L'ombre des grands - Gellert



 
Le Deal du moment :
Pokémon EV06 : où acheter le Bundle Lot ...
Voir le deal


Partagez

L'ombre des grands - Gellert

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Aller à la page : 1, 2, 3  Suivant
Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
Nationalité : Anglaise.
Patronus : Un Phénix.
Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
Reflet du Riséd : Gellert Grindelwald à ses côtés.
Avatar : Jude Law.
Messages : 215
Double-Compte : Belladone le Fragile, Desiderata la Peste, Aurora la Simplette, Minerva la Sévère, Solveig la Dure à Cuire.
Date d'inscription : 14/02/2019

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeLun 26 Juil - 11:03



L'ombre des grands

« Bureau du Professeur de Métamorphoses »

Novembre 1942

Les coupes de cristal étincelaient à la lueur du feu. Sur la nappe immaculée, le moindre petit détail, orchestré par l’incroyable magie et la non moins exceptionnelle affection d’Albus pour son hôte, chatoyait à l’éclat de son ardeur. Le vin français, paisible au creux de sa carafe, faisait scintiller avec paresse sa robe de vermeil à la tiédeur de la flamme. Paisible, il semblait, au creux de son flot tranquille, chanter dans un murmure la fraîcheur de ces côteaux de la Loire dans les tréfonds desquels il trouvait son origine. A cette mélopée chuintante se mêlait les effluves de l’épaisse soupe à l’oignon qui reposait au creux de la soupière de porcelaine. Les tièdes embruns emplissaient la pièce de leur volutes délicats, semblant susurrer la promesse que l’aîné des Dumbledore n’avait pas fait honte à la recette maternelle, concoctée pour la fratrie les dimanches de pluie. Les tranches de pain frottés à l’ail se joignaient aux fragrances délicates, réconfortantes, et, à l’unisson, ces exhalaisons délicieuses fouettaient le cœur plein de mélancolie du plus grand des sorciers, qui semblait se souvenir qu’il avait été enfant, autrefois, il y’avait de cela si longtemps.

Véritable Madeleine de Proust, car soudain l’homme usé d’un chagrin sourd, latent, se rappelait ces dimanches d’hiver au coin du feu, à rire des facéties d’Abelforth de concert avec Ariana, en prenant garde de n’être pas surpris par le regard acéré de l’inflexible Kendra Dumbledore. A revenir chaque Noël de Poudlard, auréolé d’un peu plus de gloire et d’exploits chaque année ; les célébrer devant la sempiternelle dinde aux airelles et les chaussettes de laine que la tricoteuse émérite qu’avait été leur mère leur confectionnait chaque année. Achever sa scolarité sous des vivats qu’aucun élève de Poudlard n’avait jamais atteint, pour voir mourir la fière figure maternelle qu’il avait cru indestructible. Et sous la sombre résignation qui avait abattu ses jeunes épaules, au cœur du sépulcre de la gloire d’un destin étouffé par la responsabilité de patriarche qui avait immolé ses rêves de grandeur, était arrivée l’éclaircie. Tout en boucles blondes et en sourire rebelle, Gellert était arrivé, véritable rayon de Lune au cœur de la nuit noire qu’étaient désormais devenus ses plus augustes desseins.

Alors Albus avait enfin cru trouver un sens à toute cette tragédie. A la mort de sa mère, à la renonciation à toute cette apothéose qui attendait celui à qui l’on promettait le destin du plus grand sorcier en devenir depuis Merlin. C’était lui. C’était pour Gellert que s’étaient effondrées les fondations de la famille Dumbledore, lézardées déjà par la mort du patriarche, écroulées tout à fait au trépas maternel, renvoyant au jeune garçon prometteur et plein de rêves la responsabilité d’une fratrie qu’il n’avait pas voulue. Et puis Gellert était parti, emportant Ariana, et alors Albus n’avait plus compris. Et ce fut à son tour de s’effondrer. Et les quelques larmes versées pour sa famille, pour la forte matriarche, pour la pauvre et triste Ariana, ce ne fut rien, rien dans l’océan impétueux des sanglots versés pour le déchirement d’avoir été abandonné par celui dont la seule irruption semblait avoir donné un sens à sa vie et au monde.

Le monde avait été vidé de son essence, et la Lune avait été seule témoin de la complainte déchirante du garçon abandonné à un univers qui n’avait plus de sens. Il avait pleuré en silence, avait scandé son nom, l’avait imploré et maudit, jusqu’à tomber d’épuisement au cœur de léthargies étourdissantes, assommé plus qu’assoupi ; pour se réveiller dans un soubresaut de panique et de fol espoir, ne pas trouver l’insolence de son sourire, ne pas voir s’entrechoquer à l’azur de ses yeux l’éclat rebelle des siens. Pleurer encore, et un jour, enfin, accepter l’inéluctable. Il ne reviendrait pas. Avaler l’impardonnable, et continuer en silence à parcourir cette vie qui ne serait plus que l’ombre que ce qu’elle promettait d’être.

Et aujourd’hui c’était la maturité d’un homme sage, vieilli, qui avait pardonné à son bourreau qui était devenu celui de tant d’autres. L’avait arraché à une mort certaine, aux crocs béants des Détraqueurs, l’avait sauvé avec toute la douceur de l’amour qui subsistait pour lui, se faisait une loi de le protéger, envers et contre tous, jusqu’à se mettre aux fourneaux de lui-même, lui, le grand Albus Dumbledore, servi par les Elfes de Maison depuis plus de quarante ans. Il s’était bien débrouillé. L’aîné de la fratrie avait imité sans vergogne les dîners dominicaux que confectionnait sa mère. Le rôti sommeillait, paisible, sous la cloche d’argent, à côté des pommes de terre au four et de l’aiguière de sauce brunâtre et onctueuse. Albus ne se souvenait que trop de l’amour du bavarois pour la viande et, lorsque quelques coups discrets furent frappés à la porte, il aurait pu les reconnaître en mille, et il la devinait beaucoup trop bien, cette main blanche fermée, suspendue en l’air, au bon vouloir de l’hôte qui devait daigner l’inviter ;

- Tu peux entrer, c’est ouvert.

Sur le petit divan face au fauteuil, Albus posa le livre avec lequel il avait essayé, en vain, de se distraire. Il se leva, dissimulant l’émotion que lui inspirait chaque fois la haute stature polaire depuis ce dernier échange qui avait vu l’impensable union de ces lèvres séparées trop longtemps, et qui s’était réunies avec une telle aisance qu’aucun d’eux deux ne pouvait plus douter de la complémentarité de leurs âmes sœurs, si jamais doute il y’avait eu. Albus rosit légèrement à cette réminiscence, mais ne se dépara pas de ce sourire mi-taquin, mi-ravi de retrouver l’homme de sa vie, toute une soirée, dans l’intimité de son bureau ;

- Bonsoir Gellert. J’espère que tu ne m’en veux pas, j’ai pris la liberté de t’inviter à dîner plutôt que notre thé coutumier…Peut-être pourrons discuter plus longuement et plus à notre aise. De plus, nous sommes dimanche, et j’avais soif de calme. Mais installe-toi je t’en prie. As-tu faim ?

Albus jeta un coup d’œil à la table rutilante, qui n’attendait plus qu’eux, puis à Gellert. Il était difficile de deviner, sous le sempiternel vêtement noir, si la silhouette de son ancien amant s’était épaissie ou non. Seule l’étreinte, qui les avait déjà par deux fois unis, aurait pu lui faire apprécier à quel point la bonne chère de Poudlard avait aidé à son rétablissement. Albus rosit légèrement une fois encore à ce souvenir, mais, toujours le sourire aux lèvres à l’idée d’une simple soirée paisible avec Gellert, s’installa face à lui et remplit leurs deux coupes de vin. Avec un sourire, ses doigts vinrent s’emparer de l’assiette de son ancien amant, tandis que, par un mouvement de sa baguette, la louche vint puiser au creux de la soupière la soupe épaisse pour en remplir le récipient qu’Albus déposa de nouveau devant le mage Autrichien ;

- J’espère que tu aimes la soupe à l’oignon. C’est la recette de ma mère, mais je n’ai pas la prétention de la surpasser, ni même de l’égaler. Alors dis-moi, comment s’est passé ta semaine ?

L’enthousiasme d’Albus dénotait parfois avec cette grande sagesse, frisait presque l’exultation et était en grande partie responsable de cette réputation de folie qui le précédait. Et celui qui se moquait comme d’une guigne des racontars à son sujet se prenait de faiblesse face au seul homme qui foulait cette terre qui avait la capacité de le faire vaciller. D’ordinaire il aurait glissé un plaid sur ses genoux ou ses épaules, mais avait préféré attisé un feu plus ronflant et garder sa veste, plutôt que donner à Gellert l’image d’un vieil homme frileux et fragile. Alors, de même, Albus se contint malgré tout, pour les mêmes raisons. Désirait-il vraiment que son ancien amant ne découvre en lui l’image d’un vieux fou solitaire, emmuré depuis trop longtemps dans son chagrin et sa misère affective ? Non, il fallait garder la tête haute, pour ne pas paraître vulnérable, pour ne paraître ridicule ou pathétique devant le seul et unique homme dont l’avis ait jamais réellement compté, et qu’il eut jamais aimé.


©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
Admin
Âge : 59 ans
Sang : Sang-Mêlé
Nationalité : Austro-Hongrois
Patronus : Phénix
Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
Reflet du Riséd : Albus Dumbledore
Baguette : Aucune, confisquée par le Ministère
Avatar : Johnny Depp
Messages : 897
Double-Compte : Darragh O'Sadhbh et Morgan DeWitt
Date d'inscription : 14/02/2019
Âge IRL : 27

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeLun 2 Aoû - 20:06



L'Ombre des Grands

« ICH LIEBE DICH, ICH BRAUCHE DICH »

Bureau du Professeur de Métamorphoses, Novembre 1942.

Les quelques jours qui venaient de passer semblaient être un doux rêve. Grindelwald semblait avoir perdu un peu plus pied avec la réalité, ignorant si ces rencontres fortuites avec Dumbledore dans les endroits isolés du château était seulement l’imagination de son esprit endormi ou simplement un mirage, une hallucination. Parfois, il espérait qu’en se retrouvant avec pour seule compagnie les armures décoratives des couloirs, la silhouette plus vraie que nature d’Albus sortirait, au détour d’un couloir. Mais il avait erré durant des nuits, avec pour seul souvenir, ce contact doux et chaud de ses lèvres contre les siennes, incapables de savoir s’il était récent ou s’il ne s’agissait que d’une réminiscence subite d’un passé trop lointain. Peu importait la réponse. Peu importait de savoir s’il nageait en pleine rêve ou en pleine démence. Ces quelques rares instants passés avec Dumbledore le hantait d’une agréable plénitude qui semblait le narguer. Mais il n’y avait rien eu après ce petit-déjeuner. Seulement quelques regards, quelques sourires timides et pudiques sans que quiconque puisse dire s’il s’était vraiment passé quelque chose ou pas. Au début, Gellert en avait eu la certitude. Puis un doute s’était emparé de lui. Jamais il n’en avait parlé à Albus, de peur d’être pris pour un fou.

Alors il s’était tu, avait fait comme si de rien n’était, ne voulant pas mettre mal à l’aise la source matérielle de ses hallucinations. Des sourires discrets, des regards furtifs, rien ne semblait indiquer que leur timide mais pourtant franc baiser eût été réel. Puis finalement, un jour, il avait reçu cette invitation invraisemblable. Une proposition à dîner, en tête en tête, loin de la brailleuse marmaille, le brouhaha constant des adolescents excités de se raconter leur journée. Pendant l’ombre d’un instant, il s’en était voulu pour Belladone. Ce dernier allait en effet devoir passer le temps du repas avec pour seule compagnie leur collègue le professeur Vargas. Avec un peu de chance, peut-être n’aurait-elle pas autant bu que cela ce soir-là. Mais Gellert n’avait hésité qu’une seconde avant d’accepter l’invitation. L’occasion était trop belle. Nerveux et excité, il avait passé la moitié de la semaine à choisir la tenue dont il s’affublerait pour paraître au goût des yeux azurés d’Albus… s’il avait cependant la certitude qu’il ne s’agisse pas d’un nouveau tour potentiel de son esprit. Mais s’il s’agissait à nouveau d’une hallucination, alors il y succomberait. Peut-être était-ce un effet secondaire du Miroir du Riséd. Albus n’avait-il pas dit que certains devenaient fous en le regardant ?

