Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]



 
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Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]

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Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
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Âge : 59 ans
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Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
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MessageSujet: Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]  Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI] Icon_minitimeMer 5 Aoû - 10:05



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« THE ENDING'S THE SAME, THE WORLD WILL NOT CHANGE »

Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Grindelwald était parti en direction du bureau de Dumbledore, laissant dans son dos une Lavande vidée de toute joie de vivre et d’un Belladone encore abasourdi par les évènements. Dans d’autres circonstances, on aurait pu croire à l’attaque d’un Détraqueur et pourtant, le mage noir n’avait asséné que le cruel courroux de sa déception. S’éloignant d’un pas vif, le pas lourd de ses bottes raisonnant gravement dans les dalles du sol, les pans de son manteau volant dramatiquement dans son sillage, le sombre sorcier contenait pourtant sa colère pour éviter de ne reproduire le geste accidentel de sa protégée quelques minutes auparavant. Mais s’il sentait son sang bouillir dans ses veines, il se devait pourtant résister à l’envie d’expulser cette rage par la violence. Marcher en direction du bureau de Dumbledore calma légèrement ses nerfs. Peut-être avait-il rencontré d’autres professeurs ou élèves sur le chemin, qu’il n’avait sûrement pas vu et avait probablement bousculé brusquement de son épaule. En réalité, il ne ressentait plus rien, plongé dans une sorte de léthargie de rage où seule son envie de briser un mur de pierres avec ses seuls poings faisait frissonner son corps. Rapidement, il entendit les pas affolés de quelques Aurors derrière lui. Braves chiens.

Si le trajet entre le bureau du directeur et celui de l’adjoint de ce dernier avait permis au mage noir de faire redescendre la pression, d’autres éléments parvinrent à son esprit plus lucide. Si la rage pure et physique était redescendue d’un cran, sa colère n’en restait pas moins attisée par un nouveau sentiment d’injustice. Et il ne se ferait pas prier pour en faire part à Albus. Certaines questions sur le bon fonctionnement de l’école se devaient d’avoir des réponses. Le cas de Lavande était un sujet périlleux mais il avait été témoin ce jour-là d’une faute grave de la part de l’élève mais aussi de ceux chargés de son éducation magique. C’était inconcevable que l’adolescente ait été victime d’une telle négligence qu’elle en fusse venue à une telle incompétence. Une fois arrivé devant la porte de son ancien amant qui s’était pourtant montré si doux avec lui quelques jours auparavant, Grindelwald, la plaie toujours présente sur son front et toujours couvert de la poussière des gravats, entra en trombe dans la pièce dédiée à Dumbledore. Rapidement, le mage noir fixa son regard asymétrique et glacial sur Albus. Un Auror, sentant la colère qui animait la carcasse germanique, tenta d’attraper le repris de justice par le bras avant que ce dernier ne se dégage d’un coup sec et ne vienne placer ses deux paumes sur le bureau de Dumbledore.

— C’est ainsi qu’on gère les élèves en difficulté ? Huntergrunt vient de faire sauter un couloir tout simplement en faisant une erreur de prononciation du sortilège Expelliarmus ! Je pensais qu’elle maitrisait la théorie mais elle m’a avoué avoir ne même pas s’être entraînée à le prononcer. À quel point a-t-elle abandonné ? Comment osez-vous la laisser dans un tel état de perdition ? C’est Poudlard, ici, pas Durmstrang !

Ses ongles vinrent griffer le bois du bureau tandis qu’il baissa la tête et ferma les yeux pour contenir un élan de rage qui lui parcourait la nuque. Une phrase du professeur de métamorphoses en personne raisonna dans ses oreilles et provoqua l’abattage du poing furieux du mage noir sur la table, provoquant une secousse qui firent trembler les différents objets qui la jonchaient. Il reprit alors d’une voix plus calme et grave, mais tremblante toujours de cette colère dont la flamme n’était nullement tarie.

— Tu m’as dit toi-même qu’à Poudlard, une aide serait toujours apportée à ceux qui en ont besoin… Alors dis-moi où est cette aide pour elle ? Dis-moi pourquoi il faut que les deux derniers venus de l’équipe pédagogique de cette « prestigieuse » école soient les premiers à se soucier de son sort.

Il releva les yeux vers Albus, plantant ses iris chaotiques sans aucune timidité dans celles azurées de son interlocuteur.

— Où étais-tu, encore ? Tu as été le témoin de l’abandon de cette enfant et ce depuis sa première année. Tu n’as rien fait à part être peut-être patient et conciliant, comme tu le fais d’habitude alors qu’elle avait clairement besoin de plus d’attention. Te soucies-tu vraiment des futures générations, Albus, ou te contentes-tu de regarder juste passivement les mortels s’agitaient au pied de ta tour dorée ? Tu as toujours été insupportablement passif et c’est encore plus flagrant quand je vois que cette gamine n’est même pas capable de prononcer son sortilège correctement !

Il aurait pu accabler Dumbledore un peu plus. Où avait-il été quand il fallait arrêter le mage noir et sa folie destructive qui ravageait l'Europe, par exemple. Mais il n'avait pas envie de régler ceci ici et à ce moment. La priorité était sur Lavande et l'injuste abandon dont elle avait été victime. Il pointa la porte derrière lui, son autre main ayant toujours ses ongles plantés dans le bois.

— J’ai donné mon temps pour elle, par pure… générosité, me demandant si j’étais finalement vraiment moi-même, décelant un potentiel indéniable chez elle ainsi qu’une profonde détresse et tout cela pour quoi ? Je pensais juste lui réapprendre la simple pratique de ses sortilèges, il faut aussi que je m’occupe de la théorie de ces six dernières années en seulement quelques mois ?

S’énerver ainsi n’avait pas arrangé son mal de crâne, bien au contraire. Son rythme cardiaque avait drastiquement augmenté sous cette rage qu’il tentait tant bien que mal de canaliser pour ne pas faire sauter toute l’aile du château et lui avec mais cela avait entraîner une douleur plus forte au niveau de sa plaie. Il passa rapidement deux doigts et constata qu’il saignait toujours. Cela faisait des décennies qu’il n’avait pas vu ce qui coulait dans ses propres veines, lui rappelant sans difficulté son côté mortel. Lavande pourrait au moins se vanter de cela. Il se recula du bureau avant de se laisser tomber dans un des fauteuils devant le bureau d’Albus. Le regard dans le vague, il eut un sourire désabusé.

— Quant à ton professeur de Défense Contre les Forces du Mal… Il est censé enseigner à tes élèves comment se protéger des personnes comme moi. Or cela fait déjà deux fois qu’il me prête sa baguette.

Véritable aveu qui risquait de mettre Belladone et lui-même dans une position délicate, Grindelwald estimait qu’il n’avait désormais plus grand-chose à perdre. Peu lucide par sa blessure au crâne et par sa colère frustrée, il soupira finalement, l’orage ne faisant plus que tonner au loin, pour l’instant.

— Raven a accompagné Huntergrunt chez Dippet tandis que les Aurors ont déjà réparé les dégâts dans le couloir. Vous pouvez être libre de m’accuser de l’incident si cela peut éviter à l’élève d’être expulsée.

Il se passa les doigts d’un air songeur sur les lèvres, regardant les pieds du bureau avec un air regard vide, la colère se tassant dans un coin. Cependant, le sentiment d’injustice qui animait Grindelwald était toujours présent et menaçait de repartir de plus belle d’un instant à l’autre. Il ne manquait que d’une étincelle pour remettre le feu aux poudres. Néanmoins, l’incendie était pour le moment maîtrisé. Avoir pu exprimer tout ce qu’il avait eu sur le cœur sur l’instant lui avait indéniablement fait du bien.
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Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
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Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
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MessageSujet: Re: Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]  Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI] Icon_minitimeMar 18 Aoû - 17:31



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« THE ENDING'S THE SAME, THE WORLD WILL NOT CHANGE »

Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Le vent sifflait dans la cheminée, chuintant d’un ronflement dodu avant de disparaître dans un soupir. Ainsi, il allait et venait, au rythme d’un tendre respiration qui apaisait la réflexion du professeur Dumbledore. Confortablement installé au fond de son siège, une pile de devoir à corriger devant lui sur les propriétés du sortilège de Transfert. Une tasse de thé au miel d’érable, accompagné de sa douceur au citron, préparait l’effort à venir. C’était une journée tout ce qu’il y avait de plus tranquille, et Albus aimait les journées tranquille. Cela le changeait. Il n’y avait pas de mal à parfois revenir à des choses simples ; plus il prenait de l’âge, et plus il appréciait ces instants. Il en serait presque venu à oublier tous les problèmes qui l’attendraient au-delà de la porte de son bureau, à commencer par les déboires de Gellert Grindelwald. Lui qui craignait de le voir redevenir un puissant mage noir au sein de son école, voilà qu’il se mettait à le suivre partout pour réparer des bêtises d’adolescent tourmenté. Peut-être n’était-ce qu’une période « d’accalmie » (si on pouvait l’appeler ainsi) avant que les ennuis ne commencent réellement.

Albus se penchait sur son travail, après avoir siroter une longue gorgée de thé, et remit ses petites lunettes sur son nez… avant de sentir son bureau trembler sous la pression d’une explosion dans le lointain des étages supérieurs. Après que celle-ci se fut calmée, une seconde passa où Albus ne réagit pas. Oh, des explosions, il y en avait souvent à Poudlard ; il n’était pas rare qu’en cours, un élève particulièrement peu soigneux ne fasse exploser son chaudron durant le cours de potion, ou qu’une baguette n’éclate durant un cours de sortilège. Les professeurs de l’établissement étaient habilités à gérer ce genre de problème. Mais quelque chose, profondément ancré entre son estomac et son sixième sens, ne lui faisait craindre le pire. Ces pressions soudaines qui s’abattent sur vos épaules car, même si tout semble allait pour le mieux, vous savez que quelque chose de mauvais va bientôt se produire. Il posa sa tasse de thé et se frotta l’arrête du nez. L’explosion venait de loin. Elle avait pourtant été assez puissante pour faire trembler son bureau. Bien évidemment, l’image d’une certaine élève se fit bientôt assez imprégnée dans sa tête pour prévenir qu’il n’était pas au bout de ses peines. Ce n’était pas la première fois qu’elle commettait des catastrophes dans l’établissement. Après quelques minutes, il s’apprêtait à se lever, en route pour le bureau du Directeur Dippet… quand Gellert Grindelwald fit interruption de la pire des manières que ce soit. Une sombre tornade, plus pâle que d’ordinaire, portant sur sa figure des stigmates cramoisies de l’explosion, l’oeil brillant d’une colère qui ne se contenait plus. Albus soupira et se rassit, non sans avoir au préalable fait un geste aux Aurors pour qu’ils puissent disposer en toute tranquillité. Il ne fallut pas plus d’une seconde supplémentaire pour que le mage noir frappe des paumes de ses mains sur le bois, s’écriant du mauvais suivi de la jeune Lavande Huntergrunt. Albus retint un profond soupir, restant le plus possible impassible.

Je pense que tu ne saisis pas très bien le situation, Gellert, laisse-moi te dir…

Mais il fut coupée dans son élan par Grindelwald qui déjà reprenait son monologue, usant de ses anciennes phrases contre lui; que la fameuse aide dispensée par Poudlard avait été inutile jusqu’à tant que lui et Belladone ne soient arrivés dans cette école. Au moment où ses yeux se relevèrent pour se croiser avec les siens, Albus haussa légèrement les sourcils. Évidemment, toutes les charges convergeaient contre lui. Tout le marasme de Gellert s’était effondré comme neige au soleil pour laisser apparaître une soudaine combativité qu’il ne lui avait pas vu depuis des siècles. Une sinueuse rage, infiltré d’injustice, qui faisait brûler son regard. En toute objectivité, c’était beau à voir. Il poursuivit, déclarant que Dumbledore avait été honteusement passif, comme toujours, à regarder les autres de haut depuis sa tour ; que Lavande ne l’intéressait pas et que pire encore, il l’avait laissé tomber. Pointant un doigt vers la porte, le mage noir insista sur toute la générosité avec laquelle il s’occupait de cette pauvresse, mais sous-estimant la portée de son retard. Pendant ce temps, le sang qui s’était largement écoulé de sa plaie se mettait déjà à coaguler autour de la plaie, portant à sa crête un rouge coq des moins gracieux. Se rendant lui-même compte de sa blessure, Gellert tituba légèrement jusqu’à tomber dans un fauteuil. Un court silence s’installa entre eux deux, Albus se retenant par tristesse. « Cela fait déjà deux fois qu’il me prête sa baguette. »

PARDON ?!

C’était beaucoup trop. Au tour d’Albus désormais de se lever, frappant le bureau du plat de sa main, son visage que Gellert avait l’habitude de voir si impassible se transformant sous la colère. Comment un pareil outrage avait pu lui filer sous le nez, invisible, jusqu’au moment où le mage noir aurait pu réellement s’en servir à d’horribles fins. Son coeur battait fort, enveloppant son corps d’une angoisse brûlante ; deux fois, Gellert Grindelwald avait tenu une baguette fonctionnelle dans les mains… et il se trouvait encore ici, calomniant le professeur Dumbledore pour le bien d’une… née-moldue. Albus prit de longues respirations, détournant son regard du mage qui terminait son monologue en déclarant qu’il était prêt à prendre la responsabilité, et que Belladone s’occupait de l’élève. Une minute pleine, fantomatique, avant qu’Albus ne reprenne la parole :

Tu as fini ?

