Des sacrifices de l'affection - Grindelwald



 
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Des sacrifices de l'affection - Grindelwald

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Belladone Raven
Belladone Raven
Âge : 28 ans
Sang : Sang-Pur
Nationalité : Anglaise
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Épouvantard : Lavande recroquevillée au sol, le visage baigné de larmes, qui implore son aide, personnification de son impuissance à combattre les Forces du Mal
Reflet du Riséd : Lui même sauvant Lavande à son bras, des étincelles flamboyantes jaillissant encore de sa baguette, provenant de la bataille qu'il vient de gagner
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MessageSujet: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeMer 12 Aoû - 12:09



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

Belladone avait haussé un sourcil surpris lorsqu’Eurydice s’était posé péniblement sur la table des Professeurs, ce matin-là. Le jeune homme avait délesté l’oiseau du petit lien qui nouait sa patte maigre à son fardeau, recouvert d’un papier brun que ses doigts distraits avaient déchiré avec délicatesse. Le titre de l’ouvrage lui avait arraché un léger pincement au cœur, tandis qu’il remerciait le volatile harassé d’une caresse sur le bec, le laissant picorer le reste d’œufs frits et de bacon grillé qui gisaient dans son assiette de petit-déjeuner. Son regard d’encre s’était posé un instant sur la place voisine, à sa gauche, vide depuis plusieurs jours, avant de se poser de nouveau sur l’ouvrage, peu épais, relié d’un cuir élimé par le temps. Il s’agissait d’un petit traité méconnu et plutôt rare, édité en un nombre très restreint d’exemplaires au milieu du 19ème siècle, et qui traitait de l’Histoire des persécutions sorcières, du Moyen-Âge à nos jours, de la diversité des tourments infligés à ceux-ci par les Moldus, jusqu’à la création du Code International du secret magique en 1692 et ses répercussions sur la vie quotidienne des Sorciers.

Sujet évoqué au détour d’une conversation, mais qui enflammait le cœur polaire de Gellert Grindelwald à coup sûr, cette contrainte légale de dissimuler leur existence, à eux, Sorciers, révoltant le Mage Noir repenti qui n’avait eu de cesse, sa vie entière, de lutter corps et âme contre ce qu’il considérait la pire des injustices faite à la race des magiciens toute entière, depuis maintenant plus de deux siècles. Alors Belladone s’était offert de lui prêter le traité qui prenait la poussière dans la Bibliothèque du Manoir Raven, et qu’il était peut-être le seul de la fratrie à avoir consulté, le dernier lecteur avant lui remontant sans doute à grand-père Bleuet. La rafale d’évènements récents avait bringuebalé avec tant de force les petites habitudes de son quotidien tranquille que Belladone en avait oublié la demande qu’il avait envoyé à sa mère, et son retour lui rappelait soudain que Gellert lui manquait.

Il lui en voulait encore, pourtant. La déception et l’amertume s’étaient amoindries, la raison éclipsant leur aigreur ombrageuse, infertile, qui contraignait le jeune homme à se murer dans un silence vexé auprès d’un de ses rares amis, qui avait pris le parti de ne même plus l’importuner de sa présence lors des repas. La sagesse lui intimait de prendre en considération l’éclat de colère terrible, réputé chez le grand Grindelwald, qui avait tout aveuglé sur son sillage, discernement et considération pour son ami dont il avait complètement oublié l’existence, comme tout ce qui l’avait entouré, quelques instants durant, quelques instants effroyables qui avaient vu sa rage s’exacerber jusqu’à son apogée, avant de redescendre lentement vers les sphères glacées de cette apathie polaire qui murait le visage de cire du célèbre Legilimens. Mais il n’y avait pas eu de colère chez Albus, et Belladone, peut-être, aurait-il préféré cela, à ces reproches acerbes, à cette déception cuisante qu’il avait lue dans les yeux d’azur d’ordinaire enjoués, taquins et bienveillants, de celui chez qui il désirait le plus susciter l’admiration. Le jeune homme avait baissé la tête sous la cruauté de ce coup de grâce, et avait subi le châtiment avec une soumission mutique, heureux de n’être pas renvoyé de Poudlard après la gravité extrême d’un tel manquement.

Le Professeur Dumbledore s’était encore montré bien trop bon, mais Belladone en avait amèrement voulu à son ami, à qui il avait suffisamment offert sa confiance pour accéder à sa requête les yeux fermés, et laisser choir dans sa paume de glace ouverte sa plus fidèle alliée. Le jeune homme avait bien conscience d’avoir sciemment armé le bras du Mage Noir le plus puissant de ce siècle, engeôlé à Poudlard sous la surveillance du même Dumbledore qui s’attendait, légitime, à une coopération de son Professeur de Défense Contre les Forces du Mal qu’il avait lui-même engagé. Et voilà que Belladone l’avait trahi au profit de cette amitié improbable, quand la reconnaissance du Mage Noir s’était limitée au récit détaillé de cette preuve d’affection auprès de Dumbledore lui-même. Et lui qui avait accédé à cette requête, -autant par amitié pour Gellert que par protection de la malheureuse élève dont il voyait encore la silhouette désolée fleurir le champ de ruines qu’elle avait elle-même provoqué-, s’était senti si blessé et trahi par celui avec qui il pensait partager le but commun d’offrir un monde meilleur à la douce jeune fille, qu’il avait rechigné à lui adresser la parole, s’appliquant à nier complètement son existence.

Ce petit manège puéril durait depuis presque dix jours, et c’était un véritable crève-cœur pour le jeune homme qui s’obstinait avec un acharnement inutile, la bonté de son caractère s’accommodant mal de cette froideur mal jouée et de cette mauvaise comédie indifférente, à laquelle personne ne croyait. Car voilà longtemps que Belladone aurait aimé rire des grimaces taquines de son ami, dissimulées derrière ce masque de cire de mage grave et pince-sans-rire avec lequel, pourtant, il s’amusait plus qu’avec quiconque. Et le jeune homme se sentait pauvre aussi de ces conversations éclairées, dont il semblait s’apercevoir de la richesse une fois qu’il s’en était dépouillé de lui-même, ainsi que ces conseils toujours bien avisés, rehaussés toujours, de ces compliments de fin psychologue qui touchaient toujours en plein cœur. Belladone avait toujours su qu’il lui faudrait revenir. Gellert Grindelwald n’était pas de ceux qui demandaient pardon. Mais le jeune homme, bien que de cœur plus faible, conservait tout de même son petit orgueil, effarouché par l’amère aventure.

L’arrivée de ce livre, de fait, était le prétexte idéal pour renouer le contact avec son précieux ami, contribuant à conserver les apparences sauves pour l’orgueil blessé de Belladone. Personne n’en croirait rien, pourtant. Le jeune homme mourrait d’envie de briser son silence boudeur depuis des jours, et il détenait là une excuse en or, bien que Grindelwald, pour sûr, ne serait pas dupe. Peu lui importait, pourtant. Il avait là le signe qu’il attendait, et Gellert, décidément, lui manquait.

Aussi c’est le livre sous le bras et la tête basse qu’il avait passé les deux Aurors qui gardaient farouchement la porte de la Salle d’Etude des Runes, l’après-midi même, après que le dernier élève n’ait disparu à l’angle du couloir. Son poing hésitant martela discrètement la porte de chêne, et le jeune homme mal à l’aise pénétra sur le seuil de la pièce, se raclant la gorge :

- Bonjour, Gellert…Puis-je entrer un instant ? J’ai…Hum…J’ai ce livre dont je vous avais parlé…Je l’ai reçu de Mère ce matin même alors…

Belladone avait baissé la tête, levant légèrement la main droite au creux de laquelle se tenait le dit ouvrage qui faisait office d’objet de réconciliation. Il restait sur le seuil, penaud et gêné, devant un Gellert encore assis devant son bureau, rassemblant le reste des affaires éparses dont il avait usé pour son cours. Et par un retournement de situation dont seul Grindelwald avait le secret, c’était lui, Belladone, l’offensé, qui se tenait là, fébrile, comme à la merci du jugement de celui dont il attendait avec une impatience mal contenue le premier mot adressé à son encontre depuis maintenant une dizaine de jours.

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Gellert Grindelwald
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeVen 14 Aoû - 20:02



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Plusieurs jours s’étaient écoulés depuis l’incident du couloir. Si Albus avait subi la colère du mage noir repenti et que ce dernier s’en voulait, il était néanmoins satisfait d’avoir su contenir ses pulsions dévastatrices qui avaient failli couter la vie à de nombreux innocents. Il n’ignorait pas non plus qu’il avait fait de la peine à Lavande, qu’il l’avait déçu par sa réaction intransigeante, à l’opposé de la magnanimité dont devrait faire preuve un véritable professeur. C’était pour cela qu’il avait présenté sincèrement ses excuses à l’adolescente. Elle n’était pas en tort dans cette histoire mais Grindelwald était beaucoup trop sanguin pour l’avoir compris sur le moment. Cependant, depuis quelques semaines, il tendait à s’adoucir, à comprendre vraiment ce que le pardon signifiait. Et une certaine honte était née au fond de lui. Honte de ne pas avoir été là pour Lavande quand il le fallait, honte d’avoir éructé sa rage auprès d’Albus qui n’avait rien demandé et qui avait si doux avec lui dernièrement, honte d’avoir fui également la confrontation avec Belladone à chaque dîner depuis l’incident. Grindelwald n’était pas quelqu’un de courageux, et c’en n’était que trop flagrant désormais. Lâche, il n’avait voulu confronter le seul sorcier aussi puissant que lui et maintenant, lâche, il ne désirait pas être face à un mage, certes bien moins puissant que lui, mais dont leur relation représentait beaucoup.

Les jours avaient donc passé sans que Grindelwald n’échangeât un seul mot avec son ami. Peut-être n’était-il pas fait pour la sociabilisation. À chaque fois qu’il avait essayé de nouer quelque chose de fort avec un individu, cela avait tourné au drame. Mais la vie continuait, et même si cela était extrêmement bateau comme façon de penser, cela n’en demeurait pas moins vrai. Ainsi, tel le repenti assidu qu’il était, Gellert avait continué ses cours, malgré cette colère passée qu’il trainait comme le fardeau de ses remords. Les soirées étaient longues et ennuyeuses et il n’osait demander à Albus de passer du temps avec lui. Il reprenait quelque peu espoir, cependant, que cette monotonie morose soit chassée par la reprise des cours avec Lavande. Et pourtant, tout ne tenait qu’à lui. Mais quand la nuit avançait et qu’il devait retourner dans ses quartiers, il devait se rendre à l’évidence que lire était devenue ennuyant, le souvenir de cette soirée pas si lointaine avec Belladone dans les cuisines lui revenant souvent en mémoire avec nostalgie, comme s’il s’agissait d’une vie passée alors que seulement quelques semaines séparaient ce festin nocturne à cet instant dans sa classe, où il était occupé à ranger ses affaires.

