So Come Rain On My Parade - Albus



 
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So Come Rain On My Parade - Albus

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Gellert Grindelwald
Gellert Grindelwald
Admin
Âge : 59 ans
Sang : Sang-Mêlé
Nationalité : Austro-Hongrois
Patronus : Phénix
Épouvantard : Albus Dumbledore / Le cadavre d'Ariana Dumbledore / Lui-même vieux et affaibli
Reflet du Riséd : Albus Dumbledore
Baguette : Aucune, confisquée par le Ministère
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MessageSujet: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeVen 22 Avr - 17:01



So Come Rain On My Parade

« I THINK WE'RE DOOMED »

Bureau d'Étude des Runes, fin décembre 1942.

Les jours suivants le Bal de Noël eurent une ambiance particulière. En effet, ils avaient laissé Gellert Grindelwald dans l’incompréhension totale, dans une remise en question brutale qu’il ne pensait pas avoir après ce qu’il s’était passé entre Albus et lui. Et le repenti n’aimait pas cela. Il n’aimait pas ne pas comprendre, d’avoir l’impression d’avoir été dupé et que Dumbledore s’était joué de lui. Était-ce là une basse vengeance de ce que l’adolescent stupide et paniqué qu’il avait été lui avait infligé ? Il en doutait sérieusement, ne voyant pas comme un être aussi illustre et bienveillant qu’Albus pouvait se rabaisser à faire cela. Alors que Gellert faisait les cent pas depuis des heures maintenant, peut-être même des dizaines, essayant de percer ce mystère qui lui torturait l’esprit depuis maintenant des jours. Qu’avait-il fait de mal ? Le réveil dans le lit d’Albus fut plus abrupt que lorsqu’il s’était endormi avec son homme dans les bras. Si son sommeil avait été d’une douceur indécente, apaisant toutes ses craintes, chassant tous ses cauchemars, repoussant l’ombre de son cœur, la sortie du lit fut plus brusque, à l’instar d’un Albus qui avait semblé étrangement agité. Sans sommation, Gellert, encore sous l’effet du sommeil si profond qu’il avait eu pour la première fois depuis des décennies, avait juste eu le temps de s’habiller avant de se retrouver sur le palier de la porte du bureau d’Albus.

Pas d’autres mots, pas un regard. Le repenti avait d’abord pensé que le professeur de Métamorphoses étaient en retard pour ses impératifs mais la matinée était loin d’être avancée. Un problème d’emploi du temps n’en était donc pas la raison. Dans la journée, Gellert essaya pourtant de retrouver son homme, celui qui l’avait tant fait vibrer la veille. Celui à qui il s’était ouvert comme jamais, à qui il avait décidé d’être le plus honnête des amants, à confier ses moindres secrets personnels… Mais Dumbledore, malgré les vacances de Noël, s’annonçait farouche et ne souhaitait pas être trouvé. Gellert avait erré dans les couloirs d’un Poudlard étrangement vide, à l’ambiance bien différente de ce qu’il avait connu. Il y avait bien quelques élèves qui restaient. Jedusor, O’Sadhbh, Asbjørnsen, Huntergrunt et une poignée d’autres. Mais la plupart n’était pas les plus bavards. Il faisait trop froid pour sortir dans le parc, et aucun n’avait réellement envie de sortir de leur salle commune pour vagabonder dans les couloirs, contrairement au mage noir qui cherchait désespérément à mettre la main sur Dumbledore qui l’esquivait. Plusieurs fois, il demanda à ses collègues mais personne ne semblait avoir l’illustre professeur de Métamorphoses. Plusieurs fois, Gellert était allé frapper à la porte de son bureau, sans succès.

Une fois, cependant, il était parvenu à apercevoir ses cheveux roux au détour d’un couloir. Gellert avait alors accéléré son pas, sa voix grave raisonnant le nom de l’être aimé sur les pierres du château. En passant le pan du mur, il était certain qu’Albus avait lui aussi accéléré le pas et avait feint de rien avoir entendu. Sur le coup, le repenti s’en retrouva blessé, une colère sourde naissant de cette incompréhension totale. Puis, il s’efforça d’user de sa sagesse, de taire son impulsivité et ses conclusions hâtives. Peut-être que son homme ne l’avait tout simplement pas entendu ? Il savait qu’Albus pouvait s’avérer sourd comme un pot lorsqu’il était profondément perdu dans ses pensées. Alors Gellert l’avait laissé partir. Il avait réessayé le lendemain, continuant son errance, ayant l’impression de revenir lors de ses longues nuits automnales où il cherchait encore son but dans cette nouvelle vie de professeur repenti. Il recroisa Albus une nouvelle fois lorsqu’une nouvelle nuit fut passée. L’aube avait joué si habilement joué dans la rousseur de ses cheveux que Gellert avait cru sentir son cœur chanceler à nouveau. Mais il était parvenu à se saisir délicatement du poignet de son homme. Cependant, avant qu’il n’ait eu le temps d’ouvrir la bouche, Albus l’avait devancé, prétextant d’un ton sec de ne pas avoir le temps, sans un regard, ni un sourire.

Démuni, pris au dépourvu, l’ancien mage noir était resté là, le bras ballant et l’autre suspendu dans le vide. Il le regarda partir, disparaître dans les premiers rayons de l’aube tardive du début d’hiver. Il le regarda s’éloigner et se soustraire à sa vue, restant avec pour seule compagnie ce mensonge. Albus n’était pas aussi débordé qu’il le prétendait. Il y avait quelque chose qui n’allait pas, une envie de ne plus le voir. Gellert savait au fond de lui qu’il était le centre du problème. Peut-être avait-il fait quelque chose qu’il n’aurait pas dû durant la nuit ? Pourtant, il avait certes bu mais pas au point de perdre toute lucidité. Il se souvenait, après tout, de l’entièreté de la soirée, du labyrinthe, de leur danse, puis de leurs baisers fiévreux et de la chaleur de son corps contre le sien. Avait-il décidé de regarder seul les derniers souvenirs qu’il restait dans la Pensine ? Avait-il été profondément déçu en voyant la mort de Sigurd et comment Vinda lui avait tourné autour ? Pourtant, dans le premier cas, Albus savait qu’il n’avait jamais été un enfant de cœur. Quant à la deuxième raison, peut-être avait-il interprété cela tout à fait différemment. Peut-être avait-il vu sa vision et avait cru que ledit « Severus », bourreau de Dumbledore, avait été envoyé à ses ordres.

Abattu, les épaules basses, Gellert s’assit sur le sol, le dos contre le mur. Si la Pensine était vraiment à l’origine de la froideur d’Albus alors il n’y avait plus grand-chose à faire désormais. Si cela avait suffi à balayer toute l’honnêteté dont avait preuve le repenti, si ses propres souvenirs, destinés à montrer tous ses faits et gestes, même les plus sombres, se retournaient contre lui maintenant alors il avait perdu. Albus ne reviendrait pas en tant qu’amant et Grindelwald serait condamné à vivre dans le regret éternel de ce qu’ils auraient pu être, condamné à ressasser cet instant hors du temps où les deux adolescents, devenus hommes, s’étaient enfin retrouvés. Un profond soupir s’échappa de ses poumons tandis que son regard s’éteignit et perdit sa vivacité recouvrée. Ses iris asymétriques parcouraient le parc sous sa fenêtre sans grand spectacle pour les distraire. Seul le vent jouait avec la cime et les feuilles. Ses quinze années d’emprisonnement lui avaient fait perdre la notion du temps. Ainsi, affalé dans son fauteuil prêt du feu, les paupières closes, il essayait de taire les réminiscences d’Azkaban, symptôme qui lui arrivaient trop fréquemment lorsqu’il restait enfermé trop longtemps. Mais cette nuit-là fut plus difficile à supporter. Le visage fermé, le souffle raccourcit, il lui semblait ressentir les mains décharnées des Détraqueurs sur ses épaules, son esprit jouant en boucle un scénario où Albus le haïssait désormais. Soudain, on frappa à sa porte.

— Allez-vous-en.

