre dans son sillage l’instable ami dont il s’était, en vain, évertué à renouer des liens auquel il semblait devoir tenir autant que lui. Une sourde envie de se tapir au sein du refuge de son bureau lui martelait soudain les temps et le cœur, de ces désirs de solitude forcenée qui l’assaillait parfois en pleine assemblée, des envies de lecture au coin du feu et de thé chaud, des envies d’oubli de ce monde et de ces gens qui finissaient toujours, inéluctablement, par se moquer de lui. Il ne voulait plus affronter les caprices impétueux du despote repenti, il était soudain très las, se sentait très vieux et très incompris, et ne voulait qu’oublier pour un temps que ses affections s’achevaient irrémédiablement dans de cuisants échecs. Pourtant c’est bien la voix cave de Grindelwald qui le fit se retourner, à contrecœur cette fois-ci, Belladone estimant que sa patience envers son improbable ami avait été suffisamment mise à rude épreuve pour aujourd’hui.

Et cette fois-ci, le regard hétérochrome, de nouveau, s’était rivé sur la tendresse d’encre de celui de son cadet. Et les grands yeux noirs du jeune homme s’écarquillèrent soudain sous l’audace de la proposition. Il n’en crut d’abord par ses oreilles. Ensuite, il crut à une blague. Mais le visage d’albâtre fermé de Grindelwald restait irréfutablement fermé à la plaisanterie. Rien d’autre qu’un sérieux à la hauteur de la gravité de la situation. De plus, la prudence instinctive de Belladone restait perplexe, pragmatique surtout. En quoi la mise en danger de leur vie, scellée par l’inviolabilité d’un tel serment, aiderait plus Lavande que ce qu’ils faisaient déjà ? Fallait-il vraiment risquer de s’immoler face à l’échec potentiel de la mission qu’ils s’étaient confiés ? En quoi leur mort pourrait-elle bien aider le destin tourmenté de la malheureuse jeune fille ?

C’était un peu trop, pour ce soir. Le jeune homme vouerait volontiers sa vie à améliorer celle de Lavande. Il lui semblait pourtant là qu’une telle mise en danger avait plutôt pour but de conforter Gellert dans la véracité de ses inquiétudes envers l’étudiante. Et Belladone n’avait guère envie de risquer stupidement sa vie dans l’unique but de satisfaire son ami qui lui rendait son affection avec une telle ingratitude. De plus, il trouvait tout cela un peu idiot et grandiloquent. Le secours qu’ils tentaient d’apporter à Lavande ne s’aiguiserait pas de ce pacte qui mettaient leurs deux existences en péril. La symbolique, sans doute, l’emportait sur le reste, pour ce joueur invétéré avec la vie, pour celui qui balayait la prudence et les regrets d’un revers de main. Pas Belladone. Gellert était un grand Legilimens. S’il voulait s’assurer de l’indéfectible affection que le jeune Professeur vouait à son élève, qu’il se serve donc de ce don intrusif, puisque le contraindre à épancher ses plus jolis instants d’intimité étaient à ses yeux tout aussi invasif.

Cela méritait réflexion, bien qu’il n’en voit pas l’intérêt. Le symbole était beau mais pas vraiment utile, parce qu’il n’y voyait rien de concret qui aiderait à sauver Lavande de l’avenir incertain et plein d’horreur qui lui était promis. Le temps de la réflexion, il le prendrait. Lorsqu’il serait moins fatigué, moins chamboulé, moins amer envers cet ami qui venait de lui faire du mal. Belladone eut un soupir, se doutant que Grindelwald le soumettait à un test dont il se targuait d’être le juge. Mais le jeune homme n’était pas d’humeur à se laisser tourmenter par le mage noir, une fois encore. Après tout lui n’exigeait aucune preuve de son affection pour Lavande, et ne venait-il pas d’admettre qu’il n’était pas son maître ? Belladone tâcha de se composer une contenance, lorsqu’il répondit :

- Je peux y réfléchir, bien que je n’avoue ne pas bien saisir en quoi la mise en danger de nos vies serait profitable à Lavande. Je ne peux malheureusement guère faire plus que ce que je fais là, et j’en suis navré. L’éventualité de ma mort ne changerait rien à ce que je suis dans l’incapacité d’accomplir. Mais nous ne sommes pas obligés d’en arriver à de telles extrémités ; vous êtes un grand Legilimens. Si vous avez si peu confiance en moi, fouillez donc, je vous y autorise. Cela nous évitera à l’avenir ce genre de désagréments.

Plan hasardeux et très audacieux en réalité. Belladone n’avait pas la moindre envie que l’ombre éthérée de la jeune Lavande, idéalisée au creux de la brume de ses divagations et de ses rêves, ne parvienne à l’esprit de Grindelwald. Mais il savait aussi et surtout que le mage noir se passerait volontiers de son autorisation si l’envie lui en prenait. En jouant ainsi de provocation, peut-être l’aurait-il à son propre jeu.


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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeMer 21 Oct - 19:54



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Belladone avait amorcé un retour à Poudlard sans attendre le mage noir. Ce dernier dut s’avouer qu’il fut surpris par ce geste, pensant que le jeune professeur n’aurait pas le courage de s’aventurer seul entre les troncs hauts de l’obscure forêt d’où des bruits étranges ne cessaient de sortir, tapis dans les ténèbres. Si le benjamin Raven avait le cran pour surmonter cette peur enfantine dont il s’était confié à Gellert quelques instants plus tôt, c’était sûrement dû à la profondeur béante de la blessure que lui avait infligé ce qu’il pensait être son ami. Grindelwald avait trahi sa confiance en doutant aussi impunément de lui. Rien n’était pire que de rester quelques secondes de plus en compagnie du mage noir. Ce dernier ne sut trop comment réagir. Une partie de lui se moquait du sort de ce pauvre Belladone. Les loups-garous pouvaient tout aussi bien le dévorer vivant qu’il s’en moquerait. Mais il se mentirait. Non, une autre partie de son âme, la moins corrompue à son orgueil certainement, était inquiet de le voir partir sans escorte. Ou alors était-ce lui-même qu’il allait se retrouver désespérément solitaire une fois de plus ? C’était à lui qu’on tournait le dos, lui qui était incapable d’accepter un mensonge d’une pureté exemplaire.