On frappa soudain à sa porte. Il balaya rapidement sa classe de son regard, cherchant à percevoir un potentiel oubli de matériel de la part d’un de ses élèves, mais il ne vit ni encrier, ni plume oubliés. Intrigué, il releva alors ses yeux hétérochromes sur la porte et aperçut le visage juvénile, gêné et mal rasé de Belladone. Il devait se l’avouer, il était surpris de voir le jeune homme venir vers lui. Et il était encore plus surpris de constater qu’il était ravi de sa présence. Cependant, rattrapé par sa fierté mal placée, Grindelwald ravala le sourire qui aurait pu brièvement se dessiner sur ses lèvres, préférant relever le menton. Peut-être que Belladone venait essayer de recréer quelque chose avec le mage noir, dire que ce qu’il s’était passé était oublié. Albus avait cependant certainement dû sermonner son ancien élève à propos des révélations de Gellert concernant la baguette. En réalité, le repenti n’avait pas cafté dans le but de nuire à Belladone personnellement. Il avait juste parlé sous le coup d’une colère désabusée et dépitée. Il comprendrait cependant que le jeune professeur de Défense Contre les Forces du Mal lui en veuille. Celui-ci fut pourtant le premier à prendre la parole.

Il lui demanda s’il pouvait rentrer – ce à quoi Gellert s’empressa de répondre par un léger signe de tête – et lui parla d’un livre qu’il aurait reçu le matin même. Cette fois-ci, le mage noir ne put s’empêcher d’esquisser un sourire amusé. Il n’ignorait pas le fait que son ami avait appartenu à la maison Serdaigle, réputée pour être celle des curieux et des érudits. Certaines rumeurs disaient même que Belladone était l’un des descendants de la fondatrice, ce qui ne surprenait guère le mage noir. Le jeune homme était en effet un véritable rat de bibliothèques et c’était pour cela que Gellert n’avait pu retenir son sourire amusé : son collègue lui avait parlé de tellement de livres qu’il n’aurait su deviner lequel il tenait actuellement sous son bras. Tandis que Belladone s’approchait, Grindelwald essayait de percevoir la couverture de l’ouvrage. Il appréciait cependant la démarche de faire comme si rien ne s’était passé entre les deux hommes. Son orgueil l’empêchait de s’excuser comme il avait pu le faire avec Lavande. Belladone n’était pas aussi perdu dans sa vie que la jeune élève de Serpentard. Cependant, rendu jovial par la présence de son ami, le sourire de Gellert se fit plus large et plus doux, une indéniable mais discrète lueur taquine dans les yeux.

— Bonjour Belladone. Et bien je dois t’avouer que je ne sais quel livre tu m’as apporté. Tu m’as parlé de tellement de bouquins que j’ai dû oublier quelques titres parmi ceux que tu as dû mentionner.

Il le regarda droit dans les yeux, se demandant si fermer les yeux sur leur différent implicite était la bonne stratégie à appliquer. Rapidement, il baissa le regard et désigna la chaise d’un de ses élèves à Belladone.

— Je t’en prie, assieds-toi.

Quelque peu mal à l’aise d’affronter la possible rancœur de son collègue, Gellert attrapa la brosse et la passa sur le tableau afin d’effacer le cours de la journée. Il s’en voulut alors de tourner ainsi le dos à un sorcier qui ne pourrait même pas lancer le moindre sortilège contre lui. Belladone n’était nullement une menace pour Grindelwald. Cependant, il avait indéniablement quelque chose de plus que le mage noir. Quelque chose de plus que le repenti devait trouver pour sûrement obtenir une sorte de paix intérieure. Il en était conscient, il avait besoin du jeune sorcier. Il avait surtout besoin de son amitié, bien que trop pure et sincère pour être sombre et mauvais tel que lui.
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeMer 19 Aoû - 13:19



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

Dans une tentative piteuse de dissiper son trouble, Belladone dansait d’un pied sur l’autre, trompant son immobilisme nerveux par cette danse ridicule qui ne lui ôtait rien du malaise qu’il avait à se trouver planté là, soumis à la décision de Grindelwald comme l’accusé répondant d’un crime devant le Magenmagot tout entier. Ami ou non, offensé ou pas, il y’avait de ces choses immuables, que rien ne semblait pouvoir changer. C’était Gellert Grindelwald, toujours, même en tort, qui aurait le dessus sur son cadet. Et Belladone, confronté à l’inéluctable réalité qui lui entravait la gorge, ne savait pas s’il devait s’offusquer un peu plus de cette supériorité inconsciente, naturelle, qu’aurait toujours son aîné sur lui, où l’accepter comme faisant partie intégrante de cette affection qui s’était creusée chaque jour un peu plus profondément dans la tendresse de son cœur, le laissant se remplir du vide de l’absence qu’il s’était lui-même infligé. Et si pour certains faire le premier pas relevait de la faiblesse, alors Belladone plaidait coupable, n’en déplaise à ce stupide orgueil qui l’avait fait bouder comme un gamin pendant des jours, quand l’amour restait pour lui l’unique moteur d’une existence qu’il vouait à faire le bien.

Et s’il fallait un certain courage pour, le premier, briser le silence puéril qu’il avait imposé à son inconcevable relation avec le mage noir repenti -duquel, plus jeune, il avait contemplé, terrifié et fasciné, l’auguste visage qui s’étalait dans les coupures de journaux-, celui d’avouer sa déception semblait définitivement lui manquer. Ô comme Belladone aurait voulu clamer son affliction, et offrir à son ami l’aveu d’une franchise dont il ne se sentait pas capable, fixé par le regard hétérochrome planté sur ce masque à la dureté de cire dont le menton s’était levé non sans fierté sous le salut tremblotant et bafouillé de son ami. Ô comme Belladone aurait simplement désiré lui dire à quel point il avait eu de la peine, à quel point il s’était senti trahi, mais qu’il lui avait manqué malgré tout, aussi ingrat qu’ait été son remerciement envers l’extrême confiance qu’il lui avait témoignée.

Ses belles résolutions et ses rancœurs, pourtant, semblaient fondre comme neige au soleil sous l’acquiescement de Grindelwald, qui lui donnait là l’autorisation mutique de pénétrer dans sa salle de cours. Belladone leva la tête, s’approchant docilement. Et sur le visage polaire, impassible, du Legilimens célèbre qui avait fait trembler le monde sorcier, le jeune homme crut déceler une certaine surprise, comme si l’irruption du jeune homme avait ce je-ne-sais-quoi d’improbable, comme si déjà le mage noir avait fait le deuil d’une affection que Belladone n’accordait pas à la légère. Le cœur du Professeur Raven se serra. Cet éclat de surprise presque imperceptible, sur ce visage d’ordinaire de cire, lui causait une de ces peines trop vives que son esprit délicat exacerbait. Oui, il avait été blessé et oui, il en avait sincèrement voulu à Grindelwald. Mais avait-il cru son jeune ami suffisamment volage ou évaporé, pour le voir se résigner à la moindre anicroche, ou à la plus petite des disputes ? D’aucuns pouvaient railler la fragilité exacerbée de Belladone, doublée de la morosité ennuyeuse avec laquelle il calibrait sa jeune vie. Lui s’enorgueillissait de la constance et de la loyauté qu’il mettait dans ses affections. Dans un monde vicié de haine et d’horreurs qu’il ne connaissait que trop, Belladone se refusait à avoir honte d’aimer.

Aussi, hésitant à se sentir quelque peu vexé, le Professeur Raven opta plutôt pour la peine que lui causait une si rapide résignation de Grindelwald. L’évidence même de la solitude affective du mage noir le frappait soudain en plein cœur. Et le jeune homme se souvint de sa frustration, - à lui ainsi qu’aux historiens de la Magie s’étant penchés sur le cas Grindelwald- parce que jamais il n’était parvenu à lui identifier de famille connue, parmi ses recherches, pas même l’ombre d’un nom, pas même le sillage éthéré d’un proche qui l’aurait entouré. Les rumeurs ne citaient qu’Albus Dumbledore, Vinda Rosier plus tard, et les confidences du mage noir envers son désormais ami lui avaient prouvé qu’il avait eu raison de ne guère prêter l’oreille aux racontars qui circulaient entre lui et sa plus fidèle générale. Ne restait plus donc qu’Albus, et la brièveté de leur relation triste à pleurer, et soudain Belladone semblait comprendre ce renoncement fataliste à une amitié à laquelle il tenait, pourtant. Un regain d’affection pour le sorcier qui avait sans doute été, dans un paradoxe terrible, le plus adulé et le plus seul de son temps, vint gonfler l’âme tendre de Belladone, et un sourire éclaira son visage, le rendant à celui, plus taquin et plus discret, du mage noir qui semblait amusé par l’arrivée impromptue du jeune ami qu’il n’attendait plus. Et toute rancœur semblait envolée soudain, et le jeune homme ne put réprimer un léger et bref éclat de rire, vite étouffé sous la gravité du regard hétérochrome que Gellert fixait sur lui. Pourtant la solennité de ce visage toujours de cire n’entâchait pas cette allégresse juvénile d’avoir retrouvé son ami, ses sourires taquins et ses grimaces facétieuses savamment dissimulées derrière cet auguste mage de sorcier terrifiant. Le sourire de Belladone se fit plus large, son visage hésitant prenant une mine faussement scandalisée, tandis que le regard de son aîné se baissait ;

- C’est un véritable scandale ! Il s’agit de ce traité sur l’histoire des persécutions sorcières, qui avait paru vivement vous intéresser. Ce disant, Belladone s’avança d’un pas, déposant ledit ouvrage sur le bureau de Gellert, sous ses yeux, reculant ensuite presque instantanément. Je compte sur votre méticulosité, toutefois. Mère m’a signifié qu’elle me trouvait encore suffisamment jeune pour me faire tirer les oreilles, si d’aventure je le rendais abîmé.

