THE TRUTH UNTOLD

asia & hero

1er Septembre 1942. Dans le Poudlard Express.
Full of loneliness
This garden is bloomed

La tête appuyée contre la vitre du train qui les conduisait de nouveau à Poudlard, Asia Carrow dormait profondément. Sans doute la bouche grande ouverte d'ailleurs. Une mèche de cheveux bruns lui tombait négligemment sur le front, mèche qu'il s'était d'ailleurs juré de couper au plus vite, et sa cravate verte et argent encore posée sur les genoux. Il ferait l'effort de la nouer une fois descendu du train. Il avait été nommé préfet en chef. Il ne pouvait pas se permettre d'arriver complètement débrailler au château, sa chemise hors du pantalon, une cravate à peine nouée autour du cou. Sa mère lui avait déjà reproché de ne pas avoir coupé ses cheveux rebelles, il se devait de faire un effort sur sa tenue. Pour l'heure, ses pensées étaient tournées vers les Balkans, leurs vallées à pertes de vue, le vert absolument partout, l'odeur de la pluie qui ne l'avait pas quitté durant tout son séjour en Europe de l'est. Les paupières toujours closes, Asia se replongea dans le voyage qu'il avait réalisé un mois plus tôt en compagnie de son cousin. Les montagnes, puis les forêts verdoyantes lui avaient laissé d'agréables souvenirs. Leur voyage n'avait pas toujours été facile, loin de là, et il s'était d'ailleurs juré de ne pas oublier les hauts et les bas. Marcher sur les traces de l'homme qu'il admirait le plus – après son père – avait été une expérience qu'il ne regrettait pas.

Une secousse lui fit rebondir la tête contre la vitre et il ouvrit de grands yeux. « J'ai dormi longtemps ?*» Il posait la question à son cousin, assit en face de lui, et qui avait très certainement dû se moquer de lui depuis qu'il avait fermé les yeux. À côté d'eux, la préfète de Serpentard leur lança un drôle de regard. Certains étaient encore surpris de les voir communiquer dans une langue qui n'était pas l'anglais. Mais c'était un fait : les cousins en abusaient souvent pour parler de choses sérieuses entre eux. L'avantage d'avoir une mère française se faisait alors ressentir : Asia parlait aussi bien sa langue maternelle que celle de sa mère. « J'ai hâte d'arriver, et de découvrir les nouveautés de cette année... » articula-t-il en baillant. Il passa une main dans ses cheveux, jetant un coup œil rapide autour de lui. Chaque année Poudlard leur réservait son lot de surprise. Nouveau professeur, nouvelles règles...  Aucune année là-bas ne se ressemblait. Le train sembla ralentir un peu et certaines premières années se ruèrent sur les fenêtres du train pour apercevoir quelque chose. Il se souvenait de sa première fois dans ce train. Malia, sa grande sœur, avait insisté pour être assise à côté de lui. Elle avait refusé de le laisser seul. Elle avait tenu à ce que le benjamin e la famille découvre tout ça avec elle. Aujourd'hui, il avait un pincement au cœur, en pensant qu'il était en route pour sa dernière année à Poudlard.


1er Août 1942. Bibury.
Full of thorns
I bind myself in this sand castle

« Hero... Réveilles-toi... » Il hésita quelques instants, avant de finalement craquer et de siffler très fort dans les oreilles de son cousin. En temps normal, c'était lui qui dormait aussi profondément. Mais aujourd'hui était un jour spécial. C'était le jour de leur départ pour l'Europe de l'est. Hero n'avait aucune idée de l'endroit où ils se rendaient. C'était une surprise. Il avait dû préparer quelques affaires à l'aveugle, car Asia avait refusé de dire quoi que ce soit sur leur destination. Ce matin, ils devaient prendre un porto loin qui les amènerait dans le sud de l'Albanie, première étape de leur périple européen. « C'est le grand jour... ! » chanta-t-il à moitié dans les oreilles du pauvre garçon encore à moitié endormi. Il ne tenait plus en place.

À vrai dire, Asia Carrow ne tenait plus en place depuis une semaine. Sa mère le trouvait intenable, d'une humeur impossible à contrôler. Mais la vérité était tout autre, elle s'en faisait pour son fils, et pour son neveu. Et elle pouvait. Au fond, même si le jeune homme affirmait n'avoir aucune appréhension, il avait cette boule au ventre qui refusait de le quitter depuis plusieurs jours. Il n'avait jamais voyagé jeune, sa mère estimant qu'il était bien trop jeune. Il venait tout juste d'avoir dix-sept ans, et là encore, Europe n'était pas convaincue. Dix-sept ans, c'était trop jeune pour partir vadrouiller dans le monde. Mais il avait su lui faire entendre raison. Ils seraient discrets. Ils pratiqueraient le moins de magie possible, surtout en présence des faibles d'esprits qu'étaient les moldus. « Je t'attends dans le grand salon, dépêches-toi, je suis prêt à partir ! » Ils mangeraient sur le chemin. Dehors l'aube pointait le bout de son nez et Asia inspira profondément : enfin il y était. Aujourd'hui je partais sur tes pas.

*prononcé en français.
#6FA163 couleur dialogue

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1^er Septembre 1942. Dans le Poudlard Express.

« Il est super laid comme ça. » Hero adressa un regard entendu à la préfète en désignant son cousin du menton. Il dormait contre la vitre, la bouche entrouverte, sa tête rebondissant légèrement à chaque chaos du train. Adossé nonchalamment à la banquette, le futur septième année n'avait absolument rien d'autre à faire que de se moquer de son cousin. D'une part, ça lui permettait de glisser des sourires ravageurs à miss préfète, d'autre part… Ça l'évitait de le dévisager. Tu n'avais pas encore noué ta cravate mais ça m'allait bien comme ça, tu avais l'air moins sérieux, plus réel. Les cravates, ce calvaire de l'homme bien habillé. Il lui avait fallu une éternité avant de réussir à nouer correctement cet objet démoniaque, plus encore avant de parvenir à la nouer avec une longueur parfaite. À force de crises de nerf devant le miroir, il avait fini par apprendre un sortilège noueur de cravate, trouvé au fin-fond d'un vieux recueil magique. L'avantage, il n'avait plus besoin de calibrer ce stupide bout de tissu. Le désavantage… Sa baguette prenait parfois sa mission magique trop à cœur, laissant un Hero complètement ficelé des pieds à la tête, des lacets à la cravate, juste bon à appeler une quelconque âme charitable en aide. Fichue baguette.

