Kanaeko, suivit par ses parents, passa rapidement le passage et les attendit de l’autre cotés en levant un sourcil. Ils apparurent ensemble de l’autre coté du pilier de brique. La mère de Kana, une grande femme à la chevelure blonde, était coiffée d’un feutre noir et portait une robe assortie de couleur pourpre très foncé. Son père était un petit homme d’origine asiatique aux cheveux et aux yeux noirs. Il portait un chapeau melon noir et un costume élégant. Comme toujours, il était bluffé par la magie de la voie 9 3/4 et regardait autour de lui tel un enfant dans un parc d’attraction. L’adolescente sourit un peu bêtement.

« Vous n’étiez pas obligé de m’accompagner… Je suis majeur maintenant et j’ai mon permit pour transplaner... »

Sa mère ne répondit rien mais son père s’avança en souriant, ajustant la cravate de la tenue moldu de sa fille. Il lui répondit avec douceur :

« C’est une tradition. Nous t’avons accompagné à tes onzes ans. Il est logique que cette année, nous en fassions de même… Sans compter que c’est sûrement le dernier été que nous te déposons et puis… je voulais revoir ce quai et cette locomotive une dernière fois, je te l’avoue... »

Dit il en désignant le Poudlard Express. Il regardait sa fille avec fierté… Regard qui n’était pas partagé par sa mère qui semblait vouloir être partout sauf ici. Elle regardait à droite et à gauche, jouant nerveusement avec ses doigt. Son mari dû l’interpeler d’un raclement de gorge pour qu’elle daigne s’approcher. Il se recula, laissant mère et fille se parler. Kana regardait sa mère avec une légère froideur alors que cette dernière ne semblait pas oser croiser son regard.

« Eh bien… C’est ta dernière année. Ton penses que ça ira ? Tu as tout ce don tu avais besoin. »

« Presque... »

Kana, se laissant guider par les conseils de son père (mais aussi par son cœur), prit doucement sa mère dans ses bras. Celle ci se raidit, surprise. Quelques railleries d’une bande de fille de Serpentard se fit entendre non loin mais Kana les ignorait… Elle murmura à sa mère.

« J’espère que je te rendrais fière... »

Sur ces paroles, la mère de Kana ferma les yeux et rendit son étreinte à sa fille. Elle ouvrit plusieurs fois la bouche pour lui répondre mais aucun son n’en sortit. Le sifflet du train se fit entendre… Il était temps d’embarquer. Kana lâcha sa mère, déçu, et sourit à son père.

« On se reverra à Noël ! Prenez soin de vous ! »

Elle n’osait plus regardait sa mère qui la décevait de plus en plus… Pourtant, celle-ci leva la main vers sa fille, voulant l’arrêter mais, encore une fois, aucun son ne sortit. Agacée, Kana ne fit même pas « au revoir » à ses parents et sauta dans le train, une moue agacée sur le visage. Elle tira sa malle dans le couloir, cherchant un emplacement libre, ou un ami. Au bout de deux wagons, elle fini par tomber sur Lavande qui parlait avec Jasper. Pendant l’été, les deux amies n’avaient pas changées. Lavande, belle de simplicité écoutait Jasper, dont la chevelure rousse semblait flamboyer dans la cabine, qui racontait sûrement ses folles vacances… La simple vu de la rouquine n’aida pas Kana à se calmer… Cette fille parfaite l’agaçait au plus haut point. Elle continua alors à avancer et tomba sur un emplacement qui ne contenait qu’un passager. Elle ne le reconnu pas tout de suite et failli passer son chemin. Finalement, après un temps d’arrêt, elle l’observa de plus belle. Surprise, elle venait de reconnaître son ami qui, durant l’été, avait bien changé. Lui qui faisait encore jeune adolescent l’année d’avant, faisait presque homme à présent. Il semblait plus grand et avaient des épaules larges digne d’un batteur de Quiddich. Et c’est sans parler de sa coupe de cheveux qui lui rappelait les Vikings de jadis et qui, il fallait le dire, lui allait à la perfection, lui donnant un air presque intimidant malgré la douceur de son regard. Elle ouvrit la porte et lui sourit.

« C’est toi Darragh ? »

Cette surprise avait chassé de sa tête tout ses soucis. Pour information, Kana n’avait pas tant changé durant l’été. Ses cheveux étaient juste plus long et son visage était beaucoup moins marqué par la puberté, portant juste ça et là, quelques cicatrices laissées par des boutons d’acné mal soigné.

« Tu permet que je m’installe avec toi ? »

Elle attendit son accord avant d’entrer et de hisser sa lourde mal au dessus de la banquette en face de son amis, l’observant, à la fois surprise et impressionnée :

« Tu sais que j’ai failli ne pas te reconnaître ? Avec cette coupe et ces bras… Tu as travaillé dans une industrie Moldu durant les vacances ou quoi ? »

Tactile et sans gène, elle tendit la main et vint lui tâter le bras, sans se rendre compte de la gène que cela pouvait produire à un garçon, encore plus par quelqu’un d’aussi timide que Darragh. Mais, pour elle, s’était juste curiosité et taquinnerie. Elle était heureuse de le revoir et ça se voyait. Autant l’instant d’avant elle était sombre que, depuis qu’elle avait croisé son ami, elle semblait rayonner comme ci ses problèmes de famille étaient loin derrière elle.

Poudlard Express, 1^er Septembre 1942.

Dans quelques jours commenceraient la pénultième rentrée de Darragh à Poudlard. C’était avec une certaine nostalgie qu’il faisait sa valise, sachant qu’il s’agissait de l’avant-dernière fois. Il se sentait bien dans les murs de pierre de l’école, entourés d’autres sorciers comme lui. Il aimait sa famille pourtant et cette dernière l’aimait en retour. Mais il savait qu’il ne leur était guère utile et même plutôt encombrant. Il les avait aidés comme il pouvait tout au long de l’été, essayant de surmonter sa peur de l’eau en allant vendre leur pêche sur le continent, déchargeant la cargaison. Le résultat de ses BUSE avait créé en lui un certain sentiment de revanche et une volonté de faire ses preuves. En réalité, malgré les notes excellentes si ce n’était parfaites dans la quasi-totalité des matières, il estimait que ses examens étaient un échec : en effet, il n’avait eu qu’Effort Exceptionnel dans l’une des matières qui lui importait le plus, les Métamorphoses. Il était impatient de retrouver le professeur Dumbledore afin de lui demander là où il avait échoué dans son examen afin que cela ne se reproduise plus à l’avenir. En colère durant la fin du mois d’août, il avait donc redoublé d’efforts pour faire marcher l’industrie familiale.