Belladone eut encore un bref éclat de rire, ces prémices de conversation enthousiaste le rendant nerveux. Reconnaissant, il hocha la tête en remerciement de l’invitation de Gellert, et prit place sur une des chaises du premier rang, tandis que le malaise de son aîné, palpable lui aussi, lui faisait tourner le dos, utilisant le prétexte du tableau souillé de craie qu’il brossait avec acharnement. Le jeune homme réfléchit, cherchant à tout prix à briser la glace, mais ne trouvant rien à dire que des banalités, qu’entrecoupaient ces silences gênés qui n’en finissaient pas. Toussotant, l’esprit soudain illuminé d’une idée, Belladone se risqua, s’adressant au large dos tourné ;

- Gellert…,que diriez-vous de boire une tasse de thé à mon bureau, ce soir, après le dîner ? Nous y serions mieux qu’ici et cela changerait un peu de votre…de votre bureau…Vous joindrez-vous à nous au dîner de ce soir ?

Belladone baissa les yeux, malgré que Gellert ne le regardait pas, effrayé à l’idée d’essuyer un refus. L’idée soudaine lui était venue par cette après-midi qu’il avait de libre, et de laquelle il comptait bien profiter pour faire un saut au chemin de traverse acheter la première pâtisserie à la framboise qu’il trouverait pour sceller ses réconciliations avec son ami, et lui signifier par cette petite attention mutique à quel point il lui avait manqué, si d’aventure ledit ami acceptait son offre.


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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeMer 2 Sep - 11:10



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Grindelwald finissait de nettoyer le tableau de sa salle de cours, évitant ainsi le regard de Belladone. Il avait clairement perdu de sa superbe depuis quelques semaines, à Poudlard. Il avait entendu çà et là des chuchotements de couloirs dire que pour le plus grand mage noir du siècle et peut-être même de l’Histoire, il n’avait plus rien d’effrayant. Les rumeurs allaient de bon train sur les causes de cette passivité de Gellert Grindelwald. Certains disaient qu’Azkaban avait réussi à le briser, d’autres (étrangement, une grande proportion de Serpentards) avançaient que cela faisait partie d’un plan pour revenir plus fort dans quelques mois voire années… Peut-être qu’une faible minorité imaginait qu’il désirait vraiment prendre un nouveau départ. La réalité était que le mage noir ne savait pas lui-même mais les choses allaient de bon train pour qu’il se fasse définitivement oublier entre les murs de cette école. Cette dernière serait certainement son dernier refuge, aussi ironique que cela puisse paraître si l’on regardait quinze ans en arrière. Belladone faisait partie de Poudlard et savoir que, quelque part, malgré le comportement parfois brutal du repenti, le jeune homme ne serait jamais bien loin. Il n’avait plus peur de son courroux et cela redonnait un peu de chaleur dans ce corps qui en avait été dépourvu pendant des décennies.

Belladone indiqua alors la nature du livre qu’il avait amené avec lui, ce qui força Gellert à abandonner le nettoyage de son tableau déjà bien propre. Il se pencha alors sur la couverture, effleurant le cuir du bout de son index, écoutant ce dont les écritures à l’intérieur traitaient. La persécution des sorcières. Le repenti eut un léger sourire, ouvrant l’ouvrage et parcourant rapidement quelques mots de son regard hétérochrome. Certaines phrases aux tournures familières lui laissèrent penser qu’il avait dû déjà lire ce livre. Pourtant, le titre ne lui disait pas grand-chose et il ne pouvait être complètement sûr qu’il en avait parcouru l’entièreté des pages. Cependant, le sujet abordé raviverait certainement son désir de justice entre tous, ne pouvant supporter ce genre de sévices faites appliquer au peuple sorcier. Même si les châtiments moldus s’étaient adoucis avec le temps et que leur condamnation pour sorcellerie ne résultait jamais par la mort d’un être magique mais bien d’un moldu, il se surprit à vouloir faire comme tous les autres : fermer les yeux. C’était certainement la meilleure chose à faire pour éviter de réveiller cette volonté brûlante de vengeance pour les siècles passés. Il sourit pourtant poliment, sans rien dire.

Belladone lui proposa alors de venir boire le thé durant cette soirée, le tout non sans une certaine timidité qui le caractérisait. Gellert était véritablement touché par cette attention qui semblait vouloir visiblement enterrer la hache de guerre. En réalité, il avait toujours ce sentiment de culpabilité au travers de la gorge car il savait que le jeune homme lui en avait voulu pour sa réaction colérique et effrayante par rapport à cette pauvre Lavande qui n’avait que voulu se défendre. Mais cette erreur, aussi bégnine soit-elle malgré les conséquences qu’elle avait eues, avait été, sur le moment, intolérable pour cet homme qui n’avait cherché qu’excellence, perfection et précision dans l’exercice de la magie. Cela n’avait été nullement pédagogique et Belladone le lui avait fait comprendre. Mais Gellert était-il sérieusement un aussi bon professeur que son jeune collègue ? Il avait les connaissances et la maîtrise mais il n’était pas doté de sa patience. Était-il donc vraiment le mieux placé pour venir en aide à Lavande, sachant que Belladone semblait tout autant attaché à l’élève de Serpentard que le mage noir ? Il eut un léger soupir qui demeura pourtant discret avant de regarder son collègue et de lui sourire.

— Ce serait avec plaisir, pour le thé. Je ne suis pas un aussi fin connaisseur que le professeur Dumbledore, cependant, donc ne t’embête pas trop à choisir, tout me conviendra.

Il sourit légèrement, peu encore habitué à cet amour britannique pour ces infusions de plante dans l’eau chaude. Il appréciait, certes, en boire de temps en temps, mais il savait que ceux originaires de la Grande-Bretagne pouvaient en boire des litres dans une journée, avec différents types de plante de tout genre, du buisson à la plante aromatique et même parfois aux fruits. Gellert savait qu’il lui restait beaucoup de choses à apprendre sur cette vie calme et tranquille, loin de la guerre et du chaos, des stratégies et de la violence. Son avantage était qu’il ne demeurait pas moins un homme curieux et il avait peut-être la personne la plus patiente et la plus impartiale sur son cas à ses côtés pour l’aider à apprendre cette paix qui lui échappait toujours. Son regard se porta de nouveau sur le livre.

— Ce livre a l’air fort intéressant par ailleurs, mais je ne peux l’accepter. Non pas que j’ai peur de renverser du thé dessus, que ta génitrice en soit soulagée, mais j’ai peur que son contenu ne finisse par… m’agacer, dirais-je.

Il sourit avec un air désolé et referma l’ouvrage, quelque peu à regret. C’était pourtant ce qui lui semblait le plus sage à faire pour éviter de retourner dans une colère morne et passive.

— Souhaiterais-tu cependant marcher avec moi dans le parc ?

Sa demande était douce et sincère, les rayons du soleil faisant baigner sa salle de cours dans une douce lumière dorée lui faisant particulièrement envie. Il voulait profiter également des couleurs automnales du parc avant que l’hiver ne vienne faire tomber les dernières feuilles cramoisies des arbres et recouvrir de son manteau blanc l’intégralité du parc. Marcher dans la neige serait bien moins agréable que dans l’herbe quelques peu humides des dernières averses de saisons, mais le ciel était pour une fois dégagé, il voulait en profiter et cette fois-ci, avec celui qu’il considérait comme un véritable ami. Peut-être que celui avait des choses de prévu, dans ce cas-là, il n’insisterait pas pour l’accompagner et sa promenade de fin de journée, avant son compte-rendu quotidien de sa journée auprès d’Albus, se ferait donc de manière solitaire.
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeLun 7 Sep - 13:23



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

La brosse s’acharnait sur un tableau déjà propre, aveu mutique et inconscient du trouble de Grindelwald. Le cœur de Belladone se serra un peu plus. Gellert était-il si peu aguerri aux marques d’affection ? C’était étrange à concevoir, pour quelqu’un qui n’avait fait que suivre le sillage de plus grands que lui, dissimulés au creux de leur ombre, se calquant sur leurs pas. L’inaltérable image du terrifiant mage noir adulé, acclamé par des auditoires d’innombrables sorciers en liesse, courtisé, entouré, s’effritait doucement, dévoilant le visage plus humain de la cruelle réalité ; celle d’un homme terriblement seul, qui avait suscité effroi et admiration plus qu’amour et affection. Les partisans les plus dévoués ne seraient jamais des amis. Parce qu’il aurait fallu que Gellert puisse fendre l’armure d’Occlumens polaire et insensible, bâtie à force de larmes, de sang et de sacrifices, et qu’enfin l’épanchement de ses peines trouve une âme sincère et amie, qui acceptait de se voir briser ce reflet de déité invulnérable dont il avait abreuvé le monde sorcier tant d’années. Et pour une seule âme tendre comme celle de Belladone, qui s’enorgueillissait de recueillir la confiance du mage noir faillible, humain après tout, combien s’en seraient détournés déçus, désabusés par leur propre illusion qu’ils s’étaient fait d’un être de chair et de sang ?

Sous la litanie nerveuse, bredouillante, dont Belladone abreuvait l’ancien mage noir désormais collègue et ami, ce dernier sembla contraint de s’arracher au brossage effréné et inutile du tableau vierge. Son regard hétérochrome, pourtant, -celui-là même qui, dans les prémices de leur relation, avait fait trembler d’effroi son pauvre cadet-, ne semblait pas prêt à croiser la tendresse affectueuse des yeux d’encre qui étaient revenus vers lui. Non. Les yeux de glace s’étaient baissés sur l’ouvrage fragile, qu’ils parcouraient en diagonale, un sourire presque mélancolique étirant les lèvres pâles du mage noir, tandis que ses doigts d’albâtre effleuraient les pages jaunies par le temps avec une délicatesse déconcertante. Lorsqu’enfin son regard hétérochrome se leva, pour se river vers Belladone, c’est avec un léger sourire qu’il accepta sa proposition de prendre le thé, soulignant le caractère très britannique de cette invitation en lui rappelant qu’il était moins aguerri que lui-même ou le Professeur dans l’art du thé. Le jeune homme eut un rire amusé, dissimulant le soupir d’intense soulagement qui menaçait de s’extirper de ses lèvres, suite à ses craintes d’un rejet de la part du mage noir, qui le rendait aussi fébrile et aussi nerveux :

- Comme sur d’innombrables autres domaines, le Professeur Dumbledore est imbattable en ce qui concerne les différentes sortes de thés. J’en suis moi-même un grand amateur, en bon anglais, et pourtant il parvient encore à m’en faire découvrir. Aussi ne soyez pas trop dur avec vous, et ne vous en faites pas ; j’ai en ce moment même un thé noir aux écorces d’orange confites qui est à tomber à la renverse. Vous m’en direz des nouvelles.