Il s'appuya à son tour contre la vitre pour regarder les arbres et la verdure défiler derrière la fenêtre. C'était la toute dernière fois qu'il voyait ces paysages défiler dans ce sens, sa toute dernière année dans les couloirs de Poudlard. Cette idée le rendait vaguement malade quand elle le prenait. Il avait toujours envisagé sa vie au travers du prisme rassurant du château et s'imaginer désormais prêt à plonger dans la vie adulte… Il était ambitieux, il savait qu'il voulait réussir, être un modèle à la fois pour lui-même et pour les autres… Mais il n'avait jamais imaginé sa vie professionnelle, aussi paradoxal que cela puisse paraître. Il avait bien des projets mais aucun n'incluait un métier stable. Le ministère semblait tout indiqué mais il restait le fils de son père et le neveu de son oncle. L'idée de devoir faire des courbettes à rallonge pour espérer obtenir les bonnes grâces d'un quelconque type bien placé l'agaçait. La voix d'Asia le tira de sa rêverie. « Oui, cher cousin, et tu as la trace de la vitre sur la joue droite.* » Hero adressa un sourire moqueur à son cousin et lui tira la langue. À question en français, il répondait de même. C'était leur petit code, leur jardin secret que peu pouvait pénétrer. Leurs mères bien sûr, françaises, n'étaient pas dupes, et le père de Hero, les quelques fois où il avait été à la maison, avait su montrer une bonne maîtrise de cette langue étrangère. Mais pour Asia et Hero ? C'était aussi naturel que l'anglais. Hero avait su désigner de nombreux objets par leur nom français avant même d'en connaître le terme anglais. C'était la vieille sorcière et nourrice, Amelia, qui avait remédié à ce léger problème linguistique. Le bâillement d'Asia lui en tira un à l'identique et il fouilla dans ses affaires pour désigner sa propre chemise et une cravate un peu chiffonnée. Il la lissa sur la banquette en espérant lui donner un air plus présentable. « Il faut qu'on se change, on arrive. On ne va pas tarder à découvrir les nouveautés en question ! » Septième année donc examens… Dans l'immédiat, il songeait davantage à des nouveautés dans les notations qu'à quelque chose de plus grande ampleur. Le train siffla, annonçant son entrée dans Pré-au-Lard et sa future arrivée à la gare locale.


1^er Août 1942. Bibury.

Il sauta par-dessus le ruisseau, se mouillant les pieds dans l'eau glacé. Malgré sa belle naissance dans un manoir, Asia et lui avaient grandi dans le village le plus perdu d'Angleterre et avaient passé davantage de temps à courir les champs qu'à assister à des réceptions. De toute façon, étant donné les « actes » de leurs parents, toute personne souhaitant renouer avec le ministère préférait ne pas trop se mêler à eux ; mais la situation tendait à s'améliorer depuis l'entrée à Poudlard des enfants et leur attitude exemplaire. Il reprit sa route sur le chemin lorsque sa baguette se mit à rabâcher son nom, agaçante. « Ahargh ! » Hero se redressa d'un bond dans son lit et regarda le visage qui se tenait devant lui d'un air complètement perdu. « H-hein… ? » Le chant dissonant de son cousin lui arracha un grognement et il le repoussa comme il put avant de s'asseoir au bord de son lit. « Crétin... » marmonna-t-il, encore à moitié endormi. Tu m'avais dit de préparer quelques affaires, mais sans rien me dire de notre destination, me laissant seul avec mon imagination. Hero se frotta les yeux et bailla à grands bruits. « Mmh mmh, j'te rejoins... » Il dormait sur place. L'adolescent se traîna jusqu'à la massive armoire en chêne qui trônait dans un coin de sa chambre et farfouilla jusqu'à trouver une tenue à peu près correcte : chaussettes et chaussures en cuir, un short et une chemise feraient très bien l'affaire.

Il dévala bruyamment l'escalier en pierre, s'attirant un regard faussement courroucé de sa mère. « Asia ! Asia, je suis prêt ! » Il fonça vers son cousin dans l'idée  de lui rentrer dedans et de le soulever du sol mais se ravisa au dernier moment et se rangea sagement à côté de lui. « Enfin nous pouvons y aller quoi. » Je détestais cette sale ambiance qui s'installait parfois quand nous nous laissions un peu aller, que nous étions naturels et que d'un coup, nous nous reprenions. Un sale malaise s'installait alors entre nous et... Hero afficha un bref sourire forcé et s'éloigna pour saluer sa mère et sa tante. C'était plus facile. « Nous serons sages, promis. » Il n'avait de toute façon aucune idée de leur destination mais sa valise rectangulaire était bien chargée (heureusement, sa mère lui avait jeté un petit sortilège, la rendant bien plus légère).

*prononcé en français.
#6666ff couleur dialogue

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1er Septembre 1942. Quai du Poudlard Express
What is your name
Do you have a place to go

Comme tous les ans, à la même date depuis sept ans, il ressentait cette excitation à l’approche de la gare de Prés-au-lard. Quelque part, même s’il ne le dévoilait pas à ses camarades de classe, il avait toujours ce même sentiment que lorsque la première fois qu’il avait aperçu le village sorcier. Il n’y avait plus autant de curiosité, non, plus comme au premier jour, mais Asia aimait le répéter aux nouveaux : on découvrait de nouvelles choses chaque année à Poudlard et dans ses environs. Le train sembla ralentir, et il s’empressa de nouer sa cravate, jetant un regard en biais à son cousin pour vérifier si la sienne était bien ajustée. Il enfila une veste noire, et grimpa à moitié sur son siège pour attraper sa valise. Il jugea utile d’aider la jeune femme dans leur wagon – avant que Hero ne le fasse – et lui décocha un sourire immense. À elle ou à lui, prenait ce sourire qui le voulait !