Cependant, il savait que tout cela était bien vrai. Qu’il n’y avait aucun mirage, aucun fantôme du passé mais seulement un amour pur et fort qui renaissait tel un phénix des cendres du brasier qu’avait allumé Gellert. Une nouvelle fois, Grindelwald ne sûrement pas assumer cette idylle qui venait reprendre sa place. Une nouvelle fois, il préférait cacher ses yeux de cette vérité criante qui martyrisait son cœur à chaque fois que ses yeux hétérochromes croisaient ceux d’Albus. Tandis qu’il ajustait sa tenue, il se trouvait ridicule de se voiler ainsi la face au sujet des sentiments qui l’animaient. Ces mensonges à lui-même avaient eu des conséquences bien trop catastrophiques pour qu’ils soient répétés à nouveau. Alors cette fois-ci, il assumerait. C’était pour cela, sûrement qu’il s’apprêtait avec le plus soin possible : fidèle à lui-même, il avait opté pour un costume noir, des chaussures jusqu’à la chemise. Seule sa lavallière était d’un blanc immaculé. Le choix de ses vêtements était limité, n’ayant pas une grade robe aussi fournie qu’il aurait voulu, même si elle respectait ses goûts… et ceux d’Albus, indirectement. Il ajusta les derniers détails, replaça une mèche de cheveux et enleva tous les plis indésirables sur sa tenue, vérifia son haleine, son parfum, tout. Perfectionniste, il n’avait rien laissé au hasard.

Peut-être en faisait-il trop. Mais Albus n’ignorait certainement pas que Gellert était un homme passionné qui ne faisait jamais les choses à moitié. Et là, pour cet instant privilégié en tête à tête, il était hors de question de négliger quoique ce soit. Il sortit alors de ses quartiers et se dirigea vers ceux d’Albus. Les Aurors avaient mis au courant, aussi, ils avaient pour ordre de le laisser quant le mage noir serait aux mains de Dumbledore. Grindelwald frappa quelques coups sur la porte, sûrement de la même façon que des décennies auparavant, sur la vitre de la chambre d’Albus, lors de nuits estivales. Impatient de retrouver cet homme qui le hantait depuis toujours, il ouvrit la porte avant qu’on vienne lui ouvrir et se déroba à la vue des Aurors. Albus se tenait là, auguste et royal, se levant avec grâce de son divan. Gellert s’était figé, comme pétrifié par cette aura que semblait dégager Dumbledore ce soir-là. Immobile mais restant digne, il ne put cependant retirer ces yeux braqués éhontément sur l’homme à qui appartenait son cœur. Ce fut sa voix qui brisa l’instant d’absence du mage noir et le ramena avec lui. Gellert ne put que lui sourire.

— Bonsoir Albus. C’est une très bonne idée. Je meurs de faim.

Ce qui n’était pas tout à fait vrai. En effet, une certaine nervosité ainsi qu’une excitation puérile nouaient son estomac. Se retrouver ainsi avec Albus semblait être un nouveau rêve éveillé et pourtant il ne dormait pas. Il ne dormait plus depuis qu’il avait reçu l’invitation. Enthousiaste et ailleurs, il n’osa s’asseoir, regardant l’auguste sorcier lui avouer qu’il avait cuisiner la soupe à l’oignon qu’il était en train de lui servir puis le déroulement de sa semaine. Interdit, Gellert mit un temps à répondre, toujours debout, à regarder le liquide brun et épais s’écouler de la louche enchantée. Il avait là la preuve qu’il n’était pas dans un rêve. En effet, Albus avait cette douce manie pudique et prudente de parler de la pluie et du beau temps pour se cacher. S’il Gellert avait été dans un rêve, le professeur de Métamorphoses se serait montré certainement plus entreprenant. Mais il eut un sourire doux et affectueux. Le rédimé aimait cette timidité. Et même s’il lui avait déjà raconté chaque journée de sa semaine, il ne voulut mettre Albus dans l’embarras. Prenant alors l’assiette de Dumbledore duquel il s’approcha pour aider au service, il dit de sa voix grave et posée :

— J’adore la soupe à l’oignon. Ne t’en fais pas pour le menu, je suis sûr que je vais aimer.

Il prit son assiette pour tendre celle d’Albus à ce dernier avant de poursuivre :

— Quant à ma semaine et bien, je vais dire pluvieuse. En effet, le Soleil a été assez timide je trouve. Je ne suis cependant pas déçu de la météo écossaise qui est fidèle à sa réputation.

Il posa alors les assiettes sur la table et tira celle d’Albus avec un sourire avant d’inviter ce dernier à s’asseoir. Puis, finalement, il s’installa à sa place, le regard rivé sur l’azur de l’homme qui avait marqué sa vie, les flammes dans ses iris.

— Et la tienne ?

Les vapeurs de la soupe le mirent en appétit instantanément. Gellert sentit alors un étrange dilemme à l’intérieur de lui-même : ses yeux ne voulaient pas quitter Albus mais son estomac semblait se délier et voulait être rassasié. Mais pour cela, il devrait lâcher ce regard taquin qu’il aimait tant le temps de quelques secondes et cela était inconcevable.
©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
Nationalité : Anglaise.
Patronus : Un Phénix.
Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
Reflet du Riséd : Gellert Grindelwald à ses côtés.
Avatar : Jude Law.
Messages : 215
Double-Compte : Belladone le Fragile, Desiderata la Peste, Aurora la Simplette, Minerva la Sévère, Solveig la Dure à Cuire.
Date d'inscription : 14/02/2019

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeJeu 5 Aoû - 10:29



L'ombre des grands

« Bureau du Professeur de Métamorphoses »

Novembre 1942

Et quand le filament d’air froid vint gifler la tiédeur de boudoir du bureau, Albus sut que cela n’avait pas été qu'un rêve. Quand la fraîcheur humide de la pierre grisâtre vint faire vaciller le flegme lascif des flammes roussâtres qui s’égayaient au creux de l’âtre ronflant, le plus grand sorcier du monde comprit qu’il n’avait pas tout à fait sombré dans la folie. Pas encore. Dans l’auguste beauté princière qui amenait avec lui les frimas de l’automne, il y’avait là cette preuve inexplicable, mais sacrée, immuable ; l’aveu mutique de leur émerveillement commun, face à ce qu’ils n’auraient jamais plus osé espérer, tant le fossé qui les avaient séparés avait paru infranchissable. Et rien, pourtant, n’avait pu empêcher l’union de ces deux âmes jamais vraiment arrachées l’une à l’autre. Le temps, l’espace, le monceau de cadavres, le sang sur les mains et la douleur infligée au jeune garçon orphelin avaient été balayées d’un revers dédaigneux de la main, quand l’évidence s’était révélée à leurs yeux qui avaient toujours su. Scellée dans un baiser qui n’avait eu besoin ni de mots ni de préambules. Le grand Albus Dumbledore avait retrouvé une paix dont il avait fait le deuil, sur la fraîcheur assassine des lèvres du plus grand mage noir de son époque. Il avait eu beau clamer à ses ouailles et au monde qu’il aurait la vie de celui qui s’abreuvait à l’intarissable source de ses lèvres trop froides, il l’avait vue, la larme unique, étinceler à la blancheur des cils du formidable Occlumens. Il l’avait senti frémir au creux de la tiédeur de ses bras, avait recueilli avec la plus exquise tendresse la fragilité de sa taille trop mince au creux de sa paume bienheureuse.

L’heure n’était plus au mensonge ou à l’orgueil. Ces deux instruments du plus épouvantable gâchis de leur destin n’avaient-ils pas été l’autel sur lesquels les rêves de gloire, la famille et le cœur d’Albus avaient été sacrifiés ? Avaient-ils encore ne serait-ce qu’une seconde à perdre à de telles avanies ? Le sourire qui étira les lèvres mangées de barbe cuivrée confirma cette théorie selon laquelle se priver de la moindre miette du plaisir de la présence de Gellert à ses côtés relevait désormais de l’hérésie. Aussi l’enthousiasme du grand Gellert Grindelwald à l’idée d’un dîner intimiste en sa compagnie le fit sourire un peu plus, de ces sourires mêlant taquinerie et tendresse dont il avait le secret. La lueur de leurs sourires s’entremêla, dans la douceur éclatante d’une lumière divine, joie tendre à l’unisson de laquelle étincelait l’affection commune des deux puissances qui s’entrechoquaient, et qui, à elles seules, auraient pu détruire le monde. Le liquide brunâtre s’épancha au creux des assiettes de porcelaine que Gellert tendait avec cette exquise galanterie, innée, princière, qui l’avait toujours caractérisé et qui avait contribué à faire tomber à ses pieds le jeune Albus Dumbledore en devenir, qui s’évertuait à surveiller l’écoulement de la soupe au creux des assiettes pour dissimuler cette pudibonderie qui l’animait face à celui qui était resté, envers et contre tout, l’unique homme de sa vie ;

- C’est très aimable à toi, mais je reste quelque peu nerveux malgré tout. Voilà des années que je n’ai pas eu à cuisiner. Je suis devenu une sorte d’ermite, habitué à être dorloté par la merveilleuse chère des Elfes de Poudlard.

La grâce de Gellert avait des allures de chef d’orchestre. Quand les assiettes furent reposées avec la délicatesse grâcile de ses doigts, le geste semblait millimétré, orchestré avec ce soin particulier qui, paradoxalement, semblait une seconde nature chez celui qui avait semblé un prince venu de contrées lointaines, au premier regard émerveillé que le jeune orphelin avait posé sur lui. Même son insolence et ses manières taquines ne manquaient pas d’une certaine finesse. Et le rire clair d’Albus s’égrena à la raillerie du climat écossais, pas vraiment surpris qu’après quatre décennies, l’unique amour de son existence parvienne encore à l’amuser avec tant d’aisance. Albus se risqua à un coup d’œil, ses joues rosissant sous sa barbe à mesure que sa contemplation lui révélait l’évidence. Comme il était beau ! Il semblait avoir apporté un soin tout particulier à son apparence. A la lavallière savamment nouée qui ne seyait qu’à lui, à son sempiternel costume noir impeccable, sans même l’ombre d’un pli, aux effluves de cèdre qui enivraient l’esprit et les sens de ce pauvre Albus, au moindre des gestes du mage noir repenti. Et elles auraient pu lui faire perdre complètement la tête, ces effluves, lorsque, dans un de ces gestes d’une exquise galanterie qui faisait de lui ce prince glorieux que le paysan anglais avait tant aimé, Gellert tira la chaise de son hôte pour qu’il s’y installe. Et Albus y posa son séant, déjà conquis, tandis que pour dissimuler son embarras, la réponse à sa taquinerie semblait l’excuse parfaite ;

- En effet. Je ne te ferai pas l’offense de te mentir en te promettant des étés radieux. Mais c’est aussi ce qui fait le charme de Poudlard et de cette contrée. Ceci dit, je ne m’inquiète pas pour ton adaptation. Pour un Autrichien originaire des Alpes, qui a passé sa scolarité à Durmstrang, les frimas de l’Ecosse doivent paraître bien cléments.

Nouveau sourire taquin, tandis qu’Albus, pour dissimuler sa pudeur, s’évertuer à plonger délicatement sa cuillère en argent au creux de l’épaisse soupe qui reposait au creux de son assiette, faisant mine de s’intéresser aux vagues remous qu’il créait, tandis que Gellert, toujours dans son exquise politesse, lui rétorquait la question, et que cette fois-ci il fut contraint à lever l’azur de ses yeux sur la glaciale beauté de l’homme de sa vie ;

- Oh eh bien, assez bonne, je dois dire. Plutôt tranquille. J’ai pris le thé avec Belladone mardi, et nous avons commencé à étudier les Animagi avec les troisièmes années. Il est très amusant de constater à quel point le concept les captive, mais comme la complexité du procédé refroidit leur enthousiasme. Mais j’ai toujours une certaine nostalgie de mon ancien poste à cette période de l’année. J’apprenais aux élèves à se défendre contre les Epouvantard. Je trouvais absolument fascinant de les voir se confronter à leur plus grande peur.

