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Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald

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Belladone Raven
Belladone Raven
Âge : 28 ans
Sang : Sang-Pur
Nationalité : Anglaise
Patronus : Un corbeau
Épouvantard : Lavande recroquevillée au sol, le visage baigné de larmes, qui implore son aide, personnification de son impuissance à combattre les Forces du Mal
Reflet du Riséd : Lui même sauvant Lavande à son bras, des étincelles flamboyantes jaillissant encore de sa baguette, provenant de la bataille qu'il vient de gagner
Baguette : 25 centimètres, bois de sorbier et crin de licorne
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeLun 18 Mai - 16:10



Like A Flower Made Of Iron

Couloir du Quatrième Etage

Automne 1942
Il était donc là, le but de son existence. Lui faire lever les yeux. Qu’enfin se dresse le fier menton tremblotant de la formidable sorcière ignorée, mise au ban d’une société qui ne lui arrivait pas à la cheville. Que l’émeraude d’un regard trop jeune, terni par l’outrage, reprenne ses droits, se confrontant à l’éblouissante lueur de cieux oubliés, pour enfin voir s’y refléter l’éclat de pureté virginale dont on l’avait honteusement dépouillé. Que ces lèvres mornes et sèches, pâles de n’avoir que trop eu à se crisper sous la souffrance, s’épanouissent enfin, pour éclairer ce visage grisâtre, comme un brusque rayon de soleil déchire un ciel lourd de pluie.  Que le reflet de l’opprobre de cette trop triste vie quitte enfin ces joues blanches, qu’elle aurait dû avoir roses d’une joie qui ne semblait pour la jeune fille qu’une vague notion d’un sentiment dont elle avait dû entendre parler, sans parvenir à s’en faire une idée concrète.

Lavande levait enfin les yeux. Et l’incroyable gratitude qui s’y lisait lorsqu’elle les planta dans l’encre des siens déferla en une vague impétueuse, souffletant avec une violence inouïe la mélancolie tranquille de l’âme de Belladone, qui se découvrait une fierté douloureuse à faire le bien. Elle était là la plaie béante, l’amertume secrète du Professeur Raven passionné de forces obscures dont il ne pouvait qu’effleurer les théories sur les pages jaunies des innombrables ouvrages qu’avaient parcouru ses infatigables yeux d’encre. Il se savait inutile. Sa bonté, sa douceur et sa candeur fragile avaient pour elles la pureté et l’innocence, certes, mais ne restaient que des lames émoussées face au Mal, au vrai, celui qui pouvait prendre toutes les formes du monde, du massacre d’enfants Nés-Moldus à leur persécution quotidienne jusque dans leurs dortoirs. Et pourtant, la pauvre Lavande levait bel et bien les yeux, et la gratitude muette qu’elle y insufflait lui transperçait le cœur, parce qu’elle était celle qui, sans doute, avait le plus besoin de ces armes sous-estimées qu’il maniait avec ce naturel bon et tendre que l’on avait raillé si souvent.

Un large sourire ému éclaira le visage de Belladone, devant la solennité docile de la promesse de la jeune fille, qui continuait de l’abreuver de cette inépuisable gratitude qu’il puisait dans les tréfonds d’émeraude de ses prunelles tristes. Oh, il est aisé de railler ceux qui vouent leur vie au bien. Mais combien avaient remporté de tels succès ? Combien pouvaient s’enorgueillir de cet éclat qui faisait luire le diamant délicat de ces prunelles, poli par les vicissitudes et les malheurs, semblant se dépouiller un peu plus de la fange au fond de laquelle on l’avait enseveli, à chaque mot que le jeune Professeur choisissait avec soin, pour prouver à la douce et pauvre jeune fille la valeur inestimable de laquelle on l’avait si longtemps privée ? Combien pouvaient se vanter d’avoir fait rosir de plaisir ces joues pâles et grises, beaucoup trop ternes, presque mortes et sans âge, sur un visage dont la jeunesse exacerbait l’indécence d’un tel opprobre ?

Belladone n’était pas un puissant sorcier, loin s’en faut. Mais lorsqu’il lui parlait, Lavande souriait, rougissait et ses yeux brillaient. Le pouvoir inestimable de ramener à la vie cette petite ombre éthérée et malheureuse, qui ne demandait qu’à mourir ou à se fondre dans les pierres du château, valait toutes les magies du monde. Et à cette seconde, devant la petite rose triste qui s’épanouissait enfin à la chaleur de sa tendresse, Belladone n’aurait échangé cette étrange magie contre rien au monde.

Pourtant, il avait baissé les yeux. Le jeune homme s’était arraché non sans peine à la contemplation de cette miraculeuse éclosion qu’il ne devait qu’à sa magie particulière, dénigrée et raillée à tort. Mais même la fierté qu’il avait tiré du sourire de Lavande n’éclipsait pas sa nature timide, pudibonde presque, qui le rendit rougissant lui aussi, tandis que de ses lèvres s’extirpait l’aveu dont son âme tendre brûlait de honte, d’avoir ainsi amoindri le piédestal sur lequel se devait de reposer cette époustouflante sorcière, qu’on avait eu l’ignominie de recouvrir de boue. Le silence assourdissant fit lever les yeux inquiets de Belladone, s’effrayant d’avoir pu embarrasser ou mettre en colère la prodigieuse élève qui tremblotait dans les pans de sa veste brune, et qui avait des airs de fragilité paradoxale, quand la puissance de sa magie avait éventré une aile du château et manqué de tuer un de ses innombrables agresseurs.

Un frisson parcourut Belladone, tandis que son sourire déjà agonisant mourait tout à fait sur ses lèvres. La pierre brute se dévoilait dans les larmes, dont la pureté douloureuse, l’innocence du martyr, lavaient la souillure des injures, des brimades et des coups, révélait enfin l’incomparable diamant dont l’éclat les aveugleraient tous, ingrats et bourreaux, contemplatifs et indifférents, sans exception aucune. C’était d’une beauté à poignarder le cœur, cette résurrection du brasier d’espoir, de candeur et de joie sur laquelle on l’avait immolée, ne la laissant plus errer que comme la malheureuse ombre que Belladone ne pouvait s’empêcher de croiser sans avoir une douloureuse envie de protéger celle qui aurait souffleté ce piètre Professeur d’un claquement de ses petits doigts blancs et gourds qui se crispaient derrière son dos.

Ce livre stupide et encombrant, enfin, se révélait d’une quelconque utilité. Parce qu’en proposant à Lavande de l’accompagner s’en débarrasser, Belladone brisait là la scène insoutenable dont il se targuait d’être l’auteur, mais qu’il peinait à contempler de l’œil sec et digne que se devait de conserver un Professeur de Poudlard. La timide jeune fille le suivait docilement, ses prunelles d’émeraude ayant retrouvé leur triste point d’ancrage sur l’asphalte, à la pointe de ses chaussures, comme si la main de ses bourreaux, souffletée un instant par la tendresse improbable d’un de ses Professeurs, avait de nouveau retrouvé son emprise, la contraignant à courber l’échine à chacun de ses pas, à chaque seconde de sa misérable vie que tous semblaient abhorrer. Qu’ils la détestent donc, ces misérables, ces idiots ! Méritaient-ils de l’apprécier à sa valeur formidable, ces sorciers stupides, qui n’avaient vu que créature infâme, boue et vilénie, quand il y’avait sous ses yeux à lui la plus époustouflante, la plus délicate et la plus impressionnante mage qu’il verrait jamais ? Ils pouvaient bien tous se noyer dans l’océan amer de leur ignorance et de leur mépris, car ce seraient ceux qui la craindraient le plus, lorsqu’enfin les yeux s’ouvriront sur cette nuit de sépulcre, dans les tréfonds de laquelle ils n’avaient vu qu’opprobre, là où se dissimulait la plus glorieuse sorcière de son époque.

Et l’humilité d’une si puissante sorcière, et la joie innocente, franche et à peine dissimulée avec laquelle elle acceptait sa punition attendrissaient Belladone beaucoup plus que de raison, tandis qu’il se surprenait à sourire de nouveau devant ces yeux qui s’étaient relevés pour acquiescer, de sous ce même rire qui semblait un mécanisme en branle, maladroit et chevrotant de n’avoir que trop peu servi. Avec cette douceur qui lui était coutumière, comprenant qu’il ne serait guère tendre de briser ce bel et improbable enthousiasme qu’avait la jeune fille de s’enfermer dans le bureau de son Professeur qui sentait la naphtaline, la rose et le thé, pour y trier des parchemins poussiéreux et des volumes barbares, Belladone lui offrit son large sourire, tandis qu’il tournait la tête vers elle, ses bras encerclant toujours ce stupide et encombrant manuel dont il aurait aimé se délester au plus vite :

- Nous verrons cela…Mais je ne tiens guère à vous faire veiller tard inutilement, d’autant plus que vous ne méritez guère cette retenue…Vous me semblez déjà avoir beaucoup à faire entre votre scolarité et vos cours particuliers avec le Professeur Grindelwald qui doivent vous demander une énergie considérable…

Belladone se garda bien d’évoquer à quel point éviter les bourreaux qui lui promettaient tourments et brimades à chaque angle de couloir devaient l’épuiser bien plus que tout le reste, et qui lui creusaient sous les yeux ces cernes violacées qu’il faisait mine de ne pas voir, et qui crispaient les commissures de ses lèvres comme perpétuellement sous le joug d’une attaque ou d’une souffrance inattendue. Et le jeune homme, qui n’avait pas le regard baissé, contrairement à Lavande qui s’était empressée de les river de nouveau vers ses souliers usés à la pointe et aux talons, voyait bien les chuchotements et bavardages que suscitaient leur étrange passage, celle de la malheureuse élève abhorrée de tous, son uniforme qui avait viré au grisâtre, dont les coutures béaient chaque année l’une après l’autre, dissimulé au creux de la veste de velours du nouveau Professeur sans autorité. Peu semblait importer à la pauvre Lavande, déjà si humiliée et dédaignée de tous qu’elle marchait tête basse sans paraître les entendre, quand Belladone comprenait bien quel étrange duo ils devaient faire là, et qu’il desservait sans doute à la pauvre jeune fille de déambuler ainsi dans l’habit de son Professeur. Mais Belladone ne se sentait ni le cœur ni le courage de la lui réclamer. Il l’avait vue s’y blottir et en resserrer les pans d’un geste d’oisillon fragile et tremblant qui lui ôtait définitivement toute envie de la dépouiller du peu de cette chaleur qu’elle s’était vue octroyer en six années de scolarité à Poudlard.

Il la laissa donc réchauffer ses membres roides et épuisés par la démonstration involontaire de son époustouflante magie à la chaleur de sa veste, n’en déplaisent à tous ces camarades cruels et dédaigneux qui les scrutaient sans gêne ni trouble aucuns pour l’autorité que le Professeur Raven était censée représenter sur eux. Pourtant Lavande semblait trop coutumière d’être la cible des vicissitudes, bassesses et racontars en tous genre, parce qu’elle ne semblait ni s’offusquer, ni s’affliger du fourmillement de voix juvéniles qui chuchotaient autour d’eux. Non. Ce qui semblait la préoccuper était la manifestation de sa gratitude, qu’elle peinait à exprimer à Belladone, dans toute la sincérité maladroite de cette petite âme trop longtemps bafouée pour avoir eu le temps de s’aguerrir à l’art de la reconnaissance. Pourtant jamais Belladone n’avait été si touché d’une gratitude qu’il sentait si profondément sincère, si maladroitement arrachée aux tréfonds d’un désespoir qu’elle avait cru inéluctable qu’il aurait voulu lui dire qu’il n’avait rien fait, rien fait d’autre que lui dévoiler au grand jour une grandeur qu’elle ne devait qu’à elle seule, et lui prouver que le cycle infernal des tourments subis depuis sa tendre enfance avaient été vains, qu’ils n’étaient pas parvenus à l’amoindrir, ni sa magie ni elle-même, parce qu’il ressentait sa nature, et qu’il aurait juré à tous, au fond d’un tribunal ou sous l’emprise du Veritaserum, qu’elle était bonne et pure, pourvu qu’on lui veuille du bien.

- Je n’ai fait que dire la vérité vous savez…Votre magie est exceptionnelle, c’est pourquoi il vous est si difficile de la canaliser, et pourquoi, malheureusement, je ne peux guère vous faire pratiquer lors de mes cours…Croyez-bien que vous ostraciser est la dernière de mes volontés, mais je dois vous avouer que seuls les Professeurs Dumbledore et Grindelwald sont en capacité de…Mademoiselle ?!

Egaré dans les tréfonds de ces litanies rêveuses qui lui ôtaient parfois jusqu’à la vision du monde réel, Belladone n’avait qu’à peine entendu la fin de la phrase de Lavande qui s’était entrecoupée, restée en suspens tandis qu’elle avait bravement étouffé un gémissement, les mains crispées sur son ventre. Après quelques secondes d’hébétude stupide, planté là avec son sempiternel volume idiot au creux des bras, Belladone s’accroupissait, tout près de celle dont il ne voyait plus le visage, dissimulé sous un rideau de cheveux noirs, tandis qu’elle s’évertuait à souffrir en silence, comme à son habitude, comme l’instinct de survie l’avait toujours commandé à celle qui avait été la victime de tous les épanchements de cruauté, d’idéologies archaïques, douteuses, et  de méchanceté juvénile que les élèves lui faisaient subir parfois avec l’approbation de leurs parents, souvent dans l’indifférence générale du corps enseignant. Belladone n’était pas indifférent. Toujours accroupi à quelques centimètres de son visage, les traits tirés, il ne pouvait que l’entendre inspirer avec profondeur, tandis que son corps roide et épuisé s’affaissait contre la pierre glacée qui soutenait son dos et retenait une chute éventuelle. Et Belladone semblait à peine avoir eu le temps de cligner des yeux et d’ouvrir la bouche, que Lavande l’interrompait, déjà debout, prêt à reprendre sa marche comme si de rien n’était, invoquant d’un ton ferme qu’un passage à l’infirmerie ne lui serait d’aucune utilité. Le jeune homme fronça les sourcils. Il n’était pas du tout de cet avis. A dire vrai, une seconde de plus à la regarder se recroqueviller ainsi sur elle-même, ses souffrances dissimulées derrière son rideau de cheveux noirs, et il l’y amenait par le bras.

Mais, totalement décontenancé par cette reprise de promenade tranquille que la brusque douleur venait de briser l’instant d’avant, Belladone amorça quelques pas hébétés en compagnie de la jeune fille, qui changeait brutalement de sujet, invoquant son besoin d’air, s’excusant d’avoir ralenti le jeune Professeur sur le chemin de la bibliothèque. Belladone s’arrêta, plantant un regard d’encre inquiet dans les yeux d’émeraude de la jeune fille, dubitatif quant à la légèreté de l’explication qui lui auraient infligé des convulsions telles qu’elles l’avaient plié en deux. C’est d’une voix inquiète, au fond de laquelle il n’y avait pas de remontrance, mais l’assurance du danger que représentait l’obstination de la jeune fille à éviter l’infirmerie, que Belladone tenta tant bien que mal de la persuader, sachant déjà que l’effort était vain :

- Et bien Mademoiselle, on peut dire que vous partagez l’opiniâtreté de votre mentor…Pourquoi vouloir éviter l’infirmerie ? Je suis inquiet vous savez…Vous voilà bien pâle et vous venez de faire montre d’une magie qui aurait terrassé plus d’un sorcier adulte…Et si vous faisiez un malaise toute seule dehors ? Si vous ne tenez vraiment pas à aller à l’infirmerie, j’insiste pour vous accompagner prendre un peu l’air, et je vous suggère un bref détour par les cuisines, afin de récupérer quelque chose que vous pourriez manger en marchant…Mais vous avez raison, allons déposer cet encombrant livre à la Bibliothèque une bonne fois pour toutes…

Jamais un ouvrage n’aurait autant incommodé Belladone. La hâte qu’il avait de s’en débarrasser semblait presque une hérésie, lorsque l’on connaissait son amour fusionnel pour n’importe quelle lecture, traitant les ouvrages avec un soin et une ferveur quasi religieuse. Pourtant comme il se sentit plus léger une fois délesté de ce fardeau ! Si bien que sur le seuil de la Bibliothèque, une fois sortis, Belladone se tourna vers Lavande, lui offrant un faible sourire, toujours inquiet de cette pâleur mortelle et de cette fébrilité qui menaçait de lui rompre les jambes à chaque seconde, s’apprêtant à retenir sa chute à tout moment :

- Avez-vous réfléchi Mademoiselle ? Que voulez-vous faire ?