Il descendit du train d’un pas léger, sac négligemment jeté sur son épaule gauche. D’un geste il releva la mèche qui lui barrait la vue et quitta quelques instants Hero pour guider les premières années. Il avait été surpris cet été, quand il avait reçu la lettre le nommant préfet en chef. Il était bien loin d’être le meilleur élève de sa génération (sauf en rune, peu de monde pouvait contester le talent dont il faisait preuve face à elles), et bien loin également d’être le plus discipliné. Mais peut-être avaient-ils enfin compris l’intérêt de nommer une personne de sang noble et pur à cette tâche. Il était grand temps de redresser les manières de certains, et de tous ceux qui pensaient être leurs égaux.

Quand toutes les premières années eurent pris la direction des barques, il se dirigea vers les diligences qui attendaient les élèves plus âgés. Et dire qu’au début, il les pensait magiques... Quelle ne fut pas sa déception quand on lui apprit que des sombrals tiraient en réalité la diligence jusqu’au château. Mais d’un autre côté, j’étais plutôt heureux d’avoir découvert ça tardivement. On ne pouvait voir ces animaux squelettiques qu’après avoir été confronté à la mort. Je m’estimais heureux d’y avoir échappé. Il poussa sans se gêner un élève dont le nom ne lui revenait pas, et posa ses fesses à côté de la préfète, en face de son cousin. « J’ai entendu dire que quelque chose de gros se tramait. Il y a des rumeurs sur un nouveau professeur, mais je n’ai pu avoir plus de renseignements... » Il croisait juste les doigts pour que le professeur remplacé soit le dépressif de service.


1er Août 1942. Bibury.
Oh could you tell me?
I saw you hiding in this garden

Il laissa le temps à Hero de saluer sa mère puis sa tante, et le tira hors du manoir de Bibery.  « Notre portoloin n’est pas très loin, juste là-haut, sur la colline voisine ! On transplane ? » En réalité, il ne lui laissa pas vraiment le temps de répondre. Il s’empressa d’attraper sa manche, vérifia d’un rapide coup d’œil si Hero avait bien sa petite valise une main, et transplana. Depuis que Asia avait obtenu son permis l’an passé, il devenait très vite agaçant à trans-planer sans arrêt. Quand ils atterrirent – par réellement en douceur – il ricana devant la tête encore surprise d'Hero. Je devais avouer que me moquer de m'aider à oublier les tensions entre nous. Ni toi ni moi n’en avions voulu. Elles s’étaient incrustées toutes seules dans notre petit duo parfait, et je les détestait. « C’est juste ici ! » D’un geste du menton il désigna un vieil arrosoir dont la peinture écaillée donnait clairement une bonne indication de son âge. « Tu me fais confiance, n’est-ce pas ?* » Il se rapprocha de l’objet. Dans quelques minutes, ils quitteraient leur pays natal. Dans quelques secondes même. Lui et Hero se retrouveraient en Albanie. Ils seraient seuls face  l’inconnu.

J’avoue que j’avais longuement hésité avant de concrétiser ce voyage. Je m’étais demandé s’il ne valait pas mieux que je demande à un de tes frères et sœur, ou l’un des miens, de nous accompagner. Je faisais ce voyage pour deux raisons : marcher sur les pas d’un homme que j’admirais, comprendre son but, revivre son histoire. Mais c’était aussi une bonne excuse pour être enfin libre. Le seul bémol, c’était nous. Depuis l’an dernier plus rien n'était comme avant. Tout ce que je voulais, c’était retrouver le lien unique qui nous unissait. Comme quand nous étions gosses.

*prononcé en français.
#6FA163 couleur dialogue

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1^er Septembre 1942. Dans le Poudlard Express.

Hero jeta un regard de travers à son cousin quand il lui passa sous le nez pour se saisir de la valise de la jeune femme. J'avais encore le droit d'aider n'importe quelle demoiselle en détresse, qu'importe ce qui pouvait se passer entre nous. Mais, acceptant sa défaite à contre-cœur, il s'écarta et s'empara de son propre petit bagage à main. Il récupérerait son immense valise en vieux cuir plus tard, parmi les bagages des autres élèves. Le Serpentard enfila sa veste à la va-vite, oubliant son col de travers, jeta son sac de voyage en travers de son épaule et quitta le compartiment. Asia le rejoindrait plus tard, il avait une mission à accomplir auprès des premières années et Hero n'avait aucune envie d'y assister. Il avait été déçu lorsque son cousin avait été nommé préfet pour Serpentard et que lui demeurait un rien-du-tout. Son honneur avait un peu été sauf l'année passée lorsqu'il était devenue capitaine de son équipe – enfin un domaine où il brillait loin devant Asia ! – puis celui-ci l'avait de nouveau dépassé en devenant préfet-en-chef. Bah, j'allais briller sur les stades quand tu te ridiculiserais, cousin. Ils n'étaient pas exactement en froid mais… Hero n'aurait pas su qualifier leur relation. Plus su. Avant, tout était simple : ils étaient cousins, meilleurs amis, unis comme les doigts de la main. Facile. Mais maintenant ? Une boule d'angoisse familière lui serra le ventre tandis qu'il se postait sous un arbre pour attendre la calèche suivante. « On monte, Hero ? » Toujours nerveux, il ne pouvait laisser passer sa chance. Hero s'engouffra dans une nouvelle carriole qui venait de s'immobiliser le long de la route et s'installa en face de la petite préfète. « J'espère qu'Asia ne va pas tarder, j'ai envie d'avoir une bonne place dans la grande salle. » Vu le temps, il songeait essentiellement à une place dos à la cheminée. L'avantage en tant que Serpentard d'avoir une table sur les côtés de la pièce et non au milieu – il aurait détesté s'asseoir dos à l'allée centrale.