Albus eut un sourire embarrassé, baissant le nez sur sa soupe. Le vieil ermite solitaire, face à l’homme de sa vie, parlait soudain beaucoup trop. Jeune homme volubile et surexcité devant celui dont le sourire l’avait fait tomber à ses pieds, il semblait n’avoir pas vieilli, soudain, abreuvé à la fontaine de Jouvence qu’était le regard insolent et taquin de son seul et unique amour. Avec une certaine appréhension, et pour dissimuler sa gêne, Albus porta à ses lèvres une cuillère emplie de la soupe concoctée par ses soins, agréablement surpris. Si elle ne pouvait guère rivaliser avec celle de la farouche Kendra Dumbledore, il n’avait pas en rougir, toutefois, et Gellert ne serait pas contraint d’avaler, la gorge serrée un potage infâme pour conserver sa réputation de gentleman poli. Une deuxième cuillère, et l’esprit d’Albus commençait à s’extirper de sa léthargie nerveuse ;

- Oh mais j’y pense, je sais que tu as pris le thé avec Minerva cette semaine. J’imagine que cela s’est bien passé, puisqu’elle ne m’a pas fait de retour vindicatif. Je crois que tu as pu constater qu’elle n’avait pas sa langue dans sa poche, n’est-ce pas ?

Albus eut un sourire à l’évocation de cet étrange duo, ne s’imaginant que trop bien le sourire pincé de Minerva et de ses légendaires tritons au gingembre auxquels le pauvre Gellert Grindelwald n’avait pas dû échapper. Cette fois-ci, Albus dissimula un sourire devenu franchement amusé au creux de la coupe de cristal qui recueillait le vin servi au préalable. En profitant pour y tremper ses lèvres mangées de barbe, sa fraîche légèreté le rassura. Il était exquis. Avant de trouver la hardiesse de plonger de nouveau ses yeux d’azur taquin au creux de l’insolence princière de ceux du grand Gellert Grindelwald, il y plongea une nouvelle fois les lèvres, avec prudence. Hormis un verre d’excellent hydromel de temps à autres, il n’était accoutumé à la boisson. Et l’émotion couplée à la fatigue auraient tôt fait d’enivrer le grand Albus Dumbledore, peut-être plus vite encore que les effluves de cèdre et le sourire qui s’exhalait de la trop frappante beauté de son unique amant.


©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
Admin
Âge : 59 ans
Sang : Sang-Mêlé
Nationalité : Austro-Hongrois
Patronus : Phénix
Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
Reflet du Riséd : Albus Dumbledore
Baguette : Aucune, confisquée par le Ministère
Avatar : Johnny Depp
Messages : 897
Double-Compte : Darragh O'Sadhbh et Morgan DeWitt
Date d'inscription : 14/02/2019
Âge IRL : 27

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeDim 8 Aoû - 12:56



L'Ombre des Grands

« ICH LIEBE DICH, ICH BRAUCHE DICH »

Bureau du Professeur de Métamorphoses, Novembre 1942.

Albus semblait avoir une certaine modestie dans le regard. Quelque chose que Gellert ne lui connaissait étrangement pas. Pourtant, cela avait un côté indéniablement attendrissant et presque un brin provocateur. L’espiègle Grindelwald voyait son tempérament reprendre le dessus, une envie malicieuse de taquiner cet homme qu’il avait connu par cœur. Mais qu’en était-il désormais ? Cet homme qu’il pensait avoir retrouvé était-il toujours le même adolescent tacite mais aussi arrogant que lui ? Derrière ses yeux dont l’azur était toujours aussi radieux que celui du ciel de l’été, n’avait-il pas eu quelques nuages sombres ? Gellert avait une vague idée de la douleur qu’il avait pu infliger à son ancien amant mais jamais il n’avait songé à la nature véritable de la déchirure qu’avait ressenti Dumbledore. Et peut-être valait-il mieux qu’il ne le sache jamais. Aveuglément, le bourreau se disait qu’Albus avait toujours eu l’ego nécessaire pour rebondir. Que son amour propre démesuré ferait cicatriser cette peine de cœur juvénile. Celle de Grindelwald, véritable automutilation, l’avait rendu fou. Fou d’une douleur qu’il n’était pas parvenu à noyer que dans une haine profonde et destructrice. Il avait si ardemment désiré sa mort que la honte lui étranglait la gorge à chaque fois que ses yeux dichotomiques se poser sur cette silhouette qu’il avait tant rêvé.

Oui, Albus avait changé. Et si les souvenirs du mage noir s’étaient forcément érodés après quarante ans, il trouvait que le seul homme qui ait importé dans sa vie s’était bonifié avec le temps. D’adolescent plein de promesses et aux ambitions dévorantes, il était devenu ce sorcier vénérable, sage, bienveillant, au regard légèrement arrogant et suffisant. Mais Gellert ne pouvait se mentir, il aimait cela. Chez une autre personne, il n’aurait pas hésité à remettre à sa place son interlocuteur de la plus froide des manières mais Albus, au contraire, le faisait fondre. Sa noblesse rayonnante lui donnait envie de courber l’échine face à lui, chose que le grand et terrible Gellert Grindelwald ne s’était jamais rabaissé à faire. Si, dans sa jeunesse, il s’était vaguement convaincu qu’Albus n’était qu’un adolescent épris de l’exotique rebelle qu’il pensait être, il se rendait compte maintenant que c’était bien la main de l’illustre professeur qui tenait le sien. Désormais, le mage noir n’était plus cet électron libre qui se pensait dénué de toute attache. Cet homme qui venait de s’asseoir sur la chaise qu’il lui avait présenté était bien le seul à qui il porterait allégeance et jurerait fidélité et loyauté. Le seul qui passerait après son égoïste personne. Le seul qui pouvait voir ses faiblesses, ses craintes et ce, malgré ses sourires insolents de façade. Albus était le seul qui pouvait percer ses dons innés d’Occlumens et lire en lui comme dans un livre ouvert. Mais cela ne le dérangeait pas. Cela ne le dérangeait plus. Son incarcération lui avait permis d’entrevoir certaines choses, d’en ressentir d’autres. Revoir Albus, sentir sa chaleur l’envelopper, ses lèvres l’embrasser, lui avait fait attendre une sorte de paix intérieure. Son regard perdu dans les iris azurés de ses yeux, il ne ressentait plus aucune colère.

— Je suis sûr que ce sera très bon, Albus. Je ne t’imaginais pas douter de toi ainsi. Cela doit bien être la première fois…

Son sourire taquin avait retrouvé ses lèvres tandis qu’il ne lâchait plus ce regard plus grisant que n’importe quelle ivresse. Sans plus attendre, Gellert s’installa en face de son hôte, l’écoutant religieusement parler de la pluie et du beau temps. Il était évident que cela trahissait une grande pudeur entre les anciens amants. Aucun des deux ne semblaient vouloir échanger ce qu’ils avaient sur le cœur et encore moins le dire ouvertement. Ils étaient tous les deux trop fiers pour oser confier l’évidence de leurs sentiments, la pureté de leur amour indicible qui semblait avoir résisté aux affres de la colère vindicative et viscérale de Grindelwald. Le brasier de la haine du mage noir avait fait bon nombre de dégâts, mais leur amour n’en avait été pas même noirci. Du moins, Grindelwald le pensait-il. Sinon, pourquoi Dumbledore l’aurait-il invité ici, à partager un dîner seul avec lui ? Certaines réminiscences du chemin obscur qu’il avait pris il y avait de cela quarante ans refirent surface tandis qu’il regardait la surface brune de la soupe dans son assiette. Et si Dumbledore voulait se venger et le tuer dans un moment où il était le plus vulnérable ? Mais cette idée saugrenue s’envola de son esprit aussi rapidement que son apparition fugace tandis qu’il prit une cuillerée de soupe.

— Elle est délicieuse, Albus.

Et il était sincère. Souriant toujours, il écouta à nouveau l’homme qui l’avait ramené à la vie lui raconter sa semaine. Il ne l’interrompit pas lorsqu’il parla des Animagi, ne contesta pas non plus quand il commenta la difficulté et la complexité du processus de transformation. Gellert eut une sourire : son arrogance à lui l’avait toujours défendu de s’abaisser à garder une feuille de mandragore dans la bouche pendant un mois. De plus, il n’avait pas souvenir que cela eusse un très bon goût. Albus évoqua alors son ancien poste de professeur de Défense Contre les Forces du Mal ainsi que les épouvantards. Le regard de Grindelwald eut comme un léger voile obscur dessus bien qu’un sourire paisible étirait légèrement ses lèvres. Oserait-il avouer son plus récent épouvantard à Dumbledore ? Lui confier sa plus grande peur que seul le jeune et improbable Belladone Raven connaissait ? Il l’ignorait et préféra manger sa soupe, l’appétit se faisant timide. Rapidement cependant, Albus enchaîna sur Minerva. Le sourire de Grindelwald s’élargit, reconnaissant là cette technique de l’illustre professeur d’enchaîner les sujets de conversation comme pour esquiver les plus pesants (mais néanmoins les plus intéressants). Pourtant, poli et jouant le jeu, Gellert dit :

— Effectivement, le Professeur McGonagall fait preuve d’une franchise brave, voire presque imprudente. De plus, je l’ai trouvée fière et presque effrontée de me demander de surveiller ses retenues, ne pouvant, selon ses dires, avoir le temps à cause de son emploi du temps. Nous dispensons pourtant le même nombre d’heures de cours, j’ai donc été naturellement surpris, surtout pour une matière comme l’arithmancie qui ne se prête pas à l’interprétation.

Il sourit et but une nouvelle gorgée de la soupe agréablement brûlante.

— Néanmoins, elle m’a proposé une partie échec que j’ai accepté en guise d’échange. Cela fut une belle partie, qu’elle n’a malheureusement pas remporté. Je n’ai pas perdu la main, apparemment.

Il sourit doucement, le regard pensif rivé sur sa soupe. Presque nerveusement, il fit courir le dos de sa cuillère sur la surface, jouant ainsi avec les ondes et les reflets. Finalement, dans un nouvel élan d’audace, une paix sincère affichée sur le visage, un calme profond dans son regard, il confia :

— Tu as parlé d’épouvantard tout à l’heure… Et bien j’ai eu l’occasion de voir le mien récemment, dans la salle de Belladone. Il a changé plusieurs fois, je te l’avoue mais l’une de ses apparences était exactement la même que ce que je voyais dans le Miroir. Cela dit, cela a dû changer avec le temps.

Souriant toujours avec douceur, il reporta son regard dans les yeux d’Albus. Quelle forme prendrait son épouvantard désormais ? L’amour de Dumbledore, il n’en avait plus peur, il l’embrassait avec joie, l’accueillait contre lui avec une paix indéniable. Mais peut-être prendrait-il l’apparence de ce qu’il l’avait poussé à se rendre et tout arrêter : un éclair vert et la chute dans le vide de Dumbledore depuis la Tour d’Astronomie. Probablement. Oui, c’était même sûr, cette vision qui ne cessait de le tourmenter depuis des années. Il n’en parlerait pourtant pas à Albus, connaissant l’opinion de celui-ci sur le Troisième Œil et ses pouvoirs. Pourtant, c’était ceci qui avait poussé ces deux âmes sœurs à se retrouver enfin, à partager cette délicieuse soupe à l’oignon, seuls et les joues rouges d’une timidité paralysante et d’un désir brûlant.
©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
Nationalité : Anglaise.
Patronus : Un Phénix.
Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
Reflet du Riséd : Gellert Grindelwald à ses côtés.
Avatar : Jude Law.
Messages : 215
Double-Compte : Belladone le Fragile, Desiderata la Peste, Aurora la Simplette, Minerva la Sévère, Solveig la Dure à Cuire.
Date d'inscription : 14/02/2019

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeMar 10 Aoû - 12:11



L'ombre des grands

« Bureau du Professeur de Métamorphoses »

Novembre 1942

Ce sourire, toujours. Cet éclat d’impudence qui poudroie sur la neige impassible des lèvres trop froides. Et Albus s’y sent déjà fondre, au halo pâle de ce soleil d’hiver, qui resplendit comme nul autre sur l’albâtre du visage assassin, devenu immaculé par les crimes, dont il se surprenait à louer la beauté comme au premier jour. Le vieil homme mélancolique et fantasque qu’Albus Dumbledore semblait être devenu se découvrait toujours le pied au bord du précipice ; et, à la moindre lueur de ce sourire qui avait brisé sa vie, il se sentait tomber de nouveau aux pieds du despote le plus terrible de toute son ère, qui avait clamé haut et fort, des années durant, qu’il finirait par lui arracher la vie. Comme si son cœur piétiné par les pas assourdissants de l’auguste mage noir en devenir n’avait pas suffi. Comme si voir expirer de sa main celui qui s’était offert à ses bras, dépouillé de toutes ces armes qui avaient fait de lui le sorcier le plus prometteur de Poudlard, lui aurait offert là la consécration suprême, comme l’achèvement de l’opprobre jeté sur la malheureuse famille des Dumbledore.