Sa mine était sombre. Il passa une main pour réveiller ses traits soudainement fatigués et posa ses lunettes de lecture sur le bureau avant d’en faire le tour. Il y avait des priorités. Un regard fut échangé entre le professeur et le tout jeune phénix encore oisillon de sa dernière renaissance. Fumseck lui tourna le dos en remuant de la queue. Très bien, je ferai ça sans toi, mon ami. D’un mouvement de sa baguette, il appela un tissu doux qu’il aspergea d’eau et se pencha au-dessus de Gellert. Sa blessure n’était pas si grave que ça, c’était tout ce sang et cette poussière accumulée qui la rendait impressionnante. Aussi, alors que sa magie aurait été largement assez puissante pour épurée cette plaie d’un murmure, Albus profita de l’esprit groggy de son ancien amant pour éponger son front avec douceur. L’accusation lui saignait encore le coeur au fer blanc, mais il ne dit rien. Le tissu se nettoyait au fur et à mesure qu’il se colorait de brun et d’écarlate, chaque passage plus doux que le précédent. Au bout d’un moment, le silence fut trop dur à supporter, si bien qu’Albus soupira :

Toutes ces semaines de silence, c’est donc maintenant que tu commences à dire ce que tu penses véritablement ? Tu penses que j’ai abandonné cette jeune fille ?

A peine souffla-t-il sur les cheveux de Gellert que la salissure s’envola aussitôt, les rendant à nouveau plus éclatant qu’un reflet de lune. Albus continuait d’éponger cette plaie, longuement, tristement :

Ce n’est pas le premier accident qu’elle cause ici. Plus d’un élève a été blessé par sa maladresse. En deuxième année, une pétition tournait chez les parents des familles sang-purs, quand ceux-ci ont appris qu’une née-moldue avait été accepté à Serpentard. Cette pétition était soutenue par des noms connus, faisant écho jusque dans les couloirs du ministère. Le Directeur Dippet, sauf tout son respect, a perdu depuis longtemps les raisons qui ont fait de lui le puissant sorcier qu’il était. Si je ne m’étais pas interposé, à la fois comme éminent professeur de l’établissement et en tant que président du Magenmagot, la faiblesse de Dippet n’aurait pas pu lui permettre de rester à Poudlard.

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MessageSujet: Re: Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]  Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI] Icon_minitimeVen 21 Aoû - 12:44



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Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Le mage noir s’était emporté dans sa colère, il le savait. Cela n’était pas pire que cela aurait pu être cependant. Sa rage n’avait pris personne pour tribut, n’avait emporté aucune âme pour redescendre. Cet effort pour se contenir avait été quasiment insurmontable, ne se donnant même pas la peine de se retenir d’ordinaire. Peut-être était-ce cet éclat de roche qui était venu lui percuter le crâne qui avait altéré ses pensées les plus destructrices, ou peut-être était-ce tout simplement le contact permanent avec des gens simples et innocents. Pourtant, cela ne l’avait pas empêché de jeter en pâture Belladone à Albus. Une certaine confiance s’était installée entre le mage noir et le jeune professeur de Défense Contre les Forces du Mal mais cette improbable amitié venait de voler en éclats par cette délation pourtant désintéressée de Grindelwald. L’exclamation outrée de Dumbledore et le bruit de ses paumes sur le bois de son bureau raisonnèrent douloureusement dans le crâne du repenti qui grimaça. Le choc n’avait pourtant pas été violent ni particulièrement sonore, de même que la voix de l’illustre professeur, mais cela avait suffi à assourdir le mage noir. Ce dernier porta néanmoins son regard sur l’homme qui se tenait devant et qui d’ordinaire était si impassible.

Les sempiternelles lassitude et mélancolie présentes dans le regard azuré de Dumbledore avaient, pour la première fois depuis très longtemps probablement, disparu. Une colère notable était visible sur le visage du professeur de Poudlard et Grindelwald ne put empêcher un sourire entre l’insolence et la fierté se dessiner sur ses lèvres. Cette révolte, il avait toujours eu envie de la voir dans les iris de son ancien amant. Enfin, il se levait pour quelque chose, pour combattre, réparer un outrage qui avait été fait. Mais cette colère retomba tout aussi vite qu’elle n’était montée, à la grande déception de l’ancien mage noir. Ce dernier avait fini son monologue et c’était flottant entre un sentiment à mi-chemin entre l’agacement et la peine que Grindelwald laissa un silence s’installer entre lui et Albus. Ce dernier était redevenu calme et silencieux et son regard s’était détourné. Il était redevenu laidement passif. Se mordant la lèvre inférieure de cette colère dont les flammes se ravivaient doucement, Gellert fusillait de son regard dichotomique son mutique interlocuteur. Il lui aurait crié d’arrêter d’arborer ce visage éternel de calme truqué, d’impassibilité prétendument sage, habilement feints par l’arrogance de ce rôle de sauveur ultime et omnipotent qu’il se donnait.

Les trois mots que prononcèrent Albus finirent d’agacer proprement Grindelwald qui se contenta de se replacer dans son fauteuil pour éviter d’éructer une nouvelle tirade à l’encontre de son ancien amant. Se mordant toujours l’intérieur de la lèvre, il ferma les yeux et préféra se masser une tempe d’une main, bien que cela fût particulièrement inefficace pour tenter de soulager la migraine qui enlaçait son crâne. Répliquer n’arrangerait rien. Il entendit alors Albus bouger et ouvrit un œil pour le suivre du regard. Tenant un pan de tissu humide, le professeur de métamorphose se posa près de son ancien amant pour éponger la plaie de son front. L’eau fraiche sur sa blessure lui fit faire un instinctif mouvement de recul. Pourtant, rapidement, le contact d’une douceur dont seul Albus avait le secret se révéla être agréable. La froideur de l’humidité l’apaisait, ôtant la souillure poisseuse du sang et la poussière aride de la pierre de son visage. Sa colère retombant, Gellert finit par fermer les yeux, s’abandonnant à la douceur des gestes de son ancien amant. Cela le berçait presque et il aurait pu s’endormir ici et maintenant si cela avait continué quelques minutes de plus dans un tel silence.

Pourtant, Albus prit la parole, sa voix raisonnant entre les murs silencieux de son bureau. Une certaine peine était perceptible dans l’écho de ses propos. Une peine que Gellert n’eut aucun mal à justifier. Pour lui, Lavande avait bel et bien été abandonnée par Dumbledore, c’était indéniable et l’ancien mage noir ne remettrait jamais ceci en question. Pourtant, cette négligence était malheureusement justifiée. Il se doutait que le professeur de Métamorphoses partageait ses doutes sur le potentiel mal qui rongeait la jeune élève de Serpentard. Il savait le traumatisme qu’avait dû endurer le cœur de l’aîné de la fratrie Dumbledore, malgré ce que ce dernier voulait bien laisser paraître. Indubitablement, Albus retrouvait de sa sœur en Lavande et c’était peut-être pour cela qu’il ne voulait pas se mêler de près ou de loin à la jeune fille. Par passivité. Pourtant l’illustre sorcier tenta péniblement de se justifier, indiquant que sans lui, la pauvre enfant aurait déjà été renvoyée de Poudlard depuis longtemps sans son intervention. Oui, Dumbledore était influent dans la politique du monde sorcier britannique. Mais est-ce que cela avait vraiment arrangé les choses pour l’adolescente, seule Née-Moldue dans cette maison où tous (ou presque) la haïssait par sa seule condition ? La situation que vivait Lavande était peut-être l’inverse de celle dont avait été victime Ariana et pourtant, c’était d’une étroite similarité.

— T’es-tu vraiment demandé si la garder à Poudlard, telle une brebis au milieu des loups, était la bonne solution ?

Il repensa à cette soirée où elle l’avait enlacée comme une enfant aurait enlacé son père. Il ne fallait pas être un génie de la légilimancie pour se douter que la situation compliquée familiale de l’adolescente. L’obliger ainsi à retourner d’où elle venait n’était finalement peut-être pas la meilleure des solutions pour améliorer le quotidien de l’élève. Il aurait fallu la suivre et être disponible pour elle. Albus aurait pu la prendre sous son aile, comme il l’avait fait avec Newt Scamander et Belladone Raven pour ne citer qu’eux. Mais Lavande était telle un fantôme d’Ariana, un épouvantard constant dans sa salle de cours, une réminiscence de ses propres démons et traumatismes qui lui rappelait inexorablement sa propre mortalité. Gellert n’était pas assez pur de cœur pour être le pilier de Lavande et l’exorciste d’Albus. Quelques temps auparavant, il les aurait tués tous les deux pour s’éviter de les délester de leur fardeau respectif. Il soupira doucement.

— La garder à Poudlard était effectivement la meilleure chose à faire, je pense. Cependant, oui, Albus, tu lui as tourné le dos. Et nous savons tous les deux pourquoi.

Il avait prononcé ces quelques mots avec une froide honnêteté, n’ayant voulu retenir le couperet de la vérité. Il était peut-être le seul ici à oser contredire Albus, à le bousculer un peu dans cette école où il avait assis son autorité pacifiste, bienveillante voire divine pour certains. Avec douceur, il prit la main qui continuait d’adoucir le mal physique de son front et en caressant le dos quelques secondes. Finalement il se leva, même si ses jambes auraient préféré rester à se reposer, et regarda son ancien amant dans les yeux. Il ne doutait pas de la peine qu’il venait de lui asséner par ces simples mots pourtant colorés par une certaine vérité. Un long silence s’installa entre les deux hommes et Gellert finit par poser avec douceur sa main sur le bras du professeur devant lui. Le visage de craie du mage noir était véritablement désolé, n’arborant aucun sadisme mesquin. Indirectement, il était désolé pour tout car, tout ceci était, par un jeu de causes et de conséquences, sa faute. S’il avait su, des décennies auparavant, que cette simple jalousie désespérée et furieuse d’adolescent à laquelle il s’était plié pour régir sa baguette aurait eu de telles répercussions sur tant d’âmes différentes, il se serait gardé d’expugner sa rage aveugle. La culpabilité le rongeait mais Albus était victime tout autant que Lavande. Finalement, dans un élan spontané, Gellert finit par enlacer avec douceur – et une certaine réserve néanmoins – cet homme qu’il avait brisé.

— Ce n’est pas de ta faute.

Son ton avait été grave mais chaleureux, visant à réconforter et convaincre Albus de cette nouvelle vérité. Il voulait ainsi le dédouaner de cette culpabilité qu’il pouvait ressentir à l’égard de Lavande. En réalité, Dumbledore, dans cette situation, était probablement pour l’une des rares fois de sa vie, tristement impuissant. Mais un écho désagréable raisonna dans l’esprit altéré de Grindelwald. Ôter les doutes des esprits de ses interlocuteur était un exercice qu’il avait longtemps perpétré pour attirer des fidèles de poids à ses côtés. Même encore aujourd’hui, il utilisait ses quelques mots pour décharger ses proches à Poudlard des fautes dont ils s’accusaient eux-mêmes. Il retint un soupir, son regard se perdant sur les dalles du sol du bureau d’Albus. Il ne pouvait s’empêcher de penser que jamais il ne changerait. Tout comme ce geste, peu anodin, de prendre la personne qu’il souhaitait convaincre dans ses bras. Pourtant, ce n’était pas Credence ou Lavande qu’il tenait contre lui. Ce n’était pas pour convaincre le jeune homme ou réconforter la jeune fille qu’il acceptait de donner de sa chaleur corporelle. Non, il tenait bel et bien Albus entre ses bras et une certaine angoisse naquit dans son ventre, ayant l’impression de se comporter de la pire des manières avec son ancien amant. Son comportement n’avait pas changé. Il usait de tout ce qui avait fait de lui un brillant manipulateur envers la personne à laquelle il tenait peut-être le plus : le contact physique, la douceur mielleuse, les paroles brutes d’une honnêteté visant à faire évaporer doutes et culpabilité envers l’interlocuteur. Finalement, il serra légèrement le tissu qui recouvrait le dos d’Albus, chassant cette douceur pour s’accrocher à lui. Cela faisait quarante ans qu’il n’avait pas fermer ses phalanges sur l’échine de quelqu’un d’autre. Quarante ans qu’il n’avait pas retrouvé tel contact. La chaleur de ce corps contre lui n’avait rien à voir avec celui des autres. La gorge sèche, il craignait pudiquement que l’homme contre lui ne sente son cœur marteler sa poitrine. Il ne s’était d’ailleurs toujours pas habitué à cette sensation qu’il ressentait de nouveau depuis son arrivée à Poudlard qui le faisait se sentir vivant.

Il ne sut combien de temps il avait passé à s’enivrer du parfum citronné d’Albus contre lui. Gêné, il pensait que cela faisait des heures. Heureux pourtant, il trouvait que cela avait été bien trop court. Pourtant, il se résolut à libérer son ancien amant de cette étreinte soudaine. Quelque peu bousculé et dérangé par sa propre spontanéité audacieuse, Gellert eut un regard relativement fuyant, une moue se dessinant malgré lui sur son visage. Un silence lourd s’installa de nouveau entre eux dont le mage noir se fit un devoir de briser. Finalement, un sourire légèrement mélancolique étira ses lèvres.

— Ne sois pas trop dur avec Belladone, il n’y est pour rien.