Son cousin surgit et s'installa en face de lui pour commenter les nouveautés de la rentrée. « De gros ? L'ancien professeur de soins aux créatures magiques s'est fait manger le bras… Je ne vois pas quelle pire nouvelle nous pourrions avoir, sauf si un prof est mort pendant l'été. » Est-ce qu'un seul autre prof avait vécu un truc aussi passionnant que leur voyage estival ? Hero croisa le regard de son cousin et lui sourit comme un imbécile avant de se racler la gorge et de regarder ailleurs. Tout était sujet à interprétation désormais. Tout. Il ne pouvait pas juste sourire comme un bienheureux sans imaginer que… Est-ce que nous avions besoin de ça, toi et moi ? J'aurais préféré que ça se passe un poil différemment, tu sais. Que… Bah, je ne sais pas. Ce n'était pas tombé au bon moment, j'imagine. « Arrête de me regarder comme ça.* » Il se faisait peut-être des idées. Sans doute même. Peut-être qu'Asia l'avait regardé normalement, juste parce qu'ils étaient assis l'un en face de l'autre, mais… Peu désireux de croiser le regard d'Asia, il entreprit plutôt de faire la conversation à la petite préfète, lui posant cinquante questions sur son été sans jamais lui laisser le temps d'en poser en retour.


1^er Août 1942. Bibury.

Transplanage brutal. Hero vacilla légèrement à l'atterrissage et donna un coup de poing dans l'épaule d'Asia. « Je t'interdis de faire ça sans me prévenir... » Il avait eu son permis pourtant. Mais je détestai ça, d'accord ? Ça me rendait malade ce mode de déplacement et je préférais encore y aller à pied quitte à perdre du temps. Par principe, il n'avait jamais dit à Asia qui ne supporter pas le transplanage et il s'était même suffisamment appliqué pour avoir le permis. Par fierté, purement pour ça.Au moins cela lui donnait-il un très bon échappatoire à la tension qui régnait entre eux : en râlant contre son cousin, il trouvait des choses – plus ou moins – intelligentes à dire sans que ça ne reviennent perpétuellement vers ce sujet. Mais il fallait toujours que tu prennes ce ton sérieux dés que tu t'inquiétais de quelque chose… Est-ce que tu savais combien je détestais ce ton ? Il me faisait littéralement partir en vrille et même maintenant, il fallait que tu causes comme ça. En français. Hero fusilla l'autre garçon du regard mais se rapprocha prudemment de l'arrosoir écaillé. « Oui, tu le sais très bien.* » marmonna-t-il d'une voix rauque. Ça ne l'empêchait pas d'observer l'objet avec suspicion. Tu ne m'avais rien dit sur notre destination et l'idée de partir seul avec toi, précisément maintenant... Il déglutit avec difficulté et leva les yeux sur Asia pour trouver un peu de courage. « Oui, toujours...* » Là dans l'immédiat, il était occupé à avoir peur et à trouver son cousin un peu trop proche de lui, mais bien sûr qu'il faisait confiance à Asia. Tu n'avais pas compris ? Je te ferai toujours confiance.

*prononcé en français.
#6666ff couleur dialogue

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1er Septembre 1942. Dans les diligences, en route pour le château.
And I know
All of your warmth is true

Asia rigola bêtement en écoutant la réponse de son cousin. Il n'avait jamais vraiment porté le professeur de soins aux créatures magiques, il était certes fâcheux qu'il ait malencontreusement perdu son bras, mais c'était drôle. La fille assise à côté de lui donna un coup de coude, puisque visiblement, rire de ces choses-là ne se faisait pas. « Oh je t'en prie... Soit moins angoissé, Hero.* » Nouveaux regards de travers de la part de leur camarade. Je n'avais aucune idée de comment je t'avais regardé au juste ? Mal ? Trop bien ? J'avais juste levé les yeux, je pouvais quand même toujours regarder en face de moi, non ? « Mesdames, ne fixaient pas trop mon cousin, il a visiblement horreur de ça. C'est sûrement à cause du bouton qu'il a sur le front. » Il lui tira la langue avant d'enfoncer les mains dans ses poches. Il reporta son attention sur la diligence devant eux, oubliant les rires de ses camarades. Un miaulement le rappela à l'ordre et il leva les yeux au ciel. Quand sa mère avait décrété que son hibou – Orion – était désormais trop vieux pour être baladé dans tous les sens, Asia avait d'abord pensé que cette dernière lui en offrirait un autre. Il n'en avait pas été question. S'il désirait un animal, il aurait un chat. Et pas n'importe lequel, celui dont Malia avait dû se  séparer quand elle était partis étudier loin de leur pays natal. Ainsi, il s'était retrouvé avec une boule de poils grise, jamais contente, une vraie diva. À présent, la bestiole l’épiait à travers les trous de sa cage en bois. Ses deux grands yeux jaunes et orange avaient quelque chose de dérangeant parfois. Tss, foutu chat... Nyx ne le lâcha pas du regard, et il le sentait.

La diligence s'arrêta enfin, et ils purent descendre. Comme les années précédentes, leurs affaires seraient montés durant le banquet de rentrée dans leur chambre. Il se sépara du petit groupe pour se placer en tête des élèves de sa maison, entraînant avec lui Hero, et se plaça à la place qu'il avait décidé d'occuper pour le reste de son année. Il salua quelques camarades Serdaigle avec qui il avait noué des liens les années précédentes, et s'assit. « Je meurs de faim... » Enfin, je disais ça, mais je ne mangeais jamais rien. Je savais que ma mère t'avait chargé de me surveiller là-dessus, de me forcer à me nourrir convenablement si jamais je ne le faisais pas de moi-même. « J'espère qu'ils auront de la gelée... » Il fit mine de prêter attention à la cérémonie de répartition, parce qu'il se le devait, et accueillit les nouveaux verts et argent avec un immense sourire. Et puis, le proviseur les fit taire une seconde fois. C'était le temps des annonces, des éventuelles nouveautés. Ils recevaient un nouveau professeur cette année à Poudlard, et quand les yeux d'Asia se posèrent sur le nouveau venu, il lui sembla que sa mâchoire se décrocha.