Grindelwald avait réussi à froisser la seule personne qui lui accordait un minimum de patience et d’empathie. Albus était à part, bien évidemment, même si la rancœur de leur baiser avait laissé un goût amer sur ses lèvres. Pouvait-il vraiment blâmer le mentor et le disciple ? Après tout, il n’était pas un homme digne de confiance. Manipulateur de masses, leader de foules, le mensonge était pour lui une deuxième nature, une façon de caresser ses interlocuteurs dans le sens du poil afin de mieux les attirer dans ses toiles. La colère et la déception de Belladone étaient parfaitement légitimes. Il n’y avait rien d’autre à ajouter pour sauver sa cause. Par ailleurs, il ne semblait même pas avoir compris la raison principale de sa demande insolite et peut-être déplacée concernant le Serment Inviolable. Gellert ne l’avait pas proposé pour Lavande. Il s’était emporté dans ses suspicions presque paranoïaques car il n’avait aucune raison véritable de douter de la bonne foi de Belladone. Il savait que ce dernier protégerait l’élève de Serpentard. Non, Grindelwald avait voulu lui proposer ce pacte en guise d’excuses sincères et honnêtes. Il proposait littéralement sa vie à celle de Belladone, reconnaissant implicitement son erreur au sujet du jeune professeur.

Mais le professeur de Défense Contre les Forces du Mal ne le voyait pas de cet avis, proposant même à Grindelwald de lire son esprit s’il doutait tant de lui, arguant que le mage noir était un puissant Legilimens. Silencieux, les mains solennellement placées devant lui, Gellert baissa les yeux et le menton, se faisant réprimander tel un enfant par un sorcier qui n’avait pas un millième de sa puissance magique. Était-ce là ce qui restait de cet homme qui avait plongé toute l’Europe dans la terreur ? Un simple criminel en réinsertion qui se faisait gronder pour son comportement insolent ? Pourquoi souhaitait-il conserver à ce point l’amitié de Belladone ? Il n’y avait que la défiance et le courroux dans les yeux pourtant si doux de ce dernier. Jamais, des années auparavant, Grindelwald ne se serait laissé parler ainsi, surtout dans un endroit sans témoin. Son collègue n’avait pas voulu de ses excuses. Même s’il était parvenu à mettre son orgueil suffisamment de côté pour ne pas prononcer un mot pendant la remontrance de Belladone, il demeurait malheureusement trop arrogant pour demander explicitement le pardon du jeune homme. S’il le voulait vraiment, il pouvait réduire au silence l’effronté. Il aurait pu le menacer de nouveau de baisser d’un ton. Pourtant il n’en fit rien. Un air las sur le visage, Gellert soupira et tourna de nouveau le dos à Belladone, ravalant sa fierté bafouée, regardant d’un œil sombre les ténèbres de la Forêt Interdite.

— J'ignore qui t’a dit cela, mais je ne suis absolument pas un grand Legilimens. De plus, lire ta tête ne m’intéresse pas plus que cela, j’ai encore la décence de laisser à mes interlocuteurs leur intimité... Ou le choix de leur libre-arbitre, à toi de voir.

L’envie de se venger puérilement du ton de Belladone naquit dans le cœur corrompu de Grindelwald. Pourtant, s’il voulait conserver un semblant d’amitié avec le jeune homme, il se devait se contrôler, peu importe ce que cela lui coûtait. Mais pour quoi, au final ? Tenait-il suffisamment à Belladone pour vouloir faire cet effort pour lui ? Il venait de proposer de lier sa vie à la sienne, tout cela pour qu’au premier refus, Grindelwald rejette tout d’un revers de la main ? Sa repentance à Poudlard était beaucoup plus compliquée qu’il n’avait estimé. Dans une détresse insoupçonnée et indésirable, il avait fini par confier beaucoup trop de choses intimes à Belladone. Jamais il n’avait parlé de sa relation avec Albus à quelqu’un et encore moins aussi précisément. Le jeune homme en savait trop et le réduire au silence pour cette simple contrariété serait absolument contre-productif : il serait seul suspect et le Ministère ne s’embêterait pas de retrouver le corps pour le renvoyer à Azkaban. De plus, Lavande serait perdue à jamais également. Belladone était là pour lui apporter un équilibre lumineux que Gellert n’était parvenu à comprendre seul dans sa jeunesse. Et il ne voulait pas que l’élève de Serpentard fasse les mêmes erreurs que lui.

— Nous en avons terminé, je crois.