Cloué à son siège, essayant tant bien que mal de ne pas s’abandonner aux souvenirs d’Azkaban, il rouvrit les yeux et constata que la nuit était tombée. Il ne bougea pas le moindre muscle pourtant, regardant les flammes danser dans l’âtre, seule source de chaleur à portée tandis que son corps lui donnait l’impression de retomber dans les eaux glacées de la forteresse des Détraqueurs.
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Albus Dumbledore
Albus Dumbledore
Âge : 61 ans.
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Nationalité : Anglaise.
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Épouvantard : Le cadavre de sa sœur et, depuis peu, la silhouette de Gellert Grindelwald qui s'éloigne de lui inexorablement, et ce malgré sa main tendue vers lui.
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeSam 23 Avr - 21:32



So Come Rain On My Parade

« Salle d’Etude des Runes »

Décembre 1942

À tous mes loupés, mes ratés, mes vrais soleils
Tous les chemins qui me sont passés à côté


Le lendemain du bal de Noël, Albus Dumbledore avait ouvert un regard affolé sur une aube grisâtre. Terne, laiteuse, elle baignait de sa lueur timide la chambre encore ensommeillée. Le réveil avait eu de ces allures de retour à la réalité après l’idylle d’un rêve trop souvent espéré. Cela avait été comme être plongé dans un seau d’eau glacée, comme si cette brume d’irréalité qui avait posé sa paume douce au dessus de leurs têtes hier s’était évaporée, soudain, à la laideur d’une vérité pétrie de responsabilités, de crimes, de repentir et d’ans qui avaient passé. C’était se souvenir que les chimères de son bel amant arrivé de ses contrées glaciales pour le faire tomber à ses pieds à coups de sourires et de baisers, au coeur pur encore et assoiffé de vindicte et d’espoir n’était plus rien qu’un fantôme façonné par la mélancolie de son âme trop tendre. C’était revoir en l’homme aimant et passionné de la veille le despote aux mains ensanglantées, aux yeux brûlants de fièvre qui avait regardé la mort infligée par ses doigts, à ses lèvres dévorantes avec lesquelles il avait juré sa perte. C’était se rappeler à l’hérésie de l’avoir oublié.

Le plus terrifiant mage noir que ce siècle ait porté, pourtant, dormait près de lui. La lueur frémissante du chétif matin d’hiver chatoyait sur sa chevelure de lune, s’infiltrait dans la blondeur de ses cils, comme en magnifier la beauté par reflet à la laideur de ce triste jour. Sur son visage, une sérénité tranquille qu’aucun mortel, sans doute, ne lui avait jamais vu. Même le grand Gellert Grindelwald n’aurait pu feindre cette accalmie de bienheureux ; cette moue des lèvres qui s’était relâchées, ces paupières délicates qui protégeaient pour quelques heures l’ancien mage noir de l’horreur du monde et des affres de son repentir. Son visage exempt de rides, cette longue main blanche qui gisait sur une des hanches d’Albus, qui se souvenait vaguement s’être enfoui dans ses bras avant de littéralement tomber de sommeil.

Mais le sursaut d’Albus lui avait fait ouvrir un oeil surpris ; et tandis que ce dernier l’exhortait à quitter sa chambre, avant que ne s’éveillent les premiers frémissements du château, Albus s’était habillé en vitesse pour ouvrir une porte sur un Gellert encore lourd de sommeil et dépenaillé. Chassé, littéralement. Personne, lors du déjeuner en comité réduit, n’aurait pu remarquer le trouble d’Albus Dumbledore. Il souriait à tous et la lueur espiègle dans son regard d’azur était toujours aussi vivace lorsqu’il enjoignait un élève intimidé par la proximité à table avec lui à se servir d’un peu plus de gigot, ou qu’il s’enquérait de Minerva, qui n’avait pas veillé si tard et qui répondrait sempiternellement qu’elle allait bien. Gellert lui avait jeté quelques regards, sur lesquels il s’était efforcé de ne pas s’attarder. Il avait échangé avec lui quelques banalités polies, puis s’était éclipsé en s’excusant, prétextant une surcharge de travail pour le Ministère, que personne n’aurait eu l’affront de mettre en doute.

Et puis, le calvaire. Infligé par lui-même et à Gellert, pour des raisons un peu floues que son brillant esprit ne s’expliquait pas. C’était un imbroglio étrange et douloureux de culpabilité et d’effroi, de ce qu’il avait fait et de ce qui aurait pu advenir ; de ce qu’il adviendrait peut-être si, de nouveau, l’alcool, la magie des fêtes de Noël et les sourires de Gellert Grindelwald venaient, de nouveau, lui faire ployer l’échine. C’était la stupéfaction effarée d’avoir cru aux louanges des autres, c’était l’orgueil écorché de l’éminent patriarche qui avait vraiment voulu croire au poids des ans et à sa sagesse exceptionnelle. C’était découvrir, accepter de force qu’il n’en était rien. Que rien n’avait changé depuis Godric’s Hollow, de la tragédie merveilleuse de l’éclaircie tonitruante au creux de la brume tranquille de sa longue vie de solitaire. Il y’avait entre Gellert et lui ce lien insensé, indéfectible, à la puissance folle que rien n’était parvenu à étioler. Et après ce marasme de solitude paisible, d’affections fidèles et mesurées, s’immoler à ce brasier demeuré intact avait quelque chose de proprement effrayant, même pour le téméraire Albus Dumbledore, qui n’avait jamais manqué de courage et avait toujours su quoi faire, sauf avec lui. Avec les affections en général, avec Gellert en particulier, Albus était perdu. Sa brillance et sa clairvoyance, exceptionnelles, acceptaient mal de se heurter à l’incompréhension de sentiments insondables qui lui dévoraient l’âme, cette sagesse et cette raison que tous louaient beaucoup trop, et qui s’effondrait avec la fragilité d’un château de cartes au souffle erratique de Gellert sur ses lèvres, au creux de son cou, pour l’entendre se briser, enfin, contre la digue de leurs amours qui s’unissaient dans des retrouvailles si fusionnels qu’il semblait qu’ils ne s’étaient jamais quittés.

L’effroi, l’incompréhension, l’émotion et l’affection qu’il maîtrisait mal, avaient des répercussions étranges chez Albus. L’angoisse atroce de ce qu’il aurait pu advenir de lui, de l’école, de ses élèves le tourmentait tant qu’il ne parvenait plus à regarder Gellert au fond de l’hétérochromie brûlante de ses yeux. Le si grand et si courageux Albus Dumbledore confinait à la sottise et à la méchanceté. Lâcheté d’avoir fui ses pas, lorsque son nom avait résonné contre les alcôves de pierre. Cruauté de l’avoir si sèchement congédié, lorsque son amant délaissé l’avait intercepté. Albus avait dissimulé le frémissement dont l’avait assailli la trop douce main blanche, avait prétexté un impératif, s’était dégagé de sa tendre emprise en s’y arrachant le coeur au passage, laissant planté là, roidi dans une immobilité douloureuse, son amant de toujours qui lui avait ouvert son âme.

Oh, il pouvait se cacher, fuir tant qu’il voulait, se montrer aussi odieux et prétendument indifférent qu’il le voulait. Plus que son incommensurable lâcheté sentimentale, plus que son handicap émotionnel, l’inaltérable tendresse vouée à son homme avait fini par surmonter ses piteuses failles. Parce qu’il avait beau faire semblant, feindre l’indifférence ; il le voyait partout, le cherchait partout. S’extasiait en silence de son époustouflante beauté, à chaque fois que sa taille grâcile se mouvait ses pas légers, que son regard se posait sur un interlocuteur, que ses longs doigts blancs se saisissaient avec grâce de son verre de vin ou de la montre qu’il avait dans sa poche.

Alors comment auraient-elles pu lui échapper, les cernes violacées qui creusaient un regard qui semblait s’émacier un peu plus encore ? Comment auraient-elles pu passer inaperçues, ses absences à table, lui dont la maigreur l’inquiétait déjà, lui dont Albus s’était donné pour tâche de lui insuffler un rythme régulier de repas, après l’anorexie forcée d’Azkaban ? Il avait suffi d’un éclair. Au détour d’un couloir. Deux regards qui se croisent, et Albus recouvre la raison. Si Gellert est sa raison de vivre, alors la lueur qui vacille dans ses yeux doit sonner la fin de ses stupidités. Dans les cernes qui lui creusaient le regard, au fond de ses prunelles qu’il fallait savoir lire, Albus avait compris. A quel point Gellert avait mal, à quel point il était cruel, à quel il avait été merveilleux ce soir-là, à quel point il n’avait pas mérité cela.

Alors Albus avait pillé les Cuisines, avait fini par dégoter l’impossible -des framboises en plein hiver- s’était laissé fourrer dans les bras par les Elfes ravis plusieurs tranches épaisses de jambon, un énorme morceau de gigot, un morceau de fromage qui aurait pu nourrir une dizaine de personnes, un pain entier et un pot de beurre. Après être repassé à son bureau pour récupérer une bouteille de son meilleur hydromel, Albus était allé d’un pas vif, son courage enfin recouvré, réparé les torts causés à l’homme de sa vie.