Encore une fois, il dédouanait leur jeune collègue de son échec de conduite envers le prisonnier qu’était Grindelwald. Encore une fois, il déchargeait, même absent, un autre de sa faute. Il soupira avant d’avoir un rire dépité, déçu de lui-même et imperceptiblement gêné et finit par tourner le dos d’Albus, touchant d’un doigt d’une curiosité puérile un insolite bibelot sur le bureau du professeur de Métamorphoses.
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Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Les songes de Dumbledore ont toujours été considérés comme impénétrables. Ses choix, méprisés. Ses ambitions, critiqués. Son talent, loué jusqu’à la jalousie. Son silence, suspecté. Rien de ce qu’il faisait ne trouvait de sens dans les esprits de ses contemporains, et ceux qui acceptaient de ne pas tout comprendre l’élever au rang de seigneur, de celui qui savait tout depuis le début, et qui avait œuvré dans l’ombre comme si c’était grâce à lui que le soleil se levait chaque matin. Une abnégation qui lui faisait plaisir, tout autant qu’elle le plaçait dans une effroyable solitude. La vérité était qu’il réfléchissait beaucoup, posant effectivement les bases d’un grand plan pour la protection du monde sorcier – surtout depuis qu’il avait eu vent de cette prophétie. Mais il restait un être humain, avec un cœur, des aspirations, une famille et des rêves brisés. Il était capable de se tromper, de refuser d’avancer, d’avoir peur. Ce n’était pas son âge ni son expérience qui avaient le pouvoir de changer des terreurs insondables au plus profond du sorcier le plus puissant de sa génération. Il n’était qu’un homme. Un individu lambda qui avait peur de la chose cachée en Lavande Huntergrunt. Néanmoins, il était piqué au vif qu’on le pense avoir été inactif, indolent et insensible à la peine de la jeune fille. C’était faux. Jamais il n’avait tourné le dos aux problèmes. Il les avait confronté comme il confrontait ses anciens démons depuis cet ancien été, comme il avait fini par confronté le souvenir de son ancien amant entre les murs de Poudlard, celui-là même qui était le seul à pouvoir dompter la née-moldue comme il avait été indirectement responsable du décès de sa sœur.

Finalement, tout était une nouvelle fois inextricablement lié. Si Albus Dumbledore donnait la sensation d’avoir manipulé les fils du destin, usant de sagesse et d’ubiquité pour comprendre le moindre embranchement de ce monde, alors les accusations de Grindewald devenaient la seule et unique explication à ce délire métaphysique et oedipien. Mais une fois encore, seul Albus semblait avoir le recul sur sa propre existence, et sur le monde, comme seuls l’ont ceux qui ont arrêté de vivre, pour voir le grand dessein de l’avenir et ses travers. Et il était si difficile de l’expliquer avec des mots, à ceux qui étaient encore trop vivant, trop fougeux, trop plein de vies et de futurs possibles. Ainsi, Albus paraissait avec la certitude qu’il s’était trop éloigné de tous, même de Gellert. Sa solitude lui parut alors un insoutenable fardeau. Lui qui se ressentait déjà si vieux, semblait avoir pris un millénaire de plus. Quand le mage noir lui demanda si la garder entre les murs ancestraux de l’école était une bonne idée, le professeur de métamorphose ne répondit pas. Dumbledore ne pouvait mentir avoir préféré garder un œil permanent sur la petite, et avoir souffert de la voir se transformer petit à petit en cette étrange chose qui parlait un autre langage. Il ressentait pourtant une insidieuse familiarité avec elle, mais il savait que ce n’était rien d’autre que de la nostalgie, un transfert qu’il rejetait de toutes ses forces. Sa froideur était une honte, mais il ne supporterait pas de voir Gellert Grindelwald, parmi toutes les autres créatures de cette terre, le lui reprocher. Il était la dernière personne à pouvoir lui faire le moindre reproche quant à la situation de Lavande Huntergrunt. Aussi les dernières paroles de Gellert, insinuant ce rapprochement entre la née-moldue et Ariana, acheva de le faire grincer des dents. Il termina de nettoyer la plaie de son crâne et scella magiquement les pores de la chair écartée. C’était injuste, proprement injuste. L’attachement de Gellert à cette fille le ramenait quarante ans en arrière, et ce n’était pas bon, pas bon du tout.

Soigné, le mage noir se releva… et certainement encore un peu groggy de la blessure, enlaça soudainement Albus, lui murmurant que ce n’était pas de sa faute. Ce contact l’électrisa dans toute sa mélancolie, saignant sa colonne vertébrale et piquant le moindre centimètre carré de peau touché par le poids de Gellert. Mais ce qu’il disait, tout ce que cela impliquait… mettait Albus dans une colère qui ne l’avait que rarement assombri. C’était injuste. Il ne pouvait pas le laisser parler comme ça, et pourtant leur étreinte le rendait fou à en pleurer. Malgré lui, Albus l’enlaça en retour, profitant de cette douceur si longtemps espéré ; il n’avait désiré que lui pendant tant d’années. Son poing serrait désespérément sa chemise. Mais il ne se sentait pas moins coupable, loin de là ; et pis encore, il se sentait acculé, une nouvelle fois accusé pour quelque chose qui n’était – effectivement – pas de sa faute.

Combien de temps avait duré cette étreinte ? Ni Albus ni Gellert ne le sut, mais ce fut le mage noir qui en brisa le lien aussi rapidement qu’il l’avait crée. Il s’écarta avec un sourire mélancolique, lui demandant de ne pas trop s’en prendre à Belladone. Ce fut peut-être la goutte d’eau qui fit déborder le vase, mais Albus n’avait aucune envie de crier, il se sentait submergé par cette vague de douceur qui s’en était allée dans l’océan. Il regarda vaguement le sol, amer. C’était absurde, proprement absurde. Quel avait été sa faute, son péché originel, pour que sa vie soit à ce point une blague. Il s’en retourna à son bureau, passant un doigt sur le bois ambré par la lumière du soleil :

- Il y a quarante-trois ans, deux mois et quatorze jours, c’était Abelforth qui m’accusait d’avoir l’avoir abandonné… (Il laissa un silence mordre l’air, soudainement sirupeux et asphyxiant:) ...et j’ai moi-même été abandonné par la personne que j’ai aimée plus que moi-même. Je refuse d’être aujourd’hui accusé par cette même personne. Tu n’en as aucun droit.

Albus déglutit, remettant ses lunettes sur le bout de son nez et reculant la chaise de son bureau. C’était beaucoup trop douloureux.

- Poudlard ne fait pas de miracle et le destin a plus d’une ironie dans ses cordes. Peut-être ta venue ici est-elle effectivement la solution offerte par l’école à son malheur. Qui de mieux que toi pourrait la comprendre, n’est-ce pas ?

L’amertume de sa colère trempait dans un bouillon acide d’amour déçu, de mélancolie frustré, abreuvé par la lenteur poussiéreuse de la solitude et le silence du miroir. Albus s’installa à son bureau, sa voix était professoral, lointaine :

- Quant à Belladone Raven, je suis celui qui décidera de la punition qu’il doit recevoir, m’étant porté garant auprès du Directeur Dippet de ses compétences et de son bon sens malgré sa jeunesse.

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Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Gellert avait bien perçu que ses quelques mots à Albus n’avaient nullement plu à ce dernier. Pourtant, il avait l’impression que l’émérite professeur de Poudlard se voilait la face devant ses propres erreurs. Si l’ancien mage noir avait tenté de soulager son évidente culpabilité, il devait avouer que cela était bien un échec. Les deux hommes dansaient sur chaque pied, ne sachant trouver un point d’équilibre dans leur fardeau commun et leur peine différente. Albus n’avait vraisemblablement pas tourné la page, ce qui l’enchaînait pour daigner poser les yeux sur les malheurs d’Huntergrunt et pourtant, il n’aimait pas qu’on lui fasse remarquer sa passivité. Grindelwald, quant à lui, semblait avoir pour devoir de recoller l’âme qu’il avait lui-même brisée de son ancien amant. Au final, les deux hommes étaient devenus des fantômes d’eux-mêmes, errant dans les couloirs de Poudlard, esclaves des réminiscences de leur passé trop lourd. Pourtant, ils se devaient de l’enterrer. Albus ne pouvait continuer de se morfondre jusqu’à la fin de ses jours. Tout ce qu’il s’était passé il y avait de cela quarante ans était désormais de l’histoire ancienne et lui tourner le dos ne signifiait pas qu’ils oubliaient ou manquaient de respect à la seule véritable victime.

Dumbledore finit par rompre le silence pesant dans son bureau, donnant un décompte précis et quelque peu inquiétant de ce fameux jour où tout avait changé. Gellert releva le menton, ne quittant son interlocuteur de son regard contradictoire. Le cœur du professeur était plus brisé que prévu s’il en était venu à compter un à un les jours qui le séparaient de cette tragédie. Il y avait un arrière-goût malsain, un véritable désespoir qui enracinait le cœur meurtri d’Albus à cette fameuse journée. L’homme que Grindelwald avait face à lui était-il toujours vivant ou n’était-ce plus qu’une simple enveloppe charnelle vagabondant dans un monde qu’il rejetait mais où il brillait malgré tout ? Pour beaucoup de sorciers, Dumbledore était une lumière dans la nuit. Souvent, il avait été loué de venir en aide à la communauté magique contre le terrible mage noir qui sévissait en Europe. Souvent, il avait été perçu comme le sauveur qui allait sortir les innocents de cet enfer. Mais hormis le Pacte entre eux, avait-il eu envie d’être face à une entité physique en lien direct avec ce passé auquel il se rattachait et ne parvenait à oublier. Avait-il vraiment vécu dans l’ombre de la mort d’Ariana pendant tout ce temps ? Si oui, qu’aurait-il pu accomplir s’il avait su faire son deuil ?

Ces questions n’auraient probablement jamais de réponses tandis qu’Albus reprit la parole après avoir mentionné Abelforth, puis la fuite brutale et lâche de Gellert de Godric’s Hollow. L’accusé ne baissa pas le regard pour autant. Souvent il s’était demandé ce qu’il se serait passé s’il n’avait pas tant manqué de courage. Souvent également, il avait regretté ses actes impulsifs en cette fin d’après-midi, ses actes qui avaient non seulement scellés le sort des ruines de la famille Dumbledore mais aussi celui de sa propre vie et, par un torrent d’évènements portés par la puissance magique des deux hommes, celui de très nombreuses familles innocentes, sorcières comme moldues. Le ton d’Albus était glacial, frémissant d’une colère palpable qu’il tentait tant bien que mal à contrôler. Le rappel à l’ordre était menaçant et dur. Mais les vices éternels de Grindelwald ne se laissaient pas impressionnés. Ainsi, mutin et impertinent, un sourire insolent se dessina sur les lèvres de l’ancien mage noir. Son regard perdit le peu de chaleur qu’il pouvait avoir dans ses iris manichéennes tandis qu’il demeurait rivé sur le professeur de métamorphoses. Pourtant, poliment, il laissa continuer ses propos accusateurs.

Il reparla de Lavande, signifiant que la venue du mage noir à Poudlard était une sorte de signe de la Providence pour lui venir en aide à cette élève en perdition. Gellert n’y croyait pas. Il ne croyait pas au hasard non plus. Et bien évidemment, il ne croyait pas au fait qu’Albus eût fait sortir son rival et ancien amant d’Azkaban parce qu’il pouvait tout simplement le faire. Dumbledore appréciait s’entourer de mystères, œuvrant dans l’ombre pour protéger certainement ses desseins pour le monde sorcier. Mais dans ce cas précis, Grindelwald était convaincu qu’il s’agissait d’un coup de tête, peut-être de son premier geste impulsif depuis des dizaines d’années. Ou alors, effectivement, il l’avait fait venir à Poudlard pour s’occuper de Lavande, trouver l’éventuel prochain mage noir… Mais il semblait pourtant évident que la sombre aura de Grindelwald dans les pierres de l’école faisaient souffrir Albus qui ne parvenait à expier son passé. La colère et la peine de ce dernier étaient grandes, Gellert ne pouvait que l’imaginer. Et cela le rendait inquiet. Inquiet de le voir être si irrémédiablement figé dans la propre pierre de son existence. Faisant fi de la remarque sur Raven, avec la délicatesse du marteau et du burin pour briser cette roche froide, Grindelwald déclara sur un ton mutin :

— J’ai tous les droits sur toi car je t’ai créé. Tout comme tu as effectivement tous les droits sur moi, car tu m’as également façonné. Nous sommes irrémédiablement liés par ce passé qui t’entrave à ce point ton cœur, Albus. Je suis conscient que je suis le moins bien placé pour te dire cela, mais tu dois tourner la page. Compter les jours te draine petit à petit ta propre vie, ton âme. C’est vain.

Il releva le menton, regardant cette silhouette qui s’était assise. Les mots étaient crus et violents mais Grindelwald avait rarement été délicat. De plus, il se doutait qu’Albus n’avait jamais exprimé pleinement ce qu’il avait sur le cœur, sûrement porté rapidement sur un trône de gloire qui, même s’il avait désiré puisqu’il ne demeurait pas moins un homme ambitieux, avait effacé l’être humain qu’il avait été. Un véritable rejet de ses sentiments qu’il enfouissait, contenait dans un endroit sombre de son être en voulant les oublier car cela n’était sûrement pas digne de l’allure divine que lui donnait la communauté sorcière. Gellert soupira. Des années auparavant, il avait lui aussi voulu étouffer ce que son cœur pouvait éprouver ce qu’il y avait pourtant de plus humain. Ne pas être infaillible n’était pas une faute. Cela, il ne l’avait malheureusement compris que trop récemment. Leurs incommensurables pouvoirs les avaient placés sur le toit du monde, l’un roi, l’autre tyran, mais avaient détruits ces simples créatures mortelles qu’ils avaient été. Reconstruire n’était pas chose aisée et vivre dans les ruines n’apportait que la mort.