C’était la seule chose qu’il pouvait dire sans éructer de colère et d’orgueil. Il était profondément déçu de la fin de cette soirée, elle qui avait pourtant démarré avec un tel enthousiasme partagé que Gellert avait même fini par raconter son enfance. Il s’en voulait d’avoir été si stupide et d’avoir tant manqué de pudeur. Ses poings se serrèrent, en colère contre Belladone et contre lui-même. Il avait naïf mais surtout fautif. Il aurait été de mauvaise foi d’accuser le jeune collègue comme coupable du fiasco de ce temps perdu par cette amitié vaine. C’était seulement la nature profondément mauvaise de Grindelwald qui avait détruit les bons sentiments, pourtant réciproques, entre les deux collègues. Mais la colère lui parcourait l’échine, griffant sa nuque et électrifiant ses bras. Il devait se défouler, détruire quelque chose, expulser cette frustration. Ses oreilles vrombissaient de cette rage qu’il tentait pourtant de réfréner, ne sachant si Belladone s’était décidé à partir ou non. Grindelwald espérait que ce soit le cas. Sans prévenir, sans que le mage noir ne bouge le moindre muscle, un arbre proche de lui craqua. Son écorce se déchira et les racines sortirent de la terre noire de la forêt. Dans un fracas assourdissant, le végétal bascula dans le vide, forcé par une force aussi magique qu’invisible de s’arracher du sol. Le tronc s’abattit alors lourdement, faisant trembler ce qu’il y avait sous les pieds du mage nori qui n’avait toujours pas bougé. Cet acte de destruction était purement gratuit mais avait permis de soulager l’âme sombre du mage noir qui contemplait son œuvre d’un air glacialement impassible. Bientôt, il n’y aurait plus de vie dans le tronc de l’arbre, la sève ne s’écoulerait plus jusqu’aux feuilles noires de l’arbre. Et Grindelwald s’en moquait. Il aurait fait bien pire s’il se l’était autorisé.
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Belladone Raven
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeMar 27 Oct - 15:29



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

Il n’y avait plus rien à dire. Quand la menace du silence sépulcral de la forêt fit écho au calme polaire de Grindelwald, Belladone tressaillit sous l’imminence de la rage froide, sous-jacente, qui se dessinait sous les traits de ce mage si peu accoutumé à l’insolence. Pourtant c’en était trop, même pour l’angélique patience du jeune homme, même pour sa timidité craintive qui s’effarouchait d’un ton haussé ou de la dureté d’un regard posé, réprobateur, sur ses yeux d’encre. Et même le tendre Professeur à l’âme nourrie de légendes maléfiques relatives à cette Forêt –et somme toute exagérées- ne pouvait décemment se résoudre à solliciter la compagnie de Gellert pour s’en retourner. Pas après un tel affront, pas après que la rudesse de son regard hétérochrome se soit de nouveau posé sur lui en scintillant de sombres présages de menaces. Pas après que le mage noir repenti ait entâché son âme trop douce du crime qu’il lui imputait. On avait raillé Belladone pour beaucoup de choses, sans même prendre la peine de dissimuler derrière une main discrète les sourires goguenards. Faible, lâche, incapable. Jamais, pourtant, personne ne lui avait fait l’offense de lui fourrer la hache du bourreau entre ses doigts tremblants.

La blessure avait été telle qu’un élan de courage fou, impétueux, -dont Belladone lui-même se serait cru incapable- l’animait, et pour une des rares fois de sa vie la litanie s’échappait de ses lèvres sans préparation préalable, sans retenue, de cet instinct dont il se méfiait et qu’il bridait toujours, prudent, réservé, marchant à tâtons dans le sillage de sa trop calme existence. Mais aujourd’hui Grindelwald n’était plus le despote lointain que le tout jeune homme regardait au travers de photographies et étudiait à travers de sombres ouvrages plus ou moins nébuleux. Non, aujourd’hui, et contre toute attente, contre la logique pure qui régissait la vie de Belladone, Gellert Grindelwald était devenu son ami. Et si l’affection dissipait l’autorité naturelle du petit garçon qu’il semblait redevenir face à lui, aujourd’hui le mage polaire avait acquis, en plus de sa légendaire puissance, le pouvoir de blesser plus que de raison l’âme fragile de son jeune ami.

Et c’était cette douleur qui le rendait si hardi, cette douleur lancinante qui l’avait touché en plein cœur. Et Belladone se surprenait à craindre de moins en moins le terrible sorcier, à mesure que son affection s’exacerbait, à présent qu’il contemplait, désolé, les plaines autrichiennes sur lesquelles il ne subsistait plus rien du petit garçon plein d’espoirs qui y avait gambadé. Aujourd’hui il se sentait le droit de s’insurger, à mesure qu’il gagnait la confiance et l’affection du mage noir solitaire, et aujourd’hui il put contempler, effaré et le cœur froissé par la douleur, le sorcier qui avait fait trembler le monde sous son joug, baisser le menton et le regard, sous la souffrance avouée du faible Belladone. Et quand celui qui l’aurait tué d’un claquement de doigt lui tourna le dos sous la réprimande, le jeune homme se mordit la lèvre. La sourde de lui demander pardon, de lui signifier que ce n’était rien, qu’il ne lui en voulait pas, fit affleurer une grosse larme qu’il refoula, et qui perla au bord de ses cils d’encre.

Mais c’était faux. Si faux que Belladone pouvait se morfondre d’avoir causé la souffrance de son unique ami, mais n’y pouvait rien, parce que c’était grave et parce qu’il lui en voulait. Et il n’avait presque plus peur, et peut-être même attendait-il que la foudre s’abatte, pour que se passe enfin quelque chose, pour la colère latente que le mage noir laissait planer, épée de Damoclès au-dessus des bois sépulcraux, éclate enfin, et que cesse l’insupportable attente de celui qui n’avait que trop idée de ce qu’il avait pu provoquer. Rien, pourtant. Rien d’autre qu’une déception humble qui fit s’élever la voix cave, qui perça avec peine les ténèbres des bois, qui s’agitaient sous la mélopée fredonnant des feuilles d’automne qui bruissaient en tombant. Belladone déglutit. Etait-il à ce point parvenu à faire du mal au plus grand mage noir de son époque ? Avait-il autant de pouvoir ?