La voix cave qui intimait de partir incitait Albus à tout le contraire. La main sur la poignée, il ouvrit doucement la porte du bureau de son homme, déposant son baluchon de victuailles pour un régiment sur une table au hasard. Gellert était là. Avachi dans son fauteuil. Il n’avait allumé aucun feu. A la faible lueur tamisée des candélabres, son visage paraissait plus émacié, plus creusé encore. Les cernes violacées tranchaient comme une injure sur la blancheur diaphane de son visage. Il semblait prostré, tremblant, paraissait ne même pas l’avoir vu. Albus s’approcha, prêt à prendre enfin conscience des dégâts qu’il avait causés. Il ne pouvait pas avoir pâli. C’était impossible. Sa peau avait déjà la blancheur immaculée de la neige. Pourtant, ses vilaines cernes, ses joues qui s'étaient creusées, donnaient cette lugubre impression. Son regard paraissait vide, ailleurs, comme terrorisé. De plus près, ses membres trop frêles tremblaient. Une fine pellicule de sueur froide recouvrait son visage et ses mains qui semblaient figées, crispées sur son bureau. Albus n’hésita pas, devinant l’attaque de panique causée par lui, conséquence dramatique de son incroyablement long passage à l’horreur d’Azkaban. La tiédeur de sa main se posa sur la fraîcheur de la sienne, tandis que ses genoux fléchissaient pour se trouver à hauteur de son regard ;

- Gellert…Je suis là…

Ses doigts se serrèrent sur la main tremblante, son regard cherchait le sien, comme pour l’empêcher de s’abandonner à la panique qui l’assaillait, comme pour le laisser s’arrimer à une force terrestre, protectrice, bien présente, celle de l’homme, en somme, qu’Albus paraissait enfin redevenu.
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeSam 23 Avr - 23:48



So Come Rain On My Parade

« I THINK WE'RE DOOMED »

Bureau d'Étude des Runes, fin décembre 1942.

Le regard dans le vide, se sentant si proche du gouffre et pourtant bien ancré au fond de son fauteuil, Gellert n’avait pas réagi quand la porte s’ouvrit à quelques mètres de lui. En réalité, il ne l’entendit même pas, songeant que son ordre froid et autoritaire aurait suffi à faire fuir le moindre badaud au courage sommaire. Mais l’homme qui était entré, faisant fi de l’avertissement de celui qui avait tremblé l’Europe entière, avait bien plus que de la hardiesse irraisonnée dans son cœur, seulement, Grindelwald ne le savait pas encore. Essayant toujours de calmer les réminiscences d’Azkaban, de se persuader qu’il n’y avait aucun Détraqueur derrière lui et que les cris dans sa tête appartenait au passé, il n’entendit toujours pas le sac rempli de nourriture se poser sur l’une des tables de son bureau. Non, il n’y avait que ce vide qui l’appelait encore et toujours, vil tentateur qui semblait l’appeler inexorablement à lui, à s’abandonner à l’horreur de ses propres crimes et de ses souffrances les plus enfouies. Il avait froid et chaud en même temps, la fièvre de l’angoisse et de la peur primaire de retourner à Azkaban se faisait plus forte. Son visage se crispa, il ferma les yeux, ne voulant plus voir les ombres imaginaires danser sous ses yeux.

Il n’y avait que le néant devant lui, son souffle erratique qui peinait à réguler les légers tremblements de ses membres. Il haïssait ces moments qui lui arrivaient trop souvent à Poudlard car il se sentait et se savait vulnérable. Son corps aussi faible était-il depuis Azkaban, refusait de lui répondre totalement et cela le rendait mauvais et dur envers lui-même. Pourtant, cette colère ne parvenait à contenir la peur, l’effroi des réminiscences de se retrouver seul entre quatre murs de pierres dans l’obscurité. Les cris des autres prisonniers n’existaient pourtant que dans sa tête et sa main qui se refermait fermement sur l’accoudoir de son fauteuil souhaitait les faire disparaître une bonne fois pour toute. Puis, Azkaban disparut, faisant naître une douleur plus pernicieuse, des questions plus viles et plus récentes : pourquoi Albus l’évitait-il ainsi, sans lui parler réellement ? Le détestait-il à présent ? Voulait-il le torturer à nouveau en lui ayant donné un aperçu du bonheur auquel il aurait pu goûter s’il n’avait pas fui lâchement après le sacrifice de la benjamine des Dumbledore ? Cela faisait trop de se l’avouer. Gellert ne pouvait y croire, refusant d’avoir nourri autant d’espoir, d’avoir cru aux beaux discours de son homme sur l’amour et le pardon, tout cela pour ne retrouver que mépris et indifférence à nouveau.

Puis une voix le ramena à la réalité. Une voix qui alluma une chaleureuse lueur d’espoir dans son cœur ainsi qu’une bourrasque froide tout le long de son échine. Il ouvrit les yeux et vit, devant lui, l’homme dont il n’était parvenu à comprendre les desseins. Pendant plusieurs longues secondes, Gellert s’accrocha à l’azur de ses yeux, cherchant à déceler désespérément ce que Dumbledore avait cherché à faire de lui pendant ces quelques jours. Mais il n’y trouva aucune réponse concrète, torturé à l’idée de savoir si sa présence l’apaisait ou ressassait ses pires craintes. Venait-il le narguer ? S’enquérir de l’état de son prisonnier avec qui il avait fait croire qu’il pouvait être quelqu’un de bien ? Gellert sentait à nouveau cette colère grondait en lui et voulut retirer sa main de celle douloureusement bouillante de celle d’Albus. Et pourtant, il n’avait pas lâché ses yeux bleus du regard, s’y engouffrant tel le vide qui l’avait appelé plus tôt. Le repenti ne savait ce que son propre visage dégageait. Peut-être demandait-il grâce ? Demandait-il la paix et de plus voir ce si beau visage qui le hantait autant qu’il le faisait rêver. Ou alors le méprisait-il d’avoir osé rejeter Grindelwald de la sorte. Gellert l’ignorait lui-même, étrangement détaché de son propre cœur.

— Laisse-moi, s’il te plaît…

Finalement, ce fut l’amertume qui prit le dessus. Il n’avait pas compris ce qu’Albus avait attendu de lui, le laissant dans les doutes lors de ces derniers jours. Pourtant, la voix était plaintive, timide, presque implorante. Grindelwald se savait vulnérable et exécrait l’idée de l’être devant Dumbledore. Humilié, ses yeux finirent par se défaire du regard d’Albus et s’effondrer vers ses cuisses. À cet instant, il était vaincu. Sa main toujours sous celle de son amant, il savait que psychologiquement, il était effondré. Il n’avait plus cet éclat insolente d’antan, cette étincelle de vigueur et de volonté qui l’avait porté sur le toit de l’Europe, peu importe les moyens. Albus pouvait l’acculer, lui proférer toute la rancœur qu’il pouvait avoir à son égard, Gellert ne se défendrait pas. Pourtant, il avait toujours cette soif de vaincre au fond de lui, cet orgueil brûlant lui ordonnant de ne pas se laisser faire. Alors, tel un baroud d’honneur, il siffla lentement entre ses dents :

— Je t’aime.

Son regard toujours implorant dans le fond avait pourtant été voilé de rage. Son visage s’était également crispé dans une colère naissante. Cette simple phrase, qu’il avait répété par deux fois lors de cette soirée où leurs âmes s’étaient jumelées à nouveau, était toujours aussi vraie et sincère. Elle avait pour but à ce qu’Albus ne l’oublie pas, que Gellert, malgré sa réputation, ne s’était pas joué de lui. Qu’elle signifiait encore quelque chose et qu’il en comprenait la portée. Mais plus il s’attardait à le regarder dans les yeux, plus la colère prenait le pas, plus les tremblements gagnèrent en amplitude, plus cette sempiternelle impassibilité s’effaçait de son visage. Gellert était, pour l’une des rares fois de sa vie, nerveux et peinait à contrôler ce flot d’émotions qu’il parvenait pourtant si bien à canaliser en temps normal. Mais il n’y avait qu’Albus pour le faire craquer ainsi, pour détruire ses digues. Alors, brusquement, le repenti vociféra :

—  SORS.

Ses yeux hétérochromes trahissant la fureur et le désespoir qui l’animaient, ne parvenant à s’ancrer convenablement sur le regard d’Albus, oscillant entre chaque iris azurée, Gellert légèrement essoufflé par cette éruption nullement contrôlée, resserra sa poigne sur les accoudoirs, sans pour autant retirer sa main de celle de son amant. Il se moquait de savoir si certains l’avaient entendu. Sa voix semblant raisonner encore quelques instants contre les murs silencieux, Grindelwald reprit, le souffle toujours court et erratique :

— Comment oses-tu dire que tu es là alors que tu as passé le plus clair de ton temps à m’éviter ? Je t’ai donné tout ce que tu voulais Albus, tout. Je l’ai même fait de bon cœur !