Ce fut au tour de Belladone de baisser les yeux, rendant à Gellert son sourire tout en regardant ses chaussures, dansant d’un pied sur l’autre, ému et gêné de cette réconciliation balbutiante dont tous deux ne demandaient qu’à s’extirper afin de retrouver, enfin, le naturel enjoué et allègre et de leur relation amicale. Lorsque son ami refusa l’ouvrage, pourtant, le jeune homme ne fut pas peiné. L’argument avancé était tout à fait logique, et surtout d’une grande sagesse qu’il était surprenant et appréciable de déceler chez un sorcier si impétueux et si prompt à la colère. Le souvenir encore cuisant de cet accès de rage passé sur la pauvre Lavande grelottant de froid, de peur et d’inquiétude revint douloureusement en mémoire de Belladone, qui avait gratifié Gellert d’un regard peiné et réprobateur, devant la dureté dont il avait fait preuve avec cette malheureuse élève qui ne s’entraînait jamais et qui devait réagir en une seconde face à la lâcheté de ses agresseurs. Le jeune homme n’osait pas lui demander s’il avait repris les cours de pratique avec sa protégée. Il n’avait jamais douté une seule seconde qu’il l’abandonnerait tout à fait, mais il se demandait combien de temps il allait la jeune Lavande se morfondre dans son quotidien sépulcral, la privant d’un des rares rayons de soleil qu’il lui fut permis d’espérer. Non, la réconciliation était trop fraîche, et Belladone ne se risquerait pas à évoquer Lavande ou le Professeur Dumbledore pour le moment. Manquant de se frapper le front devant une telle bêtise –proposer à un mage noir repenti la lecture d’un ouvrage plus que susceptible d’attiser de nouveau sa colère-, Belladone se racla la gorge, gêné :

- C’est évident, je vous demande pardon Gellert, c’était idiot…Si vous voulez savoir quoi que ce soit, vous n’aurez qu’à me demander. Je compte en profiter pour le relire pour la cinquième fois. Peut-être est-ce la sixième…

Belladone se gratta la barbe d’un air gêné, son sourire pâlissant devant sa propre bêtise. Lorsque son ami referma doucement l’ouvrage, le jeune homme s’en saisit, tandis qu’il écoutait son aîné lui proposer une promenade dans le Parc. En un instant, le sourire du jeune Professeur s’élargit de nouveau, ravi d’avoir retrouvé son ami, fut-ce au prix de son petit orgueil, fut-ce au prix d’une conversation gênée. Ces prix-là, après tout, étaient bien peu de choses, devant la valeur d’un véritable ami. Belladone jeta un œil vers la fenêtre, au travers de laquelle les rayons d’un soleil automnal, encore lumineux et tiède, éclairaient la pièce, pour la baigner de cette douce et chétive lueur de fin de matinée. A travers les vitres, les feuilles de cuivre et d’or dansaient, s’agitant sous la brise d’Ecosse, semblant les narguer de leurs teintes mordorées aux promesses de douces escapades. Belladone s’arracha à la contemplation de cette symphonie automnale, pour s’empresser d’accepter :

- Avec plaisir, le temps semble s’y prêter. Toutefois, me permettez-vous de faire un saut rapide à mon bureau, afin d’y déposer ce livre et de récupérer mon manteau ? C’est que je n’ai pas de sang Autrichien dans les veines, et je suis un peu frileux, même pour un Anglais. Il m’est arrivé de trembler rien qu’en vous apercevant de ma fenêtre vous promener dans le Parc sans rien pour vous couvrir ! Mais j’arrive…

Belladone tourna le dos à son ami après un large sourire, et sortit un instant, s’empressant de regagner son bureau, voisin de celui de Grindelwald. Quelques minutes à peine lui avaient suffi pour déposer délicatement sur son bureau l’ouvrage familial, et se saisir de son manteau qui était resté sur le dossier de sa chaise. Un instant plus tard, il était de nouveau sur le seuil de la salle d’Etude des Runes, s’avançant entre les rangées de pupitres, son écharpe d’étudiant aux couleurs de la maison Serdaigle glissée à la va-vite autour de son cou :

- Nous pouvons y’aller si vous êtes prêt…Belladone amorçait la descente vers le Parc, accompagné de son ami qui lui avait indéniablement manqué, si heureux de sa réconciliation que celui qui pouvait se montrer taciturne et solitaire des semaines entières en devenait presque volubile, au risque de fatiguer le mage noir repenti. Vous savez, nous parlions de thé tout à l’heure, notre boisson nationale à nous Anglais. Eh bien lorsque je suis allé faire quelques recherches à Nurmengard, j’ai séjourné quelques temps dans les Alpes Autrichiennes, et j’y ai découvert ce vin que vous buvez chaud, avec de la cannelle, …C’est divin ! Cet endroit est magnifique, mais savez-vous à quel point vous frustrez les historiens et moi-même ? Personne ne sait exactement où vous avez grandi. En fait, personne ne sait rien de votre enfance, mais vous avez grandi dans une contrée sublime…

Belladone rougit quelque peu, emporté par cet élan d’enthousiasme qui l’avait rendu un peu trop bavard. C’est vrai, son escapade au cœur des Alpes Autrichiennes, ainsi que sa fascination et ses heures de travail de recherche consacrées à Grindelwald n’avaient rien donné. Mais il n’avait jamais osé lui poser la question, ne désirant guère que Gellert croit à une quelconque amitié intéressée, quand il n’en était rien. En insatiable curieux pourtant, Belladone mourrait d’envie de savoir, simplement pour lui, sa loyauté indéfectible ne permettant pas de divulguer les confidences d’un ami, aussi célèbre et impénétrable soit-il.



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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeMer 9 Sep - 13:11



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Le thé était visiblement une façon de rassembler la communauté britannique, oubliant les potentiels litiges et autres griefs entre deux personnes. Un moyen de faire la paix autour d’une passion commune pour de simples feuilles infusées dans de l’eau bouillante. Une coutume dont Grindelwald était parfaitement étranger mais qu’il souhaitait découvrir. D’un naturel curieux, cherchant par tous les moyens d’étendre son savoir si tous les domaines possibles et inimaginables, la culture britannique sur le thé manquait cruellement à son érudition et qui de mieux pour l’initier que Belladone, pur anglais dans l’âme, qui devait boire toute sorte de quantité d’infusions différentes, malgré sa modestie par rapport à l’étendue des connaissances de Dumbledore. Pourtant, Gellert était certain que Belladone en savait plus qu’il n’osait l’admettre, et pas seulement par rapport à la boisson nationale britannique. Il était même sûr qu’il y avait des domaines où son jeune collègue surpassait son mentor, seulement il l’ignorait, aveuglé par une foi puissante et indéfectible envers le professeur de métamorphoses. Gellert ne pourrait le sauver de ce mal qui était l’adoration. Oh une adoration modérée en soi, il se doutait que Belladone était suffisamment sage pour conserver un esprit critique. Sinon, il ne serait pas revenu parler au mage noir non sans avoir sous-entendu sa désapprobation par rapport aux agissements de ce dernier face à Lavande par un mutisme froid de plusieurs jours.

Belladone reprit le livre en s’excusant, ce à quoi le mage noir répondit par un sourire doux, signifiant silencieusement que ce n’était rien. Le jeune homme était bien trop pur pour avoir songé un seul instant que cela aurait pu provoquer chez le mage noir de nouvelles envies de rébellions. Il n’accorderait pas ce geste à de la maladresse pure mais seulement à une candeur douce caractéristique au professeur novice. Il avait voulu bien faire et enterrer la hache de guerre avec le cruel personne que Grindelwald incarnait. Cela ne pouvait être une machiavélique machination dans le but de le provoquer subtilement. Non, son sourire qui trahissait sa gêne était bien trop honnête pour cela. Il était si loin des non-dits des hommes fourbes, des manipulateurs que lui-même et Dumbledore incarnaient que jamais Gellert ne remettrait la bienveillance de Belladone en question. Il se demanda même avec amusement si le jeune homme avait déjà menti une seule fois dans sa vie. L’idée même que ce juvénile professeur de Défense Contre les Forces du Mal puisse cacher la vérité à qui que ce soit. L’honnêteté était une vertu dont peu de gens était pourvu, le mage noir en premier. Il ne mentait pas forcément constamment, mais il se gardait bien de dire la vérité dès qu’elle pouvait être incommodante pour lui.

Cependant, avant que Gellert n’ait pu dire quoique ce soit à son ami concernant le livre ou le thé, ce dernier partait déjà, acceptant sa proposition pour marcher dans le crépuscule automnal du parc, mais ayant peur de la fraicheur qui pouvait vite tomber. Le professeur de Runes le regarda partir avec un air surpris, Belladone venant de lui avouer qu’il l’avait déjà vu se promener dans le parc. Il ne savait si son jeune ami le surveillait ou s’il était juste curieux. Il se demanda même s’il l’avait déjà vu travailler avec Lavande ou même cette soirée passée en compagnie d’Albus. Inquiet et un peu dérouté, Gellert l’attendit patiemment, essayant d’oublier cet étrange aveu de la part de son ami. Il n’ignorait pas que Belladone avait toujours été passionné par le chemin obscur qu’avait emprunté le mage noir, de la terreur qu’avait inspiré son pouvoir et que cela n’était sans nul doute de la curiosité que de regarder le plus terrible des sorciers vagabonder dans le parc de Poudlard. Oui, il ne pouvait y avoir d’autres réponses que cet intérêt candide et innocent d’un passionné de magie noir au cœur regardant celui qui avait fait trembler toute la population sorcière pendant des décennies.

Belladone revient quelques minutes plus tard, leurs deux étages étant, finalement peu éloignés dans l’infinité des corridors de Poudlard. Gellert eut un discret sourire attendri en voyant son éternelle écharpe de Serdaigle autour du coup, dont les couleurs avaient légèrement passées à force de innumérables lavages qu’avait dû endurer le vêtement. Impatient d’aller sentir le vent écossais dans ses cheveux, Gellert se leva rapidement et emboîta directement le pas à Belladone, commençant leur amicale et reposante conversation. Tandis qu’ils passaient le pont en bois menant aux vastes étendues du parc de Poudlard, le jeune professeur continuait sa conversation sur les boissons, indiquant que, en recherches d’informations sur le mage, il avait eu l’occasion de se rendre dans les Alpes autrichiennes et de goûter certaines spécialités locales, comme le vin chaud à la cannelle. Cet aveu arracha un sourire doux à Gellert dont les pieds commencèrent à fouler l’herbe humide et fraiche du parc. Cependant, emporté dans son élan bavard, Belladone poursuivit sa tirade, mentionnant que l’enfance du mage noir avait toujours été secrète pour le commun des mortels. Mentionner ses montagnes natales arracha un sourire nostalgique aux lèvres de Grindelwald qui regardaient de ses yeux asymétriques les reliefs écossais, plus ronds et doux que ceux abrupts et aiguisés de l’ancienne Autriche-Hongrie.