Le jeune homme se tut. Y’avait-il quelque chose à dire ? Rendre malheureux quelqu’un bafouait la nature profonde de Belladone, et pourtant il n’avait eu d’autre choix que la réplique, blessé, menacé, attaqué par l’offense ignominieuse que lui avait fait endosser Grindelwald. Et il n’y avait rien à faire d’autre que d’accepter de grandir, de s’arracher à Lune et d’admettre qu’il n’avait eu d’autre choix que de faire du mal à son unique ami, parce que lui-même ne lui avait laissé d’autre alternative. Lorsque Gellert signifia la fin de la conversation, Belladone hocha la tête, dans un acquiescement que le mage noir qui lui tournait le dos ne pouvait pas voir. Il avait raison. Belladone avait trop mal, et la fierté de Grindelwald avait été trop éprouvée pour ce soir. Rien de productif ne sortirait plus de cet échange, et il faudrait quelques jours au moins pour panser leurs plaies respectives que leur amitié incongrue et improbable leur avait infligée.

- En effet. Bonsoir, Gellert.

Belladone tourna les talons, amorçant là l’élan le plus courageux qui ait jamais agité sa petite âme fragile. Il s’en rentrait seul, s’immolait de lui-même aux crocs béants de ces bois qui avaient alimenté ses cauchemars juvéniles, par orgueil, par cette douleur lancinante qui l’empêchait de réclamer une aide dont il ne voulait plus, ce soir. Les feuilles craquèrent sous ses pas, quand un vrombissement sinistre, d’abord fébrile, se mêla une seconde au bruissement de ses pas sur le tapis automnal qui recouvrait le sillage des bois interdits. Belladone fit volte-face, abasourdi, son cœur tambourinant dans sa poitrine. Un fracas assourdissant, inhumain, avait stoppé ses pas fébriles, qu’il avait voulu décidés, et s’étendait devant son regard d’encre bouleversé l’étendue de la colère que sa petite âme fragile avait réussi à faire écumer. Armé de la seule force de sa rage, Gellert Grindelwald était parvenu à l’exploit de puiser au creux de son affection la force de ne pas faire éclater son ire formidable sur son jeune ami dont il aurait à coup sûr causé le trépas. L’arbre centenaire, déraciné sous la puissance de sa colère, resta quelques secondes en suspens, ombre sinistre qui se dressait au fond des bois, avant de s’abattre dans un épouvantable capharnaüm qui résonnait de tout ce dont était capable le mage noir en colère.

Belladone fit volteface, n’ayant que trop conscience du sort terrible dont Gellert l’avait préservé à grand-peine. Il fallait partir, à présent que l’écume de ses formidables et légendaires fureurs s’était déversée. La contenance retenue à grand peine ne vaudrait plus rien à présent, et nul doute que la chance insolente d’avoir bénéficié de la patience de Grindelwald ne se renouvellerait pas une seconde fois. Le jeune homme fit quelques pas, s’éloignant du mage noir et de sa colère terrible qui menaçait de ravager la Forêt Interdite. C’est pourtant l’ombre fantômatique d’une créature qui revêtait l’aspect d’un chien immense qui le contraignit à s’arrêter une nouvelle fois. Le Cynospectre lui barrait la route de ses crocs béants, et son aura spectrale se mêlait à la lune pour éclairer l’impasse mortifère qui acculait le pauvre Belladone, coincé entre la Bête et le plus terrifiant des mages noirs en pleine crise de fureur. Sa baguette pendait, lamentable, pointée vers le sol dans ses doigts crispés. Ce n’était pas grand-chose. Il suffisait d’un simple Lumos. C’était à sa portée, il en avait déjà rencontré. Pourtant le choc et la douleur de la soirée le rendait gourd, épuisé, comme vide de conscience et de la moindre possibilité d’agir. Et il resta ainsi quelques secondes immobile, stupide, statue de sel immolée aux crocs béants du spectre qui se rapprochait, toujours plus menaçant, sans même que ses doigts fébriles ne se décident à lever son arme qui pendait au bout de son bras ballant…


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Gellert Grindelwald
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeVen 30 Oct - 19:14



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Sa colère ne s’était pas tarie. Véritable brasier incontrôlable, sa rage avait toujours été assouvie quand la menace de son nom obscurcissait le ciel européen. Mais les choses avaient changé et Grindelwald ne pouvait plus se permettre de mettre à feu et à sang tout ce qui se trouvait autour de lui. Pourtant, tout son corps lui criait d’éructer cette haine qui le consumait, que ce soit par le frisson le long de son échine, ses muscles bandés ou le souvenir du goût du sang dans sa bouche. Cet arbre innocent et abattu n’avait fait qu’assouvir partiellement cette colère, le temps d’entendre les craquements de l’écorce qui se déchirait, ne pouvant empêchait l’inéluctable chute du tronc. À ce moment précis, Grindelwald était en colère contre tout le monde : les Aurors, Belladone et surtout lui-même. Lui, qui avait été si faible, qui avait baissé les yeux et la tête devant un sorcier à la limite d’être considéré comme un Cracmol. Lui, pire cauchemar de toute âme pure et bonne, était devenu mou et conciliant, laxiste et latitudinaire. Au fur et à mesure qu’il se trouvant trop bon pour se faire honneur, il avait l’impression de perdre chaque jour de sa superbe. Oui, Grindelwald agonisait à Poudlard, le fait que Belladone parte sain et sauf en était la preuve.