Pendant un instant, la colère de son visage laissa transparaître la douleur intense qui l’avait habité pendant ces quelques jours, l’incompréhension prédominant dans son regard perdu.

— Tu as fini par te rappeler qui j’étais n’est-ce pas ?

Défiant, il ne lâcha pas ses yeux, même si cela mettait ses nerfs à rude épreuve, prêt à céder à tout moment. Il espérait juste qu’Albus l’écoute et décide de laisser en paix. Cependant, il connaissait la nature bienveillante et altruiste de son amant : le voir dans un état si vulnérable ne le ferait pas partir, bien au contraire. Et il n’y avait rien que Grindelwald puisse faire pour empêcher cela. Pour la première fois depuis bien longtemps, jamais il ne s’était senti aussi faible.
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeLun 25 Avr - 12:10



So Come Rain On My Parade

« Salle d’Etude des Runes »

Décembre 1942
À tous mes bateaux manqués, mes mauvais sommeils
À tous ceux que je n'ai pas été


Les paupières se levèrent sur le regard anéanti de Gellert. Ce fut à cet instant, plus qu’à n’importe quel autre, qu’Albus comprit. Au fond de ces yeux pâlis qui le contemplaient comme un fantôme, dans le marasme de douleur farouche, furieuse, lancinante, qui lui brûlait les rétines, Albus prenait, enfin, toute l’ampleur du pouvoir qu’il avait sur lui. Celui que Gellert avait eu sur lui à l’adolescence, exacerbé par son abandon et sa trop longue absence, avait fini par devenir une seconde nature, à tel point que le sage patriarche n’avait pas compris à quel point il avait la capacité de lui faire du mal. Jamais il n’aurait imaginé son fier et indomptable amour se laissait abattre ainsi, par la seule force de son indifférence. Peut-être son erreur venait-elle de l’avoir cru indestructible. Gellert avait survécu à l’impensable. A présent il semblait brisé. Comme un pantin aux membres frêles, pantelants, dont les fils qu’agitaient sa colère et sa soif de justice avaient été jetés au sol, abandonnés par la main fière dont la poigne avait cessé de lutter.

Puis la voix qui s’élève. Murmure d’outre-tombe, supplication sépulcrale heurtée au tombeau froid de son bureau, embrumé d’âcres embruns de tabac. Albus se raidit, resserre sa poigne sur la main moite d’une sueur froide. Ne brise pas l’insoutenable lien de leurs regards qui s’entrechoquent et se heurtent, confrontent la douleur à la culpabilité, l’incompréhension au chagrin. Ne répond rien. La tiédeur de ses doigts qui s’agrippent à la paume frémissante se passe de mots. Il ne partira pas. Gellert le sait aussi, et il se rend. Et sa reddition fait plus de mal à Albus qu’une colère qu’il s’était préparé à affronter. Ô comme il préférerait l’entendre hurler, éructer sa rage à sa face désappointée, tempêter et se battre, se lever et se dresser contre lui, faire planer sur lui cette impérieuse autorité à laquelle le patriarche savait répliquer.

Là, rien. Rien d’autre que la fierté inflexible et intransigeante d’un regard qui se rend, vaincu, rivé sur ses genoux qu’Albus voit frémir à l’angoisse qui l’étreint de ses longs bras funestes. Puis l’aveu, qui n’a rien de la tendresse alanguie de la dernière fois. C’est sifflé comme un reproche, craché comme une injure, éructé comme s’il s’agissait là d’une malédiction qui avait sonné le glas des tourments qui l’étranglaient. A cette seconde, Albus aurait pu rétorquer qu’il l’aimait. Qu’il n’avait jamais rien fait d’autre que cela, depuis que son regard s’était heurté au sourire insolent de l’adolescent aux cheveux d’or. S’abstient, dans son immense sagesse évaporée ces jours derniers à la faveur d’une passion oubliée, qui affleurait de nouveau à son âme tendre, devant le chagrin de son homme dévasté. L’écho de son aveu, aussi vrai soit-il, prendrait des airs de moquerie ou de provocation.

Le désespoir, aussi abyssal soit-il, n’anéantirait jamais complètement l’âme indomptable qu’il avait tant aimée chez son homme. Un soubresaut de rébellion et de colère anima ses membres et tremblants, recouverts d’une fine pellicule de sueur froide et d’horreur. Sa voix devenue cave hurla l’ordre au visage trop près du sien, se répercuta contre les murs glacés du bureau aux allures sépulcrales. Albus réprima de justesse un sursaut, prenant un soin tout particulier à opposer un visage impassible à sa colère. C’était à lui, ce soir, d’être un roc pour son homme brisé par sa faute. Ses doigts avaient resserré sa prise sur la main diaphane qu’il sentait se crisper, son autre main glissait sur l’épaule mince de son homme, et le sage patriarche avait insufflé à ses gestes et à son regard une union étrange de fermeté et de tendresse, tandis que ses lèvres s’entrouvraient doucement, avec une prudence infinie ;

- Je ne partirai pas.

Comme pour appuyer ses dires, la paume qui s’était refermée sur l’épaule mince accentua son étreinte, et un fauteuil apparut sous ses genoux ployés, sur lequel il prit place doucement. Jamais Albus n’accéderait à une telle requête. Après avoir fait tant de mal pour quelques jours d’indifférence, l’abandonner en pleine crise de terreur, au beau milieu du tombeau de son bureau glacé, était impensable de cruauté. Albus n’obéirait pas, et Gellert plus que quiconque n’ignorait pas à quel point il pouvait être insupportablement têtu et déterminé, parfois. Et puis les reproches tombèrent. Pluie acerbe à laquelle Albus se soumettait, ne courbant pas l’échine, y faisant face avec la ferme tendresse qu’il insufflait à ses gestes et à sa détermination à ne pas le laisser là, à ronger le chagrin qu’il lui avait asséné injustement. Le sage professeur laissa la colère s’abattre, briser les digues d’impassibilité de son trop fier, le laissant déverser le fiel qui avait empoisonné son cœur ces derniers jours. Le flot s’écoula comme le sang d’un cœur meurtri. Aigre, amer, douloureux et accusateur. Albus le laissa s’épancher, sa patience au service du chagrin qui lui causait ces aveux, conscient d’en être l’unique responsable. Un léger soupir, un souffle déterminé ;

- Je ne l’ai jamais oublié. Et jamais cela ne m’a empêché de t’aimer. Mon amour, je n’ai pas d’excuse valable à te donner pour soulager la peine que je t’ai fait…Je peux seulement jurer que là n’était pas mon intention, et que jamais je n’aurais cru pouvoir t’en faire autant.

Albus eut un nouveau soupir, exhalé avec le désespoir de celui qui ne comprend même pas lui-même comment sa sagesse renommée et son exceptionnelle intelligence aient pu à ce point l’abandonner à la panique pour l’avoir fait réagir de manière aussi pathétique. Avec une douceur exagérée, craignant de briser la poupée de verre que semblait être devenue son fort et audacieux Gellert, la main sur son épaule glissa sur sa joue mal rasée, le contact avec la peau fraîche et soyeuse de son homme lui insufflant le courage de continuer ;

- Je crois que j’ai erré dans le noir trop longtemps…À présent que ma lumière m’est revenue, j’ai agi comme un fou aveuglé par cette lueur soudaine. Cette nuit a été une des plus belles de ma longue et terne vie. Te perdre n’est pas une option, je te demande pardon…

Les doigts glissèrent sous son menton, après ce plaidoyer pour sa propre bêtise, pleine d’humilité qu’il n’offrait qu’au seul et unique amour de son existence ;

- Regardes moi…

Albus s’essaya à un mince sourire, comme pour éclairer les ténèbres de la scène. Si c’était lui qui avait déposé là cette nuit d’encre, ce froid de sépulcre sur le brasier trop dévorant de leur passion, alors ce serait lui qui soufflerait sur les braises pour ranimer leur flamme, peu importe le temps que cela prendrait.
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Gellert Grindelwald
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeLun 25 Avr - 13:46



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« I THINK WE'RE DOOMED »

Bureau d'Étude des Runes, fin décembre 1942.