— J’ai fui, oui, Albus. Je ne te l’ai jamais caché depuis que je suis arrivé ici. Je reconnais ma faute. Je me suis senti trahi, abandonné également par l’homme que j’ai aimé plus que moi-même, et j’ai fui. J’ai été votre bourreau à tous les trois. J’ai tu mes émotions pour toi, me précipitant dans la plus vindicative et viscérale des haines. J’ai été lâche et j’ai eu peur. Alors oui, je t’accuse d’avoir fait les mêmes erreurs que moi. Mais il est trop tard pour Huntergrunt.

La passivité d’Albus attisait pourtant le brasier de sa colère qui ne parvenait nullement à s’éteindre. C’était avec un certain dédain que le professeur avait brisé leur contact visuel, se dérobant aux yeux asymétriques du mage noir. Il ne voulait pas que Dumbledore se défile encore, se cachant derrière une nouvelle phrase tordue. Gellert ne les connaissait que trop bien et s’il avait été capable de s’ouvrir franchement à l’illustre sorcier, ce dernier pouvait et devait en faire tout autant. Ainsi, le mage noir s’approcha de son ancien amant et posa de force la main d’Albus sur son bureau, lui faisant cesser ce qu’il avait entreprit de faire.

— Regarde-moi.

Le ton était dur, cassant. Il refusait qu’Albus, pourtant directeur de la maison Gryffondor, fasse preuve de lâcheté.

— Haïs-moi autant que tu le désires mais cesse de te cacher dans ta peine. Cesse de te flageller, ou même de te réconforter morbidement dans le décès d’Ariana. Tu as tout à fait le droit de me détester. Tu as tout à fait le droit d’être en colère, de crier, de pleurer même si tu veux, mais arrête de te cacher le fait que tu sois humain.

Gellert continuait de sourire, le regard rivé dans celui d’Albus. Ce dernier n’apprécierait vraisemblablement pas cette leçon donnée par un homme qui n’en avait apparemment aucun droit mais probablement personne n’oserait parler à Dumbledore comme il était en train de le faire.

— Tu veux que je te dise ce qui fait de quelqu’un un monstre ? Sa capacité à se tuer de l’intérieur. À nier toutes émotions humaines. Pour cela j’ai été un monstre et je le resterai toujours malgré moi. J’ai rejeté l’amour et la compassion pour alimenter ma haine. En toi, je ne vois que le vide, qu’un gouffre sans fin d’une peine dont tu as fait ton quotidien monotone. Il y a probablement des moments où tu regrettes de m’avoir sorti d’Azkaban car malgré toutes ces années, malgré mon emprisonnement, je demeure et demeurerais impulsif et par conséquent, imprévisible. Aussi, je suis probablement le seul qui ose te parler comme à un égal.

Il lâcha son emprise sur le poignet de Dumbledore, relevant son menton pour le toiser de sa hauteur, résolu probablement à détruire le peu de choses que lui et le professeur avaient essayé de reconstruire. En réalité, Gellert était juste peiné de voir Albus se murer dans cette indifférence morne et être piqué au vif dès qu’on le lui faisait remarquer.

— Maintenant, sois franc avec toi-même s’il te plaît. Hurle-moi dessus, renvoie-moi à Azkaban, fais ce que tu veux mais sois franc envers ce que désire ton cœur. J’ai la sensation de m’être assoupli, vois-tu, ici. J’aurai effectivement pu ravager, par deux fois, Poudlard entier avec la baguette de Raven, chercher celle de Sureau au Ministère et retourner te confronter après avoir déverser mon désir de vengeance et de liberté sur l’Europe entière car j’ai réellement pensé et j’ai été tenté de le faire. Mais ce passé, j’ai eu envie de l’enterrer. Quelque part, je vaux mieux que cela. Et toi, tu vaux mieux qu’un pauvre homme qui passe sa vie à compter les jours depuis le décès de sa sœur. Albus, s’il te plaît, fais quelque chose. Tue-moi même si cela te chante et que cela te permette d’enfin passer à autre chose.

Grindelwald ne souriait plus. Il continuait pourtant de fixer Albus dans les yeux, la gorge serrée. Au fond de lui, il avait peur. Il n’avait aucune idée de ce que le professeur de métamorphoses pouvait lui dire ou même faire. Il craignait également d’être déçu, que Dumbledore ne lui montre rien à part une passivité redondante et affligeante, une résolution morne et une volonté à rester rattaché à ce passé qui le torturait lentement mais sûrement. Résigné, Gellert ne détachait pourtant ses iris dépourvues de couleurs de l’azur de celles d’Albus. Il se rendit compte qu’il était en train de sacrifier la possibilité de retrouver cette complicité d’antan avec l’illustre sorcier par simple amour pour lui. Ce que Dumbledore prendrait sûrement pour de l’insolence avait une toute autre saveur dans les entrailles de Grindelwald. Lui qui s’était toujours considéré comme lâche, il se trouvait, pour une fois, relativement courageux.
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Albus Dumbledore
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Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Déjà l’esprit du professeur de Métamorphoses s’était dirigé vers des abords plus pédagogiques ; il songeait à la discussion qu’il lui faudrait avoir avec le trop délicat Belladone Raven. Les papiers sur son bureau devinrent soudainement d’une importance capitale à ses yeux, redressant la plume qui s’affaissait dans son encrier, remettant la pointe du stylo en sa direction, perpendiculaire à l’arrêt du bois nacré. Cette dispute n’avait plus de sens. Gellert Grindelwald ne faisait que se servir de Lavande pour régler d’anciens comptes, c’était évident. Elle était une marionnette, une figure métaphorique de la jeune fille qu’était autrefois sa sœur ; et cette évidence était une insulte. Mais Albus souhaitait lui laisser une chance de revenir sur ses paroles, de comprendre qu’il avait été trop loin et que c’était le choc de l’accident qui le faisait parler. Tout simplement. Ce n’était pas grave, Albus pouvait comprendre des paroles lancées dans l’impulsion de l’instant. Tout ne faisait que le pointer comme unique coupable, mais c’était seulement la face visible de l’immense iceberg de ce qui faisait la destinée de chacun. Si l’on pouvait écrire des prédictions, des prophéties, ce n’était que grâce à une chose : toutes les racines et les branches qui convergent sur une seule ligne directrice, celle du Temps auquel on ne peut échapper, et de toutes les règles de la Logique qui conjurent nos âmes en direction de la Mort ; cette curieuse amie. Albus tapota le bureau avec ces doigts, et ne cessa que lorsque Gellert se mit à parler, d’un sourire tout autant sucré que son regard était vif.

Ils avaient tous les droits l’un sur l’autre, car ils s’étaient mutuellement créés ; tout d’abord, cette expression fit hausser un sourcil derrière les lunettes en demi-lune d’Albus. Liés par ce passé qui entravait son cœur. Que cette situation, ce lent décompte de ce qui avait été, tout ceci était en train de le bouffer jusqu’à la moelle, jusqu’à ses yeux, le rendant aveugle de la vérité. Le visage d’Albus bascula sur la droite, haussant du même temps le sourcil opposé. Quel délicieuse prétention, de ces rivières sauvages qui ne se laissent pas choir par les pierres. En voilà une, de rivière, d’une eau translucide, une eau de diamant qui voulait tout dévorer sur son passage. Il avait désiré le monde, que souhaitait-il désormais ? Albus se sentit soudainement profondément amusé par la mutinerie de Gellert, ce dernier jouant d’arrogance, se posant maître moralisateur par dépit devant la détresse de Dumbledore. Il se savait pourtant pertinemment mal placé pour dire ces choses. Mais il les disait. Parce que c’était « le traiter en égal ». Mais il disait également s’être senti « trahi, abandonné », par lui – usant alors de la même analogie que la sienne. Fuite, bourreau des Dumbledore, s’enfonçant dans la haine… et Albus refaisant les mêmes erreurs. Ce dernier n’en croyait pas ses oreilles ; entendre un tel discours, qu’il offrait comme à son hémicycle avec une telle piété, une telle déférence, avec l’humilité du sage, de celui qui avait tout compris et de celui qui voyait. Mais Gellert avait toujours été un homme d’action, il ne réfléchissait pas plus loin que le bout de ses désirs. Albus avait toujours été la tête pensante de leur plan ; c’était principalement pour ça qu’il savait les crimes de Grindelwald siens. Il resta immobile, indolore, incolore. Un bref soupir l’emportait sur ses lèvres entrouvertes, le feu au bout de la langue. Jamais il ne se débarrasserait des calomnies sur son compte, c’était le fardeau des hommes de mystères, de ceux qui opéraient dans l’ombre, ceux qui voyaient au-delà du fil de l’araignée. Gellert le força à créer le contact visuel. La réaction d’Albus fut de sourire.

Oui, il regarda Grindelwald. Il fixa même le mage noir avec attention, cette longue ligne rose en direction du ciel, les yeux brillants presque indicibles derrière le verre de ses lunettes. Il l’observa traîner ses émotions dans la boue, parler pour son cœur, prétendre ce qui se cachait derrière sa solitude, sa détresse, son désespoir. Qu’il avait le droit d’exister en tant qu’être humain. A ces mots, Albus ne put s’empêcher de sourire davantage, ce qui ne fit vraisemblablement qu’augmenter la hargne de Gellert qui ne se limitait plus dans l’emphase de ses paraboles. Que lui n’était qu’un monstre, et qu’Albus n’était qu’une bulle opaque faite de néant ; il était amusant de constater que le mage noir parlait finalement comme ses pires détracteurs. Gellert ne souriait plus, comme si Albus le lui avait arraché pour le mettre sur son propre visage. Pourtant il y avait une certaine douceur à ses oreilles que la voix grave de Grindelwald essayant de le mettre à nu… mais la seule personne qu’il arrivait à défaire, c’était lui-même.

— Je vois.

Albus se leva, sagement, très lentement ; le poids de son corps se ressentait profondément dans la moindre de ses articulations. Jamais son regard n’avait pourtant été aussi vif ; une flamme joueuse brûlait au fond de ses prunelles. Il s’arrêta quelques secondes, la tête basse, avec de faire une petite moue et de lever un doigt en direction de Gellert :

— Je tiens juste à préciser quelque chose : je ne compte pas les jours depuis le décès de ma sœur. Je ne me morfonds pas dans sa disparition. Son souvenir ne me hante pas, contrairement à mon frère. Je ne suis pas en deuil d’Ariana, contrairement à ce que j’ai pu te laisser paraître – et je m’en excuse. En vérité… tu sembles avoir été beaucoup plus touché que moi… non, je vais te dire. Les jours que je comptais étaient les matins depuis la dernière fois où j’ai pu t’embrassé.

Le vieil homme, crevant d’une aura de nostalgie chaleureuse, se retourna vers la lumière du soleil. Il était touché par le fait qu’il n’avait effectivement pas utilisé la baguette de Raven pour créer un cataclysme… poruquoi ? Un rayon passa sur sa chevelure impeccablement coiffée, à l’image de sa vie qu’il contrôlait à la perfection. Un rayon qui lui vola son sourire, laissant de la nostalgie plus que le refrain de la lassitude :

— Heureux néanmoins de constater que c’est ainsi que tu me considères désormais. Un homme seul et triste qui vit dans ses souvenirs, incapable d’émotions, incapable d’exister, errant dans le passé. Mmh… (il prit une courte respiration et pencha légèrement la tête en arrière, avant de poursuivre d’une petite voix amusée:) … le dimanche de 15h à 15h30, il m’arrive de rejoindre Hildegarde Plantefeu et son cercle des amis des plantes aromatiques, vois-tu je me suis pris d’affections pour les plaisirs simples. Je suis un invité de marque pour toute excellente fête mondaine qui se déroule dans le monde sorcier, ainsi je partage une correspondance très intéressante avec le sorcier Kim Nam au sujet de cuisine – toujours intéressant de converser avec des Asiatiques en ce qui concerne la nourriture – mais je parle couramment la sirène et entretiens une sincère amitié avec le peuple des sirènes se trouvant dans le Lac Noir, auquel cas je t’aurai formellement interdit de plonger dedans. Je partage ma passion du tricot dans une correspondance avec la sorcière Yvaine Hule et du thé avec l’herboriste renommé Paolo Acevedo. Il m’arrive également de faire profiter de réflexions très intéressantes à des sorciers dans le besoin, comme ce cher Newt Scamender ou même certains membres du Ministère de la Magie.