Imperturbable cependant malgré ce feu de rage qui brûlait en lui, Grindelwald restait stoïquement immobile, fixant sa victime du soir dont les feuilles arrachées prématurément à leurs branches voletaient encore doucement, paresseusement dans l’air lourd de la Forêt Interdite. L’odeur âcre de la terre humide retournée parvint alors au nez du mage noir, l’apaisant presque. Le vent de sa douceur si naturelle vint caresser ses cheveux pâles telle une main réconfortante qui lui dirait que ce n’était rien. Le cœur glacial de Grindelwald cessa de battre à tout rompre, se calmant progressivement, au même rythme que son souffle. Ses épaules s’affaissèrent légèrement et il finit par pousser un long soupir, comme s’il s’agissait des derniers résidus de sa haine. Son désir irrépressible de violence était aussi s’embrasait aussi rapidement qu’une allumette jetée sur une flaque de pétrole mais son calme pouvait revenir à une vitesse tout aussi impressionnante, véritable bourrasque qui pouvait faire s’éteindre la moindre étincelle. Lunatique à l’extrême, Gellert ne voulait s’avouer que ce trait de caractère ne s’était pas arrangé avec les années et ces changements d’humeur en devenait presque éprouvants pour lui-même. Toujours immobile, il inclina légèrement la tête vers l’avant pour laisser le vent lui caresser les cheveux et en profita pour fermer les yeux et se laisser imprégné par l’atmosphère lugubre mais calme de la forêt.

Tandis que son esprit se calmait, ses oreilles bourdonnaient moins de rage. Reprenant le contrôle de lui-même et son instinct se faisant plus apaisé et plus lucide, ce dernier lui rappela que Belladone, aussi érudit était-il, venait de partir seul dans la Forêt Interdite. Pourtant, sans qu’il ne sache dire quoi, quelque chose n’allait pas. Un mauvais pressentiment, certainement. Le mage noir restait avant tout un prédateur. Il avait su traquer, chasser les personnes dignes d’intérêt et les faire tomber dans ses filets. Il savait également quand écouter lorsque quelque chose n’allait pas. Au loin, il entendit des bruits de feuilles froissées et des branches se craquer. Gellert se retourna lentement et tenta de voir le moindre mouvement entre les troncs. Inquiet, il se décida pourtant à suivre son mauvais pressentiment, entendant de plus en plus distinctement l’agitation qui avait dérangé la sensibilité de son ouïe. Prudemment, conscient des dangers que représentait cette forêt, Gellert continua de suivre le potentiel trajet de Belladone, jusqu’à ce qu’une brume, qui n’avait rien de météorologique, commence à envelopper le bas de ses jambes. Il fronça le sourcils, inquiet de connaître la réelle nature du brouillard.

Il aperçut alors la silhouette de Belladone, tétanisée ainsi que d’un Gytrash à quelques centimètres de lui, la gueule ouverte. Pourquoi le jeune professeur n’avait pas lancé de Lumos ? C’était un sortilège simple qui ne nécessitait pas une grande puissance magique pourtant. Mais avant que Gellert n’ait pu réfléchir à une quelconque raison à ce problème, une deuxième silhouette fantomatique canine sortit de la brume, suivie d’une troisième puis d’une quatrième. Sans réfléchir un instant mais cependant conscient que Belladone risquait de se faire tailler en pièces s’il ne réagissait pas sur l’instant, le mage noir courut en direction de son ami qu’il avait pourtant froidement menacé quelques instants plus tôt. Il posa alors une main ferme sur l’épaule de son chétif collègue pour le renvoyer brutalement en arrière. Dans l’action, sans qu’il ne s’en rende vraiment compte, il récupéra la baguette de Belladone et lança le fameux Lumos si efficace contre les chiens fantomatiques. Les résidus de sa colère se firent encore ressentir dans son poignet et ce n’était pas une timide lueur suffisante pour y voir qui jaillit de la baguette du jeune homme mais une forte et intense lumière, éblouissante à en faire plisser les yeux les moins sensibles, qui eut le mérite de chasser les spectres dans un couinement canin si caractéristique.

Tout à coup, la baguette se mit à chauffer intensément dans la paume du mage noir qui dû la lâcher sous la douleur vive et subite qui venait de lui brûler la peau, faisant disparaître la forte lumière en même temps. Le bout de bois tomba dans la terre meuble tandis que la brume se dissipa en quelques secondes seulement. Gellert regarda l’intérieur de sa main après avoir vérifié que le jeune homme derrière lui était hors de danger. Il posa ses yeux sur la baguette avant de se tourner vers Belladone avec une moue préoccupée. Il s’accroupit vers lui, ne cherchant nullement à effrayer son collègue qui devait se trouver dans tous ses états et voulut lui poser sa main qui n’était blessée sur l’épaule. Visiblement le benjamin Raven n’avait pas été blessé, seulement secoué. Gellert en était soulagé, lui qui avait craint brièvement de n’être arrivé trop tard. Il soupira, n’osant trop le regarder dans les yeux. Il ne désirait, en aucun cas, perturber encore plus le jeune homme. Il chercha même une façon de le réconforter. Or, il n’avait ni nourriture sur lui ni eau. Alors, il osa quelque chose, la seule chose qui lui semblait pertinente de faire. Il le prit dans ses bras, en toute amitié bien évidemment, et lui tapota le dos pour le rassurer – et également enlever la terre de ses vêtements.

— Tu n’as rien ?

La question était rhétorique si l’on se concentrait sur l’intégrité physique. Mais Belladone était un garçon sensible et s’il avait été incapable de lancer un sortilège aussi simple, c’était qu’il y avait certainement une raison.

— Rentrons. Viens manger quelque chose, ça te fera du bien. Tu es aussi pâle que moi.