La question de rester évasif se posa. Pourquoi révéler à son ami cette tranche de sa vie qu’il gardait pour lui par la force des choses. En effet, le peu de questions auxquelles il devait répondre ne concernait nullement son passé mais plus ses intentions présentes ou ses machinations futures. Les historiens étaient peut-être frustrés, mais il n’avait jamais cherché à le rencontrer. Mais, en toute honnêteté, il ne se serait peut-être pas livré si facilement. Il n’était pas un livre ouvert et parfois, même certaines lignes de son cœur lui étaient difficilement lisibles et compréhensibles. Pourtant, avouer son passé serait d’une manière de prouver la confiance qu’il avait en Belladone. Il se doutait qu’il n’était pas un journaliste rapiat qui s’empresserait d’étaler ses informations récemment acquises auprès du plus terrible mage noir de son époque auprès de la Gazette du Sorcier, avide du moindre article appétissant pour gagner en lecteurs. De toute façon, si le jeune professeur s’abaissait à faire un tel geste, il savait à quoi s’attendre. Le courroux de Grindelwald serait sans merci et nullement surprenant. Continuant d’avancer, chassant les feuilles mortes à chaque foulée, Gellert regardait devant, se surprenant à chérir ses Alpes natales dont il en avait oublié la beauté au fil des années. Il n’avait jamais réellement profité de la splendeur du paysage qu’il avait chaque jour sous les yeux jusqu’à ce moment précis, où Belladone lui faisait comprendre malgré lui qu’il en serait à jamais privé.

— Sublime, oui, ça l’était… J’ai grandi non loin de ce château de Nurmengard, que tu dois forcément connaître.

Il lui jeta un regard malicieux et faussement accusateur, sous-entendant de ses yeux contraires que Belladone avait forcément dû se rendre aux portes de la bâtisse. Une ombre mélancolique traversa les iris sans couleurs de Grindelwald tandis qu’elles se redirigeaient vers les sommets écossais. Dans quel état devait se trouver ce château à présent ? Abandonné depuis plus de quinze ans, reprit sûrement par des quidams trouvant le cadre magnifique. Peut-être même était-il aux mains des Moldus désormais, ou saisi par le Ministère afin d’éviter des pèlerinages sordides d’anciens fidèles ou de badauds curieux à l’instar de Belladone. Qui sait. Albus devait forcément avoir la réponse.

— Il y avait un village du même nom que le château où ma famille et moi vivions. Nous n’étions pas cachés mais nous n’étions pas forcément acceptés non plus car très tôt, quand mes pouvoirs se sont manifestés, j’ai toujours refusé de les contenir ou de les dissimuler.

Certains souvenirs d’enfances où Gellert haut comme trois pommes s’amusait à faire peur à des bambins aussi téméraires qu’insolents revinrent dans sa mémoire. Un sourire amusé se dessina sur ses lèvres. Tout ceci se trouvait non plus dans une autre vie, mais dans une autre génération, un autre siècle, une autre ère.

— Les Moldus de mon village ne m’appréciaient guère, tu peux t’en douter, et plus particulièrement le curé.

Son sourire amusé demeura quelques instants, le visage hors de lui du curé s’ajoutant à ceux effrayés des enfants qui le fuyaient. Finalement sa mine se fit plus sombre.

— Mon père est finalement mort d’une maladie, j’ignore toujours laquelle et cela fait trop longtemps pour que je me souvienne des symptômes. Ma mère est elle-même devenue très faible, malgré une bonne santé. Je l’ai veillée des jours, peut-être des semaines. Finalement, elle est décédée également et c’est le bourgeois du village, propriétaire du château donc, qui m’a recueilli. C’était peut-être le seul Moldu qui n’avait pas peur de moi malgré le fait que j’étais toujours été extrêmement turbulent et sûrement secoué par le décès de mes parents. Finalement, je suis allé à Durmstrang, au milieu d’autres sorciers de mon âge. En toute honnêteté, je ne pense pas que ce soit la meilleure chose qui me soit arrivée. Mon père me racontait souvent le conte des Trois Frères et j’ai fait des Reliques mon but premier. Je devais être le plus puissant possible alors j’étais studieux, peut-être trop même. Un sorcier lambda ne peut devenir le Maître de la Mort. J’ai rêvé d’avoir la puissance d’Antioche, la dévotion de Cadmus et la sagesse d’Ignotus. Tout domaine de connaissances méritait d’être approfondi, de la divination, à la botanique en passant par les forces du mal. La direction a toujours plus ou moins fermé les yeux sur mes agissements, se disant naïvement qu’il y avait des chances que je puisse devenir leur meilleur sorcier, que je fasse de grandes choses, pas forcément dans la magie noire, et que je redore la réputation mauvaise de Durmstrang.

Il s’arrêta un instant, l’air songeur. Oui, il aurait pu devenir un grand sorcier, à l’instar de Dumbledore. Un érudit maîtrisa chaque petit secret de la magie mais n’ayant pas le cœur perverti par les ténèbres.

— Un jour, un élève m’a provoqué et, comme tu t’en doutes, je ne me suis pas laissé faire. J’ai été trop virulent et j’ai manqué de le tuer. Je me suis fait renvoyer pour cela, au cours de ma sixième année. Je suis repassé brièvement à Nurmengard avant de rejoindre la seule famille biologique qui me restait. Fort heureusement, cette grande-tante se trouvait dans un village lié aux Peverell : Godric’s Hollow, en Angleterre. Comme tu peux le constater, comme toi, j’ai des origines britanniques. La suite, je pense que tu la connais.

Il eut un sourire doux, finissant son monologue non sans une pointe de nostalgie. Finalement, sans regarder Belladone, il conclut :

— J’oubliais : le châtelain qui m’avait recueilli est finalement décédé. À sa mort, il m’a légué son château. Mais tu vois, tu sais désormais plus de choses à mon sujet qu’Albus Dumbledore lui-même. Il y a donc un domaine où tu es désormais meilleur que lui.

Petite plaisanterie rappelant leur conversation précédente sur le thé, il visait ainsi à montrer à Belladone qu’il était loin de vivre dans l’ombre de son mentor et qu’à tout moment, il pouvait s’en détacher. Il était même certain que le jeune professeur de Défense Contre les Forces du Mal avait eu l’audace de creuser plus en profondeur au sujet de la magie noire que l’illustre et érudit enseignant de Métamorphoses. Mais quelque part, Gellert était heureux de se confier ainsi à Belladone. Il avait, en la simplicité de sa présence, l’impression d’atteindre un calme et une paix intérieure. Être auprès de ce sorcier innocent et bon, au milieu des collines écossaises, lui faisait accepter qu’était ici désormais sa place. Il n’avait plus de rôle à jouer, plus de vengeance à assouvir. Il y avait parfois des faits de vie qu’il fallait admettre sans pour autant les accepter, des combats vains qu’il ne fallait mener et des routes qu’il n’aurait dû emprunter. Il avait tout d’abord emprunté celui sur lequel il se trouvait pour un tout autre dessein. Mais cette amitié qu’il nourrissait avec Belladone était peut-être l’une des choses les plus précieuses et des plus pures qu’il possédait désormais.
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeMar 15 Sep - 13:34



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

La langue de Belladone s’était déliée avec l’aisance d’une âme délestée d’un fardeau aussi pénible qu’une brouille avec un ami. C’était peu, pourtant, pour certains. Rien de plus qu’une ombre légère au creux d’une vie trop remplie, rien de plus qu’un murmure plaintif, troublant à peine la tempétueuse symphonie de leur existence. Ce genre de mésaventures, qui n’était que broutilles pour d’autres, prenait beaucoup trop de place dans l’esprit du jeune homme. Se priver sciemment de la présence de Gellert lui avait fait du mal, un mal qu’il s’était infligé seul et sans aide, et que son ami, peut-être un peu par prévenance, peut-être surtout par fierté, n’avait pas cherché à annihiler. Aujourd’hui et pour une des rares fois de sa vie, Belladone s’était comporté en adulte, arrachant de lui-même cette épine douloureuse qui mortifiait sa chair, sans attendre un secours qui ne serait pas venu. Et le bavardage volubile qui s’échappait de ses lèvres fines prouvait là son allégresse soudaine devant la coopération de Gellert, et la réconciliation qu’il avait accepté d’un sourire taquin et d’un regard bienveillant.

Et il fallait bien que Belladone soit d’humeur légère, pour se fendre d’une telle audace, même auprès de celui qu’il considérait maintenant comme son plus proche ami. Car l’humeur de Gellert Grindelwald restait malgré tout à prendre avec des pincettes, et il y’avait de ces sujets que son cadet ne se permettait pas d’aborder avec autant d’insouciance. L’enfance inconnue de l’auguste mage noir repenti en faisait partie. Pourtant, c’est un sourire empreint d’une mélancolie certaine que l’audace du jeune homme arracha au Mage Autrichien, dont les pas foulaient silencieusement l’herbe. Ce n’étaient pas ces accès de rage terrible qui figeaient son visage roide et blanchi par la colère. Non, simplement l’évocation d’un souvenir auquel il n’avait sans doute pas songé depuis fort longtemps. Simplement les réminiscences d’un passé ignoré de tous, dans les tréfonds duquel il se retrouvait plongé la tête la première, soudain, l’évocation de la boisson chaude typique de sa contrée natale le renvoyant brutalement un demi-siècle en arrière, lorsqu’il n’était encore qu’un enfant plein de rêves et d’ambitions aux mains blanches du sang des victimes qui les souillaient désormais.