Belladone la fixait, fébrile et inquiet, espérant qu’elle accepterait l’infirmerie, sachant toute au fond de lui qu’il n’en serait pas question pour elle, et qu’elle retournerait sans doute souffrir seule et en silence au creux de ses draps glacés. Cette hypothèse semblait lui faire plus de mal à lui qu’à elle-même, et cela lui était insupportable, de voir une si jeune fille si résignée à des supplices qu’elle ne devrait même pas connaître, quand lui, adulte, Professeur, privilégié, ne parvenait qu’à peine à s’en imaginer les affres et que, surtout, il savait au plus profond de lui-même son incapacité à pouvoir faire changer la décision d’une sorcière qui, du haut de ses dix-sept années, se révélait déjà si éminemment supérieure à lui.
plumyts 2016
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Lavande Huntergrunt
Lavande Huntergrunt
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeMer 27 Mai - 23:46



Like a flower made of iron.

« les plus belles roses naissent dans les orties »

Automne 1942, couloir du quatrième étage.

Pourquoi son corps se devait de la trahir à cet instant précis ? De toutes les moments de sa misérable vie, pourquoi fallait-il que ce soit celui où Belladone Raven penchait les yeux vers elle, lui offrait un sourire si doux et si tendre qu’elle se sentait revivre de l’intérieur, comme si tout cela n’était qu’un rêve. Quand il souriait, elle plongeait à corps perdu dans les étincelles que cela faisait naître dans ses yeux si noirs. Alors elle ne pensait plus à la douleur qui lui enserrait la poitrine, à la poussière qui restait collé à la sueur de sa peau. Elle ne pensait plus aux regards amusés et moqueurs de ses camarades qui voyaient la célèbre enfant sauvage être prise sous la veste du trop gentil nouveau professeur de défense contre les forces du mal. Lavande se taisait, avec ce petit sourire désabusé de l’élève qui ne parvenait pas encore à croire en la chance qu’elle avait. Son professeur, après l’avoir rassuré qu’il ne voulait pas la retenir trop tard car elle ne méritait pas cette retenue, et qu’elle devait surtout se reposer entre sa scolarité et ses cours particuliers, continuait sa marche comme si de rien n’était… mais le sourire de Lavande s’était un peu étiolée. Bien évidemment… les cours particuliers qui lui dévoraient les entrailles à force de saigner la moindre de ses veines pour contrôler le flux de magie, lancer sort après sort, trouver le juste équilibre entre la puissance et l’intention. Mais la Serpentard n’était pas sûre de pouvoir davantage trouver le sommeil maintenant qu’elle aurait quelques soirées pour elle. Il lui restait encore les élèves de sa maison à affronter, et là encore, il lui faudrait trouver une autre excuse pour découcher jusqu’à ce que toutes soient endormies. Les passer chez le professeur Raven lui convenait au-delà de toute espérance, mais voulait-il véritablement d’elle ? Ce qu’il cachait sous le revers de « l’injustice », n’était-il pas juste un simple ennui ? Après tout, il ne semblait pas particulièrement enthousiaste à l’idée de la revoir pour plus d’une retenue, soit disant que le simple fait de lui en avoir donner une seule relevait déjà de l’absolu effroi. Elle n’était pas sans savoir que les adultes disaient « on verra » seulement pour se donner le temps de dire non plus tard.

Elle baissait le regard vers ses chaussures usées, suivant religieusement les talons cirés de son professeur. Ce dernier avait beau être le plus gentil de l’école, elle se demandait parfois si cette gentillesse n’était pas que de la simple ignorance. N’était-il pas tendre avec elle uniquement car il s’agissait de sa première année en tant que professeur ? Ne se sentait-il pas voué de cette mission sacrée, de devoir sauver une épave aussi évidente et délaissée que Mlle Huntergrunt ? Le syndrome du chevalier servant, ce n’était peut-être pas si anodin que cela venant d’un jeune enseignant qui se faisait de belles idées sur le métier de professeur, tout comme elle songeait aux doux rêves qu’elle avait eu sur le monde des sorciers qui lui restait à découvrir. L’humeur de la jeune Serpentard descendait en chute libre, et le brouillard qui tournait en circuit fermé dans son esprit avait fini par embrumé son regard. Elle entendit à grand peine les compliments du professeur Raven qui lui notifiait la puissance incroyable de ses pouvoirs… qu’il s’agissait de ce trop-plein qui l’empêchait de bien l’utiliser et qu’en cela, il ne pouvait l’autoriser à pratiquer dans ses cours… Lavande serrait les dents, se retenant bien de lui rétorquer qu’il n’avait pas besoin d’étaler l’évidence devant eux comme un tapis, que cela faisait bien longtemps que la jeune fille trébuchait dessus. La douleur se faisant de plus en plus grande, c’était avant même d’entendre la fin de sa tirade – qu’elle ne voulait de toute façon plus écouter – que Lavande s’effondra contre le mur. Ses oreilles bourdonnaient, sa tête lui tournait ; il lui semblait qu’un million de fourmis lui grignotaient les yeux, lui faisant miroiter des vagues de vapeurs sourdes. Elle se mordit la langue pour s’empêcher de geindre sous la douleur, oubliant jusqu’à la présence du professeur Raven. Pourquoi ? Lavande aurait tant voulu savoir ce qui n’allait pas avec elle, qu’est-ce qui clochait dans les tréfonds de son sang pour subir une pareille souffrance à l’intérieur d’elle-même, comme si le monde autour d’elle n’était pas déjà assez gris. Était-ce le revers de la puissante magie qu’elle venait d’utiliser à peine une heure auparavant ? Une des innombrables crampes qu’elle supportait après avoir user d’un muscle trop longtemps endormi ? Ou son humeur s’effondrant soudainement, persuadée que le professeur ne voulait pas passer trop de temps avec elle en dehors de ces rares moments de baby-sitting, où il la sauvait alors contre vents et marées ? Ce n’était peut-être qu’un trouble psychosomatique dû à un vulgaire caprice d’adolescente, qui désirait tant être le centre d’attention de son professeur.

Lavande se dégoûta d’avoir fait preuve d’autant de faiblesse, d’avoir dévoiler ses douleurs devant lui, quand bien même elle n’avait pas prononcé le moindre mot. Elle aurait pu serrer les dents, continuer de marcher, hocher la tête – mais la douleur était trop forte. Elle se détestait de n’être qu’une gamine qui pouvait donner l’impression de demander de l’attention à travers cette mise en scène ridicule. Aussi s’était-elle relevée dès que la vague s’était effacée du rivage, emmenant avec elle les stigmates de son mal-être. Mais la jeune fille soupirait encore des envies de nausées, et une tempête dans la tête. Il n’y avait qu’un seul endroit qui pouvait l’apaiser. Le professeur la rattrapa en grande hâte, la mine profondément inquiète, et une voix fluette et tremblante qui la comparait à son mentor. Lavande resta immobile, gardant cette comparaison en tête ; elle ne savait pas comment elle devait le prendre… et pourtant une partie d’elle était plutôt fière. C’était ridicule, mais elle était définitivement fière qu’il la compare à Grindelwald. Même si cela validait en quelque sorte toute la diatribe qu’ils s’étaient une fois échangés sur ce qu’était « être un monstre ».

Le professeur Raven lui demanda pourquoi elle ne pouvait pas aller à l’infirmerie, et cette question le taraudait sérieusement. Il était inquiet. Que la magie qu’elle avait employé aurait pu avoir raison d’un véritable sorcier, et qu’elle était peut-être en train de faire un malaise. Cette idée l’interrogea : un malaise ? Qu’est-ce que c’était ? Elle ne s’était pas sentie vidée de ses forces, comme lors de ses entraînements avec Grindelwald. Bien au contraire, cela avait été comme une explosion, et ses sens s’étaient senties en éveil, son corps entier en voulait plus encore. Fermer la porte après une telle saveur était atroce. Ce n’était pas des tremblements d’épuisement qui l’avaient saisi plus tôt, elle commençait à en être persuadée… c’était des tremblements d’excitation. Mais peut-être qu’elle avait tout faux, qu’est-ce qu’elle y connaissait après tout ? Lavande ne pouvait mentir que sa tête lui valsait dans les nuages et qu’à tout moment, un voile noir menaçait de s’effondrer sur son champ de vision. Pendant ce temps, le professeur Raven lui assura que même si elle refusait d’aller à l’infirmerie, il l’accompagnerait dehors et qu’ils devraient faire un rapide tour par la cuisine pour récupérer quelque chose à manger, car elle était si pâle. En temps normal, la jeune fille ne se serait pas faite prier pour quelques friandises… mais elle avait vraiment besoin de prendre l’air. Il lui fallait rejoindre son refuge parmi tous les refuges, et tant pis si elle devait y emmener un enseignant qui avait tous les droits de la renvoyer en retenue – mais peut-être était-ce ce le plan. Lavande resta silencieuse jusqu’à ce qu’ils eurent rejoindre la bibliothèque et que Belladone Raven ait enfin rendu ce livre qui encombrait tant ses bras. Étrangement, ce fut une véritable bouffée d’air frais même pour elle. Il la regarda, avec une ombre dans les yeux, la suppliant silencieusement d’aller à l’infirmerie. Peut-être parce qu’il ne voulait plus avoir à s’occuper d’elle et qu’il était plus simple – par acquis de conscience – de la confier à des autorités de santé. Mais Lavande ne lui ferait certainement pas ce plaisir.

Je n’irai pas à l’infirmerie. Ils n’ont jamais rien pu faire pour moi, je n’irai pas là-bas juste « attendre que ça passe ». Et… je n’ai pas faim non plus. Enfin...si, peut-être un peu mais… ce n’est pas le plus important. Je dois prendre l’air, et je sais où aller pour pouvoir me reposer et… être tranquille.

Un petit sourire timide cerna son visage fatiguée, jetant un coup d’oeil au professeur. La Serpentard rougit aussitôt, se rendant compte de ce qu’elle s’apprêtait à faire. Jamais elle n’aurait été aussi insolente. L’élève fit quelques pas, ses jambes avouant quelques faiblesses et écarts sur les dalles abîmés du couloir. Son corps se balançait à la recherche d’un équilibre précaire, peut-être qu’il avait raison : elle était peut-être bien en train de faire un malaise. Mais aller chercher à manger était bien le cadet de ses soucis, cela dit,  si le professeur Raven y tenait tant, alors il pourrait faire un Accio lorsqu’ils arriveraient à destination – peut-être que même elle pourrait s’y essayer, une fois qu’elle aurait repris ses esprits. Se tenant au mur, à l’approche d’un carrefour vide, Lavande se retourna vers le professeur Raven. Son sourire était doux et mystérieux, mais elle était incapable de le regarder dans les yeux, et ce fut en murmurant qu’elle lui lança ces paroles qui auraient pu être les dernières :

Si vous voulez toujours me suivre, Professeur.

Il pouvait ne pas accepter de la suivre sans savoir où ils allaient, ou tout simplement ne pas accepter le fait que l’élève refuse d’aller à l’infirmerie, se mettant inutilement en danger, ou prétexter n’importe quel autre devoir d’enseignant pour retrouver le confort de son bureau. Quoiqu’il décide de faire, Lavande ne pouvait plus attendre. Les murs de l’école se rétrécissaient à mesure que son regard perdait en clarté. Oh, bien sûr qu’elle aurait pu aller à l’infirmerie. Ce qu’elle allait faire dehors n’était pas bien plus différent : s’allonger et se reposer. Mais elle ne supportait pas les draps froids, l’humeur exécrable de l’infirmière, les jérémiades des autres étudiants tous allongés pour diverses raisons, du rideau ocre qui la cachait du reste des patients, de cette potion immonde qui l’assommait pour mieux la faire dormir… la jeune fille restait une fidèle du dicton « jamais mieux servi que par soi-même ». Passant les premières arches qui séparaient du pont qui les emmèneraient de l’autre côté du Parc, Lavande se disait qu’elle était en train de faire une folie. S’avançant sur le pont, extraordinaire construction centenaire qui ne semblait tenir que de bric et de broc que par une véritable ossature, Lavande tourna la tête vers le professeur et lui demanda :

Vous n’avez pas peur ?

Peur de quoi, là était la question. Peur du pont branlant ? Du vide qui s’étendait sur des dizaines de mètres en dessous d’eux ? D’elle, et de la bombe à retardement qu’elle représentait, pouvant exploser le pont et lui avec ? Ou tout simplement de leur destination qu’elle s’était refusée à lui dire ? Après tout, la jeune fille était bizarre – lunatique et sauvage. Suivre une créature pareille relevait soit du courage soit de l’inconscience. Ils passèrent les menhirs qui se dressaient de l’autre côté, et Lavande s’avoua un peu soulagé. Elle n’aimait pas vraiment ce pont. Alors que Belladone aurait pu s’attendre à ce qu’ils continuent jusqu’à une petite plaine en contre-bas, un lieu certes peu visité des étudiants mais pas non plus secret, Lavande bifurqua au dernier moment en direction de la Forêt Interdite. Elle s’approcha de sa lisière sans peur, presque assoiffée des arbres qui la rassuraient. Posant une main sur l’un des troncs, et resserrant les pans de la veste contre elle pour lutter contre le petit vent frais d’automne qui se levait autour d’eux, Lavande releva son visage vers son professeur. Elle hésitait quant à la marche à suivre : devait-elle silencieusement le supplier de l’accompagner, ou devait-elle être insolente jusqu’au bout, lui déclarant qu’elle irait quoiqu’il advienne, et que s’il devait la réprouver, il n’aurait qu’à lui rajouter la fameuse heure de retenue qu’il se refusait à rajouter.

Vous… vous n’êtes pas obligé d’aller plus… plus loin si… si vous ne voulez pas… je sais que… qu’il ne m’arrivera rien.

Puis elle attendit la réponse, les joues et le nez rosie par le vent.

©️ plumyts 2016
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Belladone Raven
Belladone Raven
Âge : 28 ans
Sang : Sang-Pur
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Épouvantard : Lavande recroquevillée au sol, le visage baigné de larmes, qui implore son aide, personnification de son impuissance à combattre les Forces du Mal
Reflet du Riséd : Lui même sauvant Lavande à son bras, des étincelles flamboyantes jaillissant encore de sa baguette, provenant de la bataille qu'il vient de gagner
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeJeu 4 Juin - 14:03



Like A Flower Made Of Iron

« Cuisines de Poudlard »

Hiver 1942

Belladone ne comprenait pas. La vague d’encre houleuse de ses yeux tendres, dans une rafale suppliante, inquiète, se fracassait contre le rivage d’émeraude du regard résolu de la jeune fille. Avant même que Lavande n’ait pu ouvrir la bouche, il avait compris qu’elle ne fléchirait pas. Tout Professeur qu’il était, toute menace était vaine. Sa décision était prise, et elle était irrévocable, bien qu’elle ne lui plaise pas, bien qu’il la trouvât irraisonnée, dangereuse et légère. Il aurait pu lui dire à quel point son obstination pour un choix mauvais était frustrante. Il aurait pu la contraindre à la solution qu’il jugeait la plus sage. Peut-être même l’aurait-il fait pour n’importe quel autre de ses élèves et l’aurait laissé là, sur le seuil de l’infirmerie, sans se préoccuper d’un avis sur lequel son statut de Professeur avait autorité. Sans doute la volonté farouche de l’étudiante aurait-elle plié, soumise par la force à une décision qui la concernait directement et pour laquelle on ne lui laissait pas voix au chapitre.

Belladone avait bien conscience de se soucier de cette malheureuse élève plus que de raison, bien plus qu’il ne l’aurait dû. Elle était bien là la cause de ses tourments, à lui et à sa promesse ingénue de se montrer un Professeur juste et impartial, et qui se heurtait aujourd’hui au paradoxe terrible de ne pouvoir imposer la solution la plus sage à l’étudiante dont le sort l’inquiétait le plus. Mais une fois de plus, devant l’émeraude résolue de ce regard fier, impérieux presque, le courage lui manquait. Ces yeux étranges de petit fantôme triste, ternis par la semi-existence au fond de laquelle gisait la malheureuse jeune fille, avaient toujours regardé Belladone avec cette stupéfaction reconnaissante de celle qui semblait découvrir la bienveillance à son égard comme quelque chose dont elle n’avait qu’eu une vague notion, et qu’elle n’avait peut-être jamais attendu. Il aurait été mentir de nier la fierté que Belladone avait extirpé des maigres lueurs de joie qui avaient étincelé dans ses yeux. Et prendre le risque de les voir s’éteindre, prendre le risque d’être regardé par ces yeux là avec la désillusion de ne découvrir qu’un autre Professeur, autoritaire et obtus parmi tant d’autres indifférents à son sort de martyre, voilà qui était au-dessus de ses forces.