Avec un sourire taquin visant à détendre l’atmosphère, Gellert se redressa et tendit sa main à Belladone pour l’aider à se relever. Au passage, il en profita pour lancer un coup d’œil à cette baguette qui avait semblé vouloir fuir sa main et cet imprévu inquiéta le mage noir. Cependant, il valait mieux qu’il n’en parle pas pour l’instant à son jeune ami. Du moins, pas tant qu’ils ne seraient pas rentrés à Poudlard et que Belladone n’aurait pas repris des couleurs.
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeJeu 5 Nov - 12:33



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

La gueule spectrale s’ouvrait avec la profondeur béante d’un gouffre avide de chair. Les crocs carnassiers s’exhibaient dans l’irrépressible voracité qu’inspirait au canidé terrible cette victime impuissante et un peu stupide qui s’offrait là, les bras ballants et sans un cri, à la férocité du monstre affamé. Sacrifice inconscient, âme apathique qui s’immolait là dans un long tremblement qui le clouait au sol, quand sa main armée pendait, lamentable, vers l’asphalte qui se riait, goguenard, de l’atonie découragée de cette proie trop facile. Belladone semblait la regarder sans la voir, cette ombre blafarde qui le menaçait de ses crocs acérés qui affleuraient de sa gueule blanchâtre et éthérée de spectre. Il n’y avait rien d’autre dans les tréfonds d’encre du regard du jeune Professeur que le chagrin las d’une âme trop tendre et trop éprouvée pour ce soir ; Le trop fragile mage était retourné à sa Lune. Et les tourments du monde ne pouvaient plus l’atteindre désormais, et la créature pouvait bien écumer sa rage vorace, viscérale, à sa face déboussolée, Belladone serait bien incapable de décoller ses pieds de sillage de feuilles et de boue de la Forêt, quand son esprit s’égarait dans les hautes sphères d’un monde plus beau qui n’existait pas.

Il faudrait bien s’y arracher, pourtant. De gré ou de force, l’instinct de survie reprenait ses droits sur l’âme fragile qui se fermait, opiniâtre, à la rudesse d’un monde qui ne lui convenait pas. Il s’imposait dans le fourmillement imperceptible de ses doigts, dans ce frisson qui lui glaçait l’échine, dans le tremblement de ses lèvres dont le sceau s’effritait sous l’effroi, dans ces yeux d’encre qui s’écarquillaient enfin sous l’apparition terrible de congénères blafards de la créature mortifère. Et enfin le sceau se brisait et ses lèvres s’entrouvraient, enfin ses doigts se crispaient sur l’arme qui pointait la terre humide, enfin son poignet s’apprêtait à se lever vers les canidés monstrueux, quand une main le fit reculer, sans ménagements, l’obligeant à décoller du sol ses pieds qui semblaient devoir y prendre racine.

La puissance du choc envoya son séant rejoindre l’asphalte automnale, fangeuse, et son linceul de feuilles mortes qui se froissèrent dans sa chute. Et ô combien la majesté de Gellert prenait en ampleur, contemplée de tout en bas, les genoux dans la boue et le regard écarquillé sur l’auguste silhouette qui lui semblait si grande, quand seule la blondeur polaire de ses cheveux crevait l’obscurité, faisant pâlir d’envie, presque, l’éclat blafard d’une Lune timide. Et Belladone ne saurait sans doute jamais comment le mage noir avait arraché sa baguette de sa main vacillante, mais sa mémoire n’oublierait pas l’éclat incroyable qui avait, pour un instant, rendu le jour à la clairière qui s’éteignait, tranquille, dans la docilité d’un crépuscule naissant. L’espace d’une seconde, le jeune homme battit des paupières, cilla sous l’insupportable lueur d’une blancheur immaculée, dans l’éclat de laquelle se découpait la haute silhouette d’encre qui lui tournait le dos, et devant laquelle s’enfuyaient les spectres monstrueux des canidés aux crocs béants.

Toujours le séant enfoncé dans la boue, Belladone contemplait avec un recueillement abasourdi ce que ses jeunes années avaient toujours rêvé de voir. Et aucun traité de magie noire, aucun témoignage, aucun entrefilet de journal n’avait pu rendre justice à la beauté de la magie du grand Gellert Grindelwald, qui lui en faisait l’offrande pour sa misérable vie, ce soir, quand il en avait tué tant d’autres, bien plus méritants que lui. Les mains de Belladone s’étaient crispées sur les feuilles d’or et d’argent qui gisaient çà et là, à mesure que ses yeux s’écarquillaient de gratitude devant le spectacle que l’existence lui offrait, dans l’accomplissement de son rêve d’adolescent. Même de dos, Gellert était splendide, nimbé par l’aura de sa magie formidable. Ombre magnifique, sa puissance semblait déferler sur les éléments et le monde, et les pans de sa cape semblaient voleter sur son sillage, tant il respirait le pouvoir absolu. Ce ne devait être qu’un Lumos, ce fut comme la résurrection de l’aube en plein cœur du crépuscule, comme si l’Autrichien avait la préséance sur les lois de la nature qui régissait les astres et les cieux. C’était de la magie à l’état pur, de celle que Belladone ne ferait jamais que regarder, de celle à laquelle il ne perd plus son temps à rêver, désormais.

Et pourtant ce fut terminé en un instant. Une seconde ou éternité plus tard, c’était son ami malicieux et taquin qui s’agenouillait devant la silhouette recroquevillée de Belladone. Il ne subsistait plus de trace du mage formidable, indomptable, qui avait tenu les innombrables vies du monde sorcier au creux de sa main blanche. Il n’y avait plus qu’une moue préoccupée pour celui qu’il aurait anéanti d’un claquement de doigts, pour le fragile sorcier qui avait eu l’audace de le considérer comme un égal, et de balayer d’un revers de main les désirs du despote déchû qui, jamais et de personne sans doute, n’avait admis aucune réplique. Alors, quand le plus grand mage noir encore en vie, -qui venait de prouver sa puissance même sur les lois immuables du sépulcre et de la lumière- pris le fragile sorcier dans ses bras réconfortants, la digue enfin se brisa, et c’en était fini de ces efforts idiots pour garder une contenance qu’il n’avait pas. Lorsque la main roide tapota son dos avec la maladresse touchante de ce néophyte en matière d’affection, lorsque la voix cave s’efforça d’adopter une tendresse inaccoutumée pour s’enquérir de son état, enfin les larmes brisèrent le passage des cils d’encre pour couler sur les joues mangées de barbe, certaines venant mourir sur le col de la cape du mage Autrichien qui le serrait contre lui ;