Durant l’été, il avait également essayé le Nutri’Vit offert généreusement par Aurora Bishop, camarade de la maison Poufsouffle qu’il avait aidé à réviser ses BUSE. Si Darragh avait au début craint des effets indésirables (la jeune fille étant toujours en apprentissage après tout), la lotion s’était révélée d’une efficacité redoutable : les cheveux de l’adolescent avaient poussé deux voire trois fois plus vite que d’habitude, ayant désormais dépassé sa nuque. La déception de l’échec en Métamorphoses lui avait pourtant donné envie de tout couper : s’il avait été si mauvais, peut-être fallait-il songer à se reconvertir dans le poisson, comme ses frères et sœurs. Le problème était que les cheveux trop longs le gênaient, toujours poisseux de sel, se collant sur son visage, lui arrivant dans les yeux. Cependant, Aurora lui avait soufflé qu’elle aurait bien aimé le voir les cheveux plus longs, plutôt qu’avec cette coupe banalement classique qu’il avait arboré pendant toute sa scolarité voire toute sa vie. Il avait donc trouvé le bon compris : raser les mèches susceptibles de lui arriver dans les yeux, de lui chatouiller les oreilles et la nuque et d’accrocher le reste en une sorte de catogan fait à la va-vite à l’arrière de son crâne.

Quatre jours avant le départ du Poudlard Express, le père de Darragh profita d’une livraison à Galway, grande ville la plus proche, pour déposer son fils dans une ruelle. Le jeune homme avait en effet eu l’instruction de s’y rendre, à 11h précises, afin de prendre un Portoloin qui l’emmènerait directement au Chemin de Traverse. C’était la même routine chaque année, se débrouillant seul à chaque fois après être arrivé à Londres. Mr O’Sadhbh ne comprenait pas trop comment des druides avaient pu inventer quoique ce soit pour se téléporter, sûrement une poudre faite de gui et de belladone ou autres plantes aux vertus un peu arcanes, mais il ne posait pas trop de questions à son benjamin à ce sujet. Ce dernier ne faisait pas trop la discussion à ce sujet non plus. Il avait seulement hâte de retrouver les siens, ayant vraiment l’impression d’être né étranger au sein de sa propre famille qu’il aimait pourtant. C’était avec un bâillement, assis sur sa valise, qu’il attendit l’employé magique venu faire le passeur en Irlande, le tout après avoir salué son père qu’il ne reverrait que dans dix mois, après, bien sûr l’avoir aidé à décharger les nombreuses caisses de poissons au marché du coin.

Quand le sorcier lui indiqua qu’il était l’heure de partir, Darragh toucha la vieille bouteille en verre posée par terre et, après avoir l’impression de passer dans des couloirs d’airs particulièrement désagréables, secoué de partout, il se retrouva non loin du Chemin de Traverse où il fit ses achats pour la nouvelle année pendant les quatre prochains jours. Il n’avait pas énormément d’argent, aussi s’achetait-il des livres d’occasion et un nouvel uniforme de facture modeste : il s’était rendu compte au Chaudron Baveur où il séjournait, que son pantalon et sa robe étaient tous deux bien trop courts, laissant apparaître ses chevilles et ses poignées et ses épaules ayant du mal à loger en largeur. Il ne s’était pas rendu compte qu’il avait à ce point changé au cours de l’été, s’amusant à imaginer ce que dirait ses camarades en le voyant. Il se surprit également à se demander si Aurora aimerait bien sa nouvelle coupe de cheveux. Subitement à cette idée saugrenue, comme si cela avait été une pensée impure, il sentit ses joues être attaquées par une douce chaleur de gêne. Pourtant, il était tout seul dans sa chambre et jusqu’à preuve du contraire, personne n’aurait pu faire preuve de Légilimancie contre lui. Et, même si cela avait été le cas, tout le monde se fichait bien de savoir que l’adolescent songeait à sa jeune camarade de Poufsouffle.

Arriva alors le 1^er septembre et Darragh arriva en avance à King’s Cross. Il monta dans le Poudlard Express, l’esprit en paix à l’idée de retourner à Poudlard malgré une détermination sans précédent de faire ses preuves en Métamorphoses. Son cœur battait plus vite qu’à l’accoutumée pourtant, espérant apercevoir Aurora sur le quai mais craignant qu’elle ne vienne également dans son compartiment. Il serait bien trop timide et nerveux pour supporter la longue journée de voyage en sa présence, qu’il appréciait pourtant beaucoup. N’ayant encore personne dans le train, il en profita pour sortir sa robe de sorcier aux couleurs de Serdaigle et aller se changer avant de hisser sa malle au-dessus de la banquette où il s’assit. Une fois installé, il ouvrit la boîte de sa chatte, Morrigan, qui s’étira avant de renifler tout autour d’elle avant de monter sur ses genoux. Darragh eut une moue embêtée, songeant aux poils qui s’accrocheraient à sa robe mais n’eut le cœur à la mettre à côté de lui, préférant la caresser en regardant le quai d’un air songeur. La porte du compartiment s’ouvrit alors et une voix familière l’appela. Il reconnut alors Kanaeko, son amie, si ce n’était sa meilleure, de Serpentard. Un sourire réservé vint éclairer poliment son visage.

— Bonjour, Kana, tu vas bien ? Je t’en prie, installe-toi.

Tandis qu’il s’était levé pour la saluer, Darragh se sentit alors inspecté de la tête aux pieds, le regard de l’adolescente braqué sur lui. Le Serdaigle eut un sourire gêné, baissant la tête pour voir si quelque chose avait changé sur lui, oubliant lui-même que oui, son corps s’était pas mal transformé ces derniers mois. Fidèle à elle-même, Kanaeko, après avoir posé sa valise sur le porte-bagage, s’approcha de lui, avouant ne pas l’avoir reconnu aux premiers abords. Ce qui semblait l’avoir marqué le plus fut ses bras et ses cheveux. Pour ces derniers, il ne pouvait que remercier Aurora. Quant à ses épaules, oui, sûrement qu’avoir soulevé des charges lourdes tout l’été l’avait peut-être aidé à gagner en masse. Sans s’y attendre pourtant, son amie vint lui tâter le bras, le prenant un peu au dépourvu. Il eut alors un rire légèrement nerveux, ne sachant trop comment réagir à cette proximité sans gêne mais caractéristique de son amie.

— Je… Et bien… C’est… J’ai pas mal aidé mes parents cet été, c’est peut-être pour ça… Toi tu n’as pas changé…

Il essaya de sourire mais avait plutôt l’impression de s’y prendre comme un manche quand il s’agissait de parler à une fille. Et les occasions où il avait essayé d’entamer une conversation avec le sexe opposé étaient rares. À part sa mère et ses sœurs, Darragh n’avait osé parler qu’à deux filles différentes, deux filles qui lui plaisaient par ailleurs : Aurora et Kanaeko. Il s’assit rapidement et se précipita d’engager une conversation sur laquelle il se sentait à l’aise :

— Et toi, tu es prête pour cette nouvelle année…? Enfin cette dernière… Je sais que je vais changer de professeur de Runes, je me demande s’il y aura d’autres nouveaux professeurs…

Coupé du monde sorcier sur son île, il n’avait pas su que la nomination du nouveau professeur de Runes était déjà connue bien avant la rentrée. Il regarda vaguement le quai, ayant l’impression de voir passer la brillante chevelure dorée d’Aurora. De nouveau gêné, surtout en présence de Kanaeko, il reporta son attention sur elle avec un sourire.

— Tes parents t’ont accompagnée ?