Et pourtant ! Le grand Gellert Grindelwald avait eu beau s’acharner, immoler sur l’autel de sa gloire la passion qu’avait été leur indicible amour, éparpiller ses braises aux quatre vents de son épopée criminelle, cracher sur les cendres de ce qui restait de son sacrifice ; il n’était pas même parvenu à en étioler l’inextinguible souffle ; tant et si bien que malgré les avanies, le sang, les larmes et les affronts, aujourd’hui il dînait à la table du plus grand de ses martyrs, qui se sentait courber l’échine, encore, face à la plus grande des armes du mage noir. Et son sourire malicieux dont il avait le secret se mêla au sien, unisson de ces deux inébranlables forces de la nature dont la lueur s’entrechoquait dans le fracas d’un choc de titans ;

- Je te suggère d’en profiter. Il n’y a que peu de domaines qui font vaciller ma confiance en moi, hormis la cuisine et…peut-être le patin à glace, je n’y entends absolument rien. C’est un sport Moldu, cela doit se pratiquer par chez toi. Les conditions climatiques s’y prêtent.

Le sourire taquin s’élargit, à s’imaginer soudain le grand Gellert Grindelwald glissant sur un des lacs gelés des Alpes d’Autriche, sa longue silhouette noire se découpant sur les infinies immaculées des neiges hivernales. Et pourtant, même chaussé de ces étranges souliers aux lames destinées à fendre la glace, Albus ne pouvait se l’imaginer autrement que pétri de cette grâce princière qui mouvait le moindre de ses gestes en toute circonstance. Cette galanterie teintée d’une nonchalance un brin impudente aussi, de celle qu’il avait toujours eu au fond du regard, quand les étoiles de ces yeux qui n’appartenaient qu’à lui s’entrechoquaient au ciel d’été des prunelles d’Albus, qui rosit légèrement sous le compliment ;

- Merci Gellert.

Albus inclina doucement la tête d’un air de modestie feinte, la malice de son sourire brillant au fond des yeux d’azur qui plongeaient sans honte dans le regard de lune non moins facétieux de son seul et unique amant. Empreint de gestes lents, tout à l’admiration ébahie de se retrouver face à l’homme de sa vie, dont il n’avait pu que rêver les traits durant quatre décennies, Albus mangeait avec précaution cette soupe de son cru qui se révélait une indéniable réussite, reposant sa cuillère pour avaler une gorgée du vin doucereux tandis que Gellert jouait le jeu et répliquait à ses litanies sur la pluie et le beau temps sur le ton de la conversation. Et, à la description de son entrevue avec Minerva, il eut un sourire franchement amusé cette fois-ci, ne s’imaginant que trop bien la répulsion bravache que la fière sorcière avait dû se faire une joie d’ériger à la face du non moins orgueilleux Gellert Grindelwald. Un sourire de plus, parce que la confrontation ne semblait pas s’être achevée sous les plus mauvais auspices, et parce qu’il connaissait trop le caractère acariâtre de sa chère amie pour s’imaginer sans peine les étincelles s’extirper de son chignon trop serré, face à l’insolence du mage noir repenti ;

- Ce qu’elle a sans doute omis de te révéler, c’est qu’au-delà de l’Arithmancie, elle corrige mes copies et organise parfois le déroulement de mes cours. Tu n’ignores pas qu’il est officieusement admis que je devienne Directeur de Poudlard par la suite, aussi je prépare Minerva à être mon adjointe, et à occuper le poste de Professeur de Métamorphoses, qui sera vacant. Et elle est en effet très brave et très fière, mais ne la sous-estime pas. C’est une redoutable sorcière.

Albus sourit un peu plus d’un air affectueux, amusé à l’image d’une Minerva aux lèvres pincées d’avoir à avaler une défaite face à Grindelwald, fut-ce aux échecs. Peut-être l’austère et fière Professeure était-elle la plus véritable amie, et la plus profonde affection qui ait comblé ce vide sans fond que Gellert avait laissé derrière lui. Aussi, c’est avec une certaine tendresse qu’il accueillait ces prémices de relation professionnelle avec l’homme de sa vie, qui, étrangement et à son grand plaisir, ne semblait pas si mal parti que cela.

La douce langueur d’échanges insouciants, sur fond de la symphonie crépitante d’un feu, lascif, qui ronronnait derrière eux s’acheva dans le sombre discours de Gellert et des réminiscences de son Epouvantard, qu’il lui avouait avoir vu en compagnie de Belladone. Albus fronça les sourcils, sérieusement intrigué par le phénomène d’un Epouvantard qui change d’aspect deux à trois fois instantanément. Si la plus grande peur de chacun pouvait, certes, changer tout au long de son existence, il était fascinant que celui de Gellert ne sache réellement laquelle de ses plus grandes peurs choisir.

L’intérêt grandissant d’Albus, pourtant, fut coupé net dans son élan. La douleur, encore. Indicible, étouffante comme un coup de poing au creux du ventre, lancinante comme un poignard au fond du cœur. Gellert n’avait pas voulu lui faire mal. De cela, il était certain. Il savait aussi que les raisons de cet effroi irraisonné de l’affection ne trouvaient pas leurs origines dans les tréfonds de leur amour, mais dans quelque chose de plus ancré en l’âme de Gellert, dans sa nature profonde qui s’effarouchait d’aimer, quand Albus, jamais, n’en avait eu honte ou la moindre crainte. Et lui avait toujours su, dans sa nature tendre, instinctif, ô combien le fier et prétendu impassible Gellert Grindelwald avait besoin de sa douceur ineffable, plus que n’importe qui peut être. Il s’était évertué à la lui donner à plein bras, comme une offrande sacrée jetée au vent, et, si elle n’avait pas suffi la première fois, aujourd’hui il redoublerait d’efforts ; il lui ouvrirait de nouveau les bras, avec tendresse et lenteur, et quand Gellert verrait qu’il n’a rien à craindre de lui, alors il les refermera sur sa trop mince silhouette, lui murmurera que la lutte est inutile, qu’ils s’aiment trop, qu’il le protégerait désormais.

Et la croisade commençait aujourd’hui, face aux peurs trop profondes de Gellert, de celles que peut-être il ne pourrait jamais guérir, mais qu’il voulait panser de toute la force de cette passion muée avec le temps en un amour indéfectible, tendre, profond, à la pureté inaltérable d’une de ses sources alpines qui s’égayaient dans les tréfonds de ses contrées natales. Avec une douceur infinie, Albus posa sa cuillère. Et c’est avec une tendresse plus grande encore que ses yeux plongèrent dans ceux de son ancien amant, et que sa main se saisit de celle qui se fondait avec la nappe blanche, lui qui, depuis le début du dîner, luttait contre l’irrépressible désir de serrer sa fraîcheur de neige au creux de sa paume tiède. Comme l’instinct de devoir le toucher, toujours, comme pour se souvenir qu’il est bel et bien là, qu’il n’est pas un rêve, que les chimères de son arrogante beauté n’allaient pas s’évaporer en fumée au creux de ses doigts. Et sa voix était devenue cave, presque un murmure, lorsqu’il consentit enfin à se débarrasser de sa pudibonderie et à entrer dans le vif du sujet ;

- Pourquoi cet effroi irraisonné pour tes sentiments, Gellert ? L’amour est une magie que beaucoup sous-estiment à tort, mais toi tu sembles mettre toutes tes forces à le renier. Tu en as eu une telle peur et un tel rejet que tu as poursuivi des années le but de me tuer, malgré ce que tu me dis être ton reflet du Miroir du Risèd. Tes sentiments ne seraient pas morts avec moi, pourtant. Ton cœur aurait continué de battre, malgré tout, seul. Mais je suis heureux que tu sois persuadé que cela ait changé. Ce n’était donc pas une fatalité. De cela, j’étais persuadé.

Albus lui offrit un tendre sourire, teinté d’une certaine mélancolie face à ce qu’il lui avait pardonné de tout son cœur, mais agitait encore son âme pleine de chagrin à l’idée que le seul et unique homme de sa vie ait consacré plusieurs années de la sienne à vouloir lui nuire. Doucement, inconsciemment presque, le pouce d’Albus traçait sur la main trop blanche d’invisibles sillons, caresse aussi légère qu’une brise d’été au creux de laquelle s’insufflait toute l’infinie tendresse que l’homme sage et vieillissant avait désormais pour celui qui avait été son bourreau, qui malgré les compliments, mangeait bien peu, comme de coutume. C’est d’un air vague et presque distrait qu’Albus poursuivit, ne lâchant la main froide qu’il détenait au creux de sa paume ;

- Cette histoire d’Epouvantard qui change instantanément de forme m’intrigue beaucoup…Je n’avais encore jamais vu cela…

Son regard d’azur s’entrechoquant toujours au sien, Albus offrit un sourire tendre à Gellert, luttant contre l’irrépressible envie d’apposer à la fraîcheur des doigts trop blancs ses lèvres tièdes, mangées de barbe. Le pudibond et farouche Dumbledore ne se reconnaissait pas, en présence de Gellert. Ce besoin de contact avec celui qui, sans conteste, avait été et demeurerait son âme sœur, semblait se dépouiller de tous ces oripeaux futiles et encombrants qu’étaient la pudeur, la timidité ou la sagesse. Albus avait besoin de le sentir, comme on a besoin de respirer ou de s’abreuver à une source claire après une longue marche. Soif inextinguible, qui se passait de mots et de grands discours, et qui n’avait besoin de nul préambule, le moindre contact comblait son cœur vide depuis trop longtemps, l’emplissait de cette soif de lui qui lui avait asséché l’âme tant d’années, pour faire de lui le vieil ermite fantasque et solitaire qui se fondait irrémédiablement, chaque jour un peu plus, au creux de la pierre des murs de l’école qu’il chérissait tant.


©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
Admin
Âge : 59 ans
Sang : Sang-Mêlé
Nationalité : Austro-Hongrois
Patronus : Phénix
Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
Reflet du Riséd : Albus Dumbledore
Baguette : Aucune, confisquée par le Ministère
Avatar : Johnny Depp
Messages : 897
Double-Compte : Darragh O'Sadhbh et Morgan DeWitt
Date d'inscription : 14/02/2019
Âge IRL : 27

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeVen 7 Jan - 19:37



L'Ombre des Grands

« ICH LIEBE DICH, ICH BRAUCHE DICH »

Bureau du Professeur de Métamorphoses, Novembre 1942.

Le feu qui crépitait doucement, la lueur dansante des bougies, créant des ombres fuyantes sur les traits d’Albus, Gellert n’en demandait pas moins pour apprécier le moment. Comment avait-il pu être aveugle si longtemps ? Se priver d’un tel calme, d’une telle paix en présence de celui qui avait été et qui était toujours la raison et la cause de tout. Comment un homme tel que Grindelwald, qui était plus puissant que n’importe quel sorcier, qui avait une prestance impériale digne à faire trembler des gouvernements internationaux entiers, en étant réduit à déverser la seule raison de son existence dans cet homme aux cheveux de cuivre et aux yeux d’un azur profond ? Peu lui importait. Il s’en moquait désormais. Il se moquait de ce que son arrogance passée pouvait bien penser, ce que ses sbires qui l’avaient placé sur un piédestal si haut pourrait s’imaginer. Le regard si tendre d’Albus était désormais ce qu’il avait plus de cher au monde. Le manque de cette lumière si bienveillante de ses iris quand elles se posaient sur lui l’avait plongé dans des ténèbres parmi lesquelles il avait fallu qu’il s’y émerge entièrement pour s’en sortir. Il était parvenu à se sortir des abîmes en plongeant dans les affres du désespoir d’Azkaban.