Tout cela n’était pas exempt d’un certain égoïsme de la part de Belladone. Puisque le bien-être de la jeune Lavande le préoccupait plus que celui de n’importe quel autre élève, la convaincre par n’importe quel moyen de soigner les maux terribles qui venaient de la plier en deux n’aurait-il pas dû être son but, plutôt que de s’en faire apprécier ? Mais non. Il y’avait quelque chose qui clouait Belladone au sol, et qui l’empêchait de contraindre Lavande à quoi que ce soit. Et cette chose indéfinissable était si violente et inéluctable qu’il ne bougea pas d’un cil, ne remua pas même les lèvres lorsque Lavande réitéra son refus catégorique, doublé d’une fermeté non exempte d’une certaine insolence. Le jeune Professeur, pourtant, ne put réprimer un soupir, ses sourcils se fronçant de nouveau devant tant d’opiniâtreté. Quel caractère chez une si jeune fille ! Et soudain elle apparaissait avec plus de clarté, cette affection étrange que lui vouait Gellert Grindelwald, dont les similitudes de caractère heurtaient de plein fouet l’humeur facile de Belladone, dont on ne réclamait visiblement pas l’opinion ;

- Tout ceci n’est guère raisonnable, mais je ne vais pas vous y contraindre n’est-ce pas ? Je vous accompagne donc, mais si vous deviez par malheur réellement avoir un malaise ou un évanouissement, cette fois-ci je ne solliciterai pas votre avis pour vous y conduire…En attendant, vous pouvez regarder dans la poche droite de ma veste, je crois bien qu’il y’a un Chocogrenouille. Vous pouvez le prendre, dans l’attente d’un repas plus consistant.

Cette prétendue fermeté ne tromperait sûrement pas la douce élève que Belladone, dans sa grande naïveté, s’était représenté docile et délicate. Ô combien la lueur de détermination farouche qui étincelait dans son regard d’émeraude lui prouvait qu’il avait eu tort, malgré le sourire las dont elle le gratifiait ! Pourtant l’idée était mauvaise, et Belladone, plus encore que l’obstination infondée de son élève, se maudissait de ne pas parvenir à lui refuser cette dangereuse requête, qu’il ne comprenait toujours pas. Si la revêche infirmière n’avait pas la bonhomie et la chaleur qui seyait à ses jeunes patients, son efficacité et ses talents n’étaient plus à prouver. Les quelques pas vacillants de la jeune fille, son maintien fragile contre la pierre froide des murs, son invitation murmurée d’une voix cave, dans un souffle agonisant, auraient au moins dû éveiller un sursaut d’autorité chez le trop tendre Professeur qu’était Belladone. Il aurait dû se saisir de la rebelle par son coude vacillant, lui intimer de cesser cette mascarade et la conduire jusqu’à l’infirmerie sans autre forme de procès, avant que la petite ombre éthérée qui semblait se fondre chaque jour un peu plus dans la pierre grise du château n’en vienne irrémédiablement à s’écrouler comme une poupée de chiffon vidée d’énergie.

Et tandis qu’il réfléchissait à ce qu’il aurait dit, si il avait été plus téméraire, plus ferme et surtout moins idiot, Lavande avançait de son pas titubant, tant et si bien que Belladone sembla se réveiller brutalement, comme après un jet d’eau froide, tandis qu’il la regardait s’éloigner, seule et vacillante. Le jeune homme pressa le pas pour se retrouver suffisamment proche de l’étudiante, en cas d’une éventuelle défaillance de son équilibre déjà précaire. Aucun doute possible, c’était Belladone qui se faisait conduire par son élève, et non l’inverse, et une frustration quelque peu honteuse le rembrunissait, mêlée du sentiment de se faire mener par le bout du nez la jeune élève de la maison au serpent.

L’air vif et frais fouetta les joues de Belladone, faisant bouffer les manches de sa chemise. Le jeune homme inspira avec délice, se délectant des effluves automnaux des conifères et de cette odeur brute de terre humide d’un ciel trop souvent chargé de pluie. Voilà deux jours qu’il n’était pas sorti, et l’air lui faisait un bien fou, tout il semblait revigorer la jeune Lavande dont il continuait de guetter une éventuelle chute de ses yeux inquiets. L’étudiante continuait de mener la danse, le conduisant à ce pont dont les fondations branlantes inspiraient si peu Belladone qu’il s’arrangeait d’ordinaire pour l’éviter au maximum, malgré la vue époustouflante dont il se privait. Visiblement la jeune fille avait anticipé l’angoisse que représentait cette traversée archaïque, puisqu’elle tourna son visage triste, qui avait repris des couleurs sous la gifle vivifiante du vent d’automne, pour s’enquérir d’une peur éventuelle de la part de son Professeur Contre les Forces du Mal.

- Non, mentit Belladone avec un laconisme qui dissimulait sa honte à avouer son angoisse du vide et de la fondation incertaine de cet antique pont, quand son élève y déambulait avec toute la légèreté dont son visage morne et triste était capable. Pourtant il dut réprimer un soupir de soulagement lorsque son pied toucha l’herbe fraîche, et qu’enfin le pont vétuste se trouva derrière lui. Le sentiment de liberté et de bonheur que Belladone éprouvait toujours à déambuler dans le Parc fut de courte durée. La frustration de se faire mener par son élève revint piquer au vif son orgueil, exacerbée par un agacement certain cette fois-ci, en plus de l’impression que la jeune Lavande se moquait ouvertement de lui et de son autorité que tout le monde savait presque inexistante. L’orée de la Forêt Interdit étendait la menace de l’enchevêtrement sombre, sépulcral, des arbres millénaires qui la peuplait, dissimulant au monde les créatures ancestrales qui la peuplaient. Avait-elle réellement conduit son Professeur jusqu’à la Forêt Interdite ? Comptait-elle vraiment y pénétrer, ou n’était-ce là qu’une provocation visant à tester et à railler les limites de l’autorité insignifiante du Professeur Raven ? Non, sans doute pas. Lavande ne faisait pas partie de cette masse cruelle et braillarde d’élèves qui se moquaient ouvertement de Belladone. De cela, il était persuadé. Et puis, la manière qu’elle avait eue de se repaître de l’énergie du tronc d’arbre qu’elle sentait vibrer sous sa paume l’avait touché, et bien que ce fût l’aveu de la transgression d’une des règles primordiales de Poudlard faites aux élèves –celles de ne pénétrer sous aucun prétexte dans la Forêt- avait touché Belladone, qui, une fois de plus, se confrontait à la réalité terrifiante d’une jeune fille que l’école abritait en son sein, et dont la solitude immense la poussait à s’enivrer de la compagnie des conifères terrifiants du sombre bois.

Lavande prit la parole, son visage ayant repris le docile aspect timide que Belladone lui avait toujours connu jusqu’à ce jour. Si le ton n’avait plus l’insolence farouche qui avait fait froncer les sourcils du jeune Professeur, la requête pourtant trahissait une impudence bien réelle, bien que dissimulée sous une demande bégayante qui, au fond, n’admettait pas le refus. L’encre du regard de Belladone sonda l’émeraude pâlie de celui de son élève. Il hésitait. Laisser Lavande arpenter seule la Forêt Interdite, comme elle le suggérait, en dépit du règlement intérieur de l’école, n’était pas une option. En cela au moins, le trop tendre Professeur se faisait la promesse d’être ferme. Il pouvait l’accompagner ou la dissuader, voire l’en empêcher. Si Belladone oubliait sa droiture obtuse relative aux cadres et aux règles édictées au sein de l’école, il lui fallait bien reconnaître qu’il n’y avait pas grand risque à lui accorder ce plaisir. La Forêt n’était pas interdite aux élèves accompagnés d’un référent, et Belladone se devait bien d’admettre, malgré son inquiétude, que la prestation de tout à l’heure avait prouvé qu’aucune créature ne pourrait rien contre son élève. Quand à songer à l’en dissuader, l’argument de l’infirmerie valait aussi pour la situation présente. Le ton doucereux et suppliant ne devait pas tromper Belladone. Lavande ne se rendrait pas, et la contraindre, il s’y refusait. Le jeune homme poussa un profond soupir, qu’il ne chercha même pas à réprimer cette fois-ci :

- Vous me mettez dans une position délicate vous savez. Vous m’avouez à demi-mot que vous avez déjà transgressé une des règles fondamentales de l’école, qui interdit l’accès à la Forêt aux élèves. Cela pourrait vous causer de sérieux ennuis, et si je respectais ce dit règlement, je devrais moi-même vous sanctionner. Nous ferons comme si je ne savais rien, n’est-ce pas, mais sachez que je désapprouve. De fait, il est hors de question que je vous laisse y aller seule. Maintenant, si vous y tenez vraiment, j’accepte de vous y accompagner, mais uniquement en échange de la promesse que si l’envie vous reprend d’y pénétrer, vous m’en informerez, et de ne plus y’aller seule. Sommes-nous d’accord ?

Un nouveau soupir s’arracha des lèvres de Belladone. Il y’avait quelque chose dans ces grands yeux tristes qui faisaient fondre la moindre volonté d’être désagréable à Lavande, ou de lui refuser quoi que ce soit. Car même le tendre Professeur qu’il était aurait refusé net cette requête à n’importe quel autre élève, requête qui l’effrayait véritablement, sans oser se l’avouer. Jamais Belladone n’avait mis un seul pied dans cette forêt, et il n’ignorait pas que l’interdiction n’était pas vaine, et que les dangers qui la peuplaient étaient bien réels. Pourtant il était là devant ces grands yeux tristes, et il aurait aimé lui dire que c’était de la folie, qu’il refusait, qu’il lui infligerait une retenue plus rude si elle désobéissait. Mais ces grands yeux tristes justement ne l’étaient que trop, et on lui avait tant refusé, et on lui accordait si peu, que pour ces yeux-là Belladone avait envie de se montrer brave, et faire fi de ce règlement archaïque qui, de toutes façons, ne se préoccupait guère des tourments qu’on lui infligeait.


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Lavande Huntergrunt
Lavande Huntergrunt
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeSam 13 Juin - 1:18


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Like a flower made of iron.

« les plus belles roses naissent dans les orties »

Automne 1942, couloir du quatrième étage.

Poudlard – 1937


Rentrer à la maison. Voilà les paroles que les filles chantonnaient dans le dortoir, elles en semblaient si fières. Lavande était restée silencieuse, invisible, cachée jusqu’au fond de son lit où seul son petit nez dépassait pour respirer. Ils allaient vraiment être obligés de retourner chez eux ? Elle avait passé toute son année ici, même Noël. Ce n’était pas pour rentrer maintenant, pour revoir une mère à la gorge emplie de haine et des villageois méprisants. Cette simple idée lui donna la nausée ; sa petite silhouette fragile se recroquevilla subrepticement. Ce n’était pas possible, elle se refusait d’y croire. Pourtant, la joie de ses camarades de classe était trop intense pour être factice : ce n’était pas une plaisanterie de mauvais goût, une pièce de théâtre qu’elles jouaient devant elle. C’était la vérité, la fin de l’année approchait et il leur faudrait rentrer chez eux. La petite souillonne n’avait même pas l’excuse d’être orpheline pour pouvoir faire son nid dans les cachots comme le rat qu’elle était. Cela faisait quelques jours maintenant que les professeurs la faisaient s’asseoir au fond de la classe, à l’écart des autres pour que ses sortilèges manqués ne blessent plus personne. Mais elle ne se faisait aucune illusion – ce n’était que la première étape avant qu’on ne lui interdise tout court d’utiliser sa magie. Lavande se mordit les lèvres, l’envie de vomir se faisant de plus en plus imposante, le besoin urgent de régurgiter une infection de son corps. Les filles se couchèrent. Le silence s’effondra après quelques minutes dans les cachots. Mais Lavande était bien incapable de dormir. Toutes ses pensées suintaient dans les pores de son cerveau, l’obligeant à chaque seconde à revenir face à l’inéluctable : sa nature qu’elle ne pouvait échapper, celle de misérable sang-de-bourbe. Il y avait des jours où plus évident il était d’échapper à ces murmures. Il lui suffisait de se réfugier dans un monde glacé, absent de tout espoir, où son regard devenait figé et sa respiration calme. Quand la ruine et le désespoir devenaient une évidence, et qu’il n’y avait donc plus besoin de se battre contre le courant. Lavande trouvait en cette technique une paix certaine, sans savoir qu’elle lui coûtait à chaque seconde, lui grignotant un peu de ce qu’il lui restait de raison de vivre.

Mais ce soir-là, la petite n’y arrivait pas. C’était au-dessus de ses forces que de simplement ignorer le fait qu’elle allait devoir partir. Poudlard n’était pas le refuge dont elle avait rêvé, mais c’était toujours mieux que ce qui l’attendait à son retour. Les professeurs, pour autant aveugle qu’ils étaient sur sa condition, n’avaient rien à voir avec les adultes qu’elle avait l’habitude de côtoyer. Ils parlaient bien, s’habillaient bien, lui disaient même bonjour quand ils la croisaient au détour d’un couloir. Il en valait de même pour les élèves : tous savaient écrire. Lavande ne comptait pas les cours du début d’année qu’elle n’avait pu recopier avant d’avoir rattrapé ses lacunes. Ses petites mains tremblaient, serrant fort le drap contre son corps pour essayer de se réchauffer. Une douleur chuinta dans son ventre, contractant ses organes, extrayant son mal-être et le diffusant dans tous les nerfs de son corps. Cette souffrance, elle finissait par la connaître. Elle était apparue quelques mois auparavant, après un puissant enchantement qui avait encore échoué. Pliée en deux, la petite fille avait rampé jusqu’à l’infirmerie. Cela n’avait inquiété personne. Une demoiselle ayant mal au ventre, d’une douleur si vive que nulle magie ne pouvait la soigner, ce n’était pas sorcier. Dans son esprit innocent, Lavande n’avait aucune idée que la force qui lui déchirait les entrailles n’avait rien à voir avec la menstruation. Elle les avait crus. Elle ne faisait pas le lien entre sa soudaine panique et le mal qui grandissait en son sein, l’un et l’autre se nourrissant perpétuellement l’un de l’autre. La fièvre rongeait ses sangs, la sueur perlant sur son corps, la chaleur la bouffant à tel point qu’elle finit par sortir la tête de ses draps, se rendant vulnérable des autres.

Lavande leva une main vers le sommet de son lit à baldaquin, s’étonnant à les voir flous. Un poignard dans son ventre en fouillait ses entrailles pour en extraire des gémissements incontrôlables, accompagnées d’une respiration sifflante qui se brisait entre deux crampes. De ses maigres forces, elle se saisit des barreaux du lit et tenta de se lever ; si elle restait allongée, elle allait mourir. Jamais son instinct de survie, pur produit de son enfance sauvage, n’avait été aussi puissant qu’à cette seconde. Mais elle s’effondra sur le sol à peine que son pied fut posé, produisant un bruit sourd qui réveilla quelques filles du dortoir qui, voyant qu’il s’agissait de Lavande, balancèrent à l’impudente les premières choses qui leur traînaient sous la main : leurs chaussons.

Lavande se remit péniblement debout, ne prenant à peine conscience des pantoufles qu’on lui jetait ; probablement parce qu’elle avait déjà connu projectile plus violent. Ignorant les injonctions des gamines à se faire manger par les limaces, n’entendant plus rien d’autre que les battements erratiques de son cœur, la petite fille se dirigea vers la salle commune, refermant la porte derrière elle en portant mollement son poids dessus. Sa tête lui brûlait, les murmures se changeant en hurlements indiscernables. Elle portait les mains à sa tête, se tapait du poing sur le ventre, tout pour faire passer sa sinistre frustration, son insurmontable impuissance. Sa respiration se faisait plus sifflante, douloureuse, à mesure que ses poumons   peinaient de plus en plus à capturer l’air. De l’air. Il lui fallait de l’air. Elle traîna ses jambes, luttant contre les larmes, plus par pragmatisme que par fierté. Tout devant ses pieds devenait de plus en plus flous, se liant dans l’obscurité pour ne faire plus qu’un avec les ténèbres. Elle pourrait s’y fondre si facilement, si elle le souhaitait. Son plan était simple : passer prendre une gorgée d’air, et repartir en direction de l’infirmerie. Supplier qu’on lui donne quelque chose de fort pour lutter contre son mal, ou au pire, de l’assommer pour qu’elle oublie la douleur. Elle se doutait néanmoins que ce n’était plus les « douleurs de femme » dont ils parlaient auparavant ; Lavande n’était peut-être pas vivace, mais elle n’était pas stupide. Elle traînait les pieds dans les escaliers, les grimpant presque à genoux sous les yeux circonspects d’un fantôme muet, qui l’observait sans mot dire. Personne ne pouvait lui venir en aide. Elle se sentait déjà partir, et dans sa tête, une seule question : « pourquoi ? ». Qu’avait-elle fait pour mériter un tel châtiment ? La pluie tombait dehors, à très fines gouttes, quasiment invisibles. Lavande s’approcha de la cour intérieure et regarda le pont, par-delà duquel s’exposait le grand vide. Mais plus loin encore, là où l’horizon se brouillait avec le ciel, Lavande savait que se trouvait un endroit plus dangereux encore que les cachots des serpentard, plus dangereux encore que son village, et plus dangereux encore qu’elle-même : la Forêt Interdite.