Par réflexe il attrapa la main d'Hero, sans pour autant détacher son regard de l'homme qui venait de faire irruption dans la salle. Autour de lui, les réactions étaient toutes différentes. De la peur chez certains, de la surprise chez d'autres... Il ne sut pas vraiment où se situer. Quelque part, la situation lui paraissait irréelle. « Hero... » Ça ne pouvait pas être lui. C'était tout bonnement impossible. Pas l'homme qui avait occupé ses pensées ses dernières années... Quelques regards se tournèrent vers lui ; beaucoup savaient la fascination du Carrow pour Gellert Grindelwad.


1er Août 1942. Quelque part en Albanie.
I want to hold
Your hand picking the blue flower

Le voyage en portoloin se passa... bien. Il manqua de se briser les deux chevilles en atterrissant, mais ils étaient entiers. Malia s'était amusée à lui dire qu'il pouvait perdre une oreille ou un petit doigt de pied dans la foulée, alors il était bien heureux de toujours sentir ses dix orteils. Le paysage qui s'offrait à eux était magnifique. Ils venaient d'arriver au sommet d'une colline, surplombant une vallée encore endormie. « Notre première étape, l'Albanie. » Annonça-t-il fièrement. Il lâcha la manche de son cousin et passa une main dans ses cheveux. « Alors, tu en penses quoi ? » Il lui tardait de vadrouiller sur ces terres inconnues avec lui. Il avait dans son sac une tente magique, que sa mère avait acheté pour l'occasion. Camper allait faire partie de l'aventure, et il se sentait prêt.

*prononcé en français.
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1^er Septembre 1942, dans la grande salle.

La réparti de son cousin le vexa. Le fusillant du regard, il releva fièrement le menton et chassa les cheveux qui lui tombaient dans les yeux d'un mouvement gracieux de la tête. « T'es trop bête. » Drapé dans sa dignité quelque peu froissée, il se cala dans un coin du carrosse et préféra se tourner pour observer le paysage à l'extérieur. J'y pouvais rien si tu me regardais comme ça et que ça finissait toujours mal. J'avais peut-être rêvé ce regard-là, mais pas les précédents. Parce que je t'observais à la dérobée avec la même gêne, le même regret, et que je savais parfaitement ce qu'il se passait. Ou parce que je l'espérais peut-être. Oui, peut-être bien que c'était ça, que je voulais de ces regards et que je finissais par les rêver ? Qu'importe, il ne supportait pas ça. Trop bien, trop mal, il n'aurait pas su définir les œillades de son cousin. Plusieurs minutes après, le jeune sorcier se passa discrètement un doigt sur le front et y trouva bien un bouton. Il se renfrogna encore davantage.

Il descendit de la diligence en prenant le plus grand soin à ne pas tâcher de boue ses chaussures. En cuir verni, elle représentait tout ce qu'il aimait : du luxe un peu clinquant, qui n'allait qu'à lui et qu'il adorait arborer. Il s'essuierait les pieds au plus vite. Le sorcier ferma le dernier bouton de sa chemise et resserra la cravate en regrettant d'avoir laissé son pull dans la valise. 1^er septembre et le temps se refroidissait déjà sur les terres écossaise. À la place, il farfouilla dans son sac en bandoulière et sortit une cape soigneusement pliée en huit pour se couvrir. Bientôt, il serait assis au coin du feu et tout irait mieux. Hero emboîta le pas à son cousin, accélérant brièvement pour se mettre à sa hauteur. Il n'avait pas envie de lui parler, il boudait encore pour l'histoire du bouton. Le Serpentard s'installa en silence à côté de son cousin, dos à la cheminée qu'il convoitait, et lissa sa cravate d'un petit geste pincé. Les gens se moquaient de mes petits gestes « trop dignes » comme il disait, mais c'était pourtant ce qui assurait un style sans défaut. Un autre élève, un troisième année, le fixa jusqu'à ce qu'il le fusille du regard. « Ton col est mal foutu... » souffla sa petite voisine, une camarade de septième année. Sans aucune délicatesse, elle entreprit de le rhabiller sous l’œil goguenard de comparses. « C'est bon, lâche-moi... » L'échange s'était fait à voix basse et Asia le ramena dans la réalité en lui prenant la main. Hero s'écarta vivement. « Quoi ? » Il suivit le regard de son cousin et fixa la cible d'un air bête, complètement abasourdi. « Quoi ?! » répéta-t-il plus fort, trop fort, avec l'intonation de l'ébahissement le plus total. Voyant qu'il avait attiré de nombreux regards curieux, il se rassit plus sagement. « Qu'est-ce qu'il fait là ? » siffla-t-il à l'oreille de son cousin. De nombreux élèves autour d'eux les fixaient pour voir leur réaction. La passion d'Asia et de Hero pour Gellert Grindelwald n'était un secret pour personne dans la salle commune des verts et argent. « Asia... » reprit-il encore un ton en dessous. « Tu crois que… Qu'il a un plan ? » Même à lui, ça lui paraissait invraisemblable. Il était toujours le premier pour dire des âneries ou pour se laisser avoir et pourtant… La bouche légèrement entrouverte, il reporta son attention sur le grand sorcier aux cheveux clairs. Avec son regard vairon, il n'y avait aucun doute à avoir…


1^er Août 1942, quelque part en Albanie.

Hero s'emmêla les pieds et termina à plat ventre. Il se releva d'un bond en pestant et en époussetant la jolie veste chic qu'il avait enfilé avant de partir et vira quelques brins d'herbe accrochés à son short. Ses chaussures vernies n'avaient rien. « Je déteste les portoloins. » En fait, en dehors du train et de la marche à pied, il détestait à peu près tous les moyens de transport, magiques ou non. « Raah. » Sa valise était un peu cabossée. Il avait beau être un enfant de la campagne, son côté un peu précieux sur les bords lui jouait des tours en permanence. « L'Albanie. » Tu sentais, Asia, que mes yeux s'étaient mis à briller à la seule mention de cet endroit ? Je regardai le paysage autour de nous et déjà, une foule de souvenirs me revenaient. Les récits liés à Lui, à son histoire, les histoires de mon père, dans les pages de son journal, les aventures racontées par Maman… L'Albanie recelait déjà à elle seule de milliers de trésors enfouis. Ici, nous pourrions... « Asia... » Il hésita avant de lui sauter dans les bras. « C'est parfait ! » Trois secondes après, il avançait déjà à grands pas dans une direction au hasard. « On commence par où ? Ça a dû te prendre un temps fou de monter l'itinéraire, de relever les emplacements des lieux à voir absolument… Tu crois qu'on va croiser des gens intéressants ? » Il continua ses questions sans même s'arrêter pour reprendre son souffle, excité comme une puce. L'Albanie. L'Albanie !