Albus se retourna vers Gellert, une moue désolée sur le visage, les mains noués devant son ventre. Il secoua la tête, sincèrement dépité :

— Tu me crois seul. Tu me crois retranché dans ma Tour Dorée. La vérité est que j’ai choisi ce refuge. J’ai choisi ce lieu comme étant l’endroit où je vivrais, où je mourais, où l’on m’enterra. Tu as raison, je n’étais rien avant que tu viennes me voir… un simple garçon brillant, plus intelligent que tous les autres, promis à des merveilles. Tu es venu, tu m’as aimé. Tu m’as montré des parts de moi que je ne pensais pas possible, mais en m’apprenant l’ambition, en m’apprenant l’agonie du pouvoir, de l’avidité… tu m’as aussi appris l’Amour, le vrai. Celui qui s’offre entre deux êtres qui parlent le même langage, la même vérité. Tu m’as tant appris… mais je sais que je ne t’ai rien offert de la sorte en retour. Tu l’as dit toi-même, tu as refusé tes émotions. Quand tu es parti… j’ai compris. J’ai compris pourquoi j’existais sur cette terre. Je suis devenu enseignant… et oui, j’ai refusé le poste de Ministère de la Magie. Je sais que le pouvoir corrompt, qu’il existe encore en moi le jeune Albus Dumbledore, qui disait que l’on pouvait contrôler les moldus « pour leur plus grand bien ». Le pouvoir asphyxie, il dénoue les limites, il restreint la vue. Une fois que l’on possède le pouvoir, on devient vulnérable. Tu le sais, n’est-ce pas ? J’ai préféré être aimé que craint. Mais j’ai choisi Poudlard, et je m’y sens bien.

Le professeur de métamorphose prit une profonde respiration et fronça soudainement les sourcils :

— Tu me connais. Tu me sais impitoyable. Tu me sais cruel. Cesse donc de faire semblant et ose me dire en face que mon comportement envers Lavande Huntergrunt te surprend ? Ariana n’existe plus et je ne suis pas de ceux qui plaignent les morts. Je nous plains nous, ceux qui ont été détruit par sa mort. Suis-je coupable ? Ais-tu coupable ? Aberforth, peut-être. Ce n’est plus important. Oui, une partie de moi reste rongée par les regrets mais ce n’est pas ça qui m’empêche d’avancer. Oui, cette fille m’a inspiré de la peur… mais j’ai décidé de la conserver, ce petit bijou noirci dans le brouillard… (Son regard s’assombrit, dans le vague d’anciens souvenirs:) ...sa souffrance a été nécessaire, pour qu’aujourd’hui, nous puissions comprendre les véritables ennemis qui nous entourent. Elle est une perle pour les futurs mages noirs : tu sais parfaitement ce que je veux dire. Maintenant, tu es celui qui doit l’aider… (Son sourire s’éclaira un instant :) …et les choses se passent encore mieux que ce que j’imaginais. Tu es devenu tendre pour elle, tu es sans cesse celui qui la ramène à Ariana… mais Lavande n’est pas Ariana. Et je prie très sincèrement… pour que tu ne te serves pas d’elle pour me cracher tous tes remords, et que si elle n’avait pas existé, tu ne m’aurais pas reproché le moindre élève avec des mauvaises notes.

Lentement, avec la grâce d’un chat, les muscles roulant sous la peau, Albus s’approcha de Gellert. L’aura chaleureuse du Gryffondor ne faisait que s’étendre, enrobant le corps du mage noir. Jusqu’à ce que le professeur, mage blanc, le sorcier le plus vénéré de cette terre depuis Merlin, ne lève la main jusqu’à lui caresser la joue avec la paume de sa main :

— Tu ne comprends pas, lui murmura-t-il. Nous sommes pareils.

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MessageSujet: Re: Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]  Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI] Icon_minitimeMar 1 Sep - 15:35



Wherein Lies Continue

« THE ENDING'S THE SAME, THE WORLD WILL NOT CHANGE »

Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Grindelwald se trouvait dans un étrange état d’esprit qui l’agaçait. Tiraillé entre la colère et la lassitude, il ne sut, pour une fois, faire du tri dans sa tête. L’âme déchirée, il n’était rien de plus qu’un être contradictoire sans raisonnement purement logique, son impulsivité et son lunatisme le faisant passer par toutes types d’émotions aussi extrêmes qu’opposées. La triste réalité était qu’il s’épuisait lui-même. Pendant vingt-cinq ans, il avait choisi de ne connaître que la haine et la vengeance. Il avait laissé sa soif de sang prendre le dessus afin de placer ce qu’il avait de bon en lui dans une léthargie. Grindelwald avait essayé de se tuer lui-même et Poudlard n’était qu’une sorte de long et pénible réveil, ayant le sentiment d’être constamment engourdi. Il ne parvenait à se l’admettre, mais il était perdu et l’homme en face de lui ne l’aidait en rien. Enlacé par cette douce ironie, il était seul dans les ténèbres de l’ignorance et du doute. Il avait toujours été un guide pour les âmes en perdition mais cette fois-ci, c’était bien lui qui n’avait aucun repère, dans cette obscurité qu’il avait lui-même créée. Alors il s’était donné des objectifs insignifiants et presque altruistes et une part de lui se haïssait pour cela.

Le sourire d’Albus coupa le souffle du mage noir. L’insolence nonchalante du regard de l’illustre sorcier qu’était Dumbledore était parfaitement insoutenable. Comme si tout ce que venait de lui dire Grindelwald était sans importance et vain mais également parce qu’il n’y avait pas plus net reflet de la propre impertinence de l’expulsé de Durmstrang. Humilié, sa mâchoire se crispa dans une frustration certaine, se préparant sûrement à affronter la défense sans nul doute bien rôdée de son interlocuteur. Le mage noir continuait de suivre les iris azurés et pétillantes de Dumbledore tandis que ce dernier se levait lentement. Peut-être allait-il finalement le tuer. Mettre fin au cirque de Gellert Grindelwald dans les couloirs de Poudlard, son comportement d’enfant mal éduqué, son irrépressible envie de n’en faire qu’à sa tête tout en taisant les désirs de son cœur. Quel homme deviendrait-il s’il devait écouter ce que le plus profond de lui-même lui dictait ? Quel homme serait-il s’il venait à avouer ce qu’il ressentait véritablement pour ce sorcier qu’il s’obstinait à provoquer constamment ? C’était sûrement d’ailleurs l’ultime défi qu’il lancerait à Albus, ce dernier se ferait un plaisir de détruire cet impertinent dans ses lieux où il était maître incontesté.

Dumbledore commença alors sa défense face aux accusations de Grindelwald. Et ce qu’il parvint de s’échapper en premier des lèvres d’Albus affecta particulièrement le mage noir. Gellert eut du mal à garder une certaine consistance, s’efforçant, dans son orgueil, de demeurer parfaitement impassible. Oui, la mort d’Ariana l’avait grandement affecté, peut-être plus qu’il ne se l’imaginait lui-même. Il refusait pourtant de croire que cela avait été un tournant encore plus décisif dans sa vie que dans celle des frères de la victime. Et pourtant… Il devait se rendre à l’évidence que c’était peut-être le cas. Mais Dumbledore ne lui laissa pas le temps de réfléchir plus longtemps sur la question, avouant alors la véritable raison du décompte. Gellert ravala sa fierté comme il put, se mordant la lèvre inférieure de honte, relevant son menton pour conserver un minimum de cette dignité bafouée. Il demeurait pourtant dubitatif. Il se souvenait parfaitement de ce dernier baiser échangé, quelques heures seulement avant le décès d’Ariana. Grindelwald ne se laisserait pas manipuler par cette énième manœuvre d’Albus pour tenter de le calmer. De par ces mots si habiles, Gellert avait le sentiment que Dumbledore cherchait à conforter sa position de victime qu’il n’oserait jamais avouer clairement.

Le professeur de Métamorphoses enchaîna alors sur la description précise d’un emploi du temps bien rôdé. Il additionnait les rencontres mondaines autour des sujets qu’il l’intéressait et plus particulièrement le thé. Gellert comprenait bien l’intérêt de cette discussion : montrer qu’il n’était pas aussi seul que le mage noir pouvait le penser. Pourtant, Grindelwald ne pouvait s’empêcher à une certaine hypocrisie derrière ces paroles. Rares étaient les véritables amis de Dumbledore qui ne percevait chez les autres personnes que des alliés ou de simples relations courtoises. On était complice, avec un ami. Et même si les conversations avec Hildegarde Plantefeu ou encore Kim Nam étaient sûrement aussi instructives qu’intéressantes, il s’imaginait mal une complicité entre le plus puissant des sorciers vivants et ces deux badauds. Mais peut-être avait-il tort, comme Albus essayait froidement de le démontrer par des suites de tergiversions construites et n’ayant, d’apparences, aucune utilité. Grindelwald demeura silencieux. Son corps, quant à lui, était tendu et droit. Enfermé dans cette carapace immobile, il pouvait donner l’impression de ne même plus respirer tant ses muscles s’étaient crispés dans l’effort de se contenir, recevant son châtiment pour son impertinence osée. De plus, il ne pouvait pas non plus de s’empêcher de sentir une certaine jalousie monter à lui en l’entente de tous ces noms qui se permettaient de côtoyer Dumbledore.

Ce dernier finit par se retourner vers Gellert, dans une posture des plus solennels, enchaînant sur ce que leur rencontre avait engendré chez lui. Qu’il avait choisi Poudlard comme foyer pour s’y réfugier après que Grindelwald lui ait appris aussi bien les dangers de l’arrogance et du pouvoir que la force de l’amour. Le mage noir sourit mais sans qu’aucune joie ne vienne éclairer son regard déjà bien sombre depuis quelques minutes. Cette morale implicite était difficile à encaisser. Souvent depuis son arrivée à Poudlard, Gellert ne pouvait s’empêcher de repenser à tous les choix qu’il avait pu faire dans sa vie, essayant d’avoir le recul nécessaire pour constater ses erreurs, les tournants de sa vie. Ces pensées étaient la principale cause de son état morose entre les murs de l’école. Enfermé et livré à toutes sortes d’échecs de sa vie, la rédemption était lourde à porter et Albus semblait prendre un malin plaisir à rajouter des pierres à son fardeau, souriant avec cette bienveillance qui le caractérisait et l’obligeant comme par magnétisme à le regarder dans les yeux. Gellert laissa échapper un soupir aussi profond que sincère, las de cette situation sans but. Toujours plongé dans ses propres ténèbres, ne pas savoir où lui menait la route qu’il avait emprunté le rendait fou.

Il n’écouta que d’une oreille les mots d’Albus concernant Lavande et Ariana. Il était évident que les deux hommes avaient retrouvé de la cadette des Dumbledore dans la jeune élève de Serpentard. Mais Gellert refusait de penser que c’était uniquement par culpabilité qu’il s’était intéressé à la Née-Moldue. En réalité, ce n’était pas cela qui l’avait fait venir auprès d’elle aux premiers abords mais bien cette magie incontrôlée due à un laxisme certain de la part du corps enseignant de Poudlard. Les similitudes avec Ariana n’étaient qu’une simple coïncidence. Il ne cherchait pas à se racheter par rapport à la mort de la sœur d’Albus mais bien à combattre cette injustice qu’il avait perçue. Et cette injustice, il la ressentait à cet instant précis en face de Dumbledore. Une nouvelle fois, Gellert avait l’impression de percevoir dans les paroles d’Albus le parfait reflet de ses propres discours : soulager l’interlocuteur de sa culpabilité pour mieux le crucifier en suivant. Profondément agacé et frustré par cette situation, Grindelwald n’eut rien à répondre. Après tout, il n’avait jamais été confronté à quelqu’un d’autre d’aussi malin qu’Albus Dumbledore en plus de quarante ans. La joute était donc rude et il savait pertinemment qu’il avait déjà perdu. Et il était trop vain pour s’avouer vaincu.

Albus s’approcha alors du mage noir et leva alors une main vers lui qui la regarda presque avec méfiance. Il eut un très léger, imperceptible mouvement de recul quand ladite main s’approcha de son visage pour finalement s’y poser avec douceur. Il se laissa pourtant faire, appréciant le contact chaleureux de cette peau contre la sienne. Son souffle se fit plus profond, comme apaisé par cette attention tendre de la part de Dumbledore. Pourtant une partie de lui s’en voulait toujours autant d’être si faible dès que son ancien amant se montrait tendre avec lui. Oui, ils étaient pareils sur bien des points. Mais il existait d’autres sujets où ils étaient bien trop différents, créant un gouffre infranchissable pour permettre à leurs âmes de se rejoindre. Et ce gouffre, Grindelwald avait été le seul à le construire, étant probablement tombé dedans depuis fort longtemps, devenant ainsi sa propre tombe et également celle de l’amour déchu. La notion du temps se distordit. Combien de secondes s’étaient écoulées depuis qu’Albus avait posé sa main sur la joue de Gellert que celui s’était muré dans un silence protecteur et tout aussi lâche que sa vaine existence de rebelle vindicatif ? Finalement, regardant le sol avec une lassitude certaine, il prit la main d’Albus et la garda dans sa paume.

— Je ne me sers pas de Huntergrunt pour te cracher mes remords. Elle est juste victime d’innombrables préjudices et tu sais que j’ai horreur de l’injustice.

Il marqua une pause. Il sentait bien que plus les secondes s’écoulaient entre ses doigts, plus ses épaules s’affaissaient. Son regard était également devenu vague, explicitant l’état de perdition dans lequel se trouvait Gellert depuis bien des semaines. Alors, comme pour se rassurer, il porta la main de son ancien amant à ses lèvres et en embrassant les phalanges avec une tendresse certaine, tout en la conservant ensuite dans ses doigts pâles et froids.

— Nous sommes pareils, oui, mais pas tout à fait. Je suis mauvais et tu es bon. Malgré nos défauts partagés, la différence se fait dans les détails. Par ailleurs, je ne sais pas si c’était pour m’arracher ce que je vais te dire, mais je ne suis pas d’accord avec le fait que tu ne m’aies rien appris. Toi aussi, tu m’as appris à aimer. Tu m’as appris à aimer avec une telle force et une telle pureté et que je nous ai haï pour cela. Tu m’as rendu fou, Albus. J’ai toujours été régi par une certaine insanité mais j’ai été tellement perdu par toi que je voulais te tuer pour cela.