Poudlard – 1942


Jamais Lavande n’avait eu à faire face à une situation aussi stressante. De son petit coeur d’adolescente qui n’avait jamais mis les pieds sciemment en dehors des clous, s’offrir aussi honteusement à la justice d’un professeur était impensable. Il s’agissait de son petit jardin secret, l’endroit qui soulageait ses peines… qui avait plus le droit d’y être invité que l’être qui, par sa simple existence, adoucissait les meurtrissures de ce même cœur. Elle se refusait à croire qu’il puisse être comme les autres, lui qui l’avait épaulé, sauvé de sa bande d’agresseurs, la regardant en souriant avec des yeux si doux. La première fois, et toutes les autres fois qui avaient conduit ses pas jusqu’à cette lisière, elle était seule. Abandonnée de tous et n’ayant personne à qui se confier, portant cette douleur durant toutes ces années comme un stigmate ineffaçable, Lavande s’enfonçait dans la forêt. Elle n’ignorait pas que c’était interdit, et qu’elle risquait gros. La première fois, le risque lui semblait immodéré. Après tout, elle était en train de perdre petit à petit tous ses privilèges de sorcière, devenant tout au plus qu’une moins que rien – on estimait davantage les cracmols que les rats dans son genre… Si elle y était retournée à chaque fois que ses douleurs étaient insurmontables, peut-être était-ce avec cette petite arrogance de la criminelle qui ne s’était pas faite prendre et qui, toute confiante, s’était décidé à recommencer, encore et encore, peut-être avec cet espoir qu’on remarque son absence, qu’on la punisse pour une erreur qu’elle aurait réellement commise. Oui, c’était assurément sans discrétion ni délicatesse que Lavande s’offrait au jugement du Professeur Raven.

Ce dernier faisait tout pour la faire revenir à la raison, la jeune fille le voyait bien. Mais même son autorité était tendre et Lavande ne pouvait redevenir une enfant sage. Elle avait beaucoup trop perdu, et luttait à présent avec les armes qu’elle s’était forgée, quand bien même elles n’étaient pas légales. Rien de ce que le Professeur Raven pourrait dire ne changerait sa façon d’agir, sa façon d’être ; il pouvait la mettre en retenue un millier de fois, cela ne ferait que rendre heureuse cette créature des marais. Elle attendait donc sa réponse, dévorant des yeux le moindre aspect de son faciès, à demi-cachée derrière son tronc d’arbre. Elle fouillait le moindre tremblement, les premiers gestes qui annoncent la dispute, plus terrifiée encore par ce qu’allait dire l’homme qui comblait ses pensées que de la terreur vrombissante au fond d’elle. Voir le professeur poussait un long soupir la fit se raidir d’un seul coup, ses ongles s’enfonçant dans l’écorce.

Oh oui, elle n’était pas sans savoir cette position dans laquelle elle le mettait. Celle d’un professeur qui se devait de punir une élève ayant enfreint le règlement – plus d’une fois, comme il le soulignait avec toute la délicatesse qui le caractérisait. Que s’il suivait lui-même ce règlement à la lettre, il lui fallait le faire. Mais dès ses premiers mots, cette première phrase dite avec sa voix hésitante, presque fragile… Lavande savait. Il fermerait les yeux, pour elle. Cette simple idée lui fit bondir son cœur torsadé, apaisant déjà la douleur qui rongeait sa poitrine. Il désapprouvait pourtant fortement, et le disait d’une voix si sincère, avec une expression qui ne faisait pas sourire ses yeux noirs – Lavande n’avait jamais remarqué à quel point ils pouvaient être profonds et presque intimidants quand aucune lumière ne venait les faire scintiller. Elle déglutit, soudainement paniquée à l’idée de l’avoir déçu et qu’il ne restait aimable que par sympathie pour son malheur. Aussi rapidement que son cœur eut bondi de joie, la chaleur revint lui creuser la gorge, assoiffée par une angoisse certaine. Une panique qui descendit décidément aussi vite qu’elle s’était exposée, car aussitôt le Professeur Raven poursuivit son discours, insistant pour l’accompagner et pour qu’à chaque fois qu’elle eut envie d’y retourner, elle ne le prévienne. Il le disait avec un tel aplomb ; Lavande savait que c’était la vérité. Tout comme il lui avait demandé de revenir à son bureau si ses agresseurs revenaient… Cette fois-ci, sur le silence qui suivit la question du professeur, le bonheur de Lavande revint. Une opportunité pareille, de passer des moments avec l’être qui faisait battre son cœur, des instants qu’elle pouvait arracher au fond même de cette malédiction qui lui déchirait le corps. C’était un joli pied de nez à son malheur, elle ne pouvait croire en sa chance.

Ses grands yeux verts se remplirent de larmes, tandis qu’un grand sourire resplendissait sur son visage. Il allait finalement l’accompagner jusqu’à son refuge, son jardin secret, l’endroit où elle venait pour aller mieux. Elle allait le partager avec lui, de tous les êtres humains de cette planète, elle irait avec lui. L’émotion la traversa avec violence, la forçant à se cacher derrière l’arbre pour effacer ses petites larmes de joie. Elle sortit ensuite la tête de derrière son arbre, ne pouvant cacher sa joie derrière ses longs cheveux emmêlés, et répondit en hochant la tête :

Oh, Professeur… bien évidemment, ce serait avec plaisir. Je… je vous remercie infiniment, vous… vous ne savez pas ce que cela représente pour moi je… vous verrez, c’est un bel endroit. Pas du tout comme ce qu’on entend dans les rumeurs…

Lavande redressa brièvement la tête pour rencontrer les yeux du Professeur Raven, espérant y voir poindre un nouveau sourire qui illuminerait son visage. Mais même s’il était déçu de son comportement qu’il devait espérer irréprochable, la jeune fille comptait bien lui prouver qu’il n’y avait rien de mal. Après avoir fait quelques pas en arrière dans la forêt, et s’assurant qu’il la suivait bien, Lavande montra le chemin. À la vue de la terre nue, et des herbes aplaties, il devenait plus qu’évident que la Serpentard ne mentait pas et connaissait très bien les lieux. Son pas se trouvait plus léger, marchant aisément entre les branchages, s’enfonçant toujours plus profondément dans la forêt. Elle ne ressentait aucune crainte et cela apparaissait comme la lune dans un ciel clair. Sa frêle silhouette, toujours engoncée dans la veste chaude de Belladone, dodelinait encore sous l’épuisement. Chaque pas était plus difficile que l’autre, mais une chaleur tendre l’entourait à travers la veste de son professeur, comme si c’était lui-même qui l’enlaçait – et cela lui donnait la force d’avancer. Il était loin le temps de la petite gamine qui s’avançait sur cette route en pleurant et en se prenant les arbres en pleine tête, ne s’embarrassant pas d’un chemin quand seule la mort se devait d’être la destination. Voilà qu’elle faisait, cinq ans plus tard, la même passerelle jusqu’à son refuge… et que derrière ses talons suivait un professeur. L’histoire aurait pu faire rire le plus stoïque des gobelins. Lavande elle-même n’y aurait pas cru.

La forêt, quant à elle, restait sublime. Un enchantement protégé du vent par sa densité, mais où l’on entendait encore son sifflement là-haut, dans le bruissement des feuilles qui chantent. La jeune fille aimait ce chant profondément apaisant, car d’en bas, elle se sentait protégée par les arbres. Elle s’avançait, se tenant aux troncs pour avancer, prenant une pause sur le contrepoint d’un rocher, mais toujours d’une respiration claire. Elle avait eu l’intelligence de s’y prendre assez tôt, maintenant qu’elle connaissait les signes avant coureur d’une crise.

Pas une seule créature sauvage ne vint perturber leur trajet. Cela pouvait surprendre le superstitieux, de ne pas voir un seul monstre de légende se précipiter à leur rencontre pour les dévorer. Mais telle était la vérité de Lavande, ou du moins de son rapport à la forêt. Voilà longtemps qu’elle marchait sur ces sentiers, et elle savait qu’à partir du moment où elle les respectait, il s’agissait de son territoire et que nul viendrait la déranger. Elle avait réclamé ce droit à la nature et aux animaux crains des hommes. Peut-être une ombre fugace les aperçut-elle, au loin derrière les fougères… mais rien ne les dérangea. Il y avait un respect latent dans l’air, celle d’une habitude. Ils marchèrent plusieurs minutes, peut-être un bon quart d’heure, s’enfonçant dans les méandres de plus en plus sombre de la forêt. N’importe qui aurait dit que cette marche n’était que pure folie. Mais un étrange silence motiva leur démarche jusqu’à cet instant précis. La jeune fille ne savait comment poursuivre la conversation si conversation il y avait eu. Elle ne pensait qu’à son refuge, son repos pour éteindre la douleur. Lavande monta une butte, se tenant aux racines d’un grand chêne pour grimper. Une fois au sommet de celle-ci, elle se retourna :

… C’est juste-là…

Elle n’avait pas eu la force d’aller plus loin, la première fois. À peine eut-elle grimpé cette côte qu’elle n’avait fait que ramper, littéralement cette fois-ci, pour s’éteindre près d’un arbre. Mais à cet instant précis, la douce et intrépide Lavande était écarlate, le museau rouge et le regard furtif comme un petit animal, heureuse d’être aux côtés de Belladone. Elle aurait voulu s’agenouiller, lui tendre la main et l’aider à gravir la côte mais… elle n’avait malheureusement pas ce courage. Après tout, elle était celle qui devait aller à l’infirmerie à la base ; et même si l’air de la nature l’avait revigoré, ce voyage restait périlleux pour sa santé, et faire des efforts supplémentaires n’était pas conseillé. Alors elle lui sourit, et disparut hors de sa vue, par-delà la butte. Son refuge était une clairière des plus classiques, une obole de lumière au milieu des ténèbres qui régnait au fond de la forêt. En son centre, un arbre millénaire se dressait jusqu’à un sommet que l’on ne pouvait atteindre du regard, au tronc si épais qu’il faisait bien jusqu’à deux mètres et demi de largeur. Son écorce était épaisse, à l’articulation enrouée et aux branches basses, offrant une protection contre le soleil. En face de cet arbre se trouvait un petit étang marécageux, couvert de feuilles mortes, orangeâtres, se mêlant à l’eau maronasse pour en faire une étrange mixture automnale, comme toutes les couleurs qui régnaient dans cette clairière. Une brume douce régnait en maître, Lavande s’y avança et s’y baigna, ouvrant ses bras au ciel et prenant une profonde respiration.

Elle se tint là, immobile, ne sachant plus trop quoi faire. Oubliant presque la présence du Professeur Raven, la jeune fille alla contre le tronc, retira sa veste pour la plier très soigneusement – le plus soigneusement possible car il était évident en la regardant faire qu’on ne lui avait jamais appris, pourtant elle y mettait les formes, puis elle le posa religieusement à côté d’elle, dans l’herbe propre. Lavande posa son dos contre le tronc, face à l’étang, et se laissa glisser jusqu’à s’asseoir. Sa chemise s’accrocha un peu aux bosses de la vieille écorce, mais elle s’en fichait – tant qu’elle n’avait pas abîmé la précieuse veste de son professeur. Lavande étendit ses jambes, posa les mains sur son ventre et ferma les yeux. C’était presque un rituel, ce moment de méditation pour faire partir le mal qui se trouvait en elle ; c’était un remède efficace qui n’avait jamais fait défaut. Elle ne faisait pas « que se reposer », comme dans un lit de l’infirmerie. La Serpentard semblait sur le point de s’endormir, mais quand son professeur aimé vint dans la clairière, elle ouvrit un œil dans sa direction et sourit avant de le refermer ; elle sentait sa présence. Ce n’était pas un intru, c’était un autre soleil, sous les arbres, qui rayonnait d’une autre lumière. Mais elle était si heureuse qu’il soit là, son coeur battait fort et même en méditant, elle était incapable de ne pas sourire.

Je sais que vous désapprouvez, Professeur…  mais… (Son sourire s’abaissa une seconde, pour un air sérieux et sincère :)… je… j’ai besoin de venir ici. (Elle se redressa, massant sa gorge un instant et poursuivit:) Je…je suis vraiment désolée, même si cela ne change rien.

Elle sourit timidement, osant enfin jeter un regard au Professeur Raven. Oui, elle était désolée d’avoir eu à enfreindre le règlement, d’avoir été tellement seule, incomprise et laissée de côté, reléguée à des généralités, d’avoir eu pour la première fois envie de mourir à la fin de sa première année, quand elle s’était enfin rendu compte de l’horrible cycle de l’infamie qu’allait être son existence. Qu’elle s’était rendue en ce moment endroit, marchant sans s’arrêter, sans savoir où aller, pour se perdre là où se trouveraient les plus immondes créatures qui prendraient plaisir à la manger – elle serait enfin utile à quelqu’un. Mais les bêtes magiques de ce territoire maudit avaient pris pitié de sa détresse et l’avaient secouru. Si Poudlard se devait véritablement d’être sa Seconde Maison, alors cette clairière serait sa chambre. Mais quand bien même elle s’ouvrait bien trop au Professeur Raven, ce n’était pas le genre de choses qu’elle serait capable de lui dire volontairement. Mais elle songea à ce qu’elle venait de lui dire et se renfrogna, honteuse, se rallongeant sur le tronc pour retrouver la paix. « Même si cela ne changera rien » Comment pouvait-elle imaginer lui plaire, quand ses seules paroles se rapportaient constamment à l’inflexibilité de sa situation, à la meurtrissure qui était devenue quotidien. Mais le contraire était impossible, elle le savait. Il lui aurait été impassable de le regarder, de lui sourire et de lui dire « oh Professeur, vous avez raison, pardonnez-moi, je ne souhaitais pas vous mettre dans l’embarras, je vais aller à l’infirmerie » … non, elle n’en faisait qu’à sa tête et sa parole tenait loi. Pourquoi agissait-elle comme ça ? Il était son professeur tout de même. Elle lui devait respect et soumission… mais elle voulait être plus que ça. Lavande désirait tant qu’il la voit autrement que comme une élève, briser cette étiquette, ruiner son uniforme s’il le fallait. Peut-être était-elle aussi implacable parce qu’il était gentil avec elle ? Peut-être en profitait-elle ? L’idée lui était insupportable. Quand bien même la maison des Serpentard n’était pas reconnue comme étant la plus gentille, songer profiter de cet être sucré, fait de douceur, de tendresse, et de senteur de rose… c’était inconcevable. Elle poussa un profond soupir, massant les zones douloureuses d’un air mélancolique.

Cela va faire... (elle compta sur ses doigts) ... environ cinq ans que je viens ici. La première fois, c'était en première année... fin de première année...

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Belladone Raven
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeVen 19 Juin - 19:02



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« Cuisines de Poudlard »

Hiver 1942


Il avait suffi de si peu. L’émeraude d’un regard voilé de larmes, le rayonnement d’un pâle sourire sur un visage trop triste, cette sensation inespérée de résurrection et de renouveau, lorsque le premier rai timide d’un soleil au déclin déchire enfin les cieux d’un hiver trop rigoureux. Quelques mots de remerciements balbutiés, confus, hoquetés avec cette maladresse farouche de jeune fille solitaire qui trébuche contre cette misanthropie forcenée, imposée par tous ces indifférents et ces bourreaux qui faisaient de son existence un enfer. Belladone n’avait rien dit. Il avait hoché la tête, gravement, sans répondre au sourire de l’étudiante, et avait suivi son morne sillage, avec au cœur la vague conscience de n’être déjà plus qu’un pantin aux membres articulés par le moindre des désirs de la trop malheureuse élève.

Belladone suivait la petite ombre vacillante sans rien dire, sur le sillage de laquelle semblaient s’incliner les arbres centenaires et les herbes indomptées. La frêle mage tourmentée, qui grelottait au creux de la veste trop grande de son Professeur, semblait nimber d’une aura rayonnante le souffle mortifère des bois interdits. Le prudent, le couard, le délicat Belladone, qui s’était toujours tenu aussi loin de l’orée de la forêt maléfique que d’une malédiction innommable, aujourd’hui s’engouffrait à l’aveugle, en grandes enjambées incertaines et inconscientes, s’immolant de lui-même à la férocité de ses crocs béants. Il y’avait une majesté étrange, indiscutable, qui se dégageait de la toute petite taille de Lavande, et qui surplombait jusqu’aux plus augustes des arbres, dont les feuillages qui dissimulaient la clarté des cieux avaient cette teinte d’émeraude ternie que l’on retrouvait dans les prunelles farouches de la jeune reine de ces bois sur lesquels sa présence laissait planer une accalmie inconcevable, inquiétante presque. Et un réconfort vague, inexplicable, s’engouffra comme une bouffée d’air frais au creux des poumons de Belladone, persuadé, sans parvenir à l’exprimer, qu’il ne risquait rien à suivre les effluves de cette étrange élève qui régnait en maîtresse au beau milieu du plus maléfique des lieux de l’école enchantée.