*prononcé en français.
#6666ff couleur dialogue

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asia & hero

1er Septembre 1942. La grande salle.
It’s my fate
Don’t smile on me
Light on me

Avait-il un plan ? C'était une très bonne question. Voyant que certains à sa table attendaient toujours une réaction de sa part, il se reprit, et fit mine d'écouter le bla bla aberrant du directeur sur la réinsertion des sorciers dangereux, et de ce fait, de l'arrivée du plus grand mage noir de tous les temps à Poudlard. Rien n'avait de sens. Cet homme... Il ne pouvait croire qu'il s'agisse du véritable Grindelwald. « Nous verrons bien... » se contenta-t-il de dire. Du coin de l'oeil, il vit le jeune préfet, un certain Jedusor, visiblement intrigué lui aussi par la situation. Il n'était pas le seul à trouver curieux qu'un homme de cette envergure se retrouve là, emprisonné entre quatre murs. Il guetta les réactions des autres professeurs. Eux, comment le prenaient-ils ? « Attends que mon père apprenne ça... » murmura-t-il à lui-même. Bien sûr, il n'apprendrait pas. Pas là où il était. Mais quand enfin il sortait de la prison dans laquelle on l'avait enfermé pour cet homme....

Un élan de haine mêlé de rancœur le prit soudain au corps. Son père s'était battu pour lui. Il avait défendu ses idées à haute voix. Il avait fait une croix sur sa femme qu'il aimait et sa propre famille pour lui ! Je me sentais trahi quelque part. Le voir ainsi, l'air calme au milieu du corps enseignant de notre école... Quelque chose n'allait pas. L'objet de ma fascination de ces dernières années venait de se briser. Je refusais de croire que l'homme que j'imaginais parcourir l'Europe, rassembler les foules et exprimer son désir de ne plus voir le peuple sorcier caché de tous soit ici. Je ne pouvais pas.

Sous leurs yeux, les plats apparurent par magie, et il jeta un regard vide au tas de gelée verte sous ses yeux. La vision du nouveau professeur de runes (parce qu'il fallait que cela tombe sur la matière dans laquelle il excellait ! ) lui avait coupé l’appétit. Il but d'une traite son verre d'eau plate et, le regarda rivé sur son assiette vide, attendit le reste du repas se déroule. Il ne pouvait pas déroger à ses nouvelles fonctions de préfet en chef, et cela aurait bien trop fait plaisir à ce Jedusor de prendre sa place. Pourtant, l'envie de se lever, et de foncer dans son dortoir était bel et bien présente.


1er Août 1942. Quelque part en Albanie.
Because I can’t come to you
There’s no name you can call me

Ta joie fit redoubler la mienne. Asia fixa bien solidement son sac à dos et suivit Hero, qui semblait déjà parti pour tout voir. « Mmh, oui, je dois avouer que ça m'a demandé pas mal d'efforts... » chantonna-t-il. Enfin, Égée l'avait bien aidé. Son grand frère avait pris très à cœur le voyage de son petit frère, et avait mis un oint d'honneur à ce que rien ne soit laissé au hasard. C'était dans ces moments-là qu'il appréciait l'esprit très organisé de son grand frère. Il était le plus posé et réfléchi des enfants Carrow, et cela se ressentait. « La liste des choses à faire est longue. Mais pour commencer... » Il entreprit de déplier une carte aussi grande que lui et s'arrêta pour la lire. Les cartes sorcières étaient bien plus agréables à lire que les cartes immobiles moldus. Les lieux digne d’intérêt étaient plus animés, les lieux supposés dangereux, signalé par un halo de couleur censée dissuader les touristes qu'ils étaient. Il tira son cousin vers lui et posa un doigt sur la carte. « Ici. Nous nous rendons ici pour le début ! Rien à voir avec Grindelwad, j'ai juste cru comprendre que la vallée était magnifique. Nous pourrons y passer la nuit. » Il voulait commencer en douceur. Après, il avait une idée très précise des villages qu'ils allaient visiter. À commencer par ceux dans lequel Grindelwad avait rassemblé bon nombre des disciples, ceux où il avait exterminé ses opposants... Il se fiait aux journaux de l'époque, aux récits de sa mère, aux lettres de son père...

*prononcé en français.
#6FA163 couleur dialogue

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asia & hero

1^er Septembre 1942, dans la grande salle.

Hero considéra son cousin avec inquiétude. S'il avait toujours été un grand fan du mage noir, s'intéressant de très près à ses paroles et à ses idées, Asia était pire. C'était peut-être parce que son père était parti en prison pour lui, ou parce qu'il avait de toute manière des convictions plus tranchées, mais il prenait mal cette présence. Le Serpentard observa Grindelwald d'un air circonspect. Qu'est-ce qu'un homme comme vous venait faire dans ce château, hein ? À quel moment une personne si pleine d'idéaux pouvait-elle s'abaisser à ramper au pied de Poudlard et du ministère ? Était-ce pour retrouver un semblant de liberté ? Rassembler de nouveau les foules comme à la grande époque ? Malgré ses rêves d'enfant, même Hero n'était pas assez stupide pour y croire. Le mage se tenait bien là, au milieu des autres professeurs. Une expression taciturne assombrissait son visage. En tout cas, votre amour pour la jeunesse, pour la prochaine génération, ne transparaissait pas ce soir. Vous veniez réellement lécher les bottes à Dipett et Dumbledore ? Vaguement écoeuré, Hero mangea son repas du bout des dents, toute forme d'allégresse l'ayant quitté. Et son cousin qui ne disait toujours mot… « Asia... » Il ne sembla même pas l'entendre.