Il eut un sourire amusé, le regard toujours baissé avant qu’un long silence ne s’installe de nouveau. Peut-être devait-il s’abandonner entièrement à Dumbledore. Quarante ans auparavant, Gellert avait été celui qu’Albus avait besoin de rencontrer pour mieux se connaître et savoir où aller. Maintenant, les rôles s’étaient inversés.

— Il y a quinze ans de cela, alors je terrorisais l’Europe, à l’apogée de mon chaos, j’ai eu une vision. J’y ai vu ma défaite. Je me suis vu affaibli et faible au sommet d’une tour. J’avais perdu, des décennies auparavant. Alors je me suis rendu. Par peur, par lâcheté primaire. J’ai tout abandonné, sur ce simple coup de tête, me disant naïvement qu’un jour viendrait où je serai finalement libéré pour une raison ou pour une autre. En arrivant ici, en retrouvant certains frissons de la vie hors d’Azkaban, je me suis dit que tout avait fonctionné, que cela n’était qu’une question d’années avant que je ne puisse préparer un nouveau coup d’éclat, au cœur de Poudlard. Mon pire ennemi, ma principale menace, je le voyais tous les soirs. Il serait donc aisé de m’en débarrasser définitivement et ainsi la route serait toute tracée.

Il eut un sourire, chargé d’ironie. Par deux fois l’occasion s’était présentée. Par deux fois, il aurait pu être ce loup dans la bergerie. Et pourtant, il était là, à entrelacer ses doigts entre ceux d’Albus d’un air pensif.

— La plus belle ironie, c’est que mon plus grand ennemi, c’est moi-même et que je n’ai pas l’impression d’être capable de trouver la paix.

Il releva finalement les yeux vers Dumbledore, son irremplaçable impassibilité gravée sur son visage pâle.

— Je suis perdu, Albus. Et j’essaye difficilement de m’accrocher à cette seule chose qui pourrait me guider : mon amour pour toi.

Ayant le sentiment d’être nu, faible et vulnérable face à Dumbledore, sa main raffermit son emprise sur celle de l’illustre professeur avant de détourner brusquement le regard dans une moue dégoûtée par lui-même. Encore une fois, il se sentit bloqué, étranglé par sa propre fierté, sa propre haine qui l’avait régi pendant si longtemps.

— Je ne veux pas être ton pion, Dumbledore. Je ne veux pas être ton fidèle chevalier. Je veux…

Il voulait être son roi. Mais c’était trop pour cette colère qui lui nouait les entrailles et sa gorge sèche. Muet, il se contenta de baisser le regard et soupira simplement.
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Albus Dumbledore
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MessageSujet: Re: Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]  Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI] Icon_minitimeMer 2 Sep - 18:57



Wherein Lies Continue

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Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Le temps s’était arrêté ; non pas un remugle du passé, mais un heureux présent à leurs pieds. Ils n’étaient plus seuls contre le monde, ils en faisait parti, intégralement, indistinctement : deux figures légendaires de la société magique. Grindelwald et Dumbledore n’étaient pas simplement unis par leur passé, mais par leur existence entière. Il semblait presque que l’un ne pouvait exister sans l’autre – deux facettes d’une même pièce, une cachée dans les ténèbres et l’autre offerte à la lumière. Mais pouvaient-ils seulement co-exister ensemble ? La question demeure, insoluble. Ce n’était pas en écoutant leurs consciences qu’ils trouveraient la moindre réponse. Dès qu’ils se regardaient dans les yeux, dès qu’ils se touchaient… quelque chose n’allait pas. Une boule dans la gorge d’Albus l’empêchait de comprendre les mots qu’il ne connaissait pas, ceux qui expliqueraient la situation, à défaut de pouvoir la régler. Il existait un langage silencieux entre eux, mais aucun n’en connaissait la grammaire. Parfois, un geste, un soupir, semblait en transporter le sens – mais celui-ci disparaissait bientôt dans l’air, ne devenant plus qu’un fantôme. C’était une malédiction. Pourquoi ? Qu’est-ce qui les empêchait de désespérément se jeter dans les bras l’un de l’autre ? De sentir ce contact humain dont ils avaient été cruellement privé depuis longtemps ? Albus se retenait-il par fierté, car il était celui qui avait été abandonné, et que se pendre à son cou aurait été désavoué toutes les souffrances qu’il avait enduré – comme si de rien était ? Tout portait à croire que les deux vieux hommes s’aimaient encore comme au premier jour, mais avec cette nouvelle pudeur, presque enfantine, de ceux qui découvrent à nouveau. Peut-être était-ce cela le problème.

Toucher sa joue, rapprocher son visage du sien, lui faire sentir ses murmures au goût chaleureux de sucre. Tant de choses avaient changé. C’était une nouvelle figure qui se dévoilait sous ses lunettes en demi-lune, tout comme c’était sur une peau plus blanche qui apparaissait sous ses doigts ; la magie noire avait transformé son aimé. Il paraissait désormais créature humanoïde, quelque chose qui appartenait davantage à la famille des spectres. Pourtant, il était bien là, chaud et doux sous sa paume. Ce n’était ni le reflet d’un miroir, ni même un souvenir intouchable, ni un fantôme, ni une image… c’était bien Gellert. Il avait changé, bien sûr : tout comme lui, il avait vieilli. Sa peau translucide, se partageant de mince teintes de bleus et de roses, s’était creusé de ride. Son regard avait profondément durci, de ceux qui avaient vu d’innommables horreurs, de ceux qui ont vu les volutes obscurs des Détraqueurs pour seules distractions. Ses cheveux… et bien, à défaut d’être les douces et belles boucles qu’il aimait passer entre ses doigts, allongés dans la paille, ils étaient toujours présents. Il était toujours aussi princier, voir plus élégant aujourd’hui : il était devenu roi. Un monarque déchu certes, mais qui transpirait toujours le respect. Même les élèves les plus taquins et les plus rebelles n’étaient capable de lever le petit doigt devant lui, et la moindre menace d’une retenue à ses côtés faisaient taire le plus bruyant des gamins. Même s’il n’était plus que l’ombre de sa légende, cette ombre était l’égale des monstres sous le lit, des grincements dans le placard, des histoires de croque-mitaine qui faisaient trembler les enfants… et ceux qui se souvenaient. Et ce démon magique, Albus Dumbledore l’avait entre ses mains. Il l’avait à sa merci. Ses paroles faisaient mouche, il pouvait sentir la volonté du mage noir défaillir sous sa rhétorique tranchante. Gellert baissa la tête et prit la main de son ancien amant entre ses longs doigts glacés. Il déclara ne pas se servir de la jeune fille comme d’une excuse mais était sincèrement pré-occupée par son cas.

Il serra un peu plus la main de Gellert pour l’empêcher de partir. Si elle n’avait pas eu la moitié de la puissance qui dormait dans ses veines, Grindelwald ne l’aurait même pas regardé. Ce qu’elle cachait en elle attirait sa curiosité malaise. Albus savait pertinemment qu’il ne pourrait faire le poids si le maître et l’élève se retournaient contre lui. N’aurait-il pas été plus simple qu’il la prenne sous son aile depuis le début, afin de faire d’elle la plus belle pièce de son échiquier ? Mais ce n’était pas son destin. Oui, le professeur de métamorphoses était finalement content de cette relation contre laquelle il s’était efforcée de paraître contre. Gellert remonta alors ses phalanges contre ses lèvres, électrisant toutes les veines de Dumbledore par ce simple contact d’une pudeur angélique. C’était si délicat. Le mage noir poursuivit enfin, déclarant que leurs ressemblances n’étaient pas sans erreurs. Qu’Albus aussi, lui avait appris à aimer. D’une façon si brutale et si intense que cela avait été insupportable pour son ancien amant. A l’image d’une maladie qui lui dévorait la vie, Gellert avait cherché à s’éloigner de lui comme de ses sentiments, à détruire ceux-ci par tous les moyens possibles, jusqu’à tuer l’être auquel ils étaient destinés. Albus resta de marbre, pourtant profondément bouleversé – cela se voyait à ses yeux se recouvrant lentement d’une fine pellicule humide. Le coup était douloureux à recevoir. Savoir que l’amour que l’on avait éprouvé et que l’on avait offert à autrui l’avait « empoisonné »… le sourire amusé de Gellert ne suffit pas pour adoucir l’humeur d’Albus. Un coup de poignard venait de traverser son coeur de toute part ; lui qui s’était offert entièrement, avec toute l’absolue de son âme, à cet amour qui le rendait ivre d’espoir et de futur, qui avait vécu toutes ces années réchauffés par son souvenir… apprenait qu’il avait été à l’origine de toute une cathédrale de souffrance pour Gellert. Il se sentit blessé. S’il y avait eu quelque chose de sincère entre eux, pourquoi l’avoir ainsi jeté aux oubliettes ? Pire encore, pourquoi l’avoir transformer en symptôme de décadence. Ce fut au tour d’Albus de baisser lentement les yeux vers le sol.

Le professeur de métamorphose pensait véritablement que Grindelwald voulait autrefois le tuer pour prendre le contrôle de l’école de sorciers (car il en était son ange gardien), ou pour tout simplement devenir le véritable sorcier le plus puissant de la Terre. Une fois Dumbledore au sol, plus personne ne saurait empêché le monde de sombrer entre les griffes du mage noir. Cela semblait si évident, que cette révélation lui était plus insupportable encore. Lui dont l’esprit impressionnait, et dont il se faisait le maître absolu en comprenant les méandres des secrets derrière la toile de l’araignée… se sentait impuissant face une chose aussi belle et aussi imprévisible que l’amour ; et plus particulièrement celui qui le reliait au mage noir Grindelwald. Pourtant, Albus savait qu’il ne devait rien dire et laisser Gellert venir jusqu’à lui – c’était aujourd’hui lui qui, après avoir survécu pendant quinze années aux Détraqueurs, devait retrouver la vérité de son essence. Albus, tel le professeur généreux et bienveillant auprès de ses élèves, se devait d’être à l’écoute de Grindelwald. Il poursuivit, déclarant qu’il s’était rendu par lâcheté en voyant sa défaite dans un songe prémonitoire. Albus ne croyait pas une seule seconde à ce qu’il disait quand il ajouta qu’il se disait naïvement qu’on le libérerait. Mais il se tut, le laissant continuer sur la confection d’un plan qui aurait pris plusieurs années avant de lui permettre de sortir de Poudlard, que Dumbledore, sa plus grande menace, n’était qu’à quelques mètres de lui plusieurs fois par jour et qu’il ne lui faudrait pas plus d’une seconde pour finalement réussir ce qu’il souhaitait depuis le début. Gellert souria, chercha son regard, serra la paume cicatrisée de sa main et entrelaça ses doigts dans les siens, se déclarant finalement son propre ennemi – enfin Albus entendit à nouveau la sincérité dans sa voix. Qu’il était pourtant à la fois grisant et terrifiant de voir son ancien amant, celui qui lui avait fait découvrir toutes les choses de l’amour, puis son némésis, celui qui voulait à tout prix dominer le monde – quitte à en tuer son gardien, maintenant à ses pieds, presque larmoyant d’une détresse qui crevait les yeux. Il se raccrochait à son amour, disait-il.

Albus déglutit. A quel point les cachots d’Azkaban avaient été une torture pour Gellert ? Ce dernier faisait comme si cela n’avait pas été important, mais il se trompait. Quelque chose s’était brisé en lui. Tandis qu’il le suppliait, par son nom de famille, de ne pas faire de lui son pion, une sourde colère montait en Albus. Une rage qui n’était pas dirigée vers Gellert – en tout cas pas entièrement :

Gellert Grindelwald n’est pas un homme naïf. Il n’aurait pas eu peur d’une vision. Le garçon que j’ai connu crachait sur le destin, il était persuadé de pouvoir le contrôler. Il n’aurait pas affronté la plus effroyable, la plus immonde et la plus haïssable des demeures sorciers, l’île prison d’Azkaban… et ses créatures sans visage. Le garçon que j’ai connu voulait confronter la mort, il voulait l’affronter, s’en faire le maître. Non, le garçon que j’ai connu n’était pas un lâche, c’était un intrépide guépard, un aigle impérial, un mystère. Le système de ré-habilitation des criminels n’existe que depuis très peu de temps, et je suis celui qui a autorisé sa création – toutes les propositions passent par moi. De plus… pourquoi attendre plusieurs années pour préparer un coup d’état à Poudlard ? Je suis là, devant toi. Par deux fois, tu as pu tenir une baguette dans tes mains… que tu aurais visiblement pu cacher dans ta manche sans le moindre problème et me tuer, là, maintenant, tout de suite. Mais tu es ici, en train de me tenir la main. Non… je sais que tu me mens, mais je ne te demanderai pas la vérité. Quoique cela ait pu être, tu devais avoir une excellente raison ; une volonté puissante, pour accepter d’affronter le mal incarné. Tu t’es sacrifié.