Machinalement, il prit Morrigan sur ses genoux alors que celle-ci faisait sa toilette et commença à la caresser tendrement. Les ronronnements qui commencèrent à s’élever rapidement du félin l’apaisa légèrement tandis que 11h pétantes sonna à l’extérieur et que le Poudlard Express commença à avancer lentement.

Septembre 1942

Le garçon réservé semblait contraster avec son amie. Il semblait tellement plus calme et moins nerveux et ce, malgré ce nouveau look qui, il fallait le dire, lui allait à merveille. Étrangement, même ci son corps avait évolué, son esprit semblait être resté le même et, dans un sens, ce n’était pas plus mal. Au moins, il restait le plus réfléchit et sage des deux et dieu sait que Kana avait besoin d’être canaliser pour ne pas trop faire de bêtise.

La réaction de Darragh sur lui même ne fit qu’élargir le sourire de la vert et argent. Il ne semblait pas s’en rendre compte et, pourtant, Kanaeko le voyait bien : En un été, il était devenu vraiment homme… et un homme beau avec ça ! Bien qu’il ait gardé quelques manières dû à sa timidité, cela ne lui retirait en rien cette soudaine prise de charisme. Elle rit doucement en lui lâchant le bras, allant s’avachir dans la banquette en se passant une main dans ses cheveux emmêlé.

« Je vois cela ! Je ne le dirais jamais assez que se servir trop d’une baguette ramolli ! Tu es la preuve vivante que travailler à la moldu, ça peut faire du bien au corps ! En tout cas, je te remercie ! Je prends ça pour un compliment ! »

Elle rit doucement en se redressant légèrement sur son siège. Bien que Kana ne se sente pas toujours très bien dans sa tête, elle se sentait bien dans son corps. Peu lui importait d’être belle ou non aux yeux des autres. Tant qu’elle arrive à tenir sa baguette, lever ses poings, monter sur un balais ou simplement marcher, tout va bien. L’air gêné du jeune homme semblait être une banalité pour elle et pour cause, il s’était presque toujours exprimé ainsi avec elle. Un peu maladroit, cherchant ses mots… Elle mentirait si elle ne disait pas s’en amuser de temps à autres. Après tout, à sa connaissance, elle était la seule fille que son ami fréquentait. A sa question, elle pencha la tête.

« Aaaaaaaah ça ! Pour changer, ça va te changer ! Ce serait nul autre que Gellert Grindelwald ton prof de rune ! Franchement, j’ai eut du mal à le croire lorsque je l’ai lu dans la Gazette du Sorcier, mais il semblerait que ce sera bien lui… Ils auraient mieux fait de le coller aux forces du mal, ça aurait été plus intéressant que l’autre imbécile… Mais Grindelwald à Poudlard… Je pense que cette année va être particulièrement intéressante. J’espère que tu me diras ce qu’il vaut ! Tiens, je l’ai apporté si tu veux lire !»

Elle lui tends le journal qui datait du mois passé dans lequel on voyait une veille photo de Gellert Grindelwald en pleine page avec titré « Grindelwald, Professeur à Poudlard ». A ce moment là, Kana ne savait pas trop quoi penser du célèbre mage noir. Partagée entre ce que sa mère lui a dit et ce qu’elle avait apprit, elle en avait déduit que personne ne savait vraiment quel était le véritable but de la croisade de Grindelwald… Elle espérait, du coup, en apprendre plus sur lui durant cette année… Pourquoi pas l’approcher ? Mais cela lui semblait impossible. Il ne faisait aucun doute qu’il allait être surveillé et que les élèves n’auraient sûrement pas le droit de l’approcher en dehors des cours. A cette pensée, elle soupira, n’ayant même pas remarqué le regard de Darragh vers la fenêtre. Lorsque ce dernier lui demanda si ses parents l’avaient accompagnée, elle se mordit la lèvre, un éclat de contrariété brillant dans son regard avant de sourire légèrement et de reporter plutôt son attention sur le chat qui commença à ronronner alors que le train démarrait… Elle n’eut pas un regard vers le quai.

« Ouais… On peut dire cela... » Mais elle n’avait pas trop envie d’en parler et elle préféra lui demander : « Pas les tiens ?… »

Elle trouvait la situation de son ami un peu triste… Après tout, il est sorcier et ses parents ne semblent pas vouloir en apprendre plus sur cet univers qui s’ouvraient à eux. Univers dont faisait partit leur fils après tout. Mais ce n’était pas un sujet facile et il était tout aussi délicat à aborder que la situation de famille de Kana. Chacun ses problèmes… En parlant de problème, elle avait une question à lui poser mais elle se demandait comment s’y prendre et tapota ses doigts l’un contre l’autre. Après tout, pendant que nous sommes dans les sujets sensibles...

« Tu sais… ma mère est toujours réticente à ce que j’envoie des Hibous… Je voulais te demander comment ce sont passé… tes BUSEs... »

Elle avait peur de le blesser. Mais, connaissant Darragh, les chances pour qu’il ait loupé ses examens étaient faibles. Mise à part Jedusor, il était le deuxième à pouvoir la coiffer au poteau durant des exams de magie pratique. Néanmoins, connaissant l’attrait de la perfection de son ami, un EF pouvait avoir pour lui autant d’effet qu’un T sur un élève ordinaire… D’où son hésitation à lui demander.

Poudlard Express, 1^er Septembre 1942.

Quand Kanaeko relâcha son bras, Darragh se sentit quelque part soulagé. Peu habitué aux contacts physiques en général, il le supportait d’autant plus mal quand il s’agissait d’une amie aussi proche qu’elle. Rougissant légèrement, il imita sa camarade de Serpentard et s’assit de nouveau, son chat n’attendant pas une seconde de plus pour se poser sur ses genoux. À son air amusé, Darragh savait que Kanaeko se jouait de son air timide et mal à l’aise dès qu’il s’agissait de sympathiser. Pourtant, il aurait voulu lui montrer qu’il ne bégayait pas, dans la salle commune de Serdaigle. Il aurait voulu lui montrer qu’il n’y avait bien qu’avec elle qu’il était… comme ça. Et avec Aurora Bishop également. Rien que de penser à la jeune Poufsouffle rendit ses joues un peu plus cramoisies et il baissa ses yeux azurés sur son chat allongé sur ses jambes qu’il s’empressa de caresser. Il aurait souhaité être un peu plus courageux, surtout avec Kanaeko. Mais la vérité était dure également à avaler pour lui-même : il avait beaucoup d’affection pour elle et ne savait trop comment s’y prendre. Cela doublé à l’amitié sincère et réciproque qu’il avait pour elle. Beaucoup des professeurs ne comprenaient pas le rapprochement entre les deux élèves que tout sembler opposer mais, jusqu’ici, ils n’avaient causé de tort à personne.