Le repas se déroula, morne. Hero fit bien la conversation à ses voisins de table parce que c'est ce que sa mère lui avait appris dés le plus jeune âge, mais l'envie n'y était pas. La bouderie d'Asia se répercutait sur son humeur. Il faudra qu'on discute. Il y a forcément une explication rationnelle à Sa présence ici... « Vous savez pourquoi ils l'ont libéré ? » Aucun besoin de mentionner un nom, ses camarades de tablée avaient compris de qui il parlait. « Bah, avec ce programme de réinsertion, ils espèrent faire du vide à Azkaban, j'imagine. Vu le nombre de sorciers et sorcières arrêtés en Europe ces vingt dernières années… Et puis il faut bien montrer que ce programme fonctionne et présente un intérêt pour les autres sorciers ! Tu imagines les moyens nécessaires à sa mise en place ? Les gens ne soutiendront pas longtemps une chose inutile. » Hero observa l'autre septième année par-dessus son dessert. Ce qu'il disait faisait complètement sens mais… Qu'en était-il de l'avis du sorcier ? Il avait tout lu sur Azkaban ces dernières années, il savait très bien qu'un prisonnier non-volontaire n'avait aucune chance d'être choisi pour ce programme. Mais si Gellert Grindelwald faisait si peur, ça n'avait aucun sens de le faire sortir de prison... Sauf si, effectivement, le ministère comptait montrer sa capacité à dompter les sorciers les plus puissants du siècle. « Mouais... » Peu convaincu, il engloutit le reste de son dessert et se força à l'avaler.


1^er Septembre 1942, dans la salle commune de Serpentard.

Les premières années étaient enfin couchés dans leur dortoir et les autres commençaient petit à petit à rejoindre leurs lits. Hero attrapa son cousin par le coude et l'entraîna vers un coin de la salle commune. « On peut attendre qu'ils soient tous montés se coucher... » Il n'avait pas envie de laisser cette journée en suspend sur une note aussi froide. L'air de rien, il força Asia à s'asseoir à côté de lui et s'installa tranquillement, croisant les jambes avec soin. Il était fatigué, vaguement de mauvaise humeur suite au repas raté qu'il venait de passer, mais avait bien envie de passer un peu de temps avec son cousin. Seul. Les deux garçons avaient fait du social toute la journée, Hero n'aimait pas ça. Il glissa un regard par en-dessous à l'autre adolescent. « Ça va, cous' ? » Dans l'élan, il faillit lui caresser le genou mais se rattrapa et se passa une main dans les cheveux.


1^er Août 1942, quelque part en Albanie.

« Une vallée ? Une vallée ! » Hero se sentait l'âme d'un petit enfant partant pour la première fois en vacances. Dans les faits, ce n'était pas tout à fait faux : il n'avait jamais trop eu l'occasion de partir en vacances en famille. Son père était presque toujours absent, toujours envoyés de ci de là par le ministère pour quelques missions secrètes, et sa mère faisait l'objet d'une surveillance désagréable de la part du bureau en charge des crimes magiques. Quant au père d'Asia, il était tout simplement à Azkaban. Si l'argent n'avait jamais manqué, Hero se rappelait tout de même des tâches d'humidité dans sa chambre et du vieux plancher grinçant. La richesse était un peu factice, même si leur famille s'appliquait à redorer leur blason face au monde sorcier. Décrépitude... Mais peu importait, il voyageait en compagnie de son cousin ! Rien n'aurait pu être plus parfait, sauf si… Je regrettai juste cette gêne permanente entre nous. Je n'aurais jamais dû mettre ce sujet sur le tapis, nous n'aurions jamais dû en parler. Maintenant… Est-ce que nous avions brisé un truc entre nous, cous' ? « Je te suis pour l'exploration de la vallée ! » Il n'avait peut-être pas pris les chaussures adéquates… Tant pis. Il considéra sa vieille paire de mocassins vernis avec une pointe de regret.

*prononcé en français.
#6666ff couleur dialogue

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1er Septembre 1942. Salle commune des Serpentard.
You know that I can’t
Show you me
Give you me

« J'ai l'air d'aller bien ? » répliqua-t-il sèchement. Il souffla et se reprit aussitôt : Hero n'avait pas à pâtir de sa soudaine mauvaise humeur. Encore moins le premier jour. Rien n'était de sa faute après tout. «  Pardon. Ce n'est juste que... Je ne comprends plus rien.  » Il posa une tête sur son épaule et fronça les sourcils. À quel moment tout avait pu basculer de la sorte . Il ne se ferait aucune raison : Grindelwald était à Poudlard pour quelque chose. Il devait avoir une idée derrière la tête. Il ne voyait pas comment cela pouvait en être autrement. «  Cet été encore je ne jurais que par lui...  » murmura-t-il. Du bout des doigts, il tripotait son insigne de préfet en chef, l'air vaguement déçu. Il avait imaginé cette dernière année mémorable, mais pas de la sorte. Il fixa la pointe de ses chaussures noires et ravala son envie d'envoyer valser tout ce qui se trouvait sur la table basse juste là, sous leurs yeux. Il était préfet en chef, il allait avoir à faire de nombreuses fois avec l'équipe enseignante. Peut-être un moyen pour en savoir plus sur les motifs de Grindelwad à Poudlard. «  J'espère qu'il est bon prof au moins...  » ricana-t-il toujours son épaule. Il essayait de détendre l’atmosphère mais en réalité, il brûlait d'envie d'exploser pour de bon. Il se contenait pour Hero, pour sa propre image, et pour ne pas faire redescendre toute sa maison. Il ferma les yeux et lâcha un long soupire. «  Ah, est désolé pour tout à l'heure dans la diligence. Je peux arranger ça, avec le bouton. Si tu veux.  » Il tapota sa baguette du bout des doigts et esquissa un sourire contre son épaule.

Mais tu savais ce qu'il y avait de bien au moins  J'étais avec toi. Pour encore un an. Je n'avais aucune idée de comment nous allions gérer cette année tous les deux. Des obstacles qui nous attendaient. De si nous arriverions à tenir, à pouvoir jouer des rôles désormais quand nous serons  ensemble.