Dumbledore n’était peut-être le chevalier blanc que tous les pensaient être. Il n’était peut-être pas cette montagne foncièrement bonne, dont l’âme était gravé dans l’or le plus pur. Il n’était peut-être pas tout simplement gentil. Jamais il n’aurait accepté d’affronter l’île des Détraqueurs. Il aurait fuis les liens et les regards, aurait confronté les éléments et déchaîné les essences magiques pour se faire indétectable, indéfinissable. Il avait la puissance pour le faire – et savait que Gellert aussi. Rien de tout ceci était logique ; et dans le grand plan parfaitement huilé de Dumbledore, il n’y avait qu’un seul rouage inconnu, et celui-ci s’appelait Grindelwald. Il n’était pas un pion, mais la pièce centrale de son œuvre. Celle qui le suppliait à demi-mot de faire d’elle son égale, chose qu’Albus ne pouvait offrir. Le professeur retira sa main de celle de Gellert, et prit le visage de ce dernier entre ses paumes. Ils faisaient exactement la même taille.

Je ne suis pas un détraqueur, même si à tes yeux, j’en ai les ombres. Mais je peux essayer ça.

Au-dessus ses yeux d’un bleu perçant, profond, fronçaient une colère sourde. Sa voix avait pourtant la chaleur du miel, insondable. Il acceptait pleinement sa supériorité face au mage noir, à cette sensation de puissance qui s’enfonçait dans sa poitrine. S’il fallait passer par là, alors il irait. Il n’était pas une créature des ténèbres, mais simplement un des plus grands sorciers de son époque, et si on lui prêtait des caractères bons et lumineux, alors peut-être serait-il capable de devenir son détraqueur d’opaline, une ombre blanche. Alors Albus ferma les yeux et posa sur les lèvres de Gellert un doux baiser, simple, sans artifice – mais long, incroyablement long.

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Gellert Grindelwald
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MessageSujet: Re: Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI]  Wherein Lies Continue [PV. Albus Dumbledore] [FINI] Icon_minitimeJeu 3 Sep - 15:01



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Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Il n’y avait pas de mot décrire le sentiment de vide que ressentait Grindelwald à cet instant précis, la main de Dumbledore enfermée dans la sienne. Cette confession sur ses doutes et ses choix avait annihilé toute forme d’énergie ou de volonté dans le cœur meurtri du mage noir. Même les Détraqueurs ne lui avaient jamais fait ressentir ce tel sentiment de flotter dans les abysses, tel un corps sans masse, sans poids. Il n’était qu’une plume dans les ténèbres, essayant de comprendre un sens à toute cette mascarade. Il était entré furieux quelques dizaines de minutes auparavant et voilà que son âme semblait avoir été aspirée par la simple présence de Dumbledore. Il vagabondait au milieu des couloirs de Poudlard, loin de ses rêves de grandeur qu’il ne pouvait percevoir derrière les montagnes du parc. Il devait renoncer à être acclamé, loué et n’être plus qu’un fantôme errant donc le regard effrayait néanmoins toujours autant mais dont la cible n’était plus que des adolescents mutins. Parfois, il regardait pendant des heures l’horizon, se demandant combien d’années il jouerait encore les professeurs. Ces minutes perdues, jamais plus il ne les retrouverait. Tout comme ces années à Azkaban à braver le froid, la pluie et la douleur.

Grindelwald n’était pas quelqu’un que l’on pouvait qualifier de douillet ou de délicat. Spontané, il s’était souvent jeté dans la gueule du loup dans sa jeunesse, sans jamais trop réagir aux conséquences. S’il pouvait le faire et que cela permettait à ses machinations d’être couronnées de succès, alors il fonçait. Cette fougue était aujourd’hui endormie. Avait-il gagné en sagesse ou était-il tout simplement las de vivre ? Il ne regardait pas Albus dans les yeux. Il ne pouvait voir que les quelques mots qu’il avait prononcés avaient affecté l’illustre professeur autant que le dernier monologue de ce dernier avait fait fini de briser les réminiscences mutines et outrées de Grindelwald. Il était maté. Depuis le début, il avait refusé le conflit, se cachant derrière ce Pacte de Sang qu’il avait toujours gardé précieusement pour ne pas avoir à affronter celui contre qui il aurait indéniablement perdu, que ce soit par la pure puissance magique ou par les propres sentiments du mage noir qui auraient certainement arrêté son bras. Albus avait toujours été plus sage, plus réfléchi et plus puissant aussi. Jamais Gellert n’avait été son égal, il le savait pertinemment, et ce, même durant ces deux mois qu’ils avaient partagé ensemble, malgré ce que Dumbledore semblait penser.

Il prit la parole, l’invectivant en essayant de démonter sa confession sur la raison de sa reddition. Gellert ne put s’empêcher de sourire devant la tentative d’Albus de trouver un sens plus profond à ce geste. Il refusait de croire que le mage noir ait pu agir par la plus primaire des lâchetés et des peurs. Dans sa vision, Grindelwald avait vu sa plus grande défaite, oui. Il s’était offert au Ministère pour l’éviter, oui. Il avait cependant eu la lucidité de constater que son combat serait vain, peu importe de sorciers qu’il massacrerait pour essayer d’avoir gain de cause. Lui qui n’avait voulu qu’une unité dans le monde entier, il était devenu chef de guerre. Il était devenu un guerrier, celui qui la créait. Il avait des litres de sang sur les mains qu’il ne pourrait faire partir définitivement et ce, malgré la longue à laquelle il était promis. Ce déni de la part d’Albus l’attendrit autant qu’il l’amusa. Non, Grindelwald n’était pas naïf. Il savait seulement lorsqu’un combat était perdu d’avance. Oui, il avait craché sur le destin, c’était pour cela qu’il avait brusquement changé de direction pour changer le sien. Oui, il avait voulu être la mort, peut-être car, comme le commun des mortels, il en avait peur. Il avait voulu l’affronter dans sa jeunesse avant qu’il ne se rende compte qu’il se trompait d’ennemi.

Mais, de manière inavouée, parfaitement dissimulée au plus profond de son être, existait l’une des raisons de sa reddition et peut-être même la majeure. Il avait vu ce nouveau mage noir plus extrémiste et totalitaire que lui. Il l’avait vu venir le chercher, lui, Grindelwald, affaibli dans sa tour. Oh il n’en avait perçu que certains traits de son visage, encore plus marqué et défiguré que lui par les stigmates de la magie noire. C’était pour cela qu’il prenait cette menace très au sérieux, malgré ce qu’il laissait prétendre. Peut-être pas devoir civique, quelque part, mais surtout par fierté de conserver son trône, lui qui avait été sûrement le premier à voir ces nuages noirs apparaître sur l’horizon d’un futur proche, mais qui n’avait rien dit. On ne l’aurait pas pris au sérieux de toute évidence. Mais il avait également vu l’éclat vert frapper un Albus Dumbledore en plein torse. Et malgré les années qui avaient drastiquement changé son apparence, il n’y avait aucun doute de son identité. Ses yeux, il les reconnaîtrait toujours. Cette vision du corps du seul être qu’il n’ait jamais aimé basculant dans le vide avait scellé sa décision. Imperceptiblement, au plus profond de son cœur, il en avait fait sa mission d’éviter ce drame. Il était impensable qu’il soit à l’origine du sortilège de Mort et la part de lui qui niait cette évidence clamait qu’il était le seul à avoir le droit de vie et de mort sur Albus Dumbledore. Se rendre avait donc était la seule façon qu’il avait trouvé pour se rapprocher de lui.

Cependant, il tenait la main de cette personne dont les épouvantards prenaient l’apparence. Et cette dernière posait des questions auxquels Gellert n’avait aucune réponse. Il savait que la vérité ne lui conviendrait pas. Le jour où Grindelwald avait choisi de suivre son cœur, personne n’avait plus rien compris à ses projets. Au final, cela le rendait toujours aussi imprévisible, il y avait de ces choses qui ne changeaient jamais. Albus finit par conclure son monologue en disant que le mage noir s’était sacrifié. C’était une affirmation puissante visant à rendre héroïque un geste qui n’en avait même pas la couleur. Gellert n’était absolument pas d’accord avec ce terme, et peut-être même encore plus de la bouche de Dumbledore qui essayait visiblement de le réconforter. Pourtant, cela n’empêcha pas au grand sourire de se dessiner sur les lèvres du mage noir. S’il y avait eu un sacrifice de la part de Grindelwald, il l’avait été des années plus tôt, lorsqu’il était parti dans cette croisade vaine pour un monde plus égalitaire et juste, où leurs semblables n’avaient plus à se cacher des Moldus. Un monde uni et régi par structure stable où plus personne n’aurait à craindre des regards curieux des autres.

Albus n’avait pas à faire de lui un martyr. Il aurait pu le devenir, s’il n’avait pas fermé ses yeux à la haine qui avait pris le contrôle de son âme. Il pourrait toujours le devenir s’il effectuait réellement un sacrifice au nom du bien. Il pouvait l’être s’il devenait le vassal discipliné de Dumbledore. Qu’en était-il de lui, d’ailleurs ? Cet homme qui l’avait fait tomber dans une folie pure et sadique. Le bourreau de son cœur qui y avait planté pour l’éternité son glaive. Son indifférence et sa fierté avaient-elles été suffisantes pour l’aider à surmonter les fautes de Grindelwald ? Albus avait toujours été secret sur ses sentiments. Il avait toujours réussi à les contrôler savamment, à défaut de son ancien amant qui était perpétuellement régi par ses émotions qu’il ne parvenait à refréner qu’en se laissant gagner par la haine. Sur ses joues froides, Grindelwald sentit alors la chaleur des paumes de Dumbledore, le forçant malgré à détacher son regard vague du torse de ce dernier pour se planter dans l’azur électrique de ses yeux. Son souffle se coupa, ayant l’étrange impression que sa peau lui brûlait d’une douceur indescriptible. Son sang bouillonnait comme il ne l’avait pas fait depuis plus de quarante ans, emplissant ce corps qui en avait été privé depuis trop longtemps.

La comparaison que le professeur fit entre lui-même et un Détraqueur eut le mérite d’arracher un sourire au mage noir qui ne pouvait s’empêcher de la trouver drôlement pertinente. Et pourtant, tel un masochiste, il ne pouvait s’empêcher de chérir ces moments passés dans la même pièce que lui, dans un silence profond et solennel la plupart du temps, à juste le regarder vivre. De ses yeux électriques pourtant, Albus avait toute l’attention de Gellert. Il avait chassé toutes les parcelles d’insolence qu’il pouvait souvent trouver dans le regard dichotomique et chaotique du repenti. Par ses mains posées sur ses joues, il l’avait entièrement à sa merci. C’était pour cela précisément que Grindelwald n’aurait jamais vaincu Dumbledore. L’amour qu’il lui portait était beaucoup trop puissant et le rendait esclave. Albus pouvait lui demander ce qu’il voudrait que Gellert accepterait certainement, docile. Même le sortilège de l’Imperium paraissait bien ridicule par rapport au contrôle qu’exerçait l’illustre professeur sur son ancien amant. Peut-être était-ce pour cette raison, au final, que le repenti avait voulu se rapprocher de Poudlard. Cette raison inavouée et inavouable de se rapprocher non pas pour tuer Dumbledore mais pour retrouver cette chaleur qu’il lui insufflait tout en l’empêchant de détourner le regard.

Mais la douceur des paumes d’Albus n’avait rien de comparable avec celles de ses lèvres quand elles vinrent se poser sur celles de Gellert. Ce dernier se laissa envahir entièrement, abandonnant le peu de résistance qui pouvait rester au plus profond de lui et répondit à ce baiser si simple et pur avec une sincérité qui le déconcertait lui-même. D’abord inactif, il sentit l’irrépressible envie de sentir à son tour Albus contre lui. Ainsi, presque timidement et non sans une douceur certaine, il posa pudiquement ses mains étrangement peu assurées sur ses hanches, profitant de ce contact qui lui crevait le cœur pourtant. Cette sensation, il l’avait ressentie des années auparavant et l’avait partiellement oubliée. Aujourd’hui, telle une vieille plaie, elle ressurgissait, étreignant de sa poigne aussi chaleureuse et agréable que douloureuse ses viscères impuissants. L’Amour était pour lui source d’un bonheur indescriptible qui finissait par le plonger dans une profonde affliction. Ce contact avec Albus, dont il avait perçu la colère dans le regard avant que celui-ci ne ferme ses yeux, lui rappelait aussi bien cet été qu’il chérissait toujours mais également les cruelles conséquences qu’il avait engendrées. Il n’y avait aucune réponse ici, seulement des indices pour éventuellement soigner ce mal qui le rongeait.

Finalement, il fut celui qui mit fin à ce baiser, sentant Albus bouillir d’une colère inconnue. Souriant pourtant, il veilla à garder celui qui avait donné un sens à sa vie autant qu’il l’avait détruite contre lui, posant une de ses mains sur cette joue qui s’était parée d’une barbe fière au fil des années. C’était un contact qui n’avait rien de similaire avec celui qu’il avait connu. La douceur de la jeunesse avait laissé place à une maturité rêche qui n’était pas sans déplaire à la main de Gellert. Ce dernier garda aussi son front contre celui d’Albus, les deux ayant été creusés par les âges. Le repenti pouvait sentir le souffle de cet être qu’il aimait tant sur son menton et sur la naissance de son cou, réchauffant cette âme meurtrie par la froideur polaire des Détraqueurs mais qui avait néanmoins tenu bon. La lassitude avait disparu pour laisser place à timide plénitude, une sérénité néanmoins partielle. Une part de lui qui brûlait vive sous cette chaleur abondante et soudaine lui criait qu’il ne voulait pas de la pitié de Dumbledore, que ce geste n’était qu’intéressé, en témoignait cette colère étrange qu’il avait pu déceler dans ses iris azurées.