L’indication claire des intentions à court terme de Dumbledore fut claire. Il ne bougerait pas de cette pièce, n’accorderait pas à Grindelwald le plaisir de ne plus voir son visage devant lui. L’ancien mage noir poussa un profond soupir agacé, fusillant de ses yeux sans couleurs l’azur vif de celui de son amant. La main douce sur son épaule fit parcourir une étincelle de rage le long de son échine, ne sachant interpréter réellement les intentions de celui qui semblait s’être joué de lui. Il ne savait si la douceur de ses gestes, de ses mots, de son regard, était sincère ou ne servait qu’à dissimuler une condescendance manipulatrice visant à adoucir le courroux explosif de celui qui avait mis l’Europe à feu et à sang. Comment pouvait-il imaginer arriver tel un prince et soigner de sa main salvatrice les maux qu’il avait causé celui qui lui avait déjà tout avoué. Celui qui lui avait déjà confié que son amour pour lui l’avait rendu fou, l’avait précipité dans les affres de la haine et dont la séparation avait plongé son cœur dans les ténèbres. Albus lui avait croire qu’il était un humain avant un monstre le temps d’un été. En le sortant d’Azkaban, il semblait de lui insuffler à nouveau cette nature en lui. Alors pourquoi s’amusait-il à le provoquer ainsi ?

La mâchoire de Gellert se contracta nerveusement, au bord de l’explosion, lorsqu’il entendit le surnom affectueux dont l’affubla Albus. Il soupira de rage, baissa les yeux pour résister à la trop forte tentation de le repousser méchamment et brusquement loin de lui. Il indiqua n’avoir excuse à lui présenter, aucune raison concrète à cette indifférence injustifiée dont il avait été victime. Gellert ne comprenait vraiment pas où voulait en venir celui qu’on décrivait comme étant le sorcier le plus brillant, le plus puissant depuis Merlin. Le menait-il en bateau ? Le prenait-il vraiment à ce point pour un idiot ? Ce qu’il ajouta ensuite n’arrangea rien à l’état d’esprit de Grindelwald. Comment Albus avait-il pu minimiser l’impact de son éloignement brusque sur lui ? Après tout ce que Gellert lui avait avoué, devant le Miroir du Risèd, à la sortie de la Pensine… Il lui avait, en l’espace de quelques semaines, avoué plus qu’il n’en avait jamais fait avec le reste du monde. Il lui avait avoué qu’il avait perdu de vue la frontière en la haine et l’amour, que c’était lui, sa raison de sa reddition, qu’il s’était infligé Azkaban pour lui. À quoi jouait-il seulement ? De plus en plus agacé, la terreur doucement convertie en rage au sein de ses entrailles, il voulut retirer sa main de celle d’Albus. Mais ce dernier, plus maître de son propre corps que lui actuellement, avait la poigne nécessaire pour que les doigts du mage noir restent à leur place.

— Ne m’appelle pas comme ça si ça ne vaut rien pour toi.

Le regard toujours empli de rage, il soutenait les yeux insupportablement doux d’Albus, par pure provocation. Dans sa colère, Gellert livrait un véritable duel avec les iris azurées de son homme, ne voulant céder pour rien au monde cette menace qui grondait en son cœur. La main chaude de son amant sur sa joue livide et moite ne calma pas non plus les battements brûlants de son cœur. Il se demanda même si le souvenir des Détraqueurs dans son dos n’était finalement pas moins insupportable que cet air faussement triste d’Albus auquel il ne croyait pas un mot. Dumbledore poursuivit sa logorrhée, déblatérant des paroles qui n’avaient pas trop de sens, sur le fait qu’il avait été aveuglé par sa propre lumière. Que cette soirée passée avec lui avait été l’une des plus belles et qu’il ne souhaitait plus le perdre. Tout cela manquait de sens dans les oreilles du repenti qui était à deux doigts d’éructer complètement. Sa main qui avait glissé sur son menton, la demande presque plaintive de le regarder dans les yeux, le mince et timide sourire calmèrent sa rage l’espace d’un instant, retardant légèrement le moment où sa colère finirait par exploser. Bouillant et toujours tremblant, il finit par dire, la mâchoire toujours serrée :

— Épargne-moi tes beaux discours. Et ne me touche pas.

Il se leva brusquement, ses mouvements rendus plus gauches par ses entrailles douloureusement nouées depuis plusieurs minutes, cette sensation de froid glacial au plus profond de ses os et cet insupportable sentiment de plus avoir le contrôle sur rien. Il se rapprocha du bureau, s’empara d’une cigarette et s’y reprit à trois fois avant de parvenir à l’allumer, accentuant d’autant plus l’agacement déjà visible du repenti.

— Comment un esprit tel que le tien, Dumbledore, a pu s’imaginer que je ne réagirai pas à ça ?

Au fur et à mesure de sa phrase, la voix de Gellert, sous l’émotion, avait gagné en volume, trahissant encore une fois l’état agitée de l’ancien mage noir.

— Comment as-tu pu omettre avoir une quelconque influence sur moi ? Alors que la veille, – la veille, Albus – je t’avais dit qu’Azkaban c’était pour toi que j’y suis allé ! Mais que t’est-il passé par le crâne pour que tu minimises à ce point ce que je ressens pour toi !?

Exaspéré, il secoua brièvement la tête, détournant son regard et commençant à faire quelques pas, afin d’essayer d’évacuer cette colère qui montait au fur et à mesure, la fine fumée de sa cigarette, dansant souplement autour de lui malgré ses gestes erratiques. Il soupira profondément.

— Je t’ai vu mourir Albus. Je t’ai vu mourir et cette vision m’a été profondément insupportable. Et c’est exactement pour cela que je sais que jamais je n’aurai pu te vaincre.

Il marqua une pause, regardant ailleurs.

— Je ne sais même pas pourquoi je te dis cela, ce n’est même pas le propos. Le fait est que tu me mens ou alors que tu me caches quelque chose. Mais j’estime qu’après tout ce que je t’ai confié, je pensais avoir au moins ton honnêteté. Ou au moins, un semblant de cohérence dans tes actes et tes paroles.

Il le regarda un instant avant de secouer à nouveau la tête et de se pincer l’arrête du nez.

— Qu’est-ce que j’ai pu être stupide.

Il ferma les yeux, ne supportant pas cet aveu de faiblesse. Ses jambes ayant du mal à le soutenir après la trop longue inactivité dans son fauteuil, la privation égoïste de nourriture, et ce fatras d’émotions qui lui embrouillait corps et âme, il s’appuya contre le mur, regardant le plafond en tentant de réguler son souffle qui se perdait à nouveau pour Albus.

— Sors maintenant, s’il te plaît. Et je ne le répéterai pas.

Son ton était paradoxalement plus calme, bien que cela ne signifiait pas que l’orage était passé. Bien au contraire. Portant sa cigarette entre ses lèvres, il chassa la fumée de ses poumons d’un air pensif, essayant d’oublier sa propre faiblesse, sa propre naïveté. Pourquoi diable était-il si crédule ? Comment avait-il à ce point se faire endormir par les beaux yeux d’Albus. Il repensa alors au bonheur qu’il avait ressenti en s’assoupissant dans les bras de son homme, au fait qu’il avait enfin l’impression d’avoir trouvé sa place. Dégoûté, il sentit sa gorge se nouer et ses yeux commencer à lui piquer légèrement. Il toussa légèrement et brièvement, comme si cela, en plus de chasser la fumée de sa cigarette, le débarrassait également de ces regrets.
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Albus Dumbledore
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeMar 26 Avr - 9:54



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« Salle d’Etude des Runes »

Décembre 1942
Aux malentendus, aux mensonges, à nos silences
À tous ces moments que j'avais cru partager


Sous la tiédeur de ses doigts, Albus avait senti la joue froide de Gellert tressaillir d’une rage contenue. Il avait senti la main frémissante chercher à s’échapper ; l’avait retenue de sa large paume maîtresse d’elle-même, contre laquelle les frêles membres de son homme en pleine crise ne pouvaient rien. Aussi Gellert usa-il d’une autre de ses armes. Pas moins puissante que sa baguette ou que ses poings, mais plus cruelle, plus acérée, sa langue s’aiguisa à écorcher l’âme solaire d’Albus, en connaissant les recoins de tendresse, de mélancolie et de fragilité dont il avait été le premier et le seul à user. Premier coup au cœur ; la poigne d’Albus ne fléchissait pas. Son regard non plus, supportant la hargne qui foudroyait sa tendresse. Si les plans de Gellert se résumaient à faire partir son amant en lui éructant un flot de verbiage venimeux, ses utopiques desseins resteraient vains. Albus ne partirait pas. Le despote craint de tous pouvait tempêter tout son saoul. Dumbledore n’était pas les autres, et il n’avait pas peur de lui.