Elle répondit alors à son commentaire rhétorique sur son nouveau professeur d’Étude des Runes et le nom qu’elle prononça le fit tomber des nues. Gellert Grindelwald à Poudlard ? Darragh avait beau venir d’une famille de Moldus, il avait passé suffisamment de temps dans les livres pour rattraper son retard sur le monde auquel il appartenait pour ignorer qui était le mage noir austro-hongrois qui avait ravagé l’Europe peu avant sa naissance. Il fut soudainement mal à l’aise et devint certainement livide. À quoi jouait Dippet et le Ministère en le libérant d’Azkaban ? Le jeune Serdaigle essaya de se convaincre en se disant que la décision avait dû être murement réfléchie mais il ne pouvait s’empêcher d’avoir une certaine appréhension qui lui serrait les entrailles. Fébrilement, il récupéra l’exemplaire de la Gazette du Sorcier et vit la photo mouvante sur la une. Grindelwald le toisait de ses yeux asymétriques, le sourire insolent mais le regard déterminé, tenant sa plaque d’identification entre ses mains. Difficile de se dire que cet homme serait assis à côté de sorciers aussi illustres que bienveillants, tel le Professeur Dumbledore. Il ne pouvait que s’en remettre à la décision des puissants. Il n’était après tout qu’un adolescent de seize ans.

Il redonna le journal à Kanaeko et eut une moue préoccupée qu’il essaya de dissimuler par un sourire tandis qu’il jeta un coup d’œil par la fenêtre, regardant le paysage défiler sous ses yeux inquiets. Lui qui n’avait aspiré qu’à une vie tranquille, voilà qu’une de ses matières préférées venait d’être recouverte d’une ombre oppressante. Le voile de déception qui avait enveloppé le cours de Métamorphoses suite à son échec ne l’aida pas à relativiser. De plus, il était toujours Préfet, tâche dont il se serait bien passé. Kanaeko lui indiqua que ses parents l’avaient accompagnée jusqu’à la gare et demanda pour ceux du jeune Irlandais. Ce dernier haussa les sourcils, un peu surpris. Il pensait qu’il lui avait déjà raconté sa situation familiale, leurs revenus modestes mais stables, qui ne leur permettaient pourtant pas de se permettre des folies comme des allers-retours à Londres. Il fallait dire que la distance était importante, devant traverser l’Irlande puis l’Angleterre pour arriver à bon port. De plus, il fallait songer au coût des fournitures scolaires. Non, le trajet était beaucoup trop cher, même pour un seul parent. De plus, c’était une paire de bras en moins pour le travail ce qui entrainait un gain d’argent insuffisant.

— Non, mes parents ne m’accompagnent pas… C’est trop cher. Ils me déposent à la grande ville la plus proche en Irlande et j’utilise un Portoloin pour parvenir jusqu’à Londres.

Il sourit doucement et l’écouta alors dire que sa mère n’aimait pas qu’elle envoie des hiboux. Maintenant qu’elle le disait, il n’y avait jamais fait vraiment attention, étant habitué à être un peu isolé sur son île pendant l’été, même si, cette année-là, il avait reçu des nouvelles d’Aurora, contre toute attente. Il fit une moue, qui s’accentua cependant, quand la Serpentard aborda le sujet des BUSE. Darragh se renfrogna légèrement, rentrant subtilement la tête dans ses épaules.

— Et bien… Je suis déçu de ma note en Métamorphoses. C’est l’une des matières que j’aime le plus, et j’ai réussi à n’obtenir qu’un Effort Exceptionnel… Je visais l’Optimal.

Il haussa les épaules.

— J’irai voir le professeur Dumbledore, qu’il puisse m’aider. Mais sinon, tant pis, je me dis que je ferai mieux lors de mes ASPIC.

Il poussa un léger soupir tout en regardant Kanaeko.

— Et toi ? Pourquoi ta mère ne veut pas que tu envoies de hiboux ? Elle a peur qu’il salisse votre maison ?

Il eut un sourire amusé, essayant de faire un peu d’humour dans cette ambiance un peu étrange. Lui qui avait toujours aimé aller à Poudlard, il se sentait maintenant stressé comme au premier jour de sa première année, appréhendant ses matières préférées mais également le regard de la jeune Poufsouffle dont il avait utilisé la potion comme promis.

Septembre 1942

Kana tourna doucement la tête vers la fenêtre, laissant son ami lire le journal. Son teint livide lui en disait long et cette réaction était tout à fait logique. Elle ne doutait pas que beaucoup d’élèves seraient absent durant cette année. N’importe qui de sensé n’inviterait pas un célèbre mage noir au sein de son école et pourtant… Mais la jeune Serpentard avait son avis sur la question. Elle sera sûrement une des rares à être impatiente de rencontrer ce nouveau professeur dont sa mère lui avait tant parlé dans sa jeunesse.

Lorsqu’il lui rendit le journal, elle le plia et le posa sur la banquette à ses cotés. Elle voulu le rassurer mais, pour le moment, il avait lui aussi des questions à répondre… Même ci Kanaeko connaissait déjà la réponse à la première. Elle fit une légère grimace lorsqu’il lui révéla que sa famille n’avait pas les moyens de se rendre à Londres et s’appuya contre le dossier en se frottant le menton.

« Je suis désolée… »

Elle trouvait cela un peu injuste de ne pas aider les parents de nés-moldus à venir à Londres… Mais que faire d’autre ? De plus, si ils venaient à loger au chaudron baveur, ses parents risqueraient de paniquer face à l’immense bizarrie de l’endroit… Après tout, c’est un lieu où la magie est pratiquée librement et des personnes peu habituées auraient vite fait de prendre leurs jambes à leur cou. Elle lui sourit, encourageante, espérant que, plus tard, quand il aura fini ses études, il partagera un peu de ce monde merveilleux avec ses parents… Mais là, il s’agissait de sa vie et elle n’avait pas à s’en mêler.

Elle l’écoutait et, doucement, un sourire se formait sur son visage, quelque peu amusée. A nouveau, elle décolla son dos de son dossier et avança son buste vers lui.

« Je reconnais qu’à la vue de tes capacités, c’est injuste… Surtout si toi même tu ne vois pas où tu as échoué. Je commence à bien te connaître, je pense… Et vu comment tu travailles, c’était hautement mérité. Mais, crois moi, tu auras ta revanche ! Si tu veux, on s’entraînera tout les deux cette année ! Je devrais réviser mes ASPICs également après tout. Bon, ne compte pas sur moi pour l’histoire de la magie ou les potions par contre ! »

Elle rit doucement puis prit un air un peu plus sérieux à sa question suivante, se pinçant doucement la lèvre. Il est vrai qu’elle ne lui avait pas révélé ses problèmes de familles… Elle ne l’avait dit à personne encore… Mais Darragh avait besoin d’être rassuré sur Grindelwald et, qui plus est, il restait un ami fidèle qui, malgré le faite que tout les opposaient, ne l’avait jamais trahi.

« J’aimerais que ce soit aussi simple qu’une simple histoire de fiente de hiboux... »

Kana tourna le regard vers la porte… Elle hésita un petit instant et lui demanda, dans un ton un peu plus léger :

« Darragh, est-ce que tu serais capable de garder un secret ? »

Poudlard Express, 1^er Septembre 1942.