Et à la vérité, la réputation maudite de ces bois ne faisait guère honneur à sa beauté époustouflante, timorée, dissimulée tout contre l’écrin de sépulcre et d’effroi qu’elle inspirait à des dizaines de générations d’écoliers. Elle semblait ne vouloir s’offrir qu’aux courageux, aux méritants et aux exilés auxquels elle ouvrait ses branches, ses enchevêtrements de ronces et ses clairières baignées d’un soleil qui perçait à d’infimes et secrets endroits la masse noirâtre des chênes centenaires. Et Belladone recueillait avec une gratitude immense ce cadeau inespéré que la nature farouche lui offrait par procuration, la véritable destinataire trébuchant de sa démarche mal assurée à quelques pas devant lui, sa chevelure défaite flottant en mèche éparses sur son dos, rendues dansantes par le vent d’automne qui s’y engouffrait. A dire vrai, l’encre des yeux de Belladone ne rendait guère justice à l’inavouable beauté de ces bois réputés terrifiants. Plantées dans le jais folâtre de la crinière de l’élève vacillante, comme cherchant à y noyer leur noirceur commune, les prunelles du jeune homme semblaient se complaire dans l’étrange, l’hypnotique spectacle des mèches de la chevelure éparse de l’étudiante qui s’emmêlaient au gré de la brise, pour retomber sur le col de la veste brune, jusque dans le creux de son dos, autour de ce petit visage fatigué qu’il ne voyait pas. « C’est juste là… ».

- …Oh…

Belladone avait répondu un peu tard, sa contemplation éperdue, inconsciente presque, ayant manqué de le faire trébucher contre une racine. Le jeune homme releva un peu les yeux, essayant de discerner par-dessus l’épaule de la jeune fille les horizons qu’elle lui dépeignait. Mais il ne voyait rien. Rien au-delà de cette butte de terre et d’herbe sur laquelle son élève fragilisée -qui menaçait de s’écrouler tout à l’heure-, grimpait avec la hardiesse folle de ces jeunes adultes sur le dos desquels ces ailes merveilleuses de l’enfance ne se sont pas encore consumées tout à fait. Ses sourcils se froncèrent de nouveau devant tant d’imprudence, à distinguer les contours de cette silhouette vacillante dont la fragilité paraissait exacerbée, flottant ainsi dans cette veste trop grande au creux de laquelle elle semblait encore frissonner, malgré la douceur du temps. Le jeune Professeur, pourtant, ne dit toujours rien, se contentant de rester planté au pied de la petite butte, à guetter la moindre défaillance de ces petits doigts blancs qui s’accrochaient péniblement aux racine, et s’attaqua à la légère escalade uniquement lorsque le sourire d’une Lavande aux joues roses, échevelée par l’effort et le vent, fermement plantée sur ses pieds, vint à le rassurer.

Ses jambes plus grandes et son énergie intacte -dont il ne s’était pas servi pour l’étalage le plus époustouflant de magie qu’il lui ait été donné de voir-, lui permirent de grimper la petite motte de terre en deux enjambées, rejoignant là la désobéissante élève dont il couvrait l’imprudence avec au cœur une joie sereine, étrange, qu’il ne s’avouait pas. Aveugle, exempt de cette honnêteté dont il se faisait d’ordinaire un ardent défenseur, Belladone mettait cet enthousiasme étourdi, malséant, sur le compte de son amour de la forêt, de la nature en tout genre, des teintes de cuivre et d’or dont elle se vêtait, lors de sa saison favorite, qu’il affectionnait particulièrement. Et, de fait, le manteau d’automne, qui avait posé son voile léger sur la cime des arbres de la forêt interdite, était particulièrement splendide ici. Chaque feuille tremblotante de pourpre et d’or que les chaussures vernies de Belladone foulait lui paraissait une hérésie, et la symphonie de cette brise chuintante, parsemée de ces dernières feuilles survivantes, dorées, écarlates, brunes, nimbait, dans un tableau merveilleux, la silhouette de l’étudiante de dos, de ses cheveux qui flottaient avec une grâce indifférente au gré des caprices de la nature, s’y confondant tant et si bien, elle et son élégance immobile, qu’elle semblait en faire partie intégrante, figure inaltérable de ce tableau bucolique sans laquelle il ne subsistait plus rien de cette poésie qui étouffait ses sens, sa raison et ses scrupules.

Lavande ne semblait plus vouloir prêter la moindre attention à son Professeur, à présent qu’elle avait atteint son oasis. Et quelle oasis ! Belladone écarquilla les yeux, comme semblant soudain comprendre cette impudence, cette obstination à vouloir panser au cœur de la Forêt réputée la plus dangereuse de Grande-Bretagne, muse des légendes les plus terrifiantes, de ces racontars qui faisaient dresser les cheveux sur la tête des premières années, que les grands s’amusaient à terroriser. Le souvenir du visage taquin et triomphal d’Hazel, déjà intrépide et fougueux, qui narrait d’une voix rogue à Belladone et Azaléa, respectivement âgés de dix et onze ans, une histoire de vampire solitaire assoiffé de sang qui hantait le cœur de la Forêt Interdite lui revint en mémoire avec une force qui lui souffleta l’âme. Une ombre de doucereuse nostalgie, du chagrin vague d’avoir vieilli, ce sentiment de ne jamais plus pouvoir redevenir, même durant une seconde, ce petit garçon effrayé, que Maman avait réconforté d’une tasse de chocolat et de biscuits au gingembre, dessina un triste sourire son visage.

Belladone, d’aussi loin qu’il se souvienne, s’était toujours senti bercé par cette mélancolie vague, cette nostalgie des choses passées qui n’existeraient plus, s’accommodant mal du caractère inéluctable du passé, n’en souffrant que peu malgré tout, pansant ce vague à l’âme en se décrochant de terre bien trop souvent pour l’adulte responsable qu’il était censé être devenu. La clairière exacerbait ce désir vital d’échapper à la réalité. Sublime, majestueuse, hors du temps. C’était un écrin véritable, créée pour les âmes isolées, éthérées et perdues, qui paraissait accueillir la douce étudiante esseulée comme une amie, une sœur, peut-être la seule compagnie véritable dont elle ait vraiment eu besoin. Si Belladone avait désapprouvé, s’il s’était agacé d’une telle opiniâtreté chez une si jeune fille, à la seconde ou son pied avait foulé l’asphalte magique de la clairière, à la seconde ou la lumière s’était révélée à ses yeux qui s’étaient accoutumés au sépulcre des bois, il avait compris. Toute frustration envers l’impudence de la douce Lavande s’était évaporée à la lueur du pâle soleil qui transperçait les branchages dépouillés de ces feuilles qui s’étalaient sur l’herbe humide, tapis de cuivre et d’or foulés aux pieds par les deux intrus qui paraissaient paradoxalement bien plus chez eux que n’importe où.

Immobile et mutique, Belladone regardait sans vraiment la voir la jeune fille lever les bras vers le ciel, comme lors de ces complaintes mutiques que les Moldus vouaient à leur Dieu, qu’ils appelaient prières, et dans lesquelles ils insufflaient jusqu’à des parcelles de leur âme, leur désespoir ou leur gratitude, leurs désirs et leurs craintes, dans ces épanchements pudiques et intimistes qui ne regardaient qu’eux et leur conscience. Toujours sans se préoccuper de lui, Lavande se débarrassait de la veste de son Professeur, la pliant avec un soin méticuleux auprès d’elle, s’adossant elle-même contre le tronc immense de l’arbre millénaire qui trônait en Roi au cœur de ce minuscule écrin de lumière et de magie. Lavande ainsi étendue, les yeux clos, avaient sur ces traits tout à l’heure tirés par une souffrance qui paraissait inéluctable une telle expression de sérénité que Belladone se surprit à sourire, et à s’avouer qu’elle avait eu raison, et que cet endroit valait bien tous les philtres calmants de l’Infirmerie et de Sainte Mangouste réunies.

Une branche craqua sous son pied. Lavande ouvrit un œil, puis offrit un sourire à son Professeur, ne semblant pas troublée de sa présence que, visiblement, elle ne considérait pas comme importune. Alors ce fut comme une évidence, et le timide et discret Belladone s'osa à avancer de lui-même, pénétrant au cœur de l'antre sacrée de la jeune fille, dont le sourire mutique, paisible, lui avait autorisé l'accès. La candeur pudibonde sembla s’emparer de nouveau de la jeune Lavande, à présent que la douleur ne régissait plus ses entrailles, à présent qu’elle pouvait regarder Belladone sans froncer ses sourcils d’une souffrance réprimée avec un courage peu commun, à présent que ses lèvres ne se crispaient plus, pâlies par le mal indicible qui lui rongeait les tripes, et que son Professeur ne pourrait jamais même soupçonner. Elle était désolée, et Belladone la croyait. Il y’avait une vérité déchirante dans ce pardon, un hurlement tragique dans les tréfonds de cet aveu qui trahissait son chagrin de lui déplaire, mais contre lequel elle ne pouvait rien. Et qui était-il, lui qui n’avait rien connu, pour reprocher à une si malheureuse jeune fille de vouloir étancher sa soif de paix et de sérénité à la source de cette clairière merveilleuse qui seule l’acceptait, à chercher coûte que coûte la seule et unique manière d’éteindre ce brasier qui dévorait ses entrailles, et l’avait pliée en deux au détour d’un couloir, devant son impuissance à lui, toujours inutile, toujours spectateur désolé ? Ne se serait-il pas rué dans un tel Éden, si à lui aussi sa vie n’avait été que souffrance, ombre et malheurs ? Aurait-il résisté à l’appel des bois interdits, sous prétexte d’une règle idiote, quand la puissance qui se dissimulait au creux de la jeune fille la protégeait de ses dangers ? Car oui, après avoir été témoin de l’ampleur des manifestations de sa Magie, Belladone aurait pu affirmer sous Veritaserum et devant le Magenmagot tout entier que Lavande ne risquait rien à s’aventurer seule dans la Forêt Interdite. Et c’est en gage de paix, et d’une confiance qu’il voulait témoigner à celle qui n’était pas une élève comme les autres, et qui s’accommodait seule de l’arrangement de son quotidien, parce qu’il n’inspirait qu’indifférence à ses Professeurs déroutés par cette trop étrange jeune fille, que Belladone lui rendit son sourire, s’avançant pour s’installer lui aussi, dos contre l’immense tronc de l’arbre, les mains nonchalamment posées sur ses genoux relevés. Lui aussi ferma un moment les yeux, laissant le soleil pâle transpercer l’alcôve mince de ses paupières closes, avant de tourner légèrement la tête vers son élève qui paraissait miraculeusement redevenue sereine et paisible ;

C’est vrai, je ne peux guère approuver...Mais...Cet endroit semble vous faire un bien fou...Vous avez l’air reposée et sereine, cela fait plaisir à voir...Vous m’avez effrayé tout à l’heure vous savez, d’où mon agitation...Alors, si cette clairière vous fait du bien, je n’en dirais rien...

C’était un gros risque que prenait là Belladone. Dissimuler les désobéissances d’une élève pouvait avoir des conséquences désastreuses en cas d’ennuis. Pour une élève aimée. Le cœur de Belladone parut se froisser, s’étouffant dans sa gorge. Pour qu’il eut des ennuis ou des remontrances, il eut fallu que quelqu’un remarque son absence, que quelqu’un s’intéressa à elle, que quelqu’un s’inquiète de sa présence et de son quotidien. Le jeune homme déglutit, sa tendresse fragile n’acceptant qu’avec beaucoup de peine que personne ne serait là pour pleurer cette malheureuse et douce élève en cas de drame, hormis Gellert qui sans doute tuerait Belladone de sa propre main. Une violente bouffée de sympathie pour son improbable ami vint envahir Belladone, qui secoua la tête pour en chasser les idées moroses qui avaient une fâcheuse tendance à revenir l’envahir au galop. Avec un sourire adressé à la jeune fille, le jeune homme se saisit de sa veste, dans laquelle il plongea la main, en extirpant la petite boîte bleue et dorée qui contenait la grenouille enchantée en chocolat, confiserie peut-être la plus populaire du monde sorcier. Le bras tendu, ne se déparant pas de son sourire, c’est avec un enthousiasme non feint que le jeune Professeur s’essayait à une autorité factice cette fois ci, toute trace d’agacement définitivement disparue devant la beauté du lieu et la guérison miracle de Lavande :

- Puisque vous allez mieux, vous allez me faire plaisir d’accepter le Chocogrenouille que je vous ai proposé tout à l’heure...Vous n’allez guère me refuser cela, n’est-ce pas ? Toutefois, si vous obtenez la carte de Paracelse, je me verrais dans l’obligation de négocier...Voilà deux ans que je la cherche ! J’en ai deux de Mirabella Plunkett et trois de Salazar Serpentard, si cela vous intéresse...

Belladone se rendit compte de sa bêtise à l’instant même où ses lèvres se refermaient. Son enthousiasme avait été naturel. Il était étrangement à l’aise avec Lavande, et la collection des cartes de Chocogrenouilles restait une activité affectionnée de la plupart des élèves, qui, souvent, avaient du répondant à ce sujet. Oui mais voilà, Lavande n’était pas une élève comme les autres. Il ne le savait que trop, et pourtant il évoquait sa collecte de confiseries devant une jeune fille dont les coutures de l’uniforme craquaient sous les outrages de l’usure et du temps. Avait-il réellement oublié ces prunelles d’émeraude pétillantes de joie, lorsqu’il avait rempli son sac sans âge de ces confiseries diverses qu’elle avait avoué elle même ne pas connaître pour la plupart ? Mais Lavande ne voulait pas de pitié. Belladone le savait, il le sentait. Alors à quoi bon les faux-semblants ? Il savait la jeune fille trop fière et trop courageuse pour se contenter de sujets évités, de discussions stériles et de pitié déplacée. Aussi le sourire de Belladone s’élargit, en voyant les doigts blancs déchirer l’emballage de la confiserie, continuant sur sa lancée :

Alors ? Questionna le jeune homme en pointant du doigt la carte qui gisait au fond de l’emballage. Mais Lavande, bien qu’elle semblait ne plus souffrir, paraissait lassé, exténuée même, et Belladone, soudain, eut peur d’exacerber plus encore cette fatigue indicible, lui et son enthousiasme manquant parfois de maturité. Son profond soupir, ainsi que les pressions qu’exerçaient ses mains blanches sur son ventre douloureux prouvaient son état d’harassement, et le jeune homme était bien décidé à la laisser reprendre un peu de son énergie au cœur de cet endroit qui lui faisait tant de bien. Elle semblait se sentir en confiance, et si cela faisait indéniablement chaud au cœur de Belladone, savoir qu’elle arpentait ces dangereux bois depuis ses onze ans, sans que personne ne se soit jamais inquiété d’elle et de ses escapades passées inaperçues, acheva de lui briser le cœur, lui faisant froncer les sourcils de nouveau, devant cette témérité désobéissante qu’elle lui avouait sans sourciller. Il n’avait plus la moindre envie de lui faire la leçon, pourtant ; c’était la faute des autres, de tous ceux qui lui avaient donné l’impression qu’elle était quantité négligeable, tant que jamais l’on avait eu soin de souligner l’absence d’une première année, tant qu’elle n’avait jamais eu même le privilège de recevoir la moindre réprimande pour mise de sa vie en danger, tant elle indifférait Poudlard. Le cœur de Belladone se serra, pourtant c’est un sourire qui étira ses lèvres, bien décidé à apporter un rayon de soleil, aussi mince soit-il, dans la nuit noire d’indifférence qui régnait sur le quotidien de son élève : [\b]

- Vous êtes bien courageuse, mais aussi bien peu regardante du Règlement de l’Ecole...Il s’agit de ma première visite...J’étais un élève bien trop sage et trop peureux pour m’immiscer ici...Mais cet endroit est magnifique alors...bien que je désapprouve...Je vous remercie de me l’avoir fait partager...Êtes-vous venue souvent ? N’avez-vous jamais croisé quelconque créature ? Vous excuserez sans doute ma curiosité, à présent que je suis au courant...

Belladone lui offrit un sourire, s’adossant un peu plus contre le tronc de l’arbre, fermant quelques secondes les yeux, s’imprégnant de la quiétude magique du lieu qui lui faisait tout oublier, du temps et de l’espace à cette entrevue avec une de ses élèves, beaucoup trop intimiste pour la trouver bienséante d’ordinaire. Mais là, face à cette mare habillée de feuilles mortes de cuivre et d’or, face à ce soleil pâle qui leur dorait le cœur, dos à ce même tronc qui avait vu des centaines d’hiver, les scrupules de Belladone s’étouffaient, heureux, simplement, de la présence de ces grands yeux tristes, qui lui apportaient une paix inexplicable.