Oui, il s’était infligé tout ceci lui-même, dans la crainte que cet éclat azuré qu’il avait pourtant cherché à supprimer, ne s’éteigne à jamais dans un éclair vert. Pourquoi avait-il choisi ainsi de s’infliger cela, à essayer de se plonger corps et âme à une repentance digne des plus rudes sevrages, il l’ignorait. Comme le disait Albus, l’amour était une magie puissante et Gellert en avait été victime. Il n’avait fait qu’agir spontanément, son cœur encore bon et humain s’accrochant à ce souvenir tendre de la seule fois où il avait vraiment heureux. Sous cet arbre, assis tous les deux dans l’herbe brûlante et jaune de l’été campagnard britannique. Sa remarque sur les Épouvantards avait été innocente et pourtant il avait bien vu que quelque chose avait changé dans le regard d’Albus. Comme une crainte, une inquiétude, dont Gellert ne parvenait à en identifier la cause. Doucement, la main chaude du professeur de Métamorphoses vint se poser sur la sienne, donnant une dimension plus tendre au sourire de l’ancien mage noir. Cependant, trop perdu dans l’azur de ses yeux, il en oublia de la serrer dans sa paume, laissant ainsi libre le pouce de son ancien amant courir sur le dos de sa main.

Il l’écouta alors parler, sans l’interrompre un instant, soulevant certains faits indépendants de la volonté de Gellert. Pourquoi s’était-il obstiné autant à se fermer à l’amour ? Il détourna les yeux finalement, les baissant vers la soupe à l’oignon dont le volume avait baissé de moitié. La réponse était stupide et le repentit l’avait. Par pudeur, par honte, il ne voulait pas révéler à Albus pourquoi il avait été si lâche. Pourtant, sa présence le poussait à se découvrir comme sous l’emprise de Veritaserum, à lui dire tout, à lui permettre de lire en lui comme s’il était dénué de talents en Occlumancie. Et malgré cela, Albus n’avait pas tort dans tout ce qu’il disait hormis pour un élément : lui mort, le cœur du mage noir aurait perdu toute trace d’humanité car le professeur de Métamorphoses était son ancre ici-bas. Celui pour qui son cœur battait chaque instant. Celui dont Gellert était avide de la moindre de ses caresses. Les yeux toujours baissés, il regardait ce pouce qui n’avait nulle concurrence dans la douceur. À cet instant, il aurait voulu reprendre contenance, recouvrer son regard espiègle et son sourire insolent, lui dire que tout cela n’était que le fruit de l’imagination fertile et romantique d’Albus mais non. Il ne parvenait plus à lui mentir. Il ne voulait plus.

— Tu te trompes… Tu es la seule chose qui me rendait humain. Sans toi, je m’abandonnais un peu plus à ce monstre qui était capable de tuer de sang-froid. Et dans… ce que j’ai entrepris… il me fallait être un monstre… Du moins, c’était ce que je pensais.

Il sourit doucement, regardant toujours la main qu’il se décida enfin à serrer entre ses doigts pâles. Il ne la porta à ses lèvres cependant, gardant cela peut-être pour plus tard. Le charme n’avait pas sa place avec une telle honnêteté. Il reporta enfin son regard Albus, retrouvant sa lueur malicieuse dans son regard. Comme pour changer de conversation, il dit sur un ton détaché :

— Mange ta soupe, elle va être froide.

Il libéra la main d’Albus afin qu’elle retourne auprès de sa cuillère et dit :

— Les Épouvantards qui changent si rapidement de forme, ça existe… L’individu est juste particulièrement peureux, que veux-tu. Un Gryffondor tel que toi, c’est normal que cela ne t’est pas commun.

Il sourit un peu plus et pris une cuillère à soupe, songeant à ce qu’Albus avait dit plutôt, avant la discussion des Épouvantards. Le patin à glace, apparemment, discipline où l’illustre Dumbledore ne parvenait à briller. Pourtant, à quel point il le voyait être beau, à glisser sur la glace avec légèrement, ses cheveux cuivrés flottant gracieusement au vent. Gellert se perdit dans l’azur des yeux d’Albus, chérissant ce souvenir qui n’existait pas. Ou plutôt, qui n’existait pas encore. Alors il sourit, un peu plus encore.

— Quant aux patins à glace, je t’apprendrai si tu veux. Il est vrai qu’entre les Alpes et Durmstrang, j’ai pu pratiquer un peu… Tu verras, ce n’est pas si compliqué… Et puis, je suis professeur dans la seule école de sorcellerie de Grande-Bretagne. Le futur Directeur a eu la folie de me demander d’accepter ce poste, c’est que je dois être un minimum pédagogue.

Avec tendresse, il continua de lui sourire, ayant presque hâte que les jours se refroidissent drastiquement, que le Lac Noir se pare d’une couche de glace afin que les deux collègues, les deux anciens amants se rejoignent à la lueur de la Lune, à l’ombre des nombreux regards qu’il y avait dans ce château. Son sourire s’agrandit, rêveur, attendrit et indéniablement aimant.
©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
Nationalité : Anglaise.
Patronus : Un Phénix.
Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
Reflet du Riséd : Gellert Grindelwald à ses côtés.
Avatar : Jude Law.
Messages : 215
Double-Compte : Belladone le Fragile, Desiderata la Peste, Aurora la Simplette, Minerva la Sévère, Solveig la Dure à Cuire.
Date d'inscription : 14/02/2019

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeMar 25 Jan - 14:41



L'ombre des grands

« Bureau du Professeur de Métamorphoses »

Novembre 1942

La blancheur diaphane de la main délicate ne se réchauffait qu’à peine sous la caresse tiède de celle du solaire Dumbledore. Immaculée, elle gisait, abandonnée avec une langueur exquise à la tendre étreinte de celui qui s’éperdait à la vision extatique de cette grâce immobile. Les mains de Gellert avaient toujours revêtu cette fascinante beauté. Leur nonchalance princière lui avait toujours conféré cette aura d’insolence et de dédain qu’Albus avait tant aimé. Peut-être était-ce pour cela qu’elle l’avait tant frappée d’effroi, plus que toute autre chose, cette vision horrifique de ces mains décharnées du mourant qui avait agonisé sans mot dire, drapé de cette fierté mutique que même les Détraqueurs ne lui avaient pas arrachée. Une douloureuse fulgurance, un éclair de réminiscence qui l’arracha une terrible seconde de la doucereuse contemplation qui s’offrait à l’azur de ses yeux. L’étreinte immobile des doigts faméliques autour des genoux maigres, les ongles trop longs et trop noirs, la posture pathétique du perdant à l’agonie qui se refuse à se rendre. Mais la main était là sous ses doigts désormais, par la seule force de sa volonté, toujours aussi belle qu’à l’aube de leur rencontre, plus blanche mais sans une ride, par la seule force de la volonté du trop grand et trop passionné Albus Dumbledore qui l’avait arraché à ses bourreaux.

De cette traversée du désert, de cette bataille acharnée, Albus avait triomphé, seul contre tous, malgré les crachats et les avanies, et avait ramené à la vie l’homme de sa vie qui se mourrait à l’ombre de ses crimes et de ses exactions. Lui voir ce sourire tendre et cette lueur facétieuse dans le regard, quand il l’avait vu abandonner tout à fait, valait bien la haine et l’incompréhension dédaigneuse de tous ces petits qui ne parviendrait jamais jusqu’à eux. Albus recommencerait, encore, sourirait à chaque injure, foulerait aux pieds chaque vaine menace, défierait chaque baguette qui s’enhardirait à se dresser contre lui, pourvu que la lueur d’âme gémellaire de la sienne subsiste, malgré qu’elle se fut égarée, malgré qu’elle l’ait renié si longtemps. Et ce soir la sincérité de Gellert le touchait en plein cœur. Ce n’était plus cette pudeur farouche qui vrombissait sous un apparât d’insolence taquine. Et l’immense Albus Dumbledore, qui s’était construit à l’ombre du drame de l’unique amour de sa vie qu’il avait crû traître et mensonger, accusait doucement le choc d’avoir été réellement aimé de celui dont l’absence lui avait laissé l’âme béante et incomplète. Et pourtant, le non moins grand Gellert Grindelwald n’avait-il pas eu le plus grand sorcier de sa génération par la force trop mésestimée d’une magie à laquelle le cœur trop tendre du formidable sorcier s’était laissé prendre ? Gellert, une fois de plus, pouvait très bien se jouer de lui. Le redoutable manipulateur avait trompé son monde remarquablement bien, et plus d’une fois. Et nul doute que si, à cette seconde, il mentait éhontément, Albus, si exceptionnel et brillant fut-il, n’en verrait rien.

Ce soir pourtant, il croyait à la sincérité de Gellert. Plus que n’importe quoi d’autre, plus qu’à l’asphalte qui recueillait ses pas, plus qu’à la Lune qui berçait la tendresse embarrassée de l’intimité de leur repas. Parce qu’il en mourrait d’envie, parce qu’il n’en pouvait plus de vivre hanté par le fantôme d’une idylle révolue, parce que la douceur de sa main sous ses doigts tièdes suffisait à l’accomplissement béat de cette âme vidée de son essence depuis si longtemps. L’azur de ciel d’été s’assombrit d’une lueur de crépuscule, tandis que la caresse machinale du pouce sur la main diaphane cessait sous la gravité de l’échange, mais que l’étreinte ne se brisait pas, pourtant :

- Peut-être est-ce là la cause du plus grand de tes échecs, Gellert ; t’être sous-estimé au point d’avoir cru pouvoir devenir un monstre véritable. Je ne nie pas que tu as essayé, peut-être de toutes tes forces. Mais puisque visiblement tu n’es pas parvenu à cesser d’aimer, alors tu as échoué…Et si je l’avais pu, je t’aurais dit que tes efforts étaient vains…

Et parce qu’Albus n’avait pas aimé un monstre. Cette âme solaire, profondément bonne et avide d’amour n’aurait rien trouvé à chérir chez un cœur sec, aride, impitoyable. L’adolescent assoiffé de passion et de romantisme éhontés avait trouvé en l’âme encore innocente de Gellert le terreau fertile de ce qui serait son seul et unique amour. Un jeune esprit fougueux et insolent, regorgeant d’une juste et sainte colère, prompt aux éclats et aux excès aussi vite regrettés qu’ils lui avaient échappés, qui aurait pu cimenter les fondations d’un homme profondément bon, si l’injustice, la douleur et les trahisons n’avaient pas meurtri sa jeune âme bravache et pleine de fougue. A présent oui, Gellert avait fauté. Assassin notoire, despote, mage noir. Ses exactions ne se comptaient plus, et pourtant. Il avait aimé, il aimait. Futile anicroche à une vie de crimes, détail balayé du revers de la main de ceux qui n’avaient jamais compris l’essentielle différence entre un monstre et un cœur qui bat. Albus leva un regard empreint d’une douce mélancolie sur le visage d’albâtre qui, pour une de ses rares fois, s’était dépouillé de toute forme de pudeur ou de mensonge. L’heure n’était plus aux démonstrations d’égo et à la fierté mal placée ; aussi Albus lui offrit un tendre sourire, presque pudibond, lorsque les doigts blancs se refermèrent sur les siens, savourant l’étreinte tranquille de ces deux anciens amants devenus plus vieux, plus mesurés et plus sages, s’étant manqué tant et si longtemps que la moindre caresse prenait des allures de tempête.