L’identité de son nouveau professeur de Runes lui avait laissé une certaine appréhension dans l’estomac, ayant du mal à digérer la nouvelle. Il évitait de regarder la une du journal posé à côté de Kanaeko où la figure blafarde et émaciée de Grindelwald les regardait avec un calme froid et menaçant. Peut-être se faisait-il des idées après tout, mais dans sa situation, quel élève n’avait pas peur de celui qui allait se retrouver seul avec eux dans une salle de cours ? Darragh se répéta pourtant que Dippet et Dumbledore avaient leurs raisons et n’avaient certainement pas pris cette décision à la légère. Peut-être que le mage noir se montrerait un excellent professeur, après tout. Le jeune Serdaigle ne doutait pas que le criminel devait avoir une grande connaissance sur la magie en général. Oui, tout se passerait bien, il n’y avait pas de raisons. Grindelwald serait certainement sous étroite surveillance et n’aurait probablement pas accès à sa baguette. C’était, par ailleurs, sûrement précisé dans la Gazette du Sorcier mais Darragh n’avait eu la foi de lire l’article en entier. Ils auraient certainement plus de précision à la rentrée, lors du festin. Dippet s’adresserait certainement à eux pour éclaircir cette nomination. Grindelwald assistera-t-il au dîner ? Une certaine curiosité naquit en lui, une certaine hâte inoffensive de voir qui allait être ce personnage haut en couleurs.

Kanaeko s’excusa pour l’absence des O’Sadhbh pour la rentrée de leur fils. Ce dernier haussa les épaules avec indifférence. Il y était habitué et la raison pour laquelle ils étaient restés en Irlande était valable. De plus, ils n’étaient pas très à l’aise avec le monde magique. Darragh avait bien essayé d’en parler deux trois fois durant l’été mais il s’était bien rendu compte en voyant les regards vagues de sa famille, que cette dernière n’y comprenait pas grand-chose. On lui posait toutefois des questions. Les O’Sadhbh étaient certes une famille modeste mais ils voulaient toujours faire bonne impression. Il était donc très important que Darragh soit un élève sage et exemplaire, mission qu’il avait peut-être un peu trop prise à cœur. Si l’idiot de Gryffondor, Adoxus Gwydd, était tristement connu comme celui étant la cause de la plus grande perte des points de sa maison, Darragh, lui, s’était fait remarquer dans l’autre sens : il n’était peut-être l’élève qui avait rapporté le plus de points, mais il pouvait se vanter de n’en avoir jamais fait perdre. Un élève sans bruit, sans vague, qui comptait réitérer cet exploit jusqu’à la fin de sa scolarité et ce, malgré son amitié avec la tumultueuse Serpentard en face de lui.

— Ce que je ne comprends pas, c’est que j’ai réussi toutes mes métamorphoses… Cela devait être à l’épreuve écrite où je me suis trompé. Et pas qu’une fois pour avoir manqué l’Optimal. J’ai dû mal comprendre quelque chose.

Il haussa de nouveau les épaules avant de sourire à Kanaeko.

— J’aimerais beaucoup qu’on puisse s’entraîner ensemble ! Toi, tu veux devenir Auror n’est-ce pas ? Il faudra que tu sois irréprochable sur la Défense Contre les Forces du Mal ! J’espère que Têtenjoy fera ce qu’il faut.

Bien évidemment, le jeune Darragh ignorait encore que le Professeur Têtenjoy avait démissionné de son poste en apprenant que le plus grand mage noir du siècle viendrait la côtoyer en tant que collègue. Ou alors cela avait été précisé dans le fameux article qu’il n’avait pas lu. Mais l’idée de passer du temps avec Kanaeko lui faisait plaisir, tant que cela n’enfreignait aucune règle de l’école. Il pourrait toujours demander l’accord de leurs professeurs respectifs, c’est-à-dire, les professeurs Vargas et Slughorn. Le Professeur Dumbledore pouvait également donner son accord. Le jeune Serdaigle était même certain que leurs enseignants verraient là une occasion d’essayer de canaliser la téméraire Serpentard qui lui répondait concernant les hiboux et sa mère qui refusait à Kanaeko le fait de communiquer avec l’extérieur durant l’été. Son air préoccupé l’intrigua et le jeune homme fronça les sourcils. Un peu pris de cours par sa question, il dit alors :

— J’i… J’imagine, oui… ? Ce n’est rien de grave, au moins…?

Darragh n’avait jamais eu l’occasion de tenir des secrets car personne ne lui en disait jamais. Pourtant, le jeune homme pouvait se montrer aussi muet qu’une tombe et c’était bien ce qu’il comptait faire avec Kanaeko. De toute façon, ses amis se comptaient sur les doigts d’une main et la Serpentard était sûrement la personne dont il était la plus proche.

Septembre 1942

Darragh était une personne très brillante, peut-être même un peu trop brillante. Bien entendu, personne et sûrement pas Kana, ne pouvait lui reprocher un tel comportement. Le souci était que son amie trouvait son comportement parfois un peu trop strict envers lui-même. Elle pouvait comprendre que l'on respecte le règlement, mais à ce point-là, s'en était presque maladif. Après tout, ils étaient des adolescents tous les deux, jeunes et pleins de vie ! Parfois, il faut s'amuser quitte à enfreindre les règlements. Cela fera toujours de bonnes histoires à raconter en famille, de belles anecdotes qui les feront rire et/ou pleurer dans le futur. L'élève de Serpentard avait un peu peur que son ami ne regrette à la longue d'avoir été aussi sage durant sa jeunesse... Mais elle respecte cela. Après tout, il s'agit là de son choix et elle n'est pas vraiment un exemple à suivre. Bien qu'elle arrivait à rattraper la plupart de ses bêtises en brillant durant les cours pratiques, Kanaeko restait une rebelle avant tout, prenant presque du plaisir à enfreindre les règles juste par plaisir alors que, si elle le voulait vraiment, elle pourrait être aussi exemplaire que son ami. Mais, un tel comportement finirait par la rendre folle d'ennui. Un sourire étira ses lèvres à cette pensée. Au final, qui d'elle ou de Darragh avait le bon comportement ?... Je vous laisse choisir par vous-même car, là encore, tout n'est qu'une question de point de vue.

A la réponse de son ami, la jeune femme fit la grimace. Peut-être que l'examinateur connaissait son statut de "né-moldu" et qu'il a voulu lui mettre des bâtons dans les roues. Mais elle n'en dit rien. Après tout, elle pourrait lui en faire part s'il venait à se décourager, mais pour le moment, elle espérait qu'il allait se servir de ce semi-échec comme d'une force pour amorcer ses deux dernières années de façon spectaculaire.

Sa réponse la fit sourire et, à sa remarque, elle hocha les épaules avec un sourire mesquin aux lèvres.

« Je n'y crois plus... Têtenjoy a les connaissances, je ne dis pas le contraire, mais elle ne veut rien nous apprendre d'utile... Et encore moins pour un futur Auror ! On n'a même pas encore vu les sortilèges impardonnables, ni les sortilèges interdits et encore moins comment les combattre. Perso, j'ai pris les devants. »

Pour le coup, elle pouvait remercier sa mère qui, malgré sa froideur, avait acceptée de l'aider un peu en matière de magie à l'aide de ses vieux livres de classe. Bien qu'elle refusait d'user de sortilèges interdit, les vieux livres du début du siècle permettaient d'en apprendre (bien que vaguement), plus sur les sorts de magie noire, mais surtout comment s'en protéger. La jeune sorcière caressa doucement le bois de sa baguette dans sa poche en songeant à sa plus grande réussite de l'été : Son patronus.