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Lavande Huntergrunt
Lavande Huntergrunt
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeLun 20 Juil - 12:58



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« les plus belles roses naissent dans les orties »

Automne 1942,  clairière au fond de la Forêt Interdite

Les pétales de fleurs étaient tombés depuis longtemps. Ce n’était plus que de lointaines feuilles, brûlées par le soleil, soufflées par l’automne qui coulaient pour atterrir paisiblement sur l’herbe. Lavande avait pu observé le spectacle de toutes les saisons sur cette clairière, année après année… mais rien n’était plus beau que ce moment où la nature se glissait en cachette dans l’hiver, mourant pour mieux renaître. Cet instant où l’eau de l’étang ne reflétait plus les rayons du soleil, tout empêtré de boue crée par la décomposition des feuilles. Un lieu clôt qui semblait sur le point de s’arrêter de vivre, quand bien même il n’était jamais autant en mouvement. C’était à cette période de l’année, coïncidant avec le retour de la jeune élève à Poudlard, qu’elle se sentait prête à disparaître à son tour. Faire comme la nature, et s’endormir. Mais aujourd’hui n’était pas comme toutes les autres fois, car au milieu de la quiétude de sa tanière se tenait un homme, invité par la bête à pénétrer dans sa quiétude. Il restait silencieux, admiratif de la lumière du soleil qui passait à travers le feuillage translucide. Lavande suivait son regard, un tendre sourire sur les lèvres. Il était respectueux, d’elle, de ses besoins et de son refuge. Il semblait vouloir comprendre sincèrement ses craintes et sa douleur, du moins l’essayait-il. La jeune fille ferma doucement les yeux, en paix malgré le grouillement encore sirupeux de la chose qui grondait dans son corps. Elle se sentait pleinement en sécurité, là sous l’œil tendre du professeur qui la surveillait, l’apprivoisant avec une douceur qu’elle n’avait jamais fait que lire dans les contes.

Son coeur se mit pourtant à battre une violente sérénade quand il vint s’asseoir à ses côtés, tout aussi délicatement et chastement qu’un prince. Elle prit une grande bouffée d’air, paniquant d’avoir à prononcer le moindre mot pour rompre la quiétude (oserai-t-elle dire romantique?) de cette instant. Tout semblait n’être qu’un rêve éveillé, le plus beau rêve qu’elle n’eut jamais fait. Lavande fuyait sans cesse, ayant passé toutes ces années à subir les brimades sans jamais répliquer à leur juste valeur, esquivant les inquiétudes de ses rares amies, trop fière qu’elle était pour accepter qu’on lui vienne en aide. Engoncée dans les méandres de ses ténèbres, elle se persuadait que ses amies ne pouvaient rien faire, et que leur existence était de toute façon bien trop douce pour la comprendre… elles le lui rendaient bien, n’approfondissant jamais véritablement le problème, la laissant voguer dans ses silences. La née-moldue se sentait tolérée, mais jamais voulue. Mais lui… était-ce son âme de professeur charitable qui lui faisait prendre autant soin d’elle ? Il la couvrait du regard, de ses yeux souriants, de ses généreuses attentions… et quand bien même Lavande n’était qu’une sauvageonne, n’en faisant qu’à sa tête, jusqu’à disparaître dans la Forêt Interdite sous ses yeux… il la suivait, l’accompagnait, refusant qu’elle ne le distance ; le tout jusqu’à surmonter ses superstitions enfantines, ses peurs inculqués dès le plus jeune âge sur les dangers de ces bois. C’était si beau, si chevaleresque, et ce n’était que pour elle. Si la jeune fille ne se retenait pas constamment, elle en pleurerait de joie. Il la suivait dans ses errances, sans hausser les épaules une seule fois, ni la remettre en question. C’était comme si… il l’acceptait telle qu’elle était. Était-ce vrai ? Est-ce qu’elle pouvait croire en ce bonheur comme une vérité ? Ne se voilait-elle pas la face, en songeant que cette abnégation était autre chose que du zèle professoral ?

En tournant la tête dans sa direction, Lavande pouvait sentir son odeur, sa chaleur à ses côtés. Il lui déclara qu’étant donné le bien-être que lui procurait cette clairière, il n’avait rien à en redire. Que sa douleur lui avait fait peur… et que la voir aussi calme lui faisait plaisir à voir. La jeune fille ne put retenir un grand sourire qui la rajeunissait soudainement. L’entendre se soucier d’elle était une sucrerie au goût de miel dont elle ne se lasserait jamais. Son professeur récupéra sa veste pliée au sol pour en récupérer le chocolat dont il lui avait parlé. Toute prise par son trajet jusqu’à cette clairière, Lavande n’y avait pas pensé une seule seconde. Ce fut donc en hochant la tête avec gratitude qu’elle récupéra la chocogrenouille, jetant un coup d’oeil amusé à l’homme de ses pensées qui aimait décidément filer ses phrases comme des perles à la suite, ne tenant pas en place dès qu’il s’agissait de converser. Tout le contraire de Lavande qui n’était pas une habituée de la parole. Il lui parla brièvement de sa collection de cartes, jusqu’à ce qu’un haussement de sourcil de la jeune fille ne fasse disparaître sa phrase dans le néant. Il parut gêné, ce dont la sauvageonne se moqua d’un petit rictus tendre.

Je verrai ça…, répondit-elle d’un air taquin avant de reprendre : Je ne sais pas qui est … Mirabelle Plankett, et quant à Salazar Serpentard… je n’en sais pas bien plus en fait… je crois que c’est lui qui a fondé la maison où je suis c’est ça ? C’est très gentil mais… je ne pense pas qu’il serait très content que je possède une de ses cartes. Mes camarades de classe disent souvent qu’il se retournerait dans sa tombe s’il me voyait à Poudlard, qu’il pouvait revenir d’entre les morts à n’importe quel moment pour « m’écorcher vive sur la place publique et monter mon cadavre sur un piquet devant le portail pour montrer que des nés-moldus n’ont pas leur place dans cette école »…, elle ouvrit son paquet de chocogrenouille : Enfin, je ne pense pas qu’il m’aurait écorcher vive, c’est beaucoup trop vulgaire.

Sur ces derniers mots, elle croqua un tout petit morceau de patte entre ses dents, savourant chaque saveur de ce délicieux chocolat. Sa tirade avait été prononcé d’une voix égale, presque amusée, comme l’on parle du temps qu’il fait ou comme l’on raconte une blague. Quand elle était petite, ces menaces lui faisaient véritablement peur, la terrifiant même, hantant de longues nuits de cauchemars. Mais avec le temps, l’enfant avait fini par comprendre que ce n’était que des balivernes. Après tout, comment un mort pouvait-il revenir à la vie ? Quand il lui demanda quelle carte était à l’intérieur, elle regarda le fond de sa boite et le cacha à la vue de son professeur en souriant malicieusement. Un ange comme lui devait être traumatisé par ce qu’elle venait de dire, même si quand même, un professeur de défense contre les forces du mal devait bien avoir l’habitude de ce genre de chose non ? N’était-il pas le rempart des élèves pour les défendre contre la magie noire ? Voyant qu’elle se refusait à lui répondre pour le moment, grignotant toujours sa cuisse de grenouille avec les yeux à demi-fermés, le professeur Raven reprit la conversation, saluant son courage. Lavande n’eut que peu de peine à l’imaginer comme un élève sage et peu téméraire, un petit enfant soigneux et discret. Comme s’il n’avait grandi que pour faire pousser une parure de beauté mature, mais que l’enfant, lui, vivait encore à l’intérieur, vif et intelligent comme au premier jour. Elle l’observait sans honte, le dévisageant tandis qu’il exprimait sa curiosité quant à ses escapades. Puis, après un petit silence, elle lui répondit :

Celui qui ne sait pas ne peut pas mentir, je ne veux pas vous attirer d’ennuis, professeur…

Pourtant, elle lui attirait des ennuis dès l’instant où elle l’avait invité à la suivre dans la Forêt Interdite. Elle mettait en danger sa carrière par la simple relation de privilégiée qu’elle semblait entretenir avec le charmant professeur. Ils étaient tous les deux dans cette galère qu’elle conduisait… et cela lui faisait peur. Elle n’avait jamais eu qu’elle-même à gérer, survivant à son propre compte et se moquant bien d’être virer ou tuer. Mais maintenant qu’il était à ses côtés, elle se sentait comme responsable de ce qu’il faisait pour elle. Et jamais personne n’avait pris autant de risques pour elle. Alors… peut-être lui devait-elle bien la vérité. Lavande détourna la tête quelques secondes, pesant le pour et le contre. Si jamais on le questionnait, il ne pourrait mentir sur le fait qu’il l’avait accompagné en toute honnêteté. Lavande ne l’avait pas trompé. Elle se mordit les lèvres et finalement lui sourit :

Je suis venue très souvent. J’ai vu toutes les saisons dans cette clairière, je sais comment la mare gèle en hiver, où passent les animaux au printemps, quel fruit donne cet arbre-là en été… et… je n’ai croisé qu’une seule fois une créature magique. C’était la première fois. Je suis venue ici, et je me suis évanouie contre cet arbre précisément. (elle tapota l’écorce contre lequel ils s’appuyaient) Quand je me suis réveillée, il y avait un centaure qui me regardait. Je l’ai regardé et j’ai ouvert les bras comme ça en disant « mangez-moi mais vite s’il vous plait » (elle mima le geste en riant) et il m’a regardé si bizarrement… avant de me demander pourquoi. Je pensais qu’il voulait savoir pourquoi « vite », alors j’ai juste répondu que si je devais mourir, je ne voulais pas souffrir. En fait, il voulait savoir pourquoi je voulais mourir. Et… j’ai haussé les épaules, en répondant que je ne savais pas pourquoi je devais vivre. Le centaure m’a regardé… avec un mélange de mépris et de pitié je crois, en tout cas c’est ce dont je me souviens. Il m’a dit qu’on ne mangeait pas les choses comme moi ici. Je m’étais rendue compte qu’être ici me faisait aller mieux, alors j’ai demandé si je pouvais revenir, de temps en temps et… il m’a répondu que toutes les créatures omis des hommes ont leur place dans la Forêt Interdite, et que je pouvais revenir ici jusqu’à ce que je trouve… « ma raison de vivre ». Alors il m’a offert ce bout de clairière, je ne savais pas que j’étais sur leur territoire. Aujourd’hui, je pense qu’en même temps qu’il me parlait, il devait y avoir cinq autres centaures qui me visaient avec leurs flèches ! J’ai eu de la chance… je ne pense pas que j’aurai survécu face à un cynospectre !

Lavande rit à nouveau, de ce rire maladroit et bancale qui la caractérisait tant. Un rire un peu bruyant, la faisant s’allonger un peu plus contre l’arbre, regardant les éclats de ciel aux travers du feuillage que le vent faisait valser. Avait-elle trouver sa raison de vivre depuis la première année ? Pas vraiment. Tout ce qu’elle avait acquis, c’était une raison de mourir, un suicide qu’elle voulait transformer en bouquet final une fois atteint son dernier jour. La jeune fille ne voyait que l’aspect symbolique de l’acte, et ne songeait pas qu’une bonne majorité de ceux qui l’avaient déjà martyrisé avait depuis longtemps quitter l’école. Elle se redressa légèrement contre l’arbre, et prit la carte qu’elle avait caché des yeux du professeur Raven pour la lire d’une voix mutine :

« Contemporain de Copernic et de Leonard de Vinci, c’est un génie dont les théories audacieuses contestaient la pensée de l’époque : on lui attribue la découverte du Fourchelangue. » mmh… c’est bizarre, j’ai du mal à lire le nom mais vous devinerez certainement de qui je parle… alors, quand est-il de mon heure de retenu supplémentaire que je vous ai demandé ? Termina-t-elle en souriant, regardant son professeur d’un œil brillant en tenant la carte loin de son emprise.

Jamais elle n’avait autant parlé en une conversation, et jamais elle ne s’était sentie si bien en le faisant, se découvrant et s’offrant à lui plus qu’à quiconque dans toute son existence.

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Belladone Raven
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« Cuisines de Poudlard »

Hiver 1942


Les langues semblaient se délier sous l’ombre du bois, et Belladone avait moins peur soudain ; c’était comme s’il ne pouvait rien dire de mal, parce que l’endroit était trop beau, parce que la majesté paternelle du chêne le mettait en garde, dans la droiture et la fierté dépouillée de son manteau automnal, comme si l’écrin irréel, merveilleux, de la clairière se protégeait de l’hérésie humaine qui foulait son sol sacré. L’endroit était magique pour sûr, peut-être même plus que Poudlard, peut-être même plus que le cœur frémissant d’une baguette de sorcier, peut-être même plus que n’importe quel endroit au monde. Et la symphonie doucereuse de la brise légère balayait les scrupules, les hontes et les tracas, qui s’en allaient rejoindre le ballet des feuilles de cuivre et d’or, tournoyant en harmonie avec ces fardeaux soudain de plume que la Forêt ôtait des épaules des valeureux. C’est comme s’il ne subsistait plus rien du fragile Professeur Raven, plus rien de cette autorité délicate brisée par les yeux trop tristes de l’élève effrontée qui lui avait fait rendre les armes. Il n’y avait plus que cet éternel enfant dans ce corps d’homme tendre et mélancolique, qui s’émerveillait de la beauté d’une nature dont l’unique présage l’avait tant effrayé autrefois. Il n’y avait plus que cette douce jeune fille trop malheureuse, détestée de tous, qui l’inondait de l’océan verdâtre de ses yeux écumant d’une compassion infinie, et qu’il se plaisait à croire n’être destiné qu’à lui, son Professeur idiot et fragile qui n’avait pas même su réprimander ses tortionnaires à la hauteur de l’infâmie de leurs actes.

De fait, Lavande ne semblait pas fâchée par la maladresse de Belladone, qui avait rougi et bredouillé la fin de sa tirade malavisée, tant et si bien que la jeune fille eut un sourire taquin, s’amusant de son malaise et laissant planer le doute quant à l’éventualité de négocier l’échange de cette carte que le jeune Professeur cherchait depuis longtemps. L’élève avouait son ignorance relative aux deux sorciers célèbres cités par Belladone, arguant toutefois qu’elle se doutait que Salazar Serpentard était le fondateur de la maison qui l’accueillait si mal depuis déjà six années. Et l’âme fragile de Belladone commençait à peine à se délester du poids de la souffrance de l’étudiante qu’il parvenait à faire sourire, et dont le visage de craie s’était détendu d’un air paisible qu’il ne lui avait jamais vu, et qui lui seyait si bien que ses lèvres s’étirèrent inconsciemment, heureux de la joie sereine de courte durée qu’il semblait avoir inspiré à la malheureuse. Car le pédagogue enjoué entrouvrait déjà la bouche, ravi de brosser à sa jeune élève les deux portraits qu’il connaissait plutôt bien, Belladone ayant longuement envisagé une carrière d’Historien de la Magie, avant de déposer les armes et de se jeter corps et âme, vaincu par ses premiers amours, la Magie Noire et les Forces Obscures, les créatures qui peuplaient les ténèbres et les sorciers du Mal.