Belladone ne savait guère quoi penser de cet état d’égarement éperdu dans les méandres desquels il semblait avoir plongé Gellert. Il ne savait pas si ces réminiscences étaient douloureuses ou non à son ami. La curiosité maladive du jeune homme avait-elle fait du mal à son ami, lui plongeant la tête la première dans un passé dont il ne connaissait rien et que, peut-être, il avait tâché d’oublier, à raison ? Ou au contraire avait-il rallumé la bougie d’une enfance heureuse, dans les tréfonds obscurs de l’existence du grand mage, perdu et seul dans le noir ? Difficile à dire. L’affection inconcevable qui liait le tendre Professeur au grand Mage Autrichien ne l’aidait en rien. Le visage du grand Gellert Grindelwald restait impénétrable au commun des mortels. N’était-ce qu’un accès d’orgueil, le reflet trompeur de son imagination fière, malgré tout, d’avoir gagné la confiance et l’affection d’un tel sorcier ? Mais Belladone croyait voir en ces foulées mesurées qui chassaient le tapis de feuilles d’automne qui gisait sous leurs pieds comme l’aveu d’un trouble certain, le clapotis d’un ricochet sur le lac gelé qu’était son esprit placide.

Il y’avait de ces sorciers à la réputation si terrible que le commun des mortels en venait à oublier la facette humaine qui régissait chacun d’entre nous. Car s’il semblait inconcevable que l’immense despote, qui avait tenu le monde sorcier sous son joug, le destin de milliers de mages dans le creux de sa main d’albâtre, ait eu une enfance, il avait bel et bien existé, pourtant, le petit Gellert Grindelwald. Il ne pouvait en être autrement. Et lorsque l’intéressé acquiesça, confirmant là la beauté de cette contrée sauvage, aux landes fleuries enclavées au creux de montagnes neigeuses millénaires, les lèvres de Belladone s’étirèrent en un sourire ému, contemplant soudain devant ses yeux d’encre le reflet éthéré, mort depuis longtemps, d’un chérubin à tête blonde galopant à travers champs, non loin des jupes d’une mère dont personne ne semblait avoir jamais connu l’existence. Quel genre d’enfant avait bien pu être Gellert Grindelwald ? Belladone se posait sincèrement la question, curieux et fasciné, mais intéressé tout simplement par le passé de l’âme repentie et torturée de laquelle il s’était fait une amie. Ses joues rosirent légèrement pourtant, lorsque le regard hétérochrome, embrumé d’un air mutin, vint se poser sur lui. Oui, sa curiosité avait poussé le timide et prévenant Belladone à une audace que beaucoup n’auraient pas osé. Et il s’agissait là d’une immense marque de confiance que Gellert lui faisait là, un cadeau sacré, inestimable, et Belladone la recueillait avec gratitude, conscient de la valeur des confidences dont son ami lui faisait don.

Le visage tendre du jeune Professeur ne se déparait pas de ce sourire ému, pâle et un brin émerveillé de ces confidences auxquelles il ne semblait pas véritablement s’attendre. Peut-être s’attendait-il à ces rejets bourrus, coutumiers de la brusquerie naturelle de Grindelwald. Ou peut-être à une réponse évasive, fuite compréhensible d’un passé auquel il avait tenté d’échapper sa vie durant, protégeant au cœur des remparts invincibles, forgés par le sang et l’Occlumancie, une trace d’humanité qu’il ne voulait plus voir subsister.

Mais non. Le grand Gellert Grindelwald parlait, parlait, ne refusant à son jeune ami aucune miette, aucune bribe de son passé secret, inconnu de tous, émaillant son récit tragique d’anecdotes terribles énoncées d’un ton placide d’un homme d’affaires qui énonce le chiffre d’affaires trimestriel des ventes de confiseries Zonko. Il y’avait cette cruauté dans ce calme olympien avec lequel il narrait ses malheurs juvéniles et son enfance brisée, qui n’avait rien à envier au ton monocorde, presque désintéressé, de sa jeune protégée Lavande, lorsqu’elle avait narré à Belladone les troubles monstrueux qui n’avaient déjà que trop agité sa jeune vie. Les similitudes entre ces deux êtres pourtant si différents, et pour lesquels la tendresse du Professeur s’était lié d’affection, étaient déroutants, parfois. Il y’avait parfois dans le regard hétérochrome de Grindelwald la même ombre passagère, fugace, d’un destin brisé et d’une résignation à la rudesse de l’existence, pourtant éclairée par la lueur exaltée d’une ambition sans limites, comme la lueur d’une bougie qui vacillait au cœur d’une veillée funèbre. C’était ce même reflet qui brisait le cœur de Belladone, lorsque le regard d’émeraude ternie de Lavande lui transperçait l’âme, le même reflet en moins vieilli, mais en tout aussi résigné, et en plus terrible peut-être, au regard du peu de printemps qu’il avait suffi à ses yeux pour s’en draper.

Belladone baissa son regard d’encre avec pudeur, le rivant vers l’éclat rougeoyant et mordoré des feuilles mortes qui tapissaient le Parc, écoutant avec un respect religieux le récit d’une enfance tourmentée par les Moldus, du deuil déchirant de ses deux parents, perdus si tôt, de la bienveillance du châtelain du village Autrichien. Et puis la naissance du grand mythe Grindelwald lui fut révélée, l’origine de la légende, de l’ambition insatiable et de l’appétit sans limites de celui qui s’était fixé, adolescent, le but encore jamais atteint de devenir Maître de la Mort. Belladone écouta l’aveu de son échec, la déchéance de cette ambition trop grande, le renvoi de Durmstrang, le retour à la mère patrie. Le protecteur décédé, et le départ pour l’Angleterre et Godric’s Hollow, chez son dernier parent qui lui subsistait. Et cette boutade taquine, qui concluait le récit cruellement placide d’une enfance terrible, l’aveu que son ancien amant et homme qu’il ait aimé plus que tout au monde en savait moins que Belladone lui-même, désormais, sur la jeunesse de Grindelwald. Le jeune homme garda le visage baissé encore un moment, s’attardant sur les veines ôcres et orangeâtres qui striaient les feuilles qui crissaient sous ses pas. Toutes ces révélations étaient un choc considérable qu’il lui fallait accuser, lui et sa fascination pour le plus grand mage noir du siècle qui, désormais son ami, lui relatait tout ce qu’il n’avait pu qu’imaginer de longues heures, perdu, tout petit au creux de ces spectaculaires montagnes qui avaient été témoins des premières années d’un si grand mage.

Lorsqu’il releva la tête, après un temps qui lui avait paru quelques secondes et une éternité, Belladone vit que Grindelwald souriait d’un air taquin, dans l’illustration, sans doute, de la taquinerie qui avait clôturé ce tragique récit. Ce fut ce sourire même qui lui rendit quelques bribes de la folle hardiesse qui l’avait animé tout à l’heure, et que la litanie de Grindelwald lui avait arraché pour le rendre livide, son visage reprenant peu à peu de ses couleurs, fouettait par la douceur de la brise automnale. Un raclement de gorge gêné et ému vint annoncer les préambules de la réaction de Belladone à une suite incroyable déclaration :

- C’est une bien triste histoire, Gellert…Mais je vous remercie de me l’avoir fait partager, ça me touche beaucoup… Belladone hésita une seconde, rougissant de nouveau, puis se risqua à l’audace qui, après tout, avait payé l’instant d’avant : Mais vous savez, si je puis me permettre, je suis persuadé que le Professeur Dumbledore serait très ému que vous la partagiez aussi avec lui…Il s’agit là d’une grande marque de confiance.

De nouveau, le jeune homme baissa les yeux vers les feuilles aux reflets de cuivre, d’or et de pourpre, embarrassé par sa propre audace, et par la pudeur trop britannique, emplie de flegme, qui l’engonçait dans les tréfonds de convenances surannées. Il n’y avait pas de mal à évoquer l’intimité avec un ami, après tout, et, après ce récit, Belladone se sentait plus que jamais proche du plus grand mage noir du siècle qui avait fasciné ses jours et ses nuits d’adolescence.



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Gellert Grindelwald
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeMer 16 Sep - 10:04



Des Sacrifices de l'Affection

« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Après avoir raconté son histoire d’une traite, Grindelwald se demanda bien ce qu’il lui avait pris de s’ouvrir autant au jeune Raven. Non pas qu’il n’avait pas confiance en lui, mais ce n’était pas quelque chose dont il parlait tous les jours. Il se demandait même s’il avait déjà raconté son passé à quelqu’un. Après tout, personne ne le lui avait demandé. Ce n’était pas pour ça qu’il était connu et craint du monde entier. Qui se soucie de l’enfance d’un despote après tout ? Cela ne justifiait en rien ses actes de barbarie sans précédent. Pourtant tous oubliaient que l’enfance était un passage obligé de la vie, qu’elle était celle qui forgeait les individus. Si ses parents n’étaient pas décédés aussi brusquement, Gellert aurait-il emprunter un autre chemin ? Qu’aurait-il voulu faire de sa vie ? La perte de ses géniteurs avait laissé une marque au fer rouge dans la construction de son être et il lui était impossible de deviner précisément à quel dessein il était destiné s’ils avaient été présents jusqu’au bout. Cependant, il pouvait affirmer avec certitude qu’ils auraient souhaité une toute autre vie pour lui. Qui aurait voulu que leur fils unique qu’ils aimaient plus que tout, devienne un despote, un meurtrier ?

Voilà pourquoi il ne repensait jamais à son passé. Mélancolique et songeant au fait que ses parents n’auraient en rien approuver ses actes violemment vindicatifs, il poussa un léger soupir teinté d’une tristesse, regardant quelques feuilles mortes se faire légèrement bousculer par la brise timide automnale qui caressait l’herbe du parc de Poudlard. Il aurait valu mieux que cela. Il avait fait de grandes choses, oui, indéniablement, mais ces choses là auraient pu être d’une nature profondément bonne et lumineuse. C’était ce qu’il avait essayé de faire, certes, en désirant libérer de ce joug ridicule qui les obligeait à rester cacher, à subir l’incompréhension et la peur primaire des Moldus. Les êtres humains ont viscéralement peur de ce qu’ils ne comprennent pas, de ce qu’ils n’expliquent pas. Et la peur pouvait rendre violent. Comment les blâmer, au final ? La diplomatie aurait été certainement le choix le plus judicieux, celui d’Albus, au final. Expliquer, au lieu d’imposer. Être des missionnaires plutôt que des croisés. Oui, il aurait dû agir différemment, bien évidemment. La question ne se posait même pas et il lui faudrait vivre avec le fardeau de ses regrets éternellement. C’était le prix à payer d’une existence aveuglée par la vengeance et la colère.