En tout cas, elle ne savait pas elle non plus que Têtenjoy avait démissionné. Ça, tout comme Darragh, elle ne l'apprendra que dans quelques heures, avant le festin, l'article stipulant bien que des démissions ont eut cour à Poudlard, mais aucun nom n'avait été mis en avant pour le moment. Dans tous les cas, elle espérait vraiment que son ami allait accepter de s'entraîner un peu avec elle. Après tout, cela fait toujours du bien de se sentir appréciée, surtout par un garçon aussi droit et doué que Darragh. Parfois, elle se demandait même ce qu'un garçon aussi respectable et introverti lui trouvait, elle qui faisait peur à la plupart des gens...

A sa réponse, elle leva un sourcil. Loin d'elle l'envie de lui faire peur, mais c'était là un risque important qu'elle allait prendre. Elle se leva et, après avoir vérifié que la porte était bien fermée, elle tira le rideau qui donnait sur le couloir et retourna s'asseoir. Son air provocateur avait, alors, laissé place à un profond sérieux.

« Il en va de la sécurité de ma famille. Ce que je vais te dire doit impérativement rester entre nous... Alors, on va dire que si, c'est assez grave quand même. Ma mère est américaine, comme je te l'ai dit et mon père est moldu et d'origine asiatique. »

Elle se mordilla la lèvre et continua.

« Déjà critiqué par ma grande famille, puis par les familles de sang pur, puis par les moldus qui ne supportaient pas de voir une Américaine avec un « jaune ». » Elle appuya ses mots avec des guillemets fait avec ses doigts. « ... ma mère a décidé de se battre pour ses droits et, à l'époque, il n'y avait qu'un seul homme qui s'était élevé au-dessus de cela. »

Elle ne précisa pas le nom du sorcier, laissant simplement Darragh comprendre là où elle voulait en venir, plaçant une courte pause avant de reprendre à voix basse.

« ... Pour elle, il n'est pas le mage noir que nous vendaient les journaux. Certes, il a fait beaucoup de mal, mais il voulait surtout le bien des gens comme mes parents... Des gens dont personne ne voulait. »

Kanaeko soupira et se passa une main sur le visage.

« A sa chute ma mère a fuit et elle se fait oublier... Comme tout partisans, elle a peur d'aller en prison. C'est pour cela que je n'ai pas trop le droit d'envoyer des hiboux à qui que ce soit. Pour te dire, elle n'a même pas fait raccordé notre cheminée ! »

Elle rit un peu tristement avant de conclure :

« Bref, ne t'inquiète pas pour Grindelwald. A ce qu'il paraît, il est impressionnant, mais un garçon aussi travailleur que toi, tu ne seras jamais dans son collimateur. »

Cela lui permettait de se confier concernant son passé et de le rassurer concernant l'ancien mage noir. Cela lui avait fait du bien d'en parler à quelqu'un, d'avoir un véritable ami à qui tout dire sans avoir peur. Elle ne voyait pas le jeune homme la dénoncer. A quoi cela lui servirait de toute manière ? Il savait que son amie n'avait aucune mauvaise intention, même à l'égard de ses rivaux de Poudlard. Kanaeko aime son école et la maison vert-argent dont elle arborait fièrement le blason. Elle tapota le bout ses doigts l'un contre l'autre, un peu nerveuse, avant de lui murmurer avec une voix un peu plus aiguë que la normale :

« Tu es le premier à qui je me confie... »

Après un tel récit, elle ressemblait plus à une enfant venant de faire une bêtise qu'à la jeune dur à cuire dont l’Irlandais a l'habitude.

Poudlard Express, 1^er Septembre 1942.

Tandis que le Poudlard Express continuait de fendre le paysage britannique de son épaisse fumée blanche, Darragh et Kanaeko ne semblaient toujours pas être embêtés par de jeunes élèves en manque de compartiments. C’était par ailleurs étrange qu’ils fussent à ce point tranquilles. Cela faisait plusieurs dizaines de minutes qu’ils étaient partis désormais et personne n’était venu les déranger, à la grande joie du jeune élève de Serdaigle. Cependant, il préféra ne rien répondre au sujet du professeur Têtenjoy. Darragh n’était pas difficile et n’aimait pas critiquer quelqu’un. Il se contentait de ce qu’on lui donnait et, n’ayant pas de comparaison possible avec d’autres professeurs de Défense Contre les Forces du Mal, le professeur Têtenjoy lui convenait. Et, à vrai dire, il se moquait du programme en vigueur. Il se contentait d’apprendre et d’appliquer parfaitement ce qu’on lui demandait. Le jeune homme était relativement docile et fuyait le conflit le plus possible. Ainsi, il n’exprimait que très rarement son avis (qui était pourtant parfois bien tranché) et se murait dans un silence, se protégeant ainsi de tout débat. Cette fois-là ne dérogea pas à la règle et, suite au commentaire de Kanaeko, il se contenta de hausser simplement les épaules en silence.

Cependant, ce fut plus la suite qui inquiéta profondément Darragh. Ce secret qu’elle voulait lui avouer ne lui inspirait rien de bon. Même la lueur taquine et rebelle de la jeune fille avait quitté ses yeux pour laisser place à une inquiétude flagrante. Tout aussi préoccupé que son amie, il resta silencieux, attendant patiemment que celle-ci reprenne la parole. Elle venait de s’assurer que personne ne viendrait les déranger et retourna s’asseoir en face de lui. Elle lui parla alors de choses auxquelles il ne s’attendait pas. Il savait qu’elle était sang-mêlé, entre deux mondes et également deux continents mais il ignorait que sa famille avait à ce point dû vivre cacher de tous : aussi bien des sorciers que des moldus. Darragh se sentit soudainement très mal pour elle. Elle qui venait des États-Unis mais appartenant également au Japon, la voici condamnée à vivre en Grande-Bretagne, loin de ses nations de cœur. Cela expliquait désormais pourquoi elle faisait sa scolarité à Poudlard et non à Ilvermorny ou à Mahoutokoro. Mais il semblait exister une autre raison encore plus légitime à la fuite de la famille de Kanaeko du continent américain. Une raison qui devenait effectivement trop compromettante pour rester sur les terres à la bannière étoilée.