Deuxième coup au cœur. Gellert ne le croit pas. Lui interdit sa peau de soie et son étreinte. S’en arrache abruptement. Le rejette. Albus grimace lorsque l’odeur âcre du tabac grillé vient embrumer la froideur glaciale de la pièce. Des cendres du Gellert abattu et brisé s’élevait avec sa voix les prémisses du Gellert furieux. Pour Albus, malgré l’orage qui restait à passer, le pire était derrière lui. Il avait toujours connu et aimé son homme tempétueux et aux ires destructrices et passagères. Après la pluie le beau temps. Le sage patriarche se leva lui aussi, prêt à laisser son amant gronder sa rage à sa raideur qu’il tâchait de rendre impassible. Ecorchure à son intelligence. Ou à son orgueil. Attaque classique, prévisible. Que le grand Albus Dumbledore se permette de se conduire avec autant de stupidité et d’incohérence n’avait guère de chance de ne pas être relevé. Albus Dumbledore, donc, ne dit rien. Et le jet d’eau glacé du reproche suivant vint lui geler les entrailles ; et l’image de son âme sœur, amas d’os et de chair flétrie informe agonisant au beau milieu de sa cellule de désespoir, revint se coller à son regard d’azur avec la violente netteté d’une photographie. Savoir que l’horreur sans nom que s’était infligée son amant avait été pour lui avait sans aucun doute contribué à l’élan de panique qui l’avait fait réagir si sottement. Après tant de temps à admettre que son unique amour s’était joué de lui, y avoir trouvé une forme d’acceptation tranquille, pétrie d’une mélancolie doucereuse, devoir assimiler l’immensité du sacrifice manquait de lui faire perdre pied.

Et puis l’aveu, enfin. De ce qu’il n’était jamais parvenu à comprendre. De ce qu’il ne comprenait toujours pas. Il y’avait toujours eu chez le trop scolaire Albus une forme de condescendance amusée pour l’art nébuleux qu’était la Divination. Aujourd’hui, à présent que Gellert lui avouait s’être jeté de lui-même aux griffes des Détraqueurs d’Azkaban pour la vision prophétique de son trépas, il n’avait plus envie de rire. Pourquoi une telle folie ? Pourquoi Gellert n’avait jamais-t-il pu supporter et accepter les lois de la nature ? Pourquoi son âme trop éprise de liberté cherchait toujours à s’opposer à l’inéluctable ? Si Albus devait mourir, et bien soit. Il y’avait de ces choses inébranlables que sa sagesse ne tentait pas de contrer. D’un geste qui lui était familier lorsqu’il voulait rester maître de lui-même, Albus remonta ses lunettes sur son nez, accusant le choc de la nouvelle.

Et puis revint le doute, et avec lui une colère qui affleurait à l’esprit blessé d’Albus. Gellert Grindelwald, son premier et unique bourreau, qui avait ravi avec sa fuite sa raison de vivre, s’était targué de vouloir sa mort à hauts cris, avait-il le droit de douter de ses sentiments à lui ? Indéniablement non. Il en avait été déchû en l’abandonnant devant le cadavre encore chaud de sa sœur, en lui faisant la promesse de lui arracher l’âme qui lui appartenait. D’un pas ferme, Albus s’était approché, le visage impassible, malgré les volutes âcres de tabac dont l’odeur le révulsait. Gellert perdait pied. Il fermait les yeux et ses jambes flagellaient, avachi contre un des murs tandis qu’il semblait se repentir d’avoir ouvert son cœur à Albus. Faisant fi de l’ordre blessant de tout à l’heure, la baguette extirpée de sa poche, la main tiède s’approcha pour le saisir par le coude, tandis qu’un fauteuil apparaissait presque sous ses jambes ;

- Assieds-toi.

L’ordre était tranquille et ferme, comme à un enfant à qui on veut l’on faire preuve d’une autorité paternelle. Connaissant son insupportable fierté, Albus en fit apparaître un second, et prit place en face de lui, malgré l’ordre qui lui intimait de sortir, une seconde fois, comme s’il s’était agi d’un de ses généraux asservis qui tremblaient au moindre regard noir d son homme. Une sursaut d’impatience vint faire tressaillir les lèvres sous la barbe de cuivre. Un léger soupir, les mains croisées devant lui ;

- A présent cela suffit, Gellert. Je ne te répéterai pas que j’ai l’intention de rester, et que tu ne parles pas à un de tes généraux asservis au moindre de tes désirs. Je veux bien entendre que je t’ai causé une peine inutile, et j’en suis vraiment et sincèrement désolé. Cependant, tu n’as aucun droit de douter de mes sentiments pour toi. Je n’ai jamais aimé que toi, et je t’interdis de prétendre le contraire. Puisque tu cherches à me le faire dire, j’ai pris peur. J’ai baissé la garde et passé les nuits dans les bras de celui qui m’a déjà manipulé une fois par le passé –tu me l’as avoué ce soir-là-. Que serait-il advenu de mes élèves, de Poudlard et du monde, si tu t’étais joué de moi ? Tu n’ignores pas que je suis le seul à pouvoir t’arrêter. Penses-tu vraiment que j’aurais pris de tels risques pour quelqu’un que je n’aimais pas ?

Croyait-il vraiment qu’il se donnait ainsi à quelqu’un, par vengeance, par mesquinerie ou par jeu ? Mais la pudeur d’Albus se heurta à ce reproche, qu’il n’osa pas formuler. Il eut un soupir, se radoucissant devant la fragilité extatique de la fierté de son homme, avachi sur sa chaise ;

- Quant à ta vision je…Je ne sais que dire. Je suis très touché Gellert, ne te méprends pas. Mais nous n’avons jamais eu la même vision des choses, quant à la fatalité de la mort. Un tel sacrifice contre ma vie…Gellert, je t’aurais empêché de faire ça…Et si dans ta vision il s’agissait d’un meurtre, qui d’autre que toi aurait été en capacité de me l’infliger ? C’est pour cela que tu t’es rendu ? Tu avais peur de parvenir à me tuer ?

Un nouveau soupir. L’apparente fragilité de Gellert faisait retomber sa colère et son impatience comme un soufflet. L’éventualité de sa propre mort l’indifférait. Bien plus que le sacrifice auquel Gellert s’était immolé, et dont il payait encore le prix. Avec une douceur recouvrée, Albus fit léviter la bouteille de son excellent hydromel, qui déversa son liquide ambré au creux de deux verres en cristal, dont il en glissa un délicatement au creux de la paume fébrile de son homme ;

- Bois, cela te fera du bien. Depuis combien de temps n’as-tu rien mangé ?

Albus fronça les sourcils, dans un frémissement qui mélangeait autorité, désapprobation et inquiétude. Un instant, ses doigts voulurent glisser sur la main blanche, mais il se retint. Gellert viendrait à lui, si et quand il le voudrait.
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeMar 26 Avr - 11:03



So Come Rain On My Parade

« I THINK WE'RE DOOMED »

Bureau d'Étude des Runes, fin décembre 1942.

Toujours appuyé contre le mur, proche de la fenêtre, la pâleur des rayons de lunaire ne pouvant mettre plus en avant le teint blafard et presque maladif du mage noir. La fumée dansait lentement autour de lui, ses paupières closes. Au fond de lui, il savait pertinemment que son ordre était vain. Albus partageait avec lui cette particularité de n’écouter personne. Tous deux plus têtus l’un que l’autre, il entendit pourtant son amant se lever. Cependant, les pas, au lieu de s’éloigner, se rapprochèrent de lui. Il sentit alors la main d’Albus sur son coude, ce qui ouvrir immédiatement les yeux de Grindelwald qui s’avérèrent menaçants et en colère. Une nouvelle fois, Dumbledore n’avait pas écouté les consignes de son amant. Pourtant, ce dernier n’eut le cœur à le chasser et le laissa lui ordonner de s’asseoir. Son regard se posa brièvement sur la baguette sortie d’Albus et, même si elle n’avait pas pour vocation de le menacer, il s’assit docilement dans le fauteuil qui était venu à lui. Ou plutôt, il se laissa tomber, entre faiblesse et nonchalance, ne quittant son homme du regard malgré sa tête qui lui tournait légèrement. Finalement, pris d’un vertige malgré le fait qu’il soit assis, il ferma à nouveau les yeux et cala sa tête sur le dossier.

Il laissa parler Albus, sans l’interrompre. Au bout de quelques secondes, il finit par le regarder à nouveau, supportant son allure presque condescendante par une nonchalance insolence dont il avait le secret. Si Dumbledore avait les mains croisées, Gellert lui, avait ses jambes, le menton légèrement relevé avec arrogance. Pourtant il l’écouta attentivement. Il s’excusa à nouveau, avoua ses sentiments un nouvelle fois mais ce n’était pas ce que le repenti voulait entendre. Il lui avait déjà dit tout ceci. Pourtant, il avait fini par lui avouer qu’il avait pris peur, lui décrivit les raisons de cette peur. L’arrogance de Gellert disparut et son visage se fit plus grave, plus fermé. Continuant de le regarder dans les yeux, il le laissa poursuivre. Bien évidemment, le mage noir se sentit blessé qu’Albus ait ainsi pu douter de lui, surtout après s’être infligé quinze années d’Azkaban, de souffrances éternelles. Non ce n’était pas un plan mesquin et tordu pour poignarder au cœur après tant d’années. En se jetant en pâture aux Détraqueurs, il savait pertinemment qu’il n’y avait pas beaucoup de chances pour qu’il en sorte. Quand Albus eut fini son monologue concernant sa crainte d’être dupé, Gellert continua de le regarder, sans prononcer le moindre mot, les yeux toujours durs, mais la fureur s’estompant.