Belladone prit alors la parole, après un long silence. Pour le jeune sorcier, cette situation devait paraître totalement inattendue, ne s’attendant probablement pas à ce que sa curiosité soit autant satisfaite, d’une traite, par un homme qui avait cultivé si habilement le mystère autour de son être pendant si longtemps. Mais Gellert n’avait plus grand-chose à perdre et par cette confession, il voulait montrer sa confiance en Belladone. Ce dernier la lui avait déjà prouvée par deux fois en lui prêtant sa baguette, dont une fois de son plein gré, l’ancien mage noir voulait lui rendre la pareille. Alors oui, il s’était confié sur son intimité, par deux fois également. La première sur Dumbledore, la seconde, maintenant, sur son enfance. Visiblement déboussolé et bien moins bavard que précédemment, Belladone parvint à articuler le fait que peut-être, l’ancien mage noir devait se confier au professeur de métamorphoses. Le sourire de Gellert réapparu et son regard se tourna sur le visage encore vierge du poids des années de son collègue. Le repenti n’était vraiment pas certain de ce qu’affirmait le professeur de Défense Contre les Forces du Mal. Il n’était pas vraiment pas sûr que Dumbledore soit sincèrement ému de l’histoire de son ancien amant.

— Non, non. Je lui raconterai s’il me le demande. Je comprendrais qu’il n’ait pas envie de savoir ou que, tout simplement, cela ne l’intéresse pas. Dumbledore a eu une enfance assez tragique lui aussi, je ne veux pas qu’il pense que je m’apitoie.

Avec un sourire doux, Gellert finit par détourner son regard avant qu’une ombre mélancolique vienne voiler ce dernier, repensant à Albus qui lui aussi avait perdu tragiquement ses parents et sa sœur. Quant à son frère, il se doutait que leur relation ne devait pas être au beau fixe. L’ancien mage noir se demanda alors où avait atterri Abelforth, mais la réponse à cette question, il la trouverait de lui-même et ne prendra certainement pas le risque de demander à Albus. Il y avait de ces choses qui appartenaient au passé, aussi lourd fût-il. Si Dumbledore et Grindelwald s’efforçaient autant à l’enterrer, ce n’était pas pour le ressasser, aussi innocente fût la manière de faire. Continuant de fouler le léger tapis de feuilles mortes, les deux collègues se dirigeaient lentement mais sûrement vers le Lac Noir et la Forêt Interdite. Finalement, Gellert s’arrêta et regarder les arbres aux silhouettes menaçantes et eut un sourire complice en direction de son ami.

— Dis-moi, une promenade dans la Forêt, ça te dirait ? Ou alors, c’est à ton tour de me parler de toi, de ta thèse… Mais on peut faire les deux en même temps, ce n’est pas incompatible, non plus.

Il espérait ardemment que Belladone accepte de s’enfoncer sous les branches sombres et tordues de la Forêt. Cet endroit de Poudlard avait toujours fortement intrigué le mage noir qui avait rêvé de tester sa réputation. On lui attribuait toutes sortes de créatures dangereuses que Grindelwald avait hâte de découvrir ou redécouvrir de ses yeux. Il voulait savoir pourquoi elle était tant interdite aux élèves, pourquoi il était défendu de s’y aventurer. Il n’avait fi de ce que pourraient lui dire les Aurors. Là, maintenant, il voulait aller se frotter à ce potentiel danger et il n’y avait rien de plus agréable que de le faire en présence d’un ami. Il comprendrait pourtant son refus. L’ancien mage noir n’avait pas de baguette et avait, en théorie, pas le droit d’utiliser la magie, sauf pour des sorts mineurs et inoffensifs, et Belladone était loin d’être un puissant sorcier. Pourtant, Grindelwald estimait que cela rajouterait un peu de difficulté à leur petite aventure improvisée. Ils n’avaient pas besoin de l’explorer de fond en comble. Deux heures suffiront amplement avant que Gellert, de toute façon, n’aille faire son compte-rendu quotidien de sa journée auprès des Aurors et bien évidemment d’Albus, avec qui la relation s'était fortement améliorée ces derniers jours, ce qui n'était pas pour lui déplaire.
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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeLun 21 Sep - 11:49



Des sacrifices de l'affection

Salle d'Etude des Runes

Automne 1942

Belladone continuait de fouler les feuilles de son pas léger, tâchant de dissimuler son trouble et sa mélancolie devant une telle révélation. L’écheveau de soie qu’il avait déroulé des heures durant, adolescent, avait égrené en vain les innombrables scénarios improbables de l’enfance de Gellert Grindelwald. Le jeune homme croyait avoir tout imaginé. De l’enfant battu à l’orphelin délaissé, du riche héritier au pauvre bougre. Jamais il n’était parvenu à la netteté de cette image de garçonnet aux boucles blondes qui s’égaye au cœur des montagnes d’Autriche, folâtrant au beau milieu des herbes folles, cueillant un bouquet d’Edelweiss et de fleurs sauvages à l’intention d’une mère qui finirait pas mourir de chagrin. Ô comme Belladone comprenait le mystère absolu au fond duquel il avait engeôlé son enfance durant tant d’années ! A se l’imaginer ainsi, aimé de deux parents, et plutôt heureux jusqu’à leur trépas précoce, Gellert revêtait un assurément un visage plus humain. Un visage beau, touchant. Mortel, atteignable, certes. Mais ô combien moins intimidant, ô combien plus poignant à quelqu’un comme Belladone, qui n’attendait rien de lui, sinon une affection désintéressée que, sans doute, le despote pourtant entouré n’avait que trop peu connu.

En réalité Belladone se sentait un peu coupable d’avoir ainsi ravivé une plaie que, sans doute, son ami tâchait de panser à l’aide de mutisme et d’oubli depuis de si longues années. Et voici que ce jeune idiot, et sa curiosité insatiable aiguisée d’une maladresse rare, avait l’audace de suggérer de but en blanc de lui faire le récit d’une jeunesse de laquelle personne n’était au courant. Si Belladone devait faire preuve d’honnêteté, toutefois, il devait s’admettre très touché et un peu fier, piqué dans son orgueil d’être celui qui connaissait le passé du Mage Noir le plus secret de son temps. Mais même dans l’orgueil, il y’avait toujours une certaine pureté chez le jeune homme, une bienveillance infaillible qui ne pouvait se résoudre à faire du mal, fut-ce dans son intérêt. N’importe qui d’autre, peut-être, en aurait profité pour divulguer cette mine aux trésors, lui assurant notoriété et assise dans le monde de la recherche pour la Défense Contre les Forces du Mal, duquel faisait partie Belladone.

Mais au contraire. L’idée même ne lui avait pas effleuré l’esprit. Il était bien trop heureux d’être le détenteur de l’intimité des confessions d’un ami, et bien trop décidé à lui prouver à quel point il avait eu raison de lui témoigner sa confiance. Sans compter le fait que si le jeune Professeur avait été animé par cette idée, il aurait sans doute fini enterré dans quelque clairière obscure de la Forêt Interdite, avant d’avoir pu profiter d’un succès si mal acquis. Grindelwald leva la tête et sourit. Il semblait aujourd’hui d’une grande clémence envers l’audace de Belladone qui s’essayait aux conseils conjugaux, quand sa vie affective à lui n’était qu’un long désert ponctué d’une ou deux ruptures de femmes s’étant trop vite lassées de la monotonie docile de son quotidien. Et il n’y avait aucune hostilité, pas même la moindre brusquerie dont il était coutumier, lorsque Gellert refusa poliment le conseil de Belladone. Non, il préférait attendre la sollicitude de son ancien amant, et il supputait que, sans doute, cette partie de l’existence de Grindelwald ne l’intéressait. Si le jeune homme n’était pas tout à faire d’accord, il n’en dit rien. On ne pouvait aimer une personne partiellement, morcelant une âme et une existence selon les étapes que nous préférons. Non, Albus avait aimé et aimait sans doute encore Grindelwald, alors son enfance l’aurait intéressé. Ce n’était plus du ressort du jeune ami de ce dernier, toutefois. L’insistance serait déplacée, surtout lorsque Gellert évoqua la jeunesse d’Albus, si différente mais non moins tragique. Baissant de nouveau le regard vers les feuilles de cuivre et d’or qui fuyaient sous la pression légère du mocassin verni de Belladone, il se contenta de hocher la tête d’un air docile :

- Hum..Oui, je comprends, bien entendu. Enfin, si le cœur vous en dit, vous pouvez toujours m’en parler. L’histoire et les états d’âme d’un ami m’intéresseront toujours.

En réalité, le visage de Grindelwald semblait empreint d’une mélancolie doucereuse, qui rassura quelque peu son jeune ami. Les réminiscences de son passé semblaient lui faire du bien, malgré leur tristesse, comme s’il était enfin parvenu à oublier, comme s’il les découvrait pour la première fois, avec un regard extérieur, guéri, presque, émerveillé de s’apercevoir qu’il ne souffrait presque plus. C’est que le temps guérissait presque tout, et il semblait s’en rendre compte aujourd’hui, à présent que son jeune ami l’avait contraint, par sa maladresse et sa curiosité insatiable, à déterrer des cadavres enfouis depuis si longtemps sous le terreau fertile de cet esprit formidable, qu’il paraissait les rencontrer pour la première fois. Belladone laissa pudiquement Gellert se repaître de l’image éthérée de ses morts auxquels il n’avait pas pensé depuis des décennies, laissant la nostalgie doucereuse baigner son visage sur lequel flottait un sourire pâle, presque hors du temps.

Et ce fût le Mage Noir repenti qui brisa l’accalmie irréelle du moment, en jetant un regard complice à son ami, qui leva les yeux. L’écrin menaçant des bois sépulcraux semblait leur tendre les bras, et le hardi, l’indomptable Gellert Grindelwald qui ne se complaisait qu’avec beaucoup de peine dans cette vie tranquille de Professeur semblait vouloir s’y engouffrer, irrésistiblement attiré par l’étreinte de la Forêt Interdite. Belladone tâcha de se composer un air tranquille. Qu’avaient-ils donc tous à vouloir le traîner au cœur des crocs béants de ces dangereux bois ? Quelle ironie du sort, pour un élève qui avait soigneusement évité d’enfreindre le règlement, et surtout cet article, qui leur interdisait de pénétrer dans la Forêt ; il lui fallait bien reconnaître, pourtant, que l’expérience avait été incroyable, en compagnie de la jeune Lavande, malgré ses réticences, et malgré la désagréable impression de s’être fait forcer la main par cette jeune élève pour laquelle il ne parvenait à dissimuler une affection particulière, mais qui de toute évidence appartenait plus à la maison Serpentard que n’importe qui, n’en déplaise à son fondateur et à ses comparses aux idées étriquées. Voilà sans doute ce qui leur déplaisait. Opiniâtre, intelligente, vive, rusée, un brin fourbe, se moquant du règlement comme d’une guigne, Lavande prouvait là que tout ce que ses camarades détestaient en elle ne l’empêchait pas d’être le plus Serpentard de toute cette Maison. Et ô comme devait être grand le dépit de certains, à s’apercevoir que leur haine était basée sur la fausseté et le mensonge. Le petit visage méprisant de Desiderata lui parvint, et c’est un sourire satisfait qui étira les lèvres de Belladone, parce qu’elle pouvait en dire ce qu’elle voulait, elle et la pureté de son sang ; Lavande était une Serpentard plus qu’elle ne le serait jamais.