La chape de plomb de la sincérité brute et pesante de Gellert s’était évaporée. L’éclaircie de son naturel taquin s’annonça par la lueur de facétie qui illumina son regard de nouveau, lorsqu’il libéra Albus de sa douce étreinte pour lui intimer de retourner à son dîner. Le vénéré Dumbledore s’exécuta docilement avec un léger rire, devant la fermeté de cette prévenance qui l’avait toujours touché plus que de raison, et obéit sans se faire prier, sans même lui rappeler le culot de sa requête, issu de quelqu’un qui n’avait pas encore pallié la traumatisante dénutrition d’Azkaban et qui n’était pas encore familier avec la prise de trois repas par jour à intervalles réguliers. Albus se mit à achever lentement sa soupe, son regard d’azur ayant retrouvé sa sempiternelle lueur de soleil taquin, n’hésitant pas à le lorgner sur l’assiette de son prisonnier trop famélique encore, dans un message mutique qui ne brillait pas par sa subtilité. Le Gryffondor vaniteux l’écouta religieusement avec un sourire vanter son courage, et avouer à demi-mot sa propre lâcheté, personnifiée par ces craintes successives qui défilaient sous ses yeux hétérochromes, lorsque le défiait l’incarnation personnelle de la peur. Achevant son assiette de soupe particulièrement réussie, Albus reposa sa cuillère avec un sourire songeur ;

- Je serais curieux de voir cela. Un jour, peut-être, accepteras-tu de me montrer…

De cela, Albus doutait beaucoup. La pudeur de Gellert, dorée au fer forgé de l’Occlumancie, ne s’effriterait pas si facilement. Mais cela n’avait pas d’importance. Pas pour l’instant. La patience et la douceur, à l’unisson de son indéfectible passion pour le seul homme de sa vie, triompheraient des doutes et de la pudibonderie du farouche Gellert Grindelwald. Pour l’heure, voir ces yeux qu’il avait cru ne jamais pouvoir affronter de nouveau se plonger dans les cieux d’azur des siens lui suffisait amplement. Se satisfaisant de cette offrande toute simple de l’existence, d’une entrevue paisible au coin du feu avec celui qui avait juré sa perte, Albus l’écouta lui proposer de lui inculquer les bases du patin à glace. Un tendre sourire s’étira sur la barbe cuivrée du professeur de Métamorphoses. Il était bel et bien capable de braver le froid et la glace, rien que pour la vision extatique de la silhouette fine de Gellert serpenter sur le Lac gelé avec cette grâce dédaigneuse qui lui insufflait des airs de prince ;

- Cette proposition est bien trop tentante. Nous irons aux premières neiges, quand le Lac aura gelé, aux heures les plus sombres de la nuit. Mais tu devras me promettre d’être indulgent. Je risque de te donner du fil à retordre…Quant à ma folie, il semblerait qu’elle paye. Les élèves semblent plutôt satisfaits de leurs cours d’Etudes des Runes et je n’ai eu aucun retour négatif au sujet de tes méthodes d’enseignement. Aurais-tu un jour songé que tu fais un formidable Professeur ?

Gellert avait enfin achevé sa soupe, et Albus, satisfait, eut un léger mouvement du poignet pour débarrasser les assiettes creuses et les cuillères, avant de faire léviter le grand plat en argent, sur lequel trônait le rôti baignant dans son jus, accompagné de l’aiguière de sauce brunâtre et très britannique qu’Albus s’était appliqué plus que de raison à confectionner. L’immense couteau s’attelant à la découpe des tranches de viande sous la baguette magique, Albus tendit le bras pour se saisir de l’assiette de son hôte et le servir de lui-même, avant même qu’il ne puisse donner son avis ou rechigner sur la quantité qu’il avait décidé de lui servir ;

- Dans mes souvenirs, tu étais très friand de bonne viande. J’espère que celle-ci te plaira. Comme la soupe, je l’ai cuisinée spécialement pour toi.

Les deux belles tranches, saignantes à souhait, furent déposées au creux de l’assiette, accompagnées des pommes de terre rôties au four, le tout nappé d’une épaisse louche de sauce, et Albus vint placer l’assiette sous le nez de son trop mince prisonnier, tandis qu’il s’appliquait à servir lui-même, et que la carafe lévitait pour remplir de nouveau les verres de vin ;

- Bon appétit Gellert.

Un énième sourire attendri vint se dessiner sur ses lèvres fines mangées de barbe. D’aucuns s’étonneraient de voir l’immense Albus Dumbledore aussi heureux d’un rien. Lui n’avait jamais sous-estimé la valeur de ces petits riens qui s’étaient refusés à lui des décennies durant. A présent que Gellert était là, lui, sa tendre sincérité et sa prévenance courtoise, Albus s’alanguissait au creux du plaisir simple d’un dîner à croiser son regard et à voir la beauté de ses mains se mêler à la blancheur immaculée de la nappe. A évoquer un passé révolu, douloureux, mais avec la douceur indicible de ceux qui décident de laisser derrière eux un gâchis duquel ils veulent faire le deuil, à tenter de connaître l’existence solitaire de l’autre par ces quelques bribes de conversation arrachées entre deux bruits de cuillère, à se souvenir à quel point ils s’étaient aimés, à quel point ils avaient tout détruit, et à vouloir croire qu’il était possible de recoller les milliers de morceaux éparpillés au vent de leurs vies et de leurs sillages respectifs, qui avaient fait d’eux des farouches ennemis.



©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
Admin
Âge : 59 ans
Sang : Sang-Mêlé
Nationalité : Austro-Hongrois
Patronus : Phénix
Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
Reflet du Riséd : Albus Dumbledore
Baguette : Aucune, confisquée par le Ministère
Avatar : Johnny Depp
Messages : 897
Double-Compte : Darragh O'Sadhbh et Morgan DeWitt
Date d'inscription : 14/02/2019
Âge IRL : 27

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeVen 28 Jan - 19:52



L'Ombre des Grands

« ICH LIEBE DICH, ICH BRAUCHE DICH »

Bureau du Professeur de Métamorphoses, Novembre 1942.

Gellert écouta Albus parler sans vraiment révéler ce qui le tourmentait réellement. Il l’écouta tenter plus ou moins de le défendre, de décrire une vérité que le repenti ne souhaitait peut-être pas entendre. Oui, malgré tout ses efforts, il n’était parvenu à être le monstre abject qu’il avait, quelque part, souhaité être. Il n’était parvenu à être ce dont tout le monde l’avait surnommé. Ce qui semblait être sa destinée : un monstre. Depuis toujours, on le traitait comme tel, chaque facette de son existence était un terreau à la monstruosité. Que ce soit à travers les yeux de sa Moldue de mère qui, même si elle connaissait la nature de son conjoint qui était demeuré discret, avait sous-estimé la puissance de sa progéniture, les enfants dans son village qui le voyait comme la créature qu’on brûlait dans les contes, les élèves à Durmstrang qui avait su d’une quelconque manière ses origines non-humaines et sa préférence affective ou encore, plus tard, l’ensemble de la communauté magique qu’il s’était pourtant évertué à essayer de sortir de cette torpeur défaitiste et lâche. Il avait embrassé cette cruauté que tout le monde lui rattachait, cette terreur qu’il suscitait. Que pouvait-il être d’autre, après tout, lui qui avait retiré une vie à laquelle il tenait pourtant ?

Mais là encore, il avait échoué. Là encore, Dumbledore lui rappelait qu’il n’était pas non plus parvenu au bout de cette voie que tout le monde lui avait tracée. Il regarda Albus manger sa soupe, son sourire ne laissant rien paraître à la mélancolie qui venait de lui enlacer le cœur. Il baissa les yeux vers son assiette dont le fumet venait lui narguer les narines. Était-ce si grave après tout, d’avoir échoué dans l’horreur ? Peut-être que ce chemin n’avait pas été le bon, qu’il s’était trompé dès l’aube de sa vie et que cette place qu’il occupait, proche du feu qui bourdonnait chaleureusement dans l’âtre, à déguster une soupe à l’oignon confectionnée par les soins du grand Albus Dumbledore lui-même, en face même de ce dernier, était peut-être la preuve qu’il n’était pas trop tard. Gellert connaissait le tempérament de son ancien amant à toujours croire en une bonté enfouie même chez les plus horribles personnes. Peut-être s’aveuglait-il sur son cas mais l’ancien mage noir se surprit à vouloir lui prouver qu’il pouvait se montrer digne de cette confiance. Que cette route que lui montrait Dumbledore était la sienne, voire même la leur. Alors il entreprit de finir son assiette de cette soupe qui le réchauffait de l’intérieur, agréablement assaisonné. Albus l’avait vraiment réussie.

Tandis que la soupe disparaissait doucement de leurs assiettes, Dumbledore sauta sur la confidence au sujet de l’épouvantard pour tenter d’en savoir plus. Gellert savait que son ancien amant ne manquerait pas l’occasion de tenter de satisfaire sa curiosité parfois mal placée. Il savait également qu’il se permettait absolument tout et cherchait nullement à faire dans la dentelle. Pourtant, sa question n’était pas si franche, presque courtoise et respectueuse. Ce qui fit dessiner un sourire sur les lèvres pâles du repenti. Il ne lui donnerait pas aussi facilement satisfaction. Ils n’étaient après tout, qu’à l’entrée de leur dîner, il n’allait pas le rassasier si facilement. Néanmoins, il sentait comme une envie de se confier à lui aussi. Il l’avait bien fait à Belladone – un peu par la force des choses, certes – mais il estimait qu’Albus lui faisait suffisamment confiance pour organiser un dîner en tête à tête avec lui. Peut-être pouvait-il au moins lui accorder cela. Cependant, Albus ne semblait pas s’attendre à une quelconque réponse et enchaîna directement sur la qualité des cours que Gellert pouvait donner et qu’il serait certainement un bon professeur pour le patinage également. Quelque peu flatté, il haussa les sourcils avec modestie tandis que son assiette à soupe vide s’envola gracieusement dans les airs.

— Et bien ce que tu me dis me touche, je ne pensais pas être si pédagogue. Je dois t’avouer que pourtant, je ne mets pas particulièrement d’effort à rendre mon cours ludique… la matière s’y prête mal après tout. On verra si je suis toujours aussi bon professeur quand tu seras sur la glace, en train d’essayer de trouver ton équilibre.

Il le regarda avec un sourire malicieux mais heureux à l’idée même de se retrouver seul avec lui sous le clair de lune, à lui tenir la main pour l’entraîner à rester sur ses deux patins. Il en avait déjà hâte. Mais il était encore trop tôt, dans le calendrier. Les premières neiges n’arrivant que par intermittence depuis deux semaines environ, fondant instantanément dès que les flocons venaient caresser les brins d’herbe. Il faudrait encore patienter avant que le Lac Noir ne se part d’une couche de glace suffisamment solide pour pouvoir les supporter. Le reste du dîner arriva alors magiquement et Albus se saisit de son assiette afin d’y déposer une quantité généreuse de rôti, de pommes de terre, accompagnés d’une sauce épaisse. L’odeur même lui rappela que la soupe oignon, aussi délicieuse fusse-t-elle, n’était parvenue à le rassasier. Il reprit son assiette, remercia Albus et attendit poliment que son hôte se serve et commence à manger.

— Bon appétit à toi aussi, Albus.

Il lui lança un discret regard, le visage d’un sourire franc et bienheureux. Il était empli d’une chaleur qu’il ne se connaissait pas, ne sachant s’il s’agissait du feu et de la soupe ou juste du bonheur indescriptible d’être ainsi en compagnie de cet homme qu’il s’avouait désormais aimer plus que tout. Il mangea une première bouchée de viande qui fut d’une réelle tendresse, la sauce relevant parfaitement le goût du bœuf.

— Albus, je dois t’avouer que tu t’es surpassé. J’avais oublié que tu cuisinais si bien.

Même les pommes de terre, des grenailles, étaient cuites à la perfection. Combien de temps avait-il passé derrière les fourneaux ? Silencieusement, profitant de son dîner, il n’osait trop regarder Albus. Mais quand par malheur, son regard croisait le sien, il ne pouvait s’empêcher de sourire d’une façon qu’il aurait trouvé d’une niaiserie sans nom. Il était beau, le mage noir qui avait tremblé l’Europe, à dévorer avec appétit un plat délicieux que Dumbledore lui avait fait, et à sourire comme un idiot en le regardant. Finalement, vaincu par son propre bonheur, il finit par se dire qu’il fallait faire plaisir également à Albus :

— Je pourrais effectivement te montrer à quelle vitesse fulgurante change mes épouvantards, mais je t’avoue que ce n’est pas une expérience très agréable. Je préfère de loin le Miroir du Risèd.

Il marqua une pause, continuant de sourire et baissant presque pudiquement les yeux.