- Non…Non je n’ai rien, mais, Gellert c’est idiot, je n’ai pas bougé alors…Alors qu’il suffit d’un Lumos…Je le sais pourtant mais je…j’étais bouleversé…Oh, Gellert, je vous demande pardon…Je ne voulais pas vous mentir vous savez…Je vous le jure, et je ne voulais pas vous mettre en colère…C’est seulement que…Lavande est tellement seule, alors je voulais qu’elle puisse me faire confiance, vous comprenez ? Sinon à qui ? Mais quand vous m’avez accusé de…Oh, ça m’a fait tellement de mal ! Mais ça veut dire…ça veut dire que Lavande compte pour vous, alors je comprends…Je réfléchirai pour le pacte, je vous le promets…Je n’aime pas me disputer avec vous…

Sans doute Grindelwald peinait-il à une affection trop inusitée. Pour Belladone, il s’agissait là d’une seconde nature, qui laissait sur son sillage les déboires et les chagrins causés par ce monde peuplé de méchants qui en abusaient. Aussi n’eut-il aucune peine à s’agripper au col de la cape de Gellert, tandis que son visage enfoui dans le creux de son épaule l’aidait à s’épancher, et qu’il retrouvait un brin de courage dans l’étreinte pleine d’affection dont son âme trop tendre avait besoin pour affronter le fil des jours. Lorsque les bras roides du mage noir repenti lâchèrent la frêle silhouette de Belladone, lorsque Grindelwald se leva et esquissa son sourire taquin en lui proposant un détour par les cuisines, alors le jeune homme sut que les réconciliations étaient scellées dans cette étreinte, dans ce sauvetage inopiné contre l’apathie ridicule du benjamin Raven.

Belladone avait les yeux secs et le sourire lui était revenu, lorsqu’il se saisit de la main tendue de son ami retrouvé qui l’aidait à se relever. Et la perspective d’une petite escapade nocturne au cœur des cuisines avec celui qu’il s’apprêtait à quitter quelques secondes plus tôt dans le but de se morfondre au creux de ses draps le ravissait.

- Gellert, votre Lumos était…Incroyable ! Moi qui ait tant rêvé de vous voir à l’œuvre, la puissance dans une telle incantation, c’était…Oh…Je…

Le souvenir de la magie incroyable de Gellert l’avait ramené à sa baguette, et, de fait, ses yeux d’encre venaient de se river sur l’asphalte humide. Elle gisait là, fumante, expirant de minces volutes de fumée blanchâtre qui n’augurait rien de bon. Belladone s’en saisit avec délicatesse. Elle était encore chaude, mais ne brûlait plus, et fumait toujours. Il eut un regard idiot qui se posa vers son ami, tandis que ses yeux d’encre menaçaient de nouveau de se remplir de larmes ;

- Ma…Ma bagu…Ma baguette…Vous…Vous pensez…que… ?

La fin de la phrase mourut dans sa gorge, au creux de laquelle quelque chose semblait l’étrangler. Oh, il ne pouvait guère imputer de miracle à sa propre puissance magique qui coulait dans ses veines, mais sa plus fidèle amie le connaissait par cœur, lui et la faiblesse tendre de ses sortilèges, et la perdre lui paraissait soudain si inconcevable qu’une larme, de nouveau, perla à ses cils. Il y’avait une tristesse pathétique à constater que sa baguette lui était bien trop accoutumée pour pouvoir supporter une puissance qu’il ne ferait jamais que regarder de tout en bas. Au creux de sa paume, le bout de bois fumant, tiède désormais, semblait là pour le lui rappeler.


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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald - Page 2 Icon_minitimeVen 13 Nov - 19:32



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Ce contact physique entre le mage noir et son jeune collègue avait soulagé plus de peines que Grindelwald voudrait l’admettre. S’il savait que la chaleur de son corps froid réconfortait probablement Belladone, sentir le poids de son ami contre lui scellait quelque chose entre ces deux êtres que tout opposait. Gellert s’abandonnait à l’idée qu’il avait une profonde affection pour le jeune Raven. Pourtant, ce dernier semblait aussi fragile qu’un enfant, se confondant en justifications entrecoupées par quelques sanglots. Le fait que Belladone aborde de nouveau le sujet de leur discorde à un tel moment prouvait bien que cette situation l’avait profondément marqué. Et Grindelwald s’en voulut. Il s’en voulut d’avoir été si impulsif et hâtif en conclusions face à cette âme bien trop pure pour qu’il ne puisse la comprendre. Là était peut-être le problème de leur mésentente : Belladone était bien trop bon et lumineux pour être parfaitement interprété par le vil et cruel Gellert Grindelwald. Le Serment Inviolable n’avait été qu’une sorte d’excuse maladroite dissimulée de la part du mage noir. Il ne voulait en aucun cas que Belladone ne se sente obligé d’accéder à cette requête toute aussi impulsive. Il posa une main sur sa nuque, visant à lui faire comprendre qu’il n’avait pas à s’inquiéter de cela.

Puis, le jeune homme plongea son visage dans l’épaule large du repenti. S’il y avait eu des témoins à cette scène autre que les champignons et autres racines, on aurait pu voir les joues de craie du mage noir rosir légèrement. Pourtant, c’était lui qui avait amorcé ce geste tactile de le prendre dans ses bras mais il n’avait cependant pas pensé que Belladone y réagirait ainsi. Ce fut sûrement ce geste qui avait amorcé son désir de se relever. L’expression du visage de son ami, qui attrapa volontiers sa main tendue pour se remettre sur pieds, avait changé. Sa détresse et sa peur avaient disparu pour ne laisser place qu’à une sorte d’émerveillement tout aussi enfantin. Il ne se fit d’ailleurs pas prier pour louer la puissance de son simple Lumos, ravi d’avoir enfin assister à une démonstration de la magie du plus grand mage noir de son temps. Gellert eut, pour la première fois, l’ombre d’un sourire modeste sur son visage. Après tout, ce n’était qu’un simple sortilège que l’on enseignait aux premières années. Il n’avait, par ailleurs, pas eu entre ses mains une baguette qui lui répondait parfaitement. Il aurait beaucoup apprécié pouvoir lui faire une démonstration de toute sa puissance avec le Bâton de la Mort entre ses doigts.