Sans dire un mot, il continua de l’écouter parler, lui avouer que sa mère avait été une partisane du plus grand mage noir de leur siècle, convaincue qu’il prêchait la liberté d’exister entre tous les peuples, toutes les différences. Darragh avait du mal à croire à cette volonté d’unité entre individus en sachant qu’il avait un nombre incroyable de décès sur la conscience. Combien de familles avait-il divisées au nom de sa croisade ? Est-ce que cela aurait vraiment aidé les Hantsuki s’il était parvenu à ses fins ? Darragh envia le calme et le sang-froid de Kanaeko tandis qu’elle parlait de sa famille et Grindelwald. Il comprenait la peur qui avait dû animer les entrailles de sa mère. Cependant, une question lui vint à l’esprit : est-ce que Mme Hantsuki avait déjà tué ? Bien évidemment, sa fille n’y était pour rien, mais il ne pouvait s’empêcher d’être légèrement mal à l’aise. Et si Grindelwald essayait de reprendre contact avec elle ? S’il avait attendu patiemment qu’on le libère d’Azkaban pour se reforger une armée ? Non, Darragh avait confiance en Dumbledore. Ce dernier n’aurait pas pris d’aussi gros risques en sortant le mage noir de prison.

— Je… Je ne sais pas trop quoi te dire… C’est horrible, je trouve…

Il essayait de se mettre à sa place et ne pouvait s’empêcher de se sentir bouleversé en s’imaginant être déraciné de ses îles irlandaises où il avait toujours vécu. Il ne savait pas trop également se placer par rapport à Kanaeko, essayant de ne pas imaginer ce qu’avait pu faire sa mère sous les ordres de Grindelwald. Malgré ce que venait de dire son amie, il ne se sentait pas du tout rassuré bien au contraire. Il sourit pourtant poliment quand la Serpentard lui témoigna sa confiance en avoua qu’il était le premier à savoir son secret. Il était réellement touché et il garderait son secret jusque dans sa tombe. Pourtant, une foule de questions se précipitait dans sa tête. Des interrogations qu’il ne pouvait contenir plus longtemps. Darragh, d’ordinaire taciturne, pouvait noyer son interlocuteur de questions quand sa curiosité était piquée au vif :

— Mais, ta mère est au courant pour Grindelwald à Poudlard…? Et… tu sais ce qu’elle a pu faire sous ses ordres…? Dumbledore est au courant pour elle ?

Il ne voulait bien évidemment pas la bombarder de questions mais c’était un enthousiasme particulier qui secouait la carcasse devenue massive du jeune homme. Il avait beau être un bon sorcier, il estimait que le savoir était la meilleure des armes et également la meilleure protection. Connaître ce qu’il s’était passé et ce qu’il se passait permettait d’anticiper ce qu’il se passerait. Darragh n’avait aucunement l’intention de nuire à Kanaeko, bien au contraire. Il voulait l’aider, lui donner son soutien également. Bien évidemment, il ne la tenait nullement responsable de ce qu’avait pu faire sa mère. Les enfants n’avaient pas à payer pour les crimes de leurs parents. La curiosité grandissante du jeune Serdaigle finit par faire évaporer son appréhension. Maintenant, il avait juste l’intense désir de savoir. Après tout, Grindelwald était un nom célèbre. Il avait marqué de son empreinte tout un siècle et même ceux à venir, bien que cela fût funeste. Connaître Gellert Grindelwald, c’était comme faire partie du cercle restreint d’amis d’Albus Dumbledore. Des individus déjà légendaires alors qu’ils avaient à peine vécu un peu plus de la moitié d’un siècle.

— Ta mère le connaissait bien ? Elle faisait quoi avec lui ? Elle t’a déjà racontée des choses ou bien jamais ?

La soif de savoir de Darragh semblait inextinguible, noyant la pauvre Kanaeko sous un flot continu de questions peut-être indiscrètes. Étrangement, il ne s’en souciait pas, connaissant le tempérament téméraire de son amie. Il était convaincu qu’elle ne lui en tiendrait pas rigueur. Elle lui faisait suffisamment confiance pour lui avouer son secret, elle comprendrait certainement que rien n’arrêtait la curiosité d’un élève tel que lui. Et s’il ne parvenait pas à tenir sa langue pour poser ses questions, elle avait déjà acquis son silence depuis bien longtemps.

Septembre 1942

Quand elle y repense, parfois, la jeune femme regrette que ses parents aient dû s’éloigner autant de leurs racines d’origine. Ilvermorny l’intéressait, de par son histoire et, surtout, ses origines. Après tout, elle se retrouvait beaucoup en Isolt Sayre… Une descendante de Serpentard qui a totalement renié les idéaux drastiques de sa famille, offrant un jour nouveau aux Sorciers d’Amérique. Néanmoins, les idéaux de son pays de naissance la dégoutaient beaucoup trop, n’autorisant notamment pas le mariage entre moldus et sorciers. Pour un pays qui se voulait symbole de liberté, c’était le comble. Cependant, elle leur reprochait de ne pas être partit au japon pour qu’elle puisse étudier à Mahoutokoro… Cette école était légendaire. Déjà, les sorciers pouvaient commencer leurs études dès sept ans et leurs uniformes, en plus de changer de couleurs selon le niveau ou la bonne tenue de l’élève, étaient particulièrement beaux et semblaient confortables à porter… Evidemment, je ne vais pas en faire toute la liste, mais ce sont là les regrets de Kanaeko. Malgré tout, elle était très bien à Poudlard qui restait une excellente école avec de très bons profs (enfin, de façon générale).

Darragh semblait prit au dépourvu et c’était quelque chose de parfaitement compréhensible. Après tout, Kana venait de lui révéler une part sombre de sa famille. Sans forcément en être une, sa mère avait œuvré pour un mage noir qui visait à renverser le monde. Elle espérait juste que le jeune homme en face d’elle n’allait pas s’en retrouver méfiant. Après tout, la jeune femme est à Serpentard, la maison connue pour avoir abrité la plupart des mages noirs connus en Grande Bretagne. A présent, il avait une raison de plus pour se méfier d’elle… Mais elle comptait sur leur expérience passée pour qu’il comprenne qu’elle n’était en rien une menace, et surement pas pour lui ou pour Poudlard.

Cependant, sa réaction lui fit étirer un léger sourire aux lèvres, sourire plutôt rassurer et tendre qui changeait de son habituel air mesquin. C’était la première fois qu’il se retrouvait aussi intrigué et curieux, mais sans pour autant avoir la moindre attention derrière la tête (ou, du moins, c’était ainsi qu’elle interprétait sa réaction). Au final, elle retrouvait bien là son ami. Il ne la jugeait pas, il voulait simplement savoir et comprendre.

« Une question à la fois… »

Dit-elle en souriant un peu plus, se remettant une mèche en place avant de lui répondre :

« Bien sûr, ma mère est au courant… Mais on ne se parle que peu, elle et moi, et l’on parle encore moins de ce qu’elle a pu faire sous ses ordres. Je pense, néanmoins, qu’elle effectuait des tâches mineurs… Mais si je suis sûr d’une chose, car je vois que c’est là où tu veux en venir, elle n’a jamais tué ou utilisé de sortilège interdit. Peut-être a-t-elle déjà touché à la magie noire, mais j’en doute. Si elle insiste bien sur un truc concernant Grindelwald, c’est qu’il ne l’a jamais obligé à faire quoi que ce soit… Et ma mère est bien des choses, mais ce n’est pas un assassin. »

Et elle disait cela avec un ton totalement détaché. Elle aimait sa mère malgré tout, mais, en toute objectivité, Kana voyait mal cette femme enlever la vie à qui que ce soit… même Vinda Rosier, elle ne la tuerait pas alors qu’il s’agit de la personne que Nelly Hantsuki déteste par-dessus tout. Ce souvenir la fit légèrement sourire alors qu’elle se reculait, s’enfonçant à nouveau dans son siège, regardant dehors, la ville ayant déjà cédée la place à la campagne.