Mais cette colère était faible, estropiée et mutilée. Elle n’avait plus la même force des années passées. Elle n’avait plus le même poids et ne parvenait plus à voiler le regard contraire de Grindelwald de colère. Son cœur lui faisait mal, il était vrai. Cela était sans nul doute une provocation d’Albus à qui il avait avoué que son amour pour lui l’avait terrassé. Mais il avait déjà avoué sa défaite, il était donc inutile d’essayer de se débattre comme il l’avait fait pendant des années, perdant à chaque fois de sa force. Finalement, dans un soupire apaisé, il prit ce corps qui avait certes changé au fil des décennies contre lui, plaçant chaleureusement ses mains dans son dos et son menton sur son épaule. Le sourire du bienheureux trônait fièrement sur les lèvres de l’ancien mage noir, revendiquant sa victoire sur l’impassible lassitude qui avait régné depuis trop longtemps sur ce visage de craie. La chaleur de cette étreinte n’avait rien à envier avec celle que Gellert avait amorcé, plus tôt, dans un but tout autre. Là, tout était pur, baignant dans un calme serein et mature. Le Pacte de Sang, pudiquement caché sous les vêtements d’Albus, témoignait sa présence par la pression qu’il exerçait sur leurs deux torses. La preuve indéfectible que leur relation passionnée et brève n’en avait pas moins été sincère.

Il voulait le remercier d’être toujours là malgré ce qu’il s’était passé pendant des années. Il voulait lui crier son amour également mais avait peur de précipiter les choses. Il avait toujours cette crainte de cette colère perçue dans le regard d’Albus car il était conscient que Gellert Grindelwald avait changé. Il ne voulait plus se laisser aveugler par la haine. Il ne voulait plus sentir son cœur se faire étreindre par une jalousie violente et viscérale qu’il éprouvait malgré lui. Dumbledore n’ignorait pas que ce baiser offert réveillait en son ancien amant une douleur due au fait que Gellert ne voulait avouer cet amour honnête et pur qu’il était capable d’éprouver. Pourtant, en restant mutique, il retombait dans ses anciens travers qui avaient gangréné son âme. L’amour ne rendait pas forcément niais au faible, bien au contraire. Il s’était rendu compte avec l’âge, qu’elle était même peut-être la forme de magie la plus puissante si on acceptait de se mettre de côté. L’arrogance et la fierté des adolescents qu’ils avaient été n’avaient été un secret pour personne. Pourtant, elles demeuraient parfaitement complémentaires. Si le sorcier noir avait tant souffert de ce puissant amour qui lui avait été offert, n’était-ce pas à cause du désaveu de cette âme qui semblait être la sœur de la sienne ?

Ils étaient fusionnels et pourtant s’opposaient pourtant sur tellement de point. L’équilibre, le principe de contrepartie ne semblaient pouvoir exister entre eux. C’était tout, ou rien. Cela avait toujours fonctionné ainsi, dans le caractère dionysiaque de leur relation d’adolescents. Maintenant la sagesse les avait gagnés. Leurs fardeaux, ils les avaient acceptés et les avaient portés sans rechigner. N’était-il pas temps de définitivement tout enterrer derrière, de reconstruire plus loin plutôt que sur les ruines de cet été idéalisé ? Oui, c’était peut-être ce que Gellert désirait, dans cette nouvelle vie qui n’avait rien à voir avec l’ancienne. Il ne restait de son règne sur l’Europe que des débris. Le chantier qu’il avait entrepris avec Albus était mort, il ne restait que des décombres car il n’avait plus le construire seul. Dumbledore, quant à lui, en avait entrepris un autre, bien différent de celui qu’ils avaient prévu de faire au commencement. Ces travaux, Gellert voulait y en être. C’était pourquoi il n’avait toujours pas lâché Albus qu’il tenait toujours contre lui. Il désirait avancer avec lui et non plus contre lui. Sa main dans la sienne plutôt que levée, prête à s’abattre. Mais les mots lui manquaient. Là où les deux garçons s’étaient montrés bavards et inarrêtables, les deux hommes étaient désormais beaucoup plus taciturnes et posés.

Finalement, après ce temps passé à savourer la chaleur du corps d’Albus contre le sien, il finit par relâcher ce dernier de son étreinte, tout en déposant un baiser sincère et doux sur la barbe noble qui dissimulait sa joue. Après quarante ans de haine, Gellert voulait s’essayer à la tendresse. Le décompte ayant été remis à zéro, c’était un nouveau départ. Plutôt que de fermer douloureusement les yeux sur ses sentiments, il comptait désormais les écouter. Il avait tant perdu qu’il estimait de pas risquer grand-chose. Pourtant, sa fierté était toujours bien ancrée en lui et il serait difficile de s’en défaire. Elle était d’ailleurs la principale coupable du fait qu’il refusait de croiser le regard de son ancien amant, arborant une expression digne sur son visage pâle, joignant caractéristiquement ses mains dans son dos. Ses yeux se perdirent dans les détails du bureau de Dumbledore, son air impassible montrant une brèche : un sourire doux et sincère s’était dessiné de manière quasiment imperceptible sur les lèvres de l’ancien mage noir, dont même l’aura tempétueuse semblait s’être adoucie. Si Albus avait la source de son mal, accru par l’orgueil malhonnête de Grindelwald, il semblait être sans nul doute le seul remède capable de soulager cette âme auto-mutilée et perdue.
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Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
Sang : Sang-Mêlé.
Nationalité : Anglaise.
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Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
Reflet du Riséd : Gellert Grindelwald à ses côtés.
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« THE ENDING'S THE SAME, THE WORLD WILL NOT CHANGE »

Automne 1942, bureau de Métamorphoses.

Les plus braves meurent dans les souvenirs. Les autres survivent et paient une éternité de leur succès. Albus craignait la vie et la mémoire, et pourtant se souvenir c’était déjà un peu mourir. Il avait passé toute son existence à cela, gardant au fond de son coeur un catalogue d’images arrachées, des tableaux illustrant un sentiment. Il revoyait Godric’s Hollow, le soleil qui tapait sur les champs ; l’arrivé de Gellert Grindelwald et comment ce même soleil frappait la blancheur de sa peau, l’illuminant telle une créature magique. Il avait toujours été réceptif à la lumière. Sa peau était un miroir, pis encore, le reflet d’un miroir, qu’un soupir transporte d’image en image, un labyrinthe éreinté qui défiait les lois de la gravité. Et pourtant, ce n’était qu’un homme. Tout comme lui, bien que semblablement doté de la même puissance, de la même curiosité et du même espoir, avec des faiblesses, des meurtrissures, des peines à un âge déjà si jeune, et des émotions électrisant le corps, des désirs sincères, humains voir même primaires. Les années les avaient érigé en puissance quasi divine, l’un du côté du bien, l’autre du côté du mal. La société les avait déshumanisé, les transformant – presque contre leur gré – en héros d’un camp opposé, figure de sagesse ou de terreur, deux vénérables dieux que l’on ne pouvait toucher, approcher, ne serait-ce qu’imaginer la profondeur de leur intellect. Voilà pourquoi seul Dumbledore pouvait affronter et vaincre Grindelwald, et bien que le contraire fut également possible, personne ne l’envisagea.

Mais ces emblèmes de la société sorcière s’étaient pourtant bien construit sur des émotions humaines, comportant leur lot de fissures. Albus avait profondément aimé Gellert, entièrement, presque désespéramment. Parce qu’il était le seul garçon autour de son âge au village ? Non, mais parce qu’il était le seul à avoir refléter la même curiosité dans le regard, à lui renvoyer sa passion et les fulgurances de son esprit. Il avait fait battre son coeur, mais plus beau encore – il lui rendit la pareille. Aimer et être aimé, à un temps si lointain où ces choses ne se disaient pas, était le plus beau cadeau que l’on pouvait arraché à la vie. Deux mois où un soleil brûlant avait rougit leurs peaux et où les nuits glacées avaient été le réceptacle de longues conversations. Albus s’était senti vivre pour la première fois à ses côtés. Poudlard lui avait donné un égo, des capacités, une certaine intelligence, des responsabilités et beaucoup d’ambition, même quelques amis. Mais ce ne fut qu’à ce moment-là qu’il saisit entre ses doigts la vacuité de ce qui comptait vraiment. Leur passion dévorante, presque belliqueuse, des débuts s’était transformé – du moins pour lui, en une douceur sucrée qu’il aurait voulu faire perdurer. Quand il perdit sa sœur, ce fut une évidence. Ces idées n’apportaient que la mort et le désespoir. Mais ce que Gellert et lui avaient construit autour de l’amour, ces choses devaient perdurer. Tout comme Aberforth aimait sincèrement Ariana, plus que lui-même ne l’avait jamais fait. Elle aurait pu être sauvé.

Aussi les paroles de Grindelwald n’étaient que mensonge. Partir en croisade contre les moldus, contre les sorciers, décider que tout le monde fut coupable était stupide. La seule chose qui avait tué Ariana, c’était eux. Pas la méchanceté des hommes ayant fait d’elle une obscurial. Dire le contraire était se voiler la face. Surtout en utilisant le mal-être d’un autre pauvre garçon pour tuer Dumbledore, ainsi que l’on finirait une boucle malsaine. Albus était fatigué. Incroyablement fatigué. Fatigué de cet homme en face de lui, qui n’était effectivement qu’un homme. Il s’était laissé dévasté par la colère, la rancœur, peut-être même la tristesse, s’engouffrant petit à petit dans une spirale infernale dont il prétendait avoir le parfait contrôle… avant d’abandonner. Albus ne pouvait imaginer qu’il n’y eut pas une excellente raison derrière tout ça. Même à Poudlard, il restait un homme : il buvait à en perdre dignité et raison dans le bureau de son collègue et s’empiffrait le soir dans les cuisines, faisait de longues promenades sur les rives du Lac Noir et s’était entiché d’une jeune élève comme apprentie pour lui sauver la vie, au point de venir la défendre au bureau du directeur des Gryffondor. Maintenant, voilà qu’il se laissait embrasser, avec une tendresse inavouée, un soupçon, un soupir, quelque chose qui venait de loin, comme un souvenir, quelque chose qui faisait écho à une peine, à un démon. Albus l’embrassait avec douceur, loin de tous les baisers qu’ils avaient pu connaître. C’était un baiser qui venait de la mort du soleil, un baiser automnal, qui annonçait l’hiver par sa faiblesse. Où était passé les temps fougueux de leur amour ? Albus en était pourtant persuadé : son amour pour Gellert ne l’avait jamais quitté. Après lui, tout lui parut fade et sans intérêt. Oh il ressentit tendresse et inclination, mais jamais assez pour s’échapper de la toile d’araignée que lui avait confectionné la personnalité hors du commun de Grindelwald. Et qu’il était si douloureux d’essayer de s’enfuir, plus douloureux encore que de s’y lover, désirant ce qui était impossible.

Était-ce une punition ? Voilà que le mage noir lui avouait qu’il avait souffert de l’avoir aimer et qu’il voulait le tuer, songeant que cela réglerait tout. Albus savait pertinemment, peut-être par la sagesse qu’il se savait supérieure à celle de Grindelwald, que cela n’aurait rien arrangé. Pis encore, peut-être que son fantôme en aurait profité pour le hanter. Bon courage à qui cette malédiction survient, car elle est pire que la mort.

Albus sentit les mains de Gellert autour de lui, poursuivant sur la voie de cette tendresse qui n’était qu’à eux. Ce baiser, pourtant si court, parut durer un millénaire. Ce fut Grindelwald qui s’écarta le premier, rassurant son ancien amant d’une caresse de ses lèvres contre sa barbe. C’était inhabituel de sa part, mais cela lui plaisait. C’était comme à l’époque où, dans les foins des granges, ils se retrouvaient cachés ; et il l’embrassait sur les cheveux. Albus était un peu fou oui, fou de ce gosse sans âge, deux ans plus jeune et pourtant dix fois plus vieux. La rudesse de son existence avait donné de la consistance à son être, et même si Albus avait souffert, il avait choisi de s’aveugler dans les études, puis dans le devoir envers sa famille. Aujourd’hui, rien n’avait sensiblement changé. Les mots n’étaient pas les mêmes, mais le fond de leurs cœurs étaient semblables. Albus sourit tendrement, ne souhaitant pas ruiner cet instant.

Lui lança un regard rempli de sens, le professeur de métamorphose s’écarta à son tour. Il retourna à son bureau, dont il caressa le bois, songeur. Que faire, que dire après cela ? Y avait-il quelque chose à dire ? Sans un mot, et d’un petit geste discret du doigt, il fit sortir des placards deux tasses et une théière qu’il remplit d’un thé revigorant. Cela leur ferait grand bien à tous les deux. Une fois qu’il fut servi, Albus prit sa tasse et partit regarder par la fenêtre. Il vit marcher deux silhouettes qu’il n’eut pas de mal à reconnaître, malgré la distance et ses lunettes de lecture. Il souffla du nez, et prit une gorgée de son thé avant de se retourner vers Grindelwald avec un sourire mutin :

Dis-moi ce que tu penses de ce thé, il est de ma conception. Un chaï aux boutons d’or, fleurs de chrysanthème et au thym pour rehausser le goût. Ça, tu ne le trouveras pas dans les tiroirs de Belladone.

Dumbledore montra la fenêtre d’un léger coup du menton.

Je pense d’ailleurs que la jeune Lavande est entre de très bonnes mains.

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