Le tendre Belladone blêmit soudain, ses joues rosies par la doucereuse gifle du vent pâlissant de manière soudaine, abrupte, sous la fine barbe noire qui les recouvrait. La malheureuse élève n’apprenait pourtant rien au Professeur, qui n’ignorait pas l’origine de la discorde qui avait vu la fin de l’alliance qui avait uni les quatre fondateurs de Poudlard. Il n’ignorait pas non plus la légende de cette chambre des secrets dont il ne savait que penser, et dont personne ne savait rien, au fond. Les familles au Sang-Pur n’ignoraient rien de l’idéologie qui avait semé le trouble entre les quatre plus grands sorciers de l’époque, et sans nul doute les élèves répétaient, inlassables, les cruautés crachées de la bouche venimeuse de leurs parents. Car oui, Serpentard se serait opposé à l’inscription de Lavande à Poudlard. Cela, Belladone ne pouvait le nier. Jamais, pourtant, il n’avait entendu parler d’un tel supplice, qui sans nul doute n’était qu’une pure invention des « camarades » de Lavande, destinée à troubler ses nuits et chaque seconde de son quotidien de martyre au sein de l’école réputée la plus moderne d’Europe. Belladone frémit d’horreur et d’indignation devant un tel raffinement de cruauté, son sourire complétement disparu de ses lèvres désormais blanches comme la craie. Lavande ne l’aidait guère non plus. Son laconisme indifférent, enjoué presque, donnait à sa litanie une neutralité sinistre, en exacerbant l’horreur, aiguisant la rudesse terrible d’un quotidien auquel la jeune fille semblait s’être résignée. Et c’est cette résignation qui était le plus insupportable à Belladone, qui tressaillait devant l’air paisible avec lequel la jeune fille détaillait l’atrocité des menaces que ses comparses lui promettaient avec un acharnement plein d’entrain. Et c’était trop pour le tendre Professeur de la voir déballer sa boîte de confiserie d’un air distrait, pour ensuite savourer avec parcimonie la petite patte de grenouille en chocolat qu’elle avait délicatement récupéré. C’est d’une toute petite voix blanche, le visage toujours blême, qu’il riva son regard d’encre empreint d’une gravité solennelle vers la jeune fille, comme pour la contraindre à le regarder :

- Mademoiselle, je…Promettez-moi de venir me trouver si d’aventure une menace aussi monstrueuse était encore proférée à votre égard…Moi, ou le Professeur Grindelwald…Les élèves n’ont pas à vous dire des horreurs pareilles, alors…Le ferez-vous ? Promettez-le-moi, s’il vous plaît…[/b

Belladone accusait le choc, ne se remettant de ses émotions qu’avec peine. Il le savait mieux que personne, pourtant, que Salazar Serpentard aurait crié haut et fort contre l’acceptation de Lavande à Poudlard, et qu’il n’aurait rechigné ni devant la violence, ni devant la cruauté pour avoir gain de cause et pour faire triomphé cette idéologie nauséabonde qui avait été la cause de son déclin à la tête de l’école. Il était une chose d’avoir la notion abstraite de la personnalité historique de Serpentard, il était une chose d’avoir retenu des faits et des dates datant d’un millénaire, lorsque l’on était le benjamin privilégié d’une riche famille de Sang-Pur. Il en était une autre de voir ces souffrances et cette idéologie infligées à la jeune Lavande, qui personnifiait là le sort infâme réservé aux Nés-Moldus, que Serpentard avait approuvé et encouragé. Pour sûr, Salazar Serpentard n’aurait pas rechigné à faire du mal à Lavande. Une sombre envie de jeter en pâture à ses Strangulots les cartes à l’effigie du quatrième fondateur tenailla soudain avec une irrépressible force l’esprit bouleversé de Belladone, qui se décida, sans parvenir jusqu’au mensonge éhonté, à altérer quelque peu la trop cruelle réalité, que Lavande accusait pourtant bien mieux que lui :

[b]- C’est de toutes les façons complètement faux…Vous auriez obtenu l’appui des trois autres fondateurs de Poudlard, qui se sont dressés contre la volonté de Salazar Serpentard de ne pas accueillir de Nés-Moldus…Tant et si bien qu’il a décidé de quitter l’école, n’étant pas parvenu à les plier à sa volonté…Ainsi voyez-vous, vos petits camarades se sont sans doute cru malins, mais peut-être devraient-ils réviser leurs cours d’Histoire de la Magie avant de chercher à vous effrayer…
Belladone se racla la gorge, ne désirant pas s’attarder sur cet infâme sujet, qui troubler la quiétude chuintante de ces bois fabuleux. Mirabella Plunkett est une sorcière du 19ème siècle. Alors qu’elle se promenait au bord du Loch Lomont avec ses parents, en Ecosse, elle est tombée amoureuse d’un triton. Ses parents lui ayant interdit de se marier, elle s’est transformée en poisson et plus personne, jamais, ne l’a revue. Faites-moi penser à vous donner le double que j’ai de sa carte. Je suis certain qu’elle vous plaira. C’est une jeune femme aux longs cheveux roux, coiffée d’une couronne de fleurs, qui tient un poisson dans ses bras.

L’enthousiasme de Belladone, relatif à sa collection de cartes de Chocogrenouilles ainsi qu’à l’éventualité d’enfin découvrir le portrait de l’auguste sorcier qu’il s’évertuait à dénicher depuis presque deux ans. Pourtant le sourire malicieux de la jeune fille, qui avait jeté un œil d’émeraude au fond de la boite avant de le lever, joueur et taquin, vers le visage interrogatif de son Professeur, fit sourire Belladone dont les joues, peu à peu, s’empourpraient de nouveau de l’air vif et frais qui les cinglaient doucement. Et Lavande semblait prendre un plaisir certain à laisser planer le doute, dégustant son chocolat d’un air tranquille, tandis qu’elle semblait plus sérieuse, réfléchissant à lui révéler ou non plus en détails le récit de ses escapades au beau milieu d’un lieu interdit et réputé dangereux. Le lac marécageux de son regard, qui s’était rivée sans honte dans l’encre de celui de Belladone, se détourna un moment, la jeune fille arguant en premier lieu les ennuis que pourraient causer au jeune Professeur la connaissance de telles informations. Consciente, sans doute, que le risque était déjà pris, à présent qu’il l’avait suivi, à présent qu’il lui avait fait la promesse de son silence et de son acceptation, un peu malgré lui, Lavande se ravisa, non sans exprimer une certaine inquiétude mutique, mordant une de ses lèvres dans mouvement tracassé. Belladone se rendit compte qu’il ne s’était jamais aperçu à quel point elle avait les lèvres ourlées avec délicatesse, comme dessinées au crayon sur ce petit visage triste qu’elle semblait toujours vouloir faire oublier au monde. La petite voix fluette arracha le jeune homme de sa contemplation déplacée, qui, horrifié par ces quelques secondes d’égarement, baissa vivement le regard, les joues de nouveau roses, suivant néanmoins avec intérêt le récit de la malheureuse élève qui lui narrait le temps phénoménal passé au sein de cette clairière, au cours de ces six dernières années, sans que personne, jamais, ne se soucie de ces absences prolongées.

Et Belladone blêmit de nouveau, s’imaginant l’étudiante en fillette de onze ans, évanouie contre le bois roide du chêne immense qui les accueillait aujourd’hui avec une mansuétude presque paternelle. Alors le jeune Professeur écouta le récit terrible, narré d’une voix presque enjouée, de cette enfant qui avait si peu confiance en Poudlard qu’elle s’en était allée perdre connaissance dans les tréfonds de la Forêt Interdite, de cette résignation désespérée, placide presque, de celui que la vie lasse, et dont il ne subsiste rien, pas même un soupçon d’enthousiasme à l’existence, dont la vie l’avait dépouillé, à la manière d’un Détraqueur assoiffé de joie, d’espoirs et de rêves. Une fois encore, Belladone détourna le regard, réprimant une larme qui menaçait de noyer l’encre de son œil gauche. La malheureuse élève n’avait guère besoin des pleurs d’un Professeur trop tendre et trop peu éprouvé par la vie, quand le récit de ses propres tourments à elle ne semblaient lui infliger rien d’autre qu’une indifférence, vague, amusée, et que Belladone devait réprimer une exclamation d’effroi devant le tableau saisissant que lui brossait Lavande, de cinq centaures la menaçant de leurs arcs et de leurs flèches, protégeant leur porte-parole avec lequel elle avait discuté sans honte ni crainte, alors qu’elle n’était encore qu’une enfant esseulée, affaiblie et ignorée.

- Oh, Mademoiselle…

Belladone riva un regard dévasté de chagrin vers la jeune fille qui ne semblait pas le moins du monde perturbée par l’agression d’une horde de centaures, alors qu’elle n’avait été qu’en première année. Ce regard n’avait duré qu’une seconde, parce qu’il n’avait pas le courage de supporter la force tranquille qui écumait des tréfonds marécageux des prunelles de Lavande, et parce qu’il comprenait l’évidence, parce qu’il savait qu’elle ne pouvait se confier à personne, et que c’est de soutien et de chaleur dont elle avait besoin, et non de la faiblesse ridicule d’un Professeur trop tendre. Prenant son courage à deux mains et se raclant la gorge, Belladone reprit donc ses esprits, bien décidé à ne pas évoquer la potentielle image de Lavande enfant devant un cynospectre, cette dernière étant décidément au-dessus de ses forces :

- J’avoue que je suis admiratif…Les centaures n’aiment pas beaucoup les êtres humains, vous savez ? Leur mansuétude envers vous est stupéfiante…Sans doute était-ce parce que vous étiez une enfant, ou parce que vous avez fait preuve de beaucoup d’humilité mais…Qu’ils vous aient offert une parcelle de leur propre territoire est incroyable ! Savez-vous qu’un des principaux sujets de discorde entre centaures et sorciers est l’attribution de territoires qui leurs sont dédiés, et que le Ministère ne cesse d’amoindrir, à leur grand courroux ? Je crois que vous pouvez vous vanter d’être la seule sorcière à avoir obtenu un territoire de la main des Centaures !

Belladone sourit. Le rire de Lavande et la caractéristique incroyable de son récit pourtant terrible ayant contribué à recouvrer partiellement son enthousiasme. Et l’âme du fragile Belladone, souffletée quelques instants avant par le ravage des chagrins causés à la jeune fille, et qu’il semblait devoir vivre par procuration, recouvra une légèreté subite, le jeune Professeur s’accoutumant doucement à la tempête changeante d’émotions qui fouettaient son esprit paisible chaque fois que la présence de Lavande l’accompagnait. Car elle semblait amusée, mutine, si enthousiaste soudain qu’un immense sourire éclaira le visage encore un peu pâle de Belladone, tandis qu’elle tenait la carte loin de son regard d’encre, et qu’elle récitait d’un taquin ce qu’il reconnut tout de suite comme ladite carte qu’il s’évertuait à chercher depuis deux ans. Devant le chantage mutin, éhonté et amusé auquel le soumettait son élève, c’est un Belladone stupéfait qui croisa les bras devant tant d’audace, dans un geste faussement autoritaire, que trahissait un bref éclat qui vint illuminer son visage éreinté par cette rafale d’émotions trop brusques.

- Sachez que vous avez une chance éhontée, Mademoiselle ! Savez-vous que vous devez être la seule élève à avoir usé de chantage auprès d’un Professeur pour voir sa retenue doubler ? J’accepte, bien que j’ai peur que vous deviez vous en repentir…Ce ne sera guère une soirée très distrayante pour vous…Mais, une chose est sûre, et n’en déplaise à ce cher Salazar, vous êtes bien plus Serpentard que n’importe quel autre élève, surtout lorsque vous décidez quelque chose ! Mais vous pouvez garder la carte, il s’agissait d’une plaisanterie, et je ne n’aurais pas la muflerie de vous réclamer quelque chose que je vous ai offert…

Belladone eut un bref éclat de rire. Il n’était pas fâché le moins du monde. Bien sûr il se demandait bien ce que pouvait trouver de si fascinant une jeune élève à trier ses soporifiques documents et notes diverses plutôt que de consacrer sa soirée à quelque loisir qu’elle affectionne. Mais peu importait après tout. Qu’importait aussi cette carte de Paracelse, quand elle avait tant fait sourire la jeune fille. Qu’importaient tous ces questionnements, parce que Belladone, soudain, se surprenait à avoir hâte, lui aussi, de pouvoir converser un peu plus avec la fascinante élève, autour d’une bonne tasse de thé et d’un feu crépitant.



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Lavande Huntergrunt
Lavande Huntergrunt
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MessageSujet: Re: Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald  Like a flower made of iron × Raven & Grindelwald - Page 3 Icon_minitimeDim 23 Aoû - 0:30



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« les plus belles roses naissent dans les orties »

Automne 1942,  clairière au fond de la Forêt Interdite

Cette clairière avait tout d’un autre monde ; un lieu où rien ne pouvait les atteindre des dangers de l’extérieur, de l’inhumanité de la société, de la folie des hommes. Un endroit merveilleux, digne des plus beaux contes de fée, où Lavande se sentait sereine et apaisée : un mystère, un secret, quelques esprits puissent sommeiller entre les racines de ce chêne millénaire… la vérité n’en restait que la même. La jeune fille parlait ouvertement, le coeur embrumé d’une rare liberté, d’un plaisir qui n’était pas sans lien avec la présence amicale du professeur Raven. Elle s’exprimait devant lui, sans honte ni gêne, les joues rougies par l’amour. Cette forêt effaçait toutes les différences. Chacun se retrouvait faible et démuni sous ses hautes branches, d’où la lumière du soleil filtrait à grande peine, créant un sentiment de claustrophobie chez le moins habitué. Ils étaient des intrus, car Lavande, malgré son discours grandiloquent, savait pertinemment que les centaures ne faisaient que la tolérer pour une raison qu’elle ignorait… ou plutôt qu’elle n’arrivait pas à décrire avec des mots. La vague fraîcheur de l’automne faisait tomber les feuilles dorés à leurs pieds, se posant tantôt sur leurs épaules et aux creux de leurs mains. Ils étaient là, tous les deux assis contre le même arbre,  à se chamailler tendrement pour une carte à collectionner de bonbons, à se raconter leurs anecdotes autour de la Forêt Interdite et ses mystères insondables. C’était comme… un rendez-vous entre amoureux. Lavande ne pouvait se retirer cette idée de la tête, et tout son corps était transi d’une chaleur qui embrumait son esprit. Il était à côté d’elle, rien qu’avec elle, et à des centaines de mètres aux alentours, il n’y avait qu’eux. Et cette proximité, tout comme cet isolement soudain du reste de l’univers, les rendant fous et bavards comme des enfants. Lavande n’avait plus l’impression d’être auprès de son professeur de Défense contre les Forces du Mal, engoncés qu’ils étaient dans les épais murs de Poudlard, dans le bureau imposant d’autorité de ses quartiers. Ils n’étaient que là, comme deux simples êtres humains qui savouraient la douceur d’un refuge offert par la nature. Il n’était plus un professeur dans les errances labyrinthique de la Forêt Interdite, pas plus qu’elle n’était un monstre.

Elle grignotait le chocogrenouille avec application, cette lenteur et cette délicatesse qui étaient la marque des gens qui manquaient ; mangeant le chocolat petit à petit, savourant un instant de répit auquel elle semblait persuadée de ne plus jamais pouvoir goûter. Lorsqu’elle eut racontée quelques unes des exactions de ses camarades, il aurait été mentir de dire qu’elle n’avait pas vu la mine déconfite du Professeur Raven se transformer, blêmissant à chaque virgule, comme si jamais la descente aux Enfers n’avaient eu de fin. Elle était désolée de le voir si triste, à tel point qu’il se tournait vers elle pour lui faire promettre qu’elle reviendrait vers lui ou le professeur Grindelwald si jamais ils recommençaient. Lavande se plongeait dans son profond regard, un océan de tendresse pouvait-il donc être aussi noir ? Elle se mordait la lèvre inférieure, astreignant un début de rire désabusé. C’était une précaution inutile. Les mots avaient creusé leurs tombes depuis longtemps dans son esprit ; ne serait-ce que par fierté, elle n’irait pas se plaindre maintenant. Cela n’avait pas de sens. Il n’y avait plus que les premières années qui ressortaient la « carte » humiliante du fondateur, les autres savaient que ces méchantes blagues ne prenaient plus. Non, les mots ne laissaient pas de traces visibles, pas d’empreintes, pas de visages, pas de noms. Lavande aurait été bien incapable d’accuser qui que ce soit. De toute façon, le professeur Raven ne lui indiquait même pas ce qu’il ferait si d’aventure la née-moldue venait le chercher. Est-ce qu’il serait aussi efficace que contre la bande à Desiderata Rosier ? En effet, tout ce qu’il pouvait lui offrir, c’était une oreille, un feu de cheminée, un thé, un bonbon…

Je vous le promets… murmura-t-elle du bout de ses lèvres, pour ne pas ruiner la beauté de cet instant.

Rien que pour pouvoir le voir encore, profiter de chaque seconde que ces deux dernières années lui promettaient en sa compagnie, la jeune fille serait capable de ressortir de vieux souvenirs et de les faire passer pour des récents. Après tout, personne ne serait capable de faire la différence. Voilà déjà que le professeur Raven poursuivait sans attendre, tout heureux de sa promesse, pour déclarer que de toute façon, elle aurait eu le soutien des autres fondateurs. Il était vrai. Tout comme elle avait le soutien silencieux et passif d’Albus Dumbledore à ses côtés, et l’ignorance bienveillante des autres professeurs qui haussaient les épaules en se regardant les uns les autres d’un air inquiet, tous se refilant la patate chaude sans savoir qui un jour saurait tenir en laisse la Serpentard. Elle connaissait l’histoire, ayant eu le bouquin pour livre de chevet pendant quelques temps. C’était amusant, d’apprendre. En tout cas, la jeune fille appréciait particulièrement lire ces histoires, dramatiques, réelles, terribles, qui lui en apprenait parfois plus sur sa propre condition. Elle avait une fois saisi une réflexion au vol, d’un Serpentard disant à un Serdaigle « c’est fou comme les sang-de-bourbe sont toujours les plus gros lèches-cul de l’école, y’a pas à dire, ça arrive comme ça et ça se permet de faire genre d’apprécier un livre de cours comme un livre de chevet... ». Peut-être que ça fonctionne aussi avec les Cracmols, comme réflexion, s’était-elle alors dit... Mais à cet instant, elle était tout à l’écoute de son doux professeur, qui débitait la biographie de la fameuse Mirabella Plunkett. Une histoire d’amour impossible, voilà qui était au mieux pour parler à l’oreille de la jeune fille en fleur dont le coeur tremblait à la voix de son prince charmant. Elle souriait, regardant ses genoux et se grattant la paume de la main.