Belladone revint à son ami qui, sans surprise, lui proposait une balade au cœur de la Forêt. L’image de ces bois, en réalité, terrorisait Belladone sans doute plus à cause de la terreur exacerbée des racontars que par les dangers de la Forêt en elle-même. Parce qu’après il en avait arpenté d’autres, des bois dangereux, et sans éprouver cette crainte irrationnelle devant ces bois pleins de légendes maléfiques et de bavardages plus ou moins vrais d’élèves qui se vantaient d’y être allés. De plus, il avait vu Lavande à l’œuvre, et la réputation de Gellert Grindelwald le précédait. Si lui aurait pu se retrouver en mauvaise posture, il ne risquait rien ni avec l’un, ni avec l’autre. Le jeune homme aurait été curieux qu’on lui nomme une créature susceptible de battre en duel l’incroyable puissance de sa jeune élève ou celle du plus grand mage noir de son époque. Avec un sourire décidé, Belladone hocha la tête :

- Oui, je veux bien. Vous avez sans doute une idée derrière la tête, n’est-ce pas ? Quelle créature aimeriez-vous rencontrer ? Quant à moi, j’ai bien peur que mon histoire ne soit que fort peu intéressante mais, je vous raconterais ce que vous voudrez…La période de la rédaction de ma thèse est peut-être la période de ma vie la plus mouvementée…J’ai beaucoup voyagé, et j’ai sillonné de nombreuses forêts, en Albanie, en Irlande, en Autriche, en Espagne, pour ne nommer que ces pays, et je suis allé à la rencontre de nombreuses créatures…Mais c’est étrange, ce souvenir d’enfance qui me fait craindre la Forêt Interdite…Pour les élèves de Poudlard, elle a l’image d’un endroit cauchemardesque, mais, avec vous, je ne peux pas avoir peur !

Belladone rit, se retenant à temps d’évoquer la splendide clairière dont la jeune Lavande lui avait offert la contemplation. Personne n’était censé savoir qu’il avait accompagné la jeune fille au cœur d’une Forêt réputée dangereuse, plutôt qu’à l’Infirmerie dont elle aurait eu grandement besoin. Et puis, c’était idiot, mais il avait une envie farouche, presque jalouse, de garder cette escapade au fond de son cœur à lui, comme si la divulguer allait en amoindrir la valeur. Avec un sourire, Belladone signifia à Gellert qu’il était prêt à s’y enfoncer à ses côtés, quand il le voudrait.




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MessageSujet: Re: Des sacrifices de l'affection - Grindelwald  Des sacrifices de l'affection - Grindelwald Icon_minitimeVen 25 Sep - 12:12



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« I KNOW WHAT I SAW »

Automne 1942.

Depuis combien d’années Gellert ne s’était-il pas souvenu de son enfance ? Même en retournant à Nurmengard, la tête emprisonnée dans sa quête révolutionnaire, il ne conservait aucune pensée pour les défunts. Était-il seulement retourné au cimetière entre la fin de sa scolarité à Durmstrang et son incarcération à Azkaban ? Certains passages de sa vie étaient juste effacés, oubliables comme les grains de sable s’enfuyant d’un poing fermé. Tout était éphémère et sans importance. Retourner voir ses morts ne le ramèneraient pas. Et pourtant, il s’était surpris avec une nostalgie certaine et une culpabilité importante à retourner à Godric’s Hollow, se recueillir sur la tombe de cette vie innocente qu’il avait abrégé. L’hypocrisie de Grindelwald était bien trop grande pour qu’il avoue ce désir de recueillement. Pourquoi elle et pas toutes ses autres victimes à son actif ? Pourquoi elle et pas cet élève qu’il avait manqué d’assassiner qui lui avait valu son exclusion de Durmstrang ? Parce qu’Ariana était la première ? Ou parce que sa mort symbolisait quelque chose de plus grand, qui avait façonné la vie du plus grand mage noir de son siècle ? Dans ce cas-là, le décès prématuré des parents dudit sorcier aurait dû avoir une importance égale à celui de la benjamine Dumbledore.

Le lien entre la Mort et Grindelwald était indéniablement flou. Comment un tel meurtrier tel que lui pouvait avoir des remords pour une seule et unique personne et se moquait parfaitement des autres ? Il avait brisé le destin de tant de familles et pourtant, seulement une seule lui importait désormais. Lui qui avait pourtant sacrifié ses propres ambitions pour celles d’un autre ne pouvait s’empêcher de se trouver atrocement égoïste à ce moment-là. Voilà pourquoi, peut-être, il ne réfléchissait jamais au passé. Voilà pourquoi, sûrement, il fermait les yeux sur ses propres atrocités, clamant que c’était pour le plus grand bien. Peut-être que le décès de ses parents avait été, également, pour le plus grand bien. Que sa mère choisisse de rejoindre son père dans les bras de la Mort plutôt que de rester auprès de son fils unique. Cela avait-il été judicieux que de pousser le jeune Gellert sur un sentier sinueux au bout duquel il aurait affronté l’implacable inéluctabilité de la Mort ? La seule loi à laquelle on ne pouvait abroger qui était celle du caractère éphémère de la vie ? Pour ensuite rencontre Albus Dumbledore, qui l’avait finalement détourné de son but premier, façonnant involontairement le monstre qu’il était à ce jour.

La voix de Belladone à ses côtés finit par le tirer hors de ses pensées qu’il ne voulait plus avoir. Tourner la page, faire fi du passé, étaient des choses que même les personnes les plus clairvoyantes et sages ne parvenaient à faire correctement. Même Albus Dumbledore en était un exemple parfait. Le bavardage de son jeune collègue à côté de lui lui permit de se recentrer sur sa présence et chassa ce vide mélancolique du regard asymétrique du mage noir. Un sourire se dessina même sur son visage. Quelle créature voulait-il croiser dans la Forêt Interdite ? En réalité, il n’en avait aucune idée, son air amusé le trahissant certainement. Il voulait simplement s’aventurer dans cet endroit défendu, s’enfoncer entre les troncs sombres et menaçant de la forêt, sentir le frisson de l’aventure et du danger sur son échine. Une adrénaline malsaine qui le ramenait à la vacuité et à la fragilité de sa propre existence de mortel. Belladone semblait avoir vu plus de chances que prévu et pourtant, il craignait également cette forêt, héritage de son enfance dorée. Pourtant, il était indéniablement plus fragile magiquement que le mage noir. Il était étrange de voir ce jeune Raven s’aventurer vers le danger, même s’il se sentait en sécurité à côté de Grindelwald.

— Tu n’es plus élève, Belladone, mais professeur de Défense Contre les Forces du Mal. Évidemment que tu n’as pas à avoir peur, avec moi ou non à tes côtés.

Il sourit, tel un professeur sourirait à un ancien élève. Sans attendre cependant, il s’engouffra dans la forêt, oubliant les Aurors qui pouvaient se trouver à quelques mètres derrière eux. Le but n’était pas de les semer, loin de là. À vrai dire, il avait oublié leur présence et il n’allait certainement pas les attendre pour se promener dans le bois défendu. Les mains dans le dos, une lueur espiègle dans son regard, il enjamba les épaisses racines sortant du sol pour emprunter un sentier composé uniquement de feuilles mortes et sombres, dépourvues de la splendeur automnale. Plus Gellert et Belladone mettaient de la distance entre eux et Poudlard, plus la lumière se faisait rare. Le Soleil était certes en train de descendre vers l’horizon, ne tardant plus à se cacher derrière les montagnes écossaises, mais subsistaient encore quelques rayons de lumière qui ne parvenaient déjà plus à se frayer un chemin entre les branches épaisses de la Forêt Interdite. Gellert se serait déjà cru au milieu de la nuit. Cette illusion était piégeuse : sans repère de la lumière du jour ni de montre, on pouvait perdre au milieu des troncs toute notion du temps. Peut-être ne retrouveraient-ils le chemin de Poudlard qu’à l’aube.

Sur son chemin, s’enfonçant toujours plus profondément dans la forêt, Grindelwald en profita pour regarder la flore tout aussi dangereuse que la faune, entre les snargaloufs et autres champignons à pointes relâchant un gaz coloré que le mage noir avait guère envie d’inhaler. Il comprenait cependant pourquoi les élèves n’avaient guère le droit de s’y aventurer. L’endroit était dangereux, comme promis. Peut-être rouillé par ses quinze années à Azkaban, Gellert continuait d’avancer avec une insouciance enfantine. Lui qui avait suscitait le danger pendant tant d’années semblait avoir perdu conscience qu’il pouvait être également tout autour de lui.

— Tu sais ce que j’aimerais croiser ? Un cocatris. Dans mes souvenirs, on le trouve plus sur le continent européen mais nous ne sommes jamais à l’abri de surprises. Scamander n’a pas mentionné cette créature dans son ouvrage et c’est fort dommage. Tout comme les Pitiponks, d’ailleurs, qu’on risque plus sensiblement de croiser s’il y a des marécages ici.

Il sourit et, les mains dans son dos, jeta un coup d’œil à Belladone afin de vérifier que celui-ci avait sa baguette en main. Gellert se garda bien de préciser qu’il n’avait pas le droit de faire de la magie, contrainte qu’il ne respectait que quand cela l’arrangeait. Il n’interviendrait que si son jeune collègue était réellement en difficulté. Mais pour l’instant, malgré le vent qui faisait grincer sombrement la haute cime des arbres de la Forêt Interdite, aucun danger ne semblait les menacer, à moins que l’instinct et les réflexes du mage noir n’eussent vraiment perdu en leur efficacité.
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