Il aborda alors le sujet de la vision, lui sous-entendant que cela avait été disproportionné et qu’il l’aurait empêché de s’infliger une telle chose. Toujours silencieux, Gellert se rendit compte qu’Albus minimisait le monstre qu’il avait été. L’esprit brillant de Dumbledore, sa sagesse infinie, semblait parfois être étiolée par son cœur trop bon, son empathie sans limite. Il n’y avait aucune pitié à avoir pour un homme tel que lui. Azkaban était méritée. La fin de son règne de terreur était méritée. Même si Albus semblait indifférent à sa propre mort, il lui posa beaucoup de questions visant à satisfaire sa insatiable curiosité. Il comprenait ses interrogations mais pourtant, il se trompait. S’il y avait bien une personne dans ce monde qui ne pouvait pas tuer Dumbledore, c’était bien, ironiquement et paradoxalement, Grindelwald. Comme il venait de lui dire, jamais il ne serait parvenu à le vaincre. Jamais il n’aurait le cran de porter le dernier coup et aurait abandonné au moment de conclure. Albus lui mit alors un verre d’hydromel dans la main et lui demanda depuis combien de temps il n’avait pas mangé. Avec indifférence, Gellert hocha nonchalamment les épaules, ne souhaitant pas répondre, n’ayant même pas la réponse. C’était tout juste s’il savait quel jour ils étaient.

— Je ne sais pas si j’étais impliqué. Mais dans ma vision, avant de mourir, tu demandais grâce à un certain Severus. Mais je n’ai pas vu son visage. C’était à la Tour d’Astronomie. Il t’a lancé un Sortilège de Mort et tu es… tombé en arrière.

Gellert baissa le regard et porta fébrilement sa cigarette à ses lèvres, ignorant pour le moment le verre d’hydromel qu’il avait dans la main. Il regarda le sol, les yeux vides, revoyant cet éclair vert éblouissant et le corps de son homme, certes âgé, tomber dans le vide. La réminiscence de cette vision lui fit pousser un profond soupir, maudissant intérieurement cet homme qui aurait le malheur de s’appeler Severus. Finalement, il prit une gorgée d’hydromel, le regard toujours dans le vide, réfléchissant à la confession de la réelle raison de l’indifférence fatale et cruelle d’Albus par rapport à lui ces derniers jours.

— Tu sais, j’ai connu un garçon un jour, qui avait eu peur de ses sentiments également. Il en a eu si peur qu’il a blessé celui qu’il aimait, s’écorchant le cœur et l’âme et en même temps. Il pensait que c’était ce qu’il y avait de plus raisonnable à faire. Il avait voulu se préserver pour éviter de souffrir à nouveau, ce qui fut vain et a causé des dégâts bien plus irrémédiables qu’il ne l’aurait jamais imaginé.

Il marqua une pause, le regard toujours dans le vague.

— Au final, il a choisi la peur plutôt que l’amour, il a choisi la fuite plutôt que la discussion, le repli plutôt que l’ouverture.

Il reporta son regard sur Albus, un regard vidé de sa colère et de sa rage dont il en avait été chargé quelques instants auparavant. Il n’y avait plus qu’une légère mélancolie et le contrecoup de l’état nerveux dans lequel il s’était trouvé. Tous les reproches dans ses yeux hétérochromes s’étaient envolés. Il eut même un léger sourire.

— Je ne te dis pas ça pour t’accabler ou te reprocher quoique ce soit. Je comprends mieux pourquoi. Tu ne me fais pas entièrement confiance et c’est normal. Un peu vexant mais normal. C’est même sensé.

Son sourire s’élargit un peu plus et il se risqua à poser sa main sur celle de son amant qu’il n’espérait ne pas avoir heurté l’orgueil.

— Je ne t’en veux pas, Albus. Je veux juste pas que tu refasses mes propres erreurs. Sois franc, s’il te plaît… Si quelque chose ne va pas, dis-le moi. Si tu ne veux pas de moi non plus parce que c’est trop dangereux pour ton école, dis-le moi également et je comprendrai.

Il eut un léger soupir.

— Malgré tout l’amour que j’ai pour toi, je préfère que tu sois rassuré et loin de moi que constamment en train de t’inquiéter pour ton école après avoir passé une nuit avec moi. J’aimerais que tu me fasses confiance, je t’assure que jamais je n’irai à l’encontre de Poudlard car c’est la première fois je pense que je me sens à ma place, à tes côtés. C’est là où j’aurai dû toujours être et pour rien au monde je m’y soustrairai. Pour rien au monde, j’irai m’y déloger. Tu pourrais devenir un mage noir plus terrible que moi encore que je serai toujours à ton bras. Mais je comprends qu’il te faut du temps, mon amour. Désolé d’avoir été douté de toi, cela n’arrivera plus.

Il eut un sourire doux et déposa un tendre baiser sur les doigts chauds de son homme. Gellert était trop fatigué, trop affaibli émotionnellement pour avoir encore l’orgueil de jouer les durs. Son mal de crâne avait voulu mettre fin aux cris, à l’ambiance même de dispute. Peut-être que sa plaidoirie ne ferait qu’accentuer l’agacement de son homme, mais tant pis. Il avait le cœur léger à présent et prit une nouvelle gorgée dans son verre.

— Cet hydromel est vraiment bon. Tu n’étais pas obligé de sortir une bouteille d’une telle qualité pour moi.

Le regard un peu vaporeux, il lui sourit toujours pourtant, l’intégralité de son corps avachi dans son fauteuil.
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Albus Dumbledore
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeMar 26 Avr - 18:25



So Come Rain On My Parade

« Salle d’Etude des Runes »

Décembre 1942

Aux phrases qu'on dit trop vite et sans qu'on les pense
À celles que je n'ai pas osées
À nos actes manqués



A l’aveu de faiblesse d’Albus, quelque chose sembla étioler la flamme mugissante de rage qui étincelait au fond de ses yeux. Comme si la peur de son homme, aussi douloureuse soit-elle à accepter, avait été la révélation nécessaire à l’apaisement de ses tourments et de sa colère. Parce qu’elle était légitime, parce qu’il ne pouvait la lui reprocher, sans doute. Mais il l’écouta religieusement, malgré l’autorité et l’arrogance, sa fragilité en acceptant la soumission, avachi qu’il était au fond de son fauteuil, son corps éreinté par la crise et la faim, haussant négligemment les épaules à la question de son repas, comme si cette futilité l’indifférait. Enfin, il évoqua un nom qui lui était inconnu. Une chute du haut de la Tour d’Astronomie. Etrangement, c’est un sentiment de réconfort qui prédomina chez Albus, à savoir qu’il mourrait à Poudlard. La suite l’intriguait plus. Il ne lui ressemblait pas de supplier pour sa vie. Peut-être y tiendrait-il plus en vieillissant ;


- Demander grâce, vraiment ? Hum…Intéressant…

D’un geste distrait, Albus remonta une nouvelle fois ses lunettes en demi-lune sur son nez aquilin. Il regarda avec un soulagement certain Gellert ne pas dédaigner l’hydromel, poussant un long soupir épuisé. Un sourire mélancolique étira ses lèvres, lorsqu’il lui dépeignit le portrait de l’adolescent dont il était tombé amoureux. Il avait raison, pourtant. Gellert avait développé une forme de sagesse qui lui allait bien. Le sourire d’Albus s’étira un peu plus, s’entrechoquant à celui, pâle et usé ce soir, de l’homme de sa vie. Lorsque sa main se posa sur la sienne, une étoile étincela au fond de son regard d’azur, et ses doigts accentuèrent l’étreinte avec tendresse ;

- Ecoutes, mon amour…J’ai confiance en toi, et je n’ai pas peur de toi. Simplement, cela aurait pu arriver, si tu l’avais voulu, et si tu n’avais pas été sincère. C’est cette éventualité qui m’a effrayé, rien de plus. Mais tu as raison, mon bel homme devenu si sage, la peur est mauvaise conseillère, et la fuite néfaste. Je ne recommencerai pas.