— Cependant, je pourrais essayer de te décrire ce que j’y ai vu. Et bien, en premier, la même chose que dans le reflet dans le Miroir. Mais, c’était il y a quelques semaines. La situation a quelque peu changé depuis et je doute que l’épouvantard reprendrait cette forme…

Il prit une gorgée de vin, toujours son sourire espiègle aux lèvres, se jouant du suspense qu’il était en train de créer, même si son regard devint légèrement plus grave.

— Ensuite, il y eut la première personne décédée par ma faute. Sur le sol. La première vie qui a été perdue à cause de moi.

Son sourire avait soudain disparu, n’osant prononcer ce nom presque tabou entre les deux hommes. Cette vie si fragile et malgré tout si pure mais dont la disparition avait engendré bien des conséquences. Gellert resta silencieux quelques secondes, pensif, avant de prendre une profonde inspiration et dire :

— Et enfin, moi, dans l’état végétatif dans lequel j’étais à Azkaban. Je pense que ça éviter à l’épouvantard de faire une représentation détaillée de la prison, avec les Détraqueurs, etc.

Il rit légèrement et regarda son assiette vide.

— Est-ce que je pourrais en avoir d’autre s’il te plaît ? C’est vraiment délicieux.

Il prit son assiette dans une main. Il avait réellement faim et l’occasion était parfaite pour tenter de changer de sujet, technique dont il abusait quand la conversation prenait une tournure où il se retrouvait à se dévoiler ou être mal à l’aise.
©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
Nationalité : Anglaise.
Patronus : Un Phénix.
Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
Reflet du Riséd : Gellert Grindelwald à ses côtés.
Avatar : Jude Law.
Messages : 215
Double-Compte : Belladone le Fragile, Desiderata la Peste, Aurora la Simplette, Minerva la Sévère, Solveig la Dure à Cuire.
Date d'inscription : 14/02/2019

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeMar 1 Fév - 14:39



L'ombre des grands

« Bureau du Professeur de Métamorphoses »

Novembre 1942

Ce n’était qu’un compliment. Pour l’âme solaire d’Albus Dumbledore, il ne pouvait en être autrement. Comment s’offusquer de n’être pas parvenu à basculer tout à fait dans l’horreur ? Beaucoup le pensaient avec sincérité, peut-être avec raison. Pourtant, au regard du cœur tendre du formidable sorcier, il y’avait de ces stigmates indélébiles, d’une pureté pas tout à fait effacée sous l’ignominie des crimes du non moins grand Gellert Grindelwald. Mais derrière les mains blanches maculées du sang de ses victimes, derrière le masque d’infâmie forgé à force d’avanie et d’exceptionnelle Occlumancie, il y’avait un cœur qui avait battu. Le souvenir éthéré d’un adolescent qui avait aimé le brillant élève aux yeux de ciel d’été, qui avait joint son rire au sien, dont la main encore blanche avait tremblé lorsque, dans un élan d’extrême courage, il avait pris sur lui d’esquisser ce qui serait leur premier baiser. Alors, pour certains, cela ne changerait rien. Pour beaucoup, cela n’amoindrirait pas l’horreur du personnage qui avait fait trembler un continent tout entier. Pour le mélancolique Albus Dumbledore, elle différenciait le monstre véritable de l’âme égarée qui avait fait tous les mauvais choix possibles. Il aurait suffi de si peu. Une main tendue et quelques mots, un élan de tendresse, une marque de confiance. Le jeune homme flamboyant lui avait tout donné, l’avait aimé plus que n’importe qui, et pourtant ! Avec quelle douleur il avait dû s’arracher à lui, par la force des drames d’une famille qui le réclamait et à laquelle il ne pouvait pas se soustraire. Et comme Gellert avait dû avoir mal ! Mais avait-il seulement su un millième du de la souffrance du sacrifice qu’il s’était infligé, en ne le choisissant pas ?

Personne ne saurait jamais à quel point Albus avait eu sa part de responsabilité dans le personnage horrifique qu’était devenu Gellert. Personne ne saurait à quel point il avait eu le pouvoir de tout changer, et personne, jamais, pas même Gellert, ne saurait à quel point le fardeau était lourd sur ses épaules qui paraissaient ne jamais vaciller. Et aujourd’hui Albus voyait dans le rachat de Gellert le salut de sa propre repentance, de celle que personne ne soupçonnait, et qui pourtant n’avait cessé de le tourmenter de ses calvaires qui agitaient ses nuits d’insomnie et qu’il déguisait de sourires taquins et de fariboles d’adolescent. Et là encore, comme toujours avec l’âme gémellaire de la sienne, il s’était montré sincère. Gellert semblait un excellent professeur, peut-être même plus que ce qu’il s’était imaginé. Un sourire attendri s’esquissa devant son humilité et sa réserve, tandis que l’aiguière obéissait aux ordres mutiques de sa baguette et déversait la sauce brunâtre sur la viande rosée qu’il servit à Gellert ;

- Et bien tu es charismatique, tu inspires une autorité naturelle et tu es très érudit. Il me semble que tu as toutes les qualités requises. Quant à l’Etude des Runes, c’est une matière effectivement très scolaire que tu aurais du mal à rendre ludique, contrairement au patin à glace.

Un sourire malicieux et plein de défi éclaira le visage solaire d’Albus, le joignant à celui de Gellert, les deux semblant avoir retrouvé pour un temps un peu de cette paix bienheureuse d’adolescents qui les avaient fait s’esclaffer ensemble et balayer le monde qui tournait autour d’eux d’un revers de main. Ce simple dîner à l’intimité d’un âtre crépitant et d’effluves d’une cuisine modeste, rappelaient avec la force d’une madeleine de Proust ce qu’ils avaient été l’un pour l’autre, comme un rien avait suffi à leur bonheur, comme ils se satisfaisaient d’une glace ou de l’ombre d’un arbre, pour se complaire dans cette sérénité aussi vite arrachée qu’elle ne leur avait été offerte. Albus se surprenait à se trouver simplement heureux, à lutter contre des envies de sourire à s’en décrocher la mâchoire, à simplement rester là à se délecter d’une cuisine qu’il ne concoctait plus depuis des décennies, à s’abreuver de vin français et de la lueur du sourire de Gellert qu’il avait retrouvé, enfin, comme une évidence que leurs chemins opposés n’avaient pu défaire tout à fait.

Et lorsque Gellert vanta la qualité de mets auxquels il ne s’était plus essayé depuis tant de temps, Albus rosit de plaisir. Le jeune Autrichien de l’époque cuisinait bien mieux que lui, et sans doute était-ce encore vrai. Aussi l’éloge lui allait droit au cœur, au regard surtout du temps et de l’application qu’il avait consacré à son dîner. Albus sourit un peu plus, et, derrière ses lunettes en demi-lune, des étoiles semblaient briller dans son regard de ciel d’été, à la manière du soleil qui se confronte au reflet azuré d’un lac de montagne ;

- Oh, merci beaucoup…C’est que je me suis appliqué. Je me souviens, tu étais un excellent cuisinier, déjà si jeune. Tes tartes au citron étaient exceptionnelles. Tu sembles toujours aussi doué, au regard de celle que tu m’as offerte il y’a quelques semaines.

La gourmandise d’Albus restait un de ses points sensibles que Gellert ne connaissait que trop. Son goût exacerbé et enfantin pour les sucreries, avec une prédominance pour le citron, n’avait pas changé, et le mage noir repenti avait touché en plein cœur, le phénix de fumée surmontant la pâtisserie ajoutant la touche sentimentale à laquelle Albus avait toujours été sensible. Et tandis que la conversation prenait un ton plus grave, le sourire du grand Dumbledore se teinta de mélancolie, à entendre Gellert vanter le Miroir du Risèd au détriment des tourments de l’Epouvantard, quand l’apparition avait été similaire pour lui. De nouveau, le sage et vénéré Directeur Adjoint voulut mettre en garde l’impulsivité de l’amour de sa vie, qui lui avait joué déjà tant de tours.

Mais il continuait, et loin d’Albus l’idée stupide de vouloir couper les confidences trop rares du pudique et farouche Gellert Grindelwald. Et l’évocation de la mort d’Ariana était si claire que l’azur de ciel d’été, derrière l’éclat des lunettes en demi-lune, s’assombrit tout à fait, d’une ombre de crépuscule, à l’idée que leurs âmes fusionnelles partagent jusqu’au plus terrible de leur effroi. Ariana. Son trépas dramatique et accidentel pouvait-il réellement être le pire regret des innombrables exactions du sombre Gellert Grindelwald ? Cet épouvantable dénouement d’une passion consumée trop vite avait-il sonné le glas de l’innocence facétieuse de l’adolescent qu’il avait aimé ? Albus marqua quelques secondes de silence de recueillement pour sa douce et jeune sœur, qu’il n’avait pas pris le temps de suffisamment aimer. Et quand vint le portrait du Gellert agonisant au fond de sa cellule glacée par l’horreur des monstres véritables qu’étaient les Détraqueurs, l’obscurité s’engouffra dans les cieux d’été ternis d’Albus, et ses prunelles paraissaient presque sombre, à la résurgence de cette vision de cauchemar qui l’extirpait encore de son sommeil et le contraignait à arpenter sa chambre en faisant les pas, pour tâcher d’en amoindrir la netteté horrifique.

La pudeur de Gellert se révéla dans un rire. Léger, sans joie et trahissant l’embarras de ces révélations dont il n’était que trop peu coutumier. La sourde envie de serrer de nouveau au creux de la sienne la main diaphane, qu’il avait émaciée et mourante, au creux de sa paume tiède, fut réprimée avec force par sa propre pudeur à lui, et la crainte de voir son excès de tendresse rejeté par la nonchalance princière de l’homme de sa vie. Albus préféra le laisser manger, constatant avec un plaisir non feint qu’il dînait de bon cœur, malgré la douleur des confidences qu’il lui offrait. Du bout de sa fourchette, constatant que c’était lui qui boudait sa propre assiette, il se saisit d’une petite pomme de terre qu’il mâcha doucement, cherchant à insuffler toute la douceur possible dans la réplique qu’il s’apprêtait à faire ;

- Ainsi, il semblerait que nous ayons un Epouvantard en commun. Toutefois, après ma…visite à Azkaban, il est très probable que le mien ait changé de forme également.

Car la mort d’Ariana avait été terrible, certes. Le fardeau d’une culpabilité innommable ne s’étiolerait pas à la douceur des ans. Albus, toujours, aurait sur l’âme et la conscience la mort de sa douce et jeune sœur négligée par son égo d’élève brillant, qui s’était nourri d’aspirations grandioses et de hautes sphères, jusqu’à oublier l’adolescente qui le réclamait et qu’il n’avait pas entendue. Mais la vision du fier Gellert, qu’il avait considéré comme son roc, sa bouée au milieu d’un naufrage, s’abandonner à un sort inéluctable, quand il l’avait toujours connu bien trop vivant, enflammé de passion, de colère et de soif de justice, aura sans doute remplacé dans l’horreur le trépas lointain de la benjamine des Dumbledore. Sans Ariana, il manquait une petite sœur à Albus. Sans Gellert, son âme errait, morcelée et sans but, suivant docilement, comme une ombre, le cours d’une vie qui n’avait plus de sens. Un Gellert mourant, un Gellert l’abandonnant, encore, avait bien plus de chances aujourd’hui de meurtrir le cœur tendre du grand Albus Dumbledore que le souvenir d’une jeune sœur depuis trop longtemps perdue.