Ce serait avec plaisir… je veux bien voir cette carte…

Il lui faudrait trouver un savant endroit où la cacher, un endroit où personne ne la lui déchirerait. Elle rit doucement en s’imaginant le poisson gigotant dans les bras de la rousse souriante. Cette femme avait eu le courage de tout quitter par amour, tous ses plans, sa famille, son monde, pour s’engouffrer au fond du vaste inconnu bleu, dans les bras d’un triton. L’image était sublime, et laissa longuement Lavande rêveuse. L’enthousiasme de Belladone Raven quant à cette collection de cartes pouvait renvoyer la plus taciturne des créatures en enfance. Lavande s’oubliait dans sa naïveté, chacun de ses doux mots étant portés par une inexorable tendresse, envers ces choses inanimés qu’il aimait tant. Il s’attachait à cette collection de cartes qui lui rappelaient son enfance, la nostalgie de l’appropriation matériel sans conséquence, impressionnante et féerique. Dans sa voix résonnait le miel, le sifflement du vent de l’hiver quand il fait bon dans son fauteuil. Il était doux à l’entendre parler de bonheur. Une façon de parler presque contagieuse, qui la prenait à vouloir être belle et rayonnante à son tour. Mais elle n’avait son talent ni sa pratique, aussi l’employa-t-elle dans une situation totalement à contre-emploi, racontant avec joie l’épisode de son arrivée dans la clairière. Mais le Professeur Raven n’eut pas la réaction auquel elle s’attendait ; sa mine était profondément meurtrie, ses fines lèvres ne laissant s’échapper qu’une très légère injonction, semblable à la caresse d’une plume. Elle tourna son regard vers lui, inquiète et tranquille – tout cela était chose du passé, et cela avait permis qu’ils puissent tout deux se réunir ici à l’abri des regards. Mais Belladone détourna le sien. Alors Lavande craint sa réaction ; avait-elle était trop loin ? C’était-elle trop ouverte à celui qui restait malgré tout son professeur ? Son coeur battait, insouciant du rythme des feuillages qui chuchotaient au-dessus d’eux. C’est alors qu’il s’exclama ; qu’il était admiratif, que c’était un fait exceptionnel, qu’elle pouvait s’estimer fière d’être l’une des rares sorcières à avoir pu marchander avec les Centaures. Lavande rougit profondément, il lui semblait que même son sang devenait un peu plus vif par seconde.

C’est curieux… bredouilla-t-elle doucement, pourquoi les sorciers auraient besoin de territoires plus que les centaures ? Les sorciers sont des humains, ils peuvent se fondre parmi les moldus… eux ne peuvent ni se mélanger aux chevaux, ni aux humains… ils sont les deux à la fois et… et rien du tout en même temps... quelque chose de bâtard et d’inexpliqué qui fait peur aux gens, comme tout ceux qui n’entrent pas dans une seule case. (elle resta silencieuse quelques secondes, sa bouche terminant de mâcher la dernière patte de la grenouille comme un petit veau:) ...si je devenais un jour Ministre de la Magie, je leur rendrais des territoires, à commencer par cette clairière.

Mais trêve de tristesse ! Lavande sentait que cette corrélation ne serait pas au goût de son professeur adoré. Pourtant elle n’était que vérité. Peut-être était-ce pour cela qu’ils l’avaient accepté sur leur territoire ; parce qu’elle était une demi, inexplicable et insensée, refusée et rejetée… mais elle ne souhaitait pas que l’atmosphère de leur premier rendez-vous improvisé (même s’il ne le voyait certainement pas ainsi) ne devienne triste. Lavande possédait toujours la carte dans sa main et se mit à jouer d’un chantage taquin, avec en prix la carte tant désirée de Paracelse. Ce qui eut le don de surprendre son professeur qui eut cet air faussement autoritaire, conjuré parla mignonnerie de son visage si doux. Lavande eut le sourire jusqu’aux oreilles, joignant ses mains et remontant ses épaules dans un mimique de timidité maladive, bien que ses yeux fussent incroyablement brillant. Rarement on aura aperçu de marécage plus scintillant à la lueur du soleil. Elle riait de s’entendre dire qu’elle était la plus Serpentard de sa maison, et ils rirent ainsi de concert. Ce  partage d’étincelles fut peut-être la chose la plus intense qu’ils connurent durant cette sortie. Mais il refusait la carte, déclarant que cette histoire de marchandage n’était qu’une plaisanterie, et ce ne fut pas au goût de Lavande qui remua la carte délicatement aux lueurs des rayons de soleil :

Un marché est un marché, dit-elle en souriant, avant de prendre la main de Belladone et de délicatement déposer la carte dans sa paume. Je serai triste de vous arracher l’une des dernières pièces de votre collection… laissez-moi un peu de temps et je vous rattraperai, finit-elle en refermant les doigts de son professeur sur la carte.

Faire sa propre collection ne l’intéressait pas réellement, en toute honnêteté. Pouvoir se délecter de celle de son prince charmant, et l’entendre débiter les histoires de ces incroyables personnalités, le tout en se vantant d’avoir plusieurs doubles, lui suffisait largement à son bonheur. Elle n’avait pas besoin de plus.

Dites-vous que… c’est un cadeau de ma part, pour vous remercier de m’avoir suivie jusqu’ici.

La lumière descendait sur leur clairière. L’heure du repas approchait à grand pas, et l’hiver venant, le soleil se couchait de plus en plus tôt. Il ne faudra pas attendre longtemps avant que les lucioles seules ne viennent éclairer leurs visages. Lavande regardait Belladone en silence, un tendre sourire sur son visage. Elle rougissait encore, arguant son teint pâlichon d’un soupçon de rose sur ses joues, se sentant toute gênée d’avoir fait preuve d’autant de courage envers lui. Tout ce qu’elle avait fait durant cette journée… jamais en se couchant la veille, même en somnolant milles aventures, elle n’aurait imaginé cette après-midi. Mais la jeune fille serait prête à accuser encore cent et milles malheurs sur son dos, pour pouvoir revivre des instants comme celui-ci, fragile et innocent.

©️ plumyts 2016
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Belladone Raven
Belladone Raven
Âge : 28 ans
Sang : Sang-Pur
Nationalité : Anglaise
Patronus : Un corbeau
Épouvantard : Lavande recroquevillée au sol, le visage baigné de larmes, qui implore son aide, personnification de son impuissance à combattre les Forces du Mal
Reflet du Riséd : Lui même sauvant Lavande à son bras, des étincelles flamboyantes jaillissant encore de sa baguette, provenant de la bataille qu'il vient de gagner
Baguette : 25 centimètres, bois de sorbier et crin de licorne
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Like A Flower Made Of Iron

« Cuisines de Poudlard »

Hiver 1942


La promesse fut extirpée dans un souffle las, résigné, désireux de ne pas s’attarder sur ces malheurs qui n’accablaient plus la malheureuse étudiante au regard d’eau trouble. Interrompue dans la dégustation appliquée de son Chocogrenouille, les lèvres ourlées de Lavande s’en revinrent à la délectation parcimonieuse du petit amphibien chocolaté. Belladone se tût, respectant la volonté mutique de la jeune fille de ne pas mêler à la pureté étincelante de la clairière les souillures de ses humiliations passées. Son regard d’encre se leva, hésitant, vers la sorcière ébranlée, et un sourire léger, ravi et satisfait, étira ses lèvres fines mangées par la barbe, lorsqu’il aperçut de jolies et vives couleurs teinter de nouveau le triste visage de craie. En bon Professeur de Défense Contre les Forces du Mal, Belladone n’ignorait pas les vertus curatives du chocolat sur les mages affaiblis par une puissance magique encore non maîtrisée, et, sur Lavande, la friandise semblait avoir fait des merveilles. Les eaux troubles de ses yeux s’agitaient sous l’éclat rieur, presque effronté qui y étincelait, dansant au creux de la tempête écumante qui faisait rage dans les prunelles marécageuses, véritable feu de joie enserré au cœur des tristes immensités de cet océan d’émeraude ternie.

L’humilité de Belladone ne s’avouait pas cette fierté vague, un peu honteuse, d’avoir rendu heureuse la malheureuse élève, fut-ce éphémère, fut-ce pour quelques instants. Cette amertume que lui infligeait sa faiblesse magique n’avait pour origine que le bien qu’il ne pouvait pas faire, que la défense des opprimés qui lui paraissait insurmontable. Mais là où la nature l’avait dépouillé d’armes affûtées, le fragile jeune homme se retrouvait pétri d’une force dont beaucoup trop sous-estimaient la valeur. Car c’était bel et bien la tendresse exacerbée de Belladone qui avait fait crépiter cette lueur de joie dans ces yeux mornes ; c’était bel et bien cette compassion pour la lente descente aux enfers de l’étudiante qui avait réchauffé ses pommettes de craie ; c’était bel et bien cette empathie débordante qui écumait de son âme fragile, qui avait fait briller l’éclat d’un joli sourire sur les lèvres de la jeune Lavande, que sans doute, personne à Poudlard ne pouvait se targuer d’avoir ne serait-ce qu’entr’aperçu. L’ancien élève affublé du sobriquet de Cracmol avait réussi, par la seule force de son aptitude à l’affection, à faire naître la joie sur le visage de cette élève qui semblait n’attendre que la mort avec cette lassitude qu’ont ceux dont les yeux ont vu défiler beaucoup trop d’automnes.

L’allégresse de Lavande faisait plaisir à voir. C’était comme lui rendre un cadeau de la nature déchu, dépouillé par le malheur et la souffrance, arraché par lambeaux par la cruauté des uns et l’indifférence des autres. L’enthousiasme seyait à son jeune âge, et de fait, il lui allait à ravir ; l’histoire de Mirabella Plunkett lui avait indéniablement plu. Belladone nota dans un coin de sa mémoire quelques récits fantastiques qui pourraient amuser la jeune Lavande lors de l’injuste soirée de retenue qu’il avait été contraint de lui infliger. Peut-être lui montrerait-il la carte de Gwendoline la Fantasque, sur laquelle s’étalait son visage extasié sur un bûcher érigé par les Moldus qu’elle narguait, y étant montée quarante-sept fois pour le simple plaisir provoqué par le chatouillis du brasier qu’elle ensorcelait d’un Gèle-Flammes. Ou alors il lui parlerait de la grande Morgane, Reine d’Avalon et ennemie jurée de Merlin, redoutable sorcière férue de Magie Noire. Le sourire du Professeur de Défense Contre les Forces du Mal s’étira, ravi, tandis qu’il lui répondait d’un hochement de tête :

- Alors c’est entendu.

Une brève lueur d’incompréhension peinée avait de nouveau terni le regard d’eau trouble de Lavande, devant le chagrin manifeste qui avait déformé les traits de Belladone, comme si elle ne comprenait pas qu’il puisse autant s’affliger d’un malheur aussi lointain, comme si elle l’avait offensé en narrant à une oreille enfin amie les tourments qu’elle avait dû endurer seule, tant d’années. Belladone secoua la tête. Il était définitivement un idiot. Lavande avait besoin de son enthousiasme, de ses conseils et de son réconfort, pas de ses apitoiements de gamin trop fragile et de sa peine trop exacerbée pour des illusions dont elle avait déjà fait le deuil. Aussi préféra-t-il se concentrer sur le raisonnement si intelligent et si bienveillant de cette jeune fille laconique, presque muette, qui gagnait tant à s’exprimer que le sourire de Belladone s’élargit, ravi de pouvoir engager une conversation aussi digne d’intérêt ;

- Vous soulevez là une question épineuse, Mademoiselle. Nombre de sorciers ne sont malheureusement pas de votre avis, ce qui provoque des batailles sans fin et menace d’extinction, à long terme, toute la communauté des centaures. Le fait est que les Sorciers s’estiment en droit de réclamer ces terres, parce qu’ils se croient supérieurs à eux. Or, les centaures sont des créatures fières et indomptables, et dotés d’une intelligence redoutable, n’en déplaisent à beaucoup, et ils ne comptent pas se laisser dépouiller de leurs terres sans réagir. Quant à leur…Apparence physique…Je trouve votre raisonnement très logique, et très bienveillant. Beaucoup de sorciers matures et expérimentés devraient s’en inspirer…Mais l’être humain, Moldu ou Sorcier, a cet insatiable désir de conquête dans les veines, qui fait tant de mal…Il faudrait peut-être que vous soyez Ministre de la Magie, et croyez bien que je soutiendrai votre candidature !

Belladone eut un large sourire, enthousiasmé par la maturité incroyable qui se dégageait de la logique de cette jeune fille qui ne parlait pas assez, et comme pour s’excuser de s’être encore égaré dans une litanie professorale que, sans doute, elle allait avoir la politesse d’écouter patiemment. Mais l’étudiante ne semblait ni agacée, ni même ennuyée. En fait, devant l’air faussement outragé du Professeur par le chantage amusé de la jeune fille, devant cette opiniâtreté qu’il soulignait comme étant indubitablement caractéristique de sa Maison, Lavande rit aux éclats, et celui, discret, presque flegmatique de Belladone se mêla à la symphonie maladroite du sien, dans un concert bancal de bonheur gêné. Lavande mimait une posture timide, effarouchée presque, la carte serrée entre ses mains jointes sur son buste. Mais la lueur effrontée qui étincelait dans son regard d’ordinaire trop terne pour une fille si jeune ne le trompait guère, et son immense sourire le comblait de joie. C’était la deuxième fois qu’il la faisait rire, et c’était incroyablement bon. C’était comme s’il se sentait investi d’une forme de pouvoir de résurrection, parce que chaque accès de joie sur ce visage déjà usé par la vie semblait un miracle, une renaissance impossible à qui ne se donnait même pas la peine d’essayer.

Belladone avait tiré un trait sur cette carte ardemment recherchée, sans l’ombre d’un remord ou d’un regret. La joie éphémère de la malheureuse élève valait bien sa collection toute entière. Ce ne semblait pas être l’avis, pourtant, de l’intéressée, dont le jeune homme percevait un peu plus à chaque rencontre les lignes acérées de ce caractère bien trempé, savamment dissimulé sous une soumission déguisée à des tourments qu’elle subissait avec un brave stoïcisme, sachant pertinemment ne rien pouvoir faire d’autre sans risquer le renvoi, voire la prison d’Azkaban. Belladone trembla un instant de tous ses os en s’imaginant la frêle et malheureuse élève jetée en haillons au fond de ces cellules glaciales, balayées par le vent, le peu d’illusions qui lui subsistaient dévorées par ces infâmes gardiens assoiffés d’espoir, de rêve et de bonheur déchus. Non, il n’allait certes pas recommencer à appesantir l’atmosphère. Chassant de son esprit la terrifiante image qui s’y était immiscée de force, le jeune homme posa un regard sur l’étudiante qui semblait réfléchir, la carte scintillant au gré du mouvement de sa main blanche.

Et Belladone ouvrit la bouche, mais aucun son n’en sortit, de même qu’aucun geste ne put arrêter la jeune Lavande qui s’était saisie de sa main avec une douceur infinie, comme si elle craignait de casser une effigie en cire de son Professeur qui s’était tenu là, à ses côtés au beau milieu de cette somptueuse clairière, adossé contre ce pin millénaire qui lui insufflait une paix salvatrice. C’est immobile, comme statufié par la foudre, qu’il recueillit l’offrande que Lavande déposait dans le creux de sa paume, tandis que sa bouche restait entrouverte, béant sous la surprise, lui conférant un air proprement stupide, tandis que la jeune fille arguait qu’elle ne voulait pas le priver d’une pièce rare de sa précieuse collection.

- Mais…Je…Commença Belladone, tandis que la jeune élève, comme de coutume, avait décidé de s’en tenir à ce qui lui plaisait de faire, sans laisser au Professeur le loisir de la réplique. Sa main referma d’elle-même les doigts de Belladone sur la carte à l’effigie du petit homme chauve qui lui souriait d’un air quelque peu illuminé. Les joues du jeune Professeur s’empourprèrent brutalement, violemment, lorsqu’enfin son cerveau gelé par la stupeur eut conscience du contact physique, de la douceur tendre de ces doigts qui se refermaient sur les siens, de l’attention délicate de l’étudiante à son égard, de la proximité soudaine que cet échange avait provoqué. Profitant de ce que Lavande réclamait quelques instants d’accalmie solitaire, Belladone bondit sur ses pieds, manquant de trébucher, se rattrapant d’une main au pauvre pin qui accusait le choc de sa maladresse. Les joues toujours aussi écarlates, mal dissimulées derrière sa trop fine barbe, le maladivement timide Professeur se baissa un moment pour récupérer sa veste, la posant au creux de son bras tandis que la jeune fille, qui ne semblait pas gênée, le dévisageait avec un tendre sourire qui acheva de lui empourprer le visage entier, tandis qu’elle lui demandait de considérer cette offrande comme un cadeau pour le remercier de l’avoir accompagnée. S’apercevant soudain de son impolitesse et de son ingratitude, Belladone balbutia :

- Merci…Vous n’étiez pas obligée…Ça, ça me fait très plaisir, vraiment…Mais ne tardez pas trop je vous prie, je ne serai pas tranquille tant que vous ne m’aurez pas rattrapé…En ce qui concerne la retenue, je vous attends donc jeudi soir à 18H30 comme convenu...

Belladone lui offrit un sourire tremblotant, embarrassé, puis lui tourna le dos à regret, la nuit menaçant de déposer son voile de sépulcre sur les sentiers de la Forêt qui deviendraient impraticables, d’ici une petite heure.


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