1er Août 1942. Quelque part en Albanie.
I can’t show you a run-down part of myself
I wear a mask again and go to see you
But I still want you

Asia inspecta rapidement la tenue de son cousin et eut un peu de peine pour lui. En temps normal, il portait sensiblement les mêmes affaires que lui. Mais pour ce voyage, il avait dû tordre le cou à ses vieilles habitudes vestimentaires. Il avait gardé son gilet à grand carreau sous sa veste sombre, son pantalon marron, mais avait troqué ses chaussures trop fragiles contre de solides paire de bottines en cuir. Ils débutèrent donc leur marche dans les vallées encore sauvages d'Albanie, pour son plus grand plaisir.

C'était dans ces moments-là qu'Asia se félicitait d'avoir une endurance à toute épreuve. Son physique pouvait prêter à confusion (jamais personne n'aurait pu croire qu'il était très sportif, et qu'il ne pouvait pas rester assit sans bouger plus d'une heure), avec son corps enfin très fin, et une musculature à peine développée. Seule ses épaules semblaient s'être beaucoup développées au fil des derniers mois. « On fait une pause pour manger un bout ? » Évidemment, il avait tout prévu.  

*prononcé en français.
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1^er Septembre 1942, dans la salle commune de Serpentard.

La répartie idiote de son cousin lui arracha un soupir. Hero se laissa aller contre le dossier du canapé en cuir en levant les yeux au ciel. « Mouais. » Il acceptait de bonne grâce les excuses d'Asia. Je savais que voir Grindelwald ici t'avait secoué, j'aurais bien eu du mal à t'en vouloir pour un bref accès de mauvaise humeur à mon encontre. Cependant… J'étais tout autant déçu que toi, d'accord ? Notre idole de toujours, notre roi, notre leader… Était professeur de runes à Poudlard. Hero se gratta la joue, ne sachant que dire pour alléger la situation. Asia s'en acquitta fort bien pour eux deux. « Laisse mon bouton en paix, ok ? J'ai pas envie de me retrouver avec une verrue indélébile à cause de toi. Ma beauté en pâtirait. » Il plaisantait. À moitié. « Aller cous', on s'en fout. Il était une image du passé, on sera celle du futur, d'accord ? » Belle éloquence ! Il sourit d'un air suffisant, juste pour la beauté de trois mots à peu près bien alignés. Hero tapota la jambe de son cousin en repoussant sa baguette. « Fiche-moi la paix avec ça, tu me toucheras pas. » Le jeune sorcier tourna la tête, son nez heurtant celui d'Asia, et il s'écarta, un peu gêné. Il était de ces choses tellement parfaites qu'il ne pouvait les ignorer et ça le gênait. Ça le gênait uniquement parce qu'ils n'avaient posé aucun mot dessus. Ils avaient abordé la question avant de la rejeter et de prétendre une chose fausse. C'était difficile à tenir. Et toi, cous', qu'en pensais-tu ? Là tout de suite, dis-moi ce qui te traversait la tête ? Tu étais déçu pour Grindelwald et je l'étais aussi. Mais...

Hero regarda un sixième année passer la porte qui menait aux dortoirs. « On va voir si les elfes n'ont pas égaré nos valises ? Ou tu veux qu'on reste encore un peu là ? » L'année passée, sa valise avait mis six jours avant de lui parvenir, les elfes l'ayant malencontreusement oublié à la sortie du Poudlard Express. Le jeune Serpentard avait retrouvé sa malle en cuir détrempée, ses affaires ayant vaguement moisie. Sans le concours d'une camarade de promo, ses habits auraient été irrécupérables. Hero avait passé les six semaines suivantes à jouer des tours aux elfes près des cuisines, jusqu'à ce que l'un de se venge lors d'un repas. La guerre était toujours déclarée aux cuistos en chef du château et il craignait des représailles cette année. « S'ils m'ont volé mes affaires, je… » Tant pis, il prendrait celles d'Asia mais il avait pas mal de choses précieuses dans cette malle, à commencer par des photos de leur voyage et son album photo préféré. Je tenais à toutes ces vieilleries comme à la prunelle de mes yeux. Bien sûr, le journal de mon père m'accompagnait tous les jours, me guidant dans mes choix et dans mon perpétuel travail sur moi-même. Mais nos albums photo, Asia ? Nous y étions tous les deux, depuis le début de nos vies. Hero adressa un sourire doux à son cousin.


1^er Août 1942, quelque part en Albanie.

Il avait mal aux pieds. Il en était sûr, si on lui demandait quoi que ce soit à propos de ce voyage, il répondrait qu'il n'avait jamais eu aussi mal aux pieds. Et encore, Hero était heureux de porter des chaussettes hautes dans ses mocassins en cuir. Quand Asia proposa de faire une pause pour manger un morceau, le sorcier opina du chef et se laissa tomber sur la première pierre venue avec un soupir de soulagement. S'il présentait une excellente capacité pour l'effort bref, l'endurance n'était absolument pas son point fort et avec son caractère de précieux, il évitait les trucs trop douloureux. C'était d'ailleurs dans une logique absolue qu'il était devenu batteur pour l'équipe de Serpentard, se révélant ma foi extrêmement doué pour dégommer ses adversaires. Il fallait croire qu'être un peu précieux n'empêchait pas de démolir l'adversité pour gagner. « Tu as bien préparé ton coup, Asia. » C'était un constat, avec une pointe d'admiration. Il savait que son cousin préparait quelque chose en cachette, ils étaient trop proches pour parvenir à se cacher un truc pareil… Mais jusqu'au bout, Hero n'avait pas réussi à savoir de quoi il s'agissait. Et ça, c'était un exploit. Il était tellement curieux et fouineur qu'il finissait généralement par parvenir à ses fins et tout découvrir. Pas cette fois. « Merci*, en tout cas. Ça va nous faire… du bien. Je pense. » Bien sûr, il y avait tout l'aspect voyage initiatique, mais il songeait surtout à leur petit malentendu commun. La distance qui s'était installée entre eux le rendait malheureux et savoir qu'Asia voulait toujours voyager en sa compagnie était le plus beau cadeau de son été.

*prononcé en français.
#6666ff couleur dialogue