Albus goûta à sa viande. Il est vrai qu’elle s’était surpassé. Elle fondait dans la bouche, et la sauce épaisse lui donnait un aspect velouté et onctueux qui la magnifiait encore. Le vin était délicieux, lui aussi. Il lui faudrait remercier son ami Horace. Il n’y avait pas dans toute la Grande-Bretagne de plus grand connaisseur que lui en la matière. Et lorsque Gellert lui réclama un second service, tendant son assiette vide, Albus rosit de plaisir de nouveau, joignant son rire au sien, trop heureux de l’appétit de Gellert qui l’inquiétait parfois, à la table des Professeurs. Se hâtant de le resservir, il lui déposait son assiette devant lui tandis qu’il se décidait à avouer ;

- Je l’ai vue, tu sais, à Azkaban. J’ai vu sa belle robe bleue que je lui avais achetée s’étaler sur les affreux pavés gris. Et ses longues boucles blondes se répandre autour de son visage surpris. J’ai cru devenir fou, à la voir là, dans ce lieu sordide. Et ensuite, quand je t’ai vu, toi, j’ai bien failli perdre la tête. Gellert, je ne saurais jamais comment tu as pu résister à ces monstres aussi longtemps…

Albus crispa sa main libre sur la nappe immaculée. Des monstres véritables, en voilà, et ces créatures déjà honnies du sage patriarche lui insufflaient de sourdes colères, à se remémorer l’abominable état dans lequel ils avaient maintenu si longtemps celui qui partageait son âme. Mais à regarder Gellert sourire et manger, n’était-ce pas lui qui avait triomphé de tous, encore une fois ? Il leur avait arraché leur proie, de force, pied de nez au Ministère qui s’était targué de lui infliger une humiliation de laquelle il était sorti vainqueur. Gellert était là et sans doute était-ce là la plus belle de ses victoires, et son sourire s’attendrit devant celui qu’il avait sauvé in extremis de la mort atroce réservée aux criminels d’Azkaban. Un sourire tendre, teinté de la vengeance douce-amère d’être supérieur à toute cette plèbe qui lui avait voulu du mal, vint éclairer sa barbe, tandis qu’il picorait son plat que Gellert dévorait avec application ;

- Me referas-tu à manger, un jour prochain ? Je meurs d’envie de goûter de nouveau à tes Knödel et à tes Spätzle. Ils sont délicieux.

Le tendre sourire persista. Une bûche craqua dans l’âtre, tandis que l’œil d’azur d’Albus avait recouvré un peu de son éclat de ciel d’été. Derrière les lunettes en demi-lune, une œillade furtive glissa vers la main blanche, alanguie avec cette nonchalance princière sur la nappe immaculée. A défaut d’oser la prendre de nouveau dans la sienne, Albus préféra achever son assiette, ne se déparant pas de son tendre sourire pour l’homme pour lequel il avait cuisiné pour la première fois en quarante ans.

©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
Admin
Âge : 59 ans
Sang : Sang-Mêlé
Nationalité : Austro-Hongrois
Patronus : Phénix
Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
Reflet du Riséd : Albus Dumbledore
Baguette : Aucune, confisquée par le Ministère
Avatar : Johnny Depp
Messages : 897
Double-Compte : Darragh O'Sadhbh et Morgan DeWitt
Date d'inscription : 14/02/2019
Âge IRL : 27

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitimeMer 2 Fév - 14:23



L'Ombre des Grands

« ICH LIEBE DICH, ICH BRAUCHE DICH »

Bureau du Professeur de Métamorphoses, Novembre 1942.

Gellert ignorait ce qu’il avait fait à ses élèves pour qu’Albus vante à ce point ses qualités de professeur. Jamais l’idée d’enseigner lui avait traversé l’esprit, ce dernier étant tourné vers d’autres priorités pendant des décennies, et il donnait ses cours de manière spontanée. Et malgré le côté très peu ludique de sa matière et le peu d’effort qu’il y mettait pour la rendre intéressante, il trouvait qu’il s’agissait d’une petite victoire en soi. Cependant, il n’était pas si certain de ses qualités de pédagogue en patins à glace. Albus ne serait pas n’importe quel élève. Et il était difficile de savoir si l’éminent professeur de Poudlard se jouait de lui ou non. Peut-être était-ce seulement une excuse pour passer un moment avec lui, loin des regards. Gellert sourit. Si cela était vraiment le cas, Albus n’avait pas besoin de tels stratagèmes pour rester en sa compagnie. Il n’avait qu’à lui demander. Ou non en vrai. Même de cela, il n’en avait pas besoin. Gellert avait récemment établi le constat que jamais la présence d’Albus ne le dérangerait, bien au contraire. Chaque seconde passée avec lui était un instant privilégié comme ce dîner qui s’écoulait malheureusement trop vite à son goût malgré le sujet un peu plus sombre abordé.

L’ombre dans les yeux d’Albus n’avait pas échappé à Gellert. Ce dernier s’en est voulu de s’être ainsi confié. Il avait pensé que l’honnêteté aurait été la meilleure contrepartie à la confiance que lui donnait l’auguste sorcier devant lui mais il avait simplement l’impression que cela venait de poser une chappe de plomb entre eux deux. Gellert baissa les yeux vers son assiette à nouveau pleine, peu satisfait de ses propos et des nuages de tristesse et de mélancolie qui avaient obscurci le ciel d’été des yeux de son hôte. Il n’osa rien dire quand Albus dit que son épouvantard était le même que le sien. Le corps sans vie de la sœur négligée. La personnification même de leur cause d’adolescents révolutionnaires, leur premier martyr, ironiquement décédée par leur faute qui avait fini de faire s’effondrer la famille Dumbledore. Gellert s’en voudrait toujours de s’être ainsi allé à son accès de rage. Et pourtant, il savait que rien n’aurait pu empêcher cette vague de détresse, de douleur et de colère qui s’était déferlée brutalement sur lui. Il savait qu’avec tout le contrôle et toute la maturité qu’il avait pu gagner au fil des années, il ne pourrait pas l’empêcher de s’abattre à nouveau et de faire rentrer son sang déjà bouillant en ébullition.

Cela il se garda bien de le dire, malgré la totale véracité de sa pensée. Il ne voulait pas qu’Albus pense qu’il était toujours l’adolescent espiègle du passé, l’âme brûlante d’ambitions et de projets. Et pourtant, c’était de lui que l’illustre sorcier était tombé amoureux. De plus, Gellert ne pouvait s’empêcher de se convaincre qu’il avait changé, qu’il était plus sage, plus réfléchi, que ses quinze années à Azkaban avaient eu un impact sur lui aussi bon que mauvais. Mais le fait était là, ils étaient tous les deux hantés par le décès brusque de la jeune fille qui n’avait pas assez compté à ce moment-là pour son aîné. Gellert n’avait pourtant jamais trouvé qu’Albus faisait un mauvais frère. Après tout, malgré son cerveau brillant, il n’était qu’un adolescent à l’époque. Un adolescent qui avait dû endosser un rôle d’adulte mûr qu’il n’avait nullement voulu. Comment le blâmer pour cela… Abelforth ne s’était pas privé de cracher ses remarques et ses reproches acerbes tout l’été mais aurait-il mieux fait, à la place d’Albus ? Lui qui n'avait nourri aucune ambition, n’avait aucune envie, aucun projet. Qui se contentait de vivoter même étant à l’aube de sa vie. Gellert retint un soupir.

Albus déclara alors l’avoie aperçue entre les murs d’Azkaban. Et Gellert fronça légèrement les sourcils. Il était au courant de récurrentes divagations du plus grand génie de son temps mais s’il était surtout incompris par la globalité de l’humanité, pour l’une des rares fois, son âme sœur ne le comprenait pas. Dumbledore n’était pas sénile ou fou. Ses décisions semblaient parfois être dénuées de sens mais elles étaient rapidement justifiées ensuite. Mais cette fois-ci, il ne comprenait pas ni ce qu’Albus était allé faire à Azkaban, ni pourquoi il avait vu Ariana. Était-ce la présence des Détraqueurs qui s’était jouée ainsi de son esprit ? Impossible. Il était un tel sorcier que ses créatures des Ténèbres ne pouvaient l’affecter aussi facilement. Il ne les appréciait pas pour autant, mais tout de même. Puis Albus avoua l’avoir vu, lui. Gellert s’arrêta même de mâcher la viande tendre qu’il venait de mettre dans sa bouche. Le repenti fouilla dans sa mémoire et ne parvint à se remémorer cet épisode où Dumbledore était venu lui rendre visite à Azkaban. Il était si troublé par ce moment qu’il lui manquait, qu’il avait peut-être oublié qu’il n’écouta même plus Albus lui demandait tendrement et adorablement de lui refaire à manger un jour.

— Albus, excuse-moi mais… tu as dit que tu étais venu me voir à Azkaban ? Je ne m’en souviens plus… La première fois que je t’ai revu, c’était ici, à Poudlard.

Il se doutait qu’il y avait un nombre important de facteurs qui ont amené le fait qu’il ne s’en souvenait plus. Peut-être avait-il dormi à ce moment-là – ou avoir perdu connaissance – qu’Albus s’était grimé ou était couvert et n’avait voulu se manifester, de peur d’exciter les autres détenus. Mais l’éclat solaire dans les yeux de l’homme de sa vie était revenu, comme fier de le voir en chair et en os, mangeant à sa faim, après l’éternité passée à se faire dévorer l’âme par les Détraqueurs. Et le sourire d’Albus vint chasser l’inquiétude du visage pâle de Gellert pour y remettre un sourire heureux et doux. Ému, il baissa les yeux.

— Tu as pris des risques inconsidérables en me sortant de là-bas… Je te suis éternellement reconnaissant mais… je ne comprends toujours pas ce qui t’est passé par la tête pour me sortir d’Azkaban.

Il marqua une pause, continuant de sourire. Puis, il reprit avec le même ton léger :

— Mais après tout, tu dois bien te demander pourquoi je me suis sciemment jeté là-bas alors qu’il n’y avait rien qui menaçait directement ma croisade. Hormis toi.

Il regarda son verre de vin qu’il finit de boire. Puis il resservit Albus et enfin lui-même.

— Et bien sache que la réponse, c’est toi. Je savais que notre affrontement était inéluctable. Que dans ta sagesse, tu finirais par prendre le choix de la raison et non celui du cœur. De plus, tu avais le Pacte en ta possession, ce n’était qu’une question de temps avant que tu ne parviennes à le détruire. Et je savais qu’en cas d’affrontement, j’aurai perdu parce que je n’aurai souhaité me retrouver face à toi. C’est au-delà de ma volonté, de mes forces.

Il marqua une pause, avala une nouvelle gorgée de vin. Devait-il aussi lui parler de cette vision qu’il avait eue ? De cet éclat vert qu’il connaissait que trop bien et du basculement du corps vieilli mais sans vie d’Albus dans le vide ? Peut-être était-ce trop tôt. Peut-être qu’il ne le croirait tout simplement pas. Mais le voilà maintenant enlisé dans des confessions que l’auguste professeur ne lui avait jamais demandées.

— J’ai voulu éviter cela. Vois cela peut-être comme un éclat de lucidité mais je me suis dit que ma place n’était pas contre toi mais à côté de toi. Je n’ai jamais voulu t’affronter, mais te… te protéger… Je sais que cela n’a aucun sens avec tout ce que j’ai entrepris contre toi mais… il y a un sens, dans mon esprit chaotique.

Il sourit légèrement, l’œil redevenu taquin.

— C’était voué à l’échec de toute façon. Il m’a fallu du temps avant de me rendre compte que sans toi, je n’irai jamais au bout. Tu as toujours été d’une sagesse incroyable, Albus. Et même, si parfois tu as commis quelques erreurs, elles sont toutes justifiées, quoiqu’en disent certains.

Il finit son verre et se déclara intérieurement que cela serait son dernier de la soirée. Il aurait voulu lui dire tant d’autres choses mais, les yeux baissés sur son assiette par deux fois vidée durant la soirée, l’audace lui fit défaut. Il n’était même pas sûr qu’Albus croit en son invraisemblable histoire. Et à nouveau, comme pour désamorcer cette langue trop facilement déliée face à cet homme, il dit :

— Je te ferai toutes les flammekueches et tartes au citron que tu voudras. On pourra même les faire à deux si tu veux.

Il sourit avec douceur avant de finalement regarder la main solitaire d’Albus sur la table et de s’en saisir tendrement, presque avec prudence et pudeur.
©️ plumyts 2016
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé

L'ombre des grands - Gellert Empty
MessageSujet: Re: L'ombre des grands - Gellert  L'ombre des grands - Gellert Icon_minitime

Revenir en haut Aller en bas

L'ombre des grands - Gellert

Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Revenir en haut
Page 1 sur 3Aller à la page : 1, 2, 3  Suivant

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Domus Paenitentis :: Poudlard :: Premier & Deuxième Étages :: Premier Étage :: Salle de Métamorphose-