Mais songer à la puissance de Grindelwald les ramena tous deux à une situation plus urgente et immédiate : la baguette de Belladone qui avait brûlé la paume du mage noir. Rapidement, l’inquiétude et la peur réapparurent dans les yeux du jeune professeur de Défense Contre les Forces du Mal. Le morceau de sorbier fumait doucement d’une légère fumée blanche suffisamment épaisse pour être parfaitement visible par les deux collègues. Gellert se mordit l’intérieur de la lèvre, le visage devenu grave. Il n’était pas un expert en baguettes comme pouvait l’être Gregorovitch mais il ne fallait pas être aussi érudit que lui sur le sujet pour savoir que cela n’augurait rien de bon. Néanmoins, le mage noir n’avait jamais entendu parler d’une baguette pouvant être détruite par la seule force magique du jeteur de sorts. Gellert n’osa rapporter la baguette à son ami. Il préférait éviter de la toucher et d’accroître les dégâts. La peine visible de Belladone lui creva cependant le cœur, chose qu’il n’aurait jamais cru possible quelques semaines auparavant. Étrangement, le bien-être de son ami lui importait. Et le voir ainsi malheureux lui déplaisait. Il pouvait parfaitement comprendre l’attachement émotionnel que son collègue pouvait avoir envers sa baguette.

— Je suis sûr que ce n’est rien…

C’était bien la première fois également que Gellert se trouvait si peu convaincant en mentant. Pourtant, pour une fois, ce mensonge avait pour but de réconforter cette âme en peine envers laquelle il ne pouvait s’empêcher de se sentir coupable. Par ailleurs, il refusait de penser aux potentielles conséquences de ce qu’il venait de se passer. Si Belladone n’avait pas désiré en parler, Gellert savait pourtant qu’Albus lui avait sûrement passé un savon sur ce qu’il s’était passé ces derniers mois. C’était la troisième fois qu’il avait tenu la baguette de son ami entre ses doigts blancs, résultant avec le triste fait qu’elle était probablement cassée. Par un simple Lumos, certes. Pour sauver Belladone, certes aussi. Mais rien ne jouait en leur faveur. Ils étaient, après tout, isolés dans la Forêt, ayant semé les Aurors depuis de nombreuses minutes. Albus, Dippet et le Ministère allaient sûrement entendre parler de cet incident et tout ceci n’augurerait rien de bon. Tout cela parce que son esprit trop sombre était persuadé que la pureté n’existait pas. S’il n’avait pas accusé à tort Belladone, jamais celui-ci ne serait parti seul dans la Forêt. Il regardait son ami, une lueur triste qu’il essayait de cacher dans son regard hétérochrome. Il était probablement condamné mais la peine de son ami était la priorité à cet instant. Il fallait sortir d’ici au plus vite. Il soupira légèrement et s’approcha de lui avant de lui mettre une douce entre ses omoplates.

— Rentrons. Viens boire un thé, nous pourrons mieux voir à la lueur des bougies ce qu’a ta baguette. Je suis sûr qu’elle n’a rien…

Il essaya de lui sourire pour lui redonner un minimum espoir même s’il avait rarement été aussi rongé par la culpabilité que maintenant. Si jamais elle était réellement brisée, les sorciers diraient à l’unanimité qu’il est impossible de la réparer. Mais Gellert connaissait une baguette capable de réaliser ce miracle. De plus, il se trouvait que cette fameuse baguette lui appartenait et l’avait choisi. L’inconvénient était qu’elle se trouvait probablement enfermée dans les sous-sols du Ministère britannique, sous haute surveillance. Aller cambrioler le centre politique sorcier de Grande-Bretagne ne lui faisait absolument pas peur, mais il s’agissait d’une mission très dangereuse et il y avait de fortes chances pour qu’il soit déjà retourné à Azkaban à ce moment-là. Il soupira doucement, un sourire véritablement peiné et désolé sur le visage. Doucement, il encouragea Belladone à avancer et à se diriger vers la sortie de la Forêt. Fort heureusement, Gellert n’avait pas tout perdu de son sens de l’orientation aiguisé : ses promenades dans les bois alpins durant son enfance lui avaient certainement appris à reconnaître et différencier les troncs pour retrouver son chemin, même en pleine nuit. Proche de Belladone comme pour le réconforter et le protéger, ils finirent par apercevoir l’orée de la forêt au bout de quelques dizaines de minutes. Sans un mot, ils regagnèrent le château sous le regard affolé des Aurors, le tout dans l’obscurité la plus totale de la nuit. Une fois dans le hall, Gellert prit Belladone chaleureusement par les épaules et le regarda dans les yeux.

— Souhaites-tu aller faire un tour aux cuisines ? Tu pourrais me faire goûter une nouvelle infusion ?

Il lui sourit. Cette invitation visait surtout à réconforter le pauvre homme, visiblement très déboussolé par la crainte de la perte de sa baguette. Peut-être qu’il pourrait lui cuisiner quelque chose de rapide également, qui pourrait lui redonner un peu de joie. Il devait bien avoir un peu de chocolat de cacher dans les placards. Et puis, si jamais cela ne marchait toujours pas, Gellert essayerait autre chose, certes moins moral, pour alléger l’esprit en peine de son seul et pourtant si précieux ami.
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