« Albus Dumbledore ?... Je suis persuadée qu’il est au courant. Ce sorcier a des yeux et des oreilles partout. »

Elle fronça les sourcils. Dumbledore était un excellent professeur, si ce n’est le meilleur de l’école. Mais son coté je-sais-tout lui portait sur le système et il s’agissait d’un homme trop gentil pour être sincère… En sa présence, la jeune femme avait la constante impression de sentir son regard perçant fouiller jusqu’à son âme et cela ne lui plaisait pas.

« Mais s’il n’a rien dit à Dippet ou au Ministère, je pense qu’il se doute que je ne suis pas ma mère et que je ne chercherai pas à le faire évader ou quoi !... En tout cas, j’espère qu’il ne me mettra pas sous surveillance. C’est ma dernière année, merde ! J’ai bien envie de finir ma vie d’étudiante en beauté ! »

Elle lui lance un regard espiègle, ayant retrouvé son sourire taquin… Oh oui Darragh, elle espère bien t’entrainer dans quelques-unes de ses aventures folles avant de partir.

Poudlard Express, 1^er Septembre 1942.

Légèrement balloté par les secousses berçantes du Poudlard Express, Darragh gardait son regard azuré sur celui asymétrique de son amie, avide d’en apprendre plus sur cette partie d’elle qu’elle n’avait jamais osé révéler. Savoir que sa mère avait côtoyé Gellert Grindelwald était aussi captivant qu’effrayant. Le mage noir, même s’il avait relativement épargné la Grande-Bretagne, s’était forgé une réputation plus que sombre à travers l’Europe et rares étaient ceux qui n’avaient jamais entendu parler de lui. Malgré cela, Kanaeko lui avoua qu’elle imaginait mal sa mère être une meurtrière. Darragh ne sut dire s’il était soulagé ou étrangement déçu. Comme tout adolescent qui se respecte, l’inconnu et le danger faisaient naître en lui quelques étincelles d’adrénaline, malgré que celles-ci mourussent rapidement, le jeune Serdaigle restant néanmoins un enfant beaucoup trop sage pour oser faire la moindre vague dans son quotidien doux. Cependant, il fut rassuré quand Kanaeko rajouta que son nouveau professeur ne semblait pas avoir forcé Mme Hantsuki à faire les pires méfaits. Darragh n’avait pas assez d’éléments pour savoir s’il s’agissait juste de respect de la part du terrifiant sorcier ou bien juste de dénigrement par rapport au cœur peut-être trop doux de la mère de Kanaeko. Il préféra s’en tenir à la première hypothèse.

De plus, ce que rajouta la Serpentard concernant le professeur Dumbledore rassura naïvement Darragh. Malgré le ton un peu froid de la jeune fille, l’adolescent n’ayant jamais trop compris ce qu’elle reprochait à leur professeur de Métamorphoses, elle disait vrai sur le fait que l’illustre sorcier voyait et entendait tout. Il devait certainement être au courant pour la mère de Kanaeko et, si la décision avait été prise, c’était qu’il était pleinement conscient des risques. Il repensa alors à cette élève de Serdaigle, d’un an son aînée, dont les parents avaient été tués sur ordre de Grindelwald. Il se demandait comment elle réagirait en apprenant qui était son nouveau professeur d’Étude des Runes. L’ambiance dans sa salle commune ne serait certainement pas au beau fixe pour cette année. Il fit une moue et regarda pensivement dehors, écoutant Kanaeko fustiger à l’idée qu’on puisse la surveiller pour l’allégeance passée de sa mère. Cela semblait improbable qu’une élève soit flanquée d’Aurors sans qu’on lui demande son avis. Il voyait mal les professeurs Dippet et Dumbledore infliger cela à Kanaeko ou alors, Darragh ne pourrait s’empêcher d’être profondément déçu par les deux hommes. Déchiré entre l’impatience et l’appréhension, il essaya pourtant de sourire :

— Ne t’en fais pas ! S’ils te collent des Aurors aux fesses, c’est certainement pour que tu te tiennes à carreau pour ta dernière année. Tu as tellement causé de problèmes à toi toute seule que tu pourrais rivaliser avec Adoxus Gwydd ! Je connais ton animosité envers les Gryffondor et plus particulièrement celui-ci, puisqu’il est batteur si je ne me trompe pas, mais s’il te plaît, n’essaye pas de le battre à ce jeu-là.

Il sourit, le regard amusé.

— De plus, je te rappelle que je suis Préfet, je n’hésiterai pas à infliger des sanctions si tu transgresses les règles !

Il leva un doigt comme menaçant, mais son sourire prouvait bien qu’il serait tout aussi inefficace que l’année précédente quand il s’agirait de rappeler à l’ordre son amie. Darragh se demandait encore pourquoi on lui avait donné une telle responsabilité, lui qui était bien incapable d’hausser la voix sur qui que ce soit. Jamais il ne s’était battu, jamais il ne s’était même retrouvé au milieu d’un quelconque conflit. Il les fuyait comme la peste alors les résoudre… De plus, il n’avait guère d’ami. À part Kanaeko, dont le tempérament était parfaitement opposé au sien, il préférait rester seul. C’était notamment pour cela qu’il n’oserait jamais sérieusement sanctionner sa seule amie. Elle était bien trop précieuse à ses yeux pour risquer un désaccord entre eux deux. Il regarda sa montre et soupira tristement.

— D’ici quelques dizaines de minutes, il faudra que j’aille dans le compartiment pour les préfets. La petite réunion de début d’année…

Il n’aimait pas particulièrement cette responsabilité. Lui qui aurait désiré rester tranquille tout le long de sa scolarité, le voilà obligé de gérer des premières années perdues ou des troisièmes années qui se pensaient plus importants qu’ils ne l’étaient vraiment. Avec un peu de chance, il serait remercié et un autre Serdaigle, peut-être plus enthousiaste à cette tâche, prendrait sa place. Il s’en voulait également de laisser Kanaeko seule pendant une partie du trajet. Peut-être rejoindrait-elle le reste de l’équipe de Quidditch de Serpentard, bien qu’elle fût la seule fille dans l’effectif. En réalité, l’envie de sécher cette réunion grotesque lui traversa soudainement l’esprit mais ce serait bien mal entamer l’année et cela ne lui ressemblait pas du tout. Il avait parlé de réputation précédemment, il se devait de conserver la sienne.

— Tu vas continuer le Quidditch cette année ?

Sa question était naïve et ne nécessitait nullement de réponse. La discussion sur Grindelwald étant close et n’osant aborder plus longtemps le sujet de sa mère sur lequel Kanaeko semblait pudique, il préféra essayer autre chose, voulant oublier l’échéance de son premier devoir scolaire de l’année.