Un sourire taquin se dessina sur la barbe d’Albus, s’étiola à l’émotion que lui procurait l’aveu de tout l’amour de son homme, dont la fébrilité semblait aider à l’épanchement auquel il avait tant de mal, d’ordinaire. Albus lui abandonna avec délices ses doigts qu’il porta à ses lèvres, avec déjà l’impression d’être assoiffé d’elles, si vite. Avec une douceur émue, son pouce glissa sur le plat de la main qu'il aurait jurée plus froide, et plus fine que d'ordinaire ;

- Merci, mais tu n'as pas à t'excuser. Tu n'avais pas mérité d'être traité ainsi. Tu as été merveilleux ce soir-là, et je te suis très reconnaissant des confidences que tu m'as offertes. Je te crois, et je crois en toi, auquel cas je ne t'aurais jamais sauvé. Et puis, après la cruauté de ces quelques jours que je nous ai imposés, je ne compte plus me passer de toi pour rien au monde...Tu m'as manqué...

Albus lui offrit un tendre sourire, le laissant s'abreuver d'une nouvelle gorgée de l'alcool délicieusement sucré au miel qui gisait dans sa coupe en cristal. Son pouce continuait à réchauffer la fraîcheur de sa main, traçant d'invisibles sillons sur sa peau diaphane ;

- Ah oui ? Et quelle meilleure compagnie que la tienne pour l'inaugurer ? Cesse de dire des bêtises. En revanche, tu vas devoir l'accompagner de quelque chose à manger. Et c'est non négociable. Je n'ai pas dîné non plus, pour le plaisir de partager ce frugal repas avec toi.

Un éclat de lueur amusée recouvrée dans le regard, la baguette négligemment reposée au creux de la main gauche, une des tables lévita entre eux deux, et le petit baluchon s'ouvrit, servant de nappe qui vint s'étaler grâcieusement, et les victuailles s'installer d'elle-même, le gigot et les tranches de jambon sur une assiette, la grosse miche de pain, le fromage et le pot de beurre à côté. Le couteau en lévitation vint couper une épaisse tranche de pain, généreusement beurrée, sur laquelle vint s'ajouter une généreuse tranche de jambon fumé. Albus fourra sans plus de cérémonies la tartine entre les mains de son homme, l'éclat de malice restitué à son regard pétillant ;

- J'ai une surprise pour le dessert...En attendant, bon appétit mon amour...

Albus s'appliqua distraitement à se confectionner une autre tartine, qu'il grignota d'un air absent, tout à la contemplation de son homme retrouvé. Une lampée d'hydromel exquis l'aida à avaler sa première bouchée et, un instant, ne pouvant plus s'en empêcher, ses doigts virent caresser la main libre de Gellert qui gisait sur la table ;

- Lorsque nous aurons terminé, m'autoriseras-tu à te prendre dans mes bras ? Je crains de ne plus pouvoir m'en passer désormais...

Cette fois-ci Albus eut un sourire plus franc. Entre eux, le temps de l'orgueil et d'une pudeur effarouchée était vain et terminé. Ils s'aimaient trop, et avaient perdu trop de temps, pour en consacrer à de la fierté ridicule. Tout à fait tranquillement cette fois-ci, mâchonnant une nouvelle bouchée de sa tartine, Albus relança le sujet de conversation qu'il aurait payé très cher, il y'a de cela des années ;

- Dis-moi mon amour, avais-je cette apparence dans ta vision ? Je veux dire par là qu'aucun élève que j'ai connu ne répondait à ce nom. Aussi, il est très probable qu'il soit très jeune, ou même pas encore né, d'autant qu'il n'existe pas encore de sorcier connu en taille de m'affronter, et encore moins de me faire demander grâce.  J'étais donc plus vieux, n'est-ce pas ?

Un instant, Albus posa sa tranche de pain, pour ne pas lâcher la main de Gellert, et se saisit de son verre, en buvant une plus grande lampée. Entre ces deux titans, le paradoxe d'orages furibonds et brefs s'effaçaient bien trop vite sous l'hallucinante éclaircie de leur tendre passion qui confinait à la folie. Ils s'étaient retrouvés.

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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeMar 26 Avr - 21:21



So Come Rain On My Parade

« I THINK WE'RE DOOMED »

Bureau d'Étude des Runes, fin décembre 1942.

Assis dans son fauteuil, Gellert remarqua qu’Albus avait l’air intrigué par la confidence qu’il lui avait faite sur sa mort. Pour lui aussi, cela lui semblait étrange que le grand Dumbledore demande grâce à quelqu’un. Lui qui était un sorcier si puissant, que tout le monde vénérait ou craignait de par sa force magique et son intelligence. Et de par son incommensurable bienveillance, beaucoup voulait le voir disparaître. Il était vrai que cette demande insolite d’épargner sa vie paraissait improbable. Mais il n’y avait pourtant pas de doute à avoir. Les mots, dans la nuit de de Poudlard, étaient parfaitement audibles et compréhensibles. Puis Albus revint sur le conversation d’origine, lui avouant avoir confiance en lui, qu’il avait simplement été effrayé de la possibilité que Gellert ait pu lui faire le moindre mal. Le repenti ne comprit pas vraiment pourquoi son homme avait paniqué après « que le mal soit fait ». Certes, durant la soirée, ils avaient tous les deux bien bu. Ils étaient désinhibés, plus ouverts l’un à l’autre. Si Gellert avait vraiment voulu lui nuire, il l’aurait certainement fait durant la nuit. De plus, tous deux n’avaient pas été ivres morts, encore lucides pour être parfaitement maîtres de leurs propres désirs.

Il lui promit alors de ne plus recommencer et pour ça, Gellert eut des doutes. Cependant, il eut tout de même un sourire doux et aimant. Quoi qu’Albus lui fasse, il l’aimerait toujours, lui pardonnerait toujours autant que lui lui a pardonné ses crimes. Il regarda alors avec un sourire le pouce de son homme caresser doucement le dos de sa main, si content de retrouver cette chaleur à portée. Et pourtant, qu’il était si loin, dans ce fauteuil loin, trop loin de lui. Sans décrocher ses yeux des doigts de son homme, il l’écouta s’excuser encore, reconnaissant sa faute et avouant avoir agi avec une cruauté involontaire. Le sourire de Gellert se fit plus doux encore, entre la mélancolie, la fatigue et la tendresse, écoutant soigneusement son homme lui dire qu’il lui avait manqué. Les lèvres fines de l’ancien mage s’étendirent plus franchement, trahissant la chaleur dans laquelle baignait son cœur après ces quelques mots. Une modestie timide ressortait presque sur le visage épuisé du renégat, vraiment touché par le fait d’avoir pu manquer à l’homme de sa vie. Après tout, lui aussi l’avait manqué. Il avait mal encaissé son absence et apparemment, cela se voyait de façon assez flagrante. Après quarante ans loin de l’autre, il semblerait qu’aucun des deux ne puissent passer plus de trois jours loin de l’autre.

— Toi aussi tu m’as manqué, Albus… Et je mérite toute la cruauté du monde donc ne t’en fais pas pour cela.

Il sourit doucement tandis que son amant insista pour le faire manger, prétextant ne pas avoir dîner lui non plus. Faussement exaspéré, il leva les yeux au ciel et regarda le « frugal » festin qu’Albus avait rapporté des cuisines. Tandis qu’il posa une tartine de beurre et de jambon fumé sans attendre la permission du repenti, l’illustre professeur lui vendit un dessert qui attisa sa curiosité. Et que cette dernière était puissante chez Grindelwald. Comme pour lui faire plaisir, mordant à l’hameçon, il prit une bouchée de sa tartine, regardant Albus dans les yeux avec un sourire bienheureux. Depuis qu’il était là, que son aura avait embaumé la pièce, Gellert n’avait plus de crainte, ni de peine, ni de colère. Il avait toujours la nuque humide et les jambes faibles mais ses terreurs, ses démons avaient disparu. Albus lui demanda alors de lui octroyer le droit de pouvoir le serrer contre lui, ce à quoi Gellert ne répondit que par un sourire taquin, retrouvant peu à peu une lueur malicieuse dans ses iris qui faisaient miroir à celle de son homme. Tenant toujours sa main pour ne pas perdre un instant le contact avec sa peau, l’homme de sa vie prit une gorgée d’hydromel avant de repartir sur la conversation de la vision, visiblement très intrigué par ce mystère.

Doucement, Gellert se leva alors, laissant sa main hors de l’emprise de celle de son homme et cala sa tartine entre ses dents. Il s’approcha alors de son amant avec un sourire et un regard doux bien que taquin et s’assit sur ses cuisses avec douceur. Il retira une petite miette de la barbe du seul amour de sa vie et prit une bouchée de sa tartine qu’il reprit ensuite dans sa main. Le contemplant quelques instants, il blottit sa nuque encore légèrement humide dans son cou, s’imprégnant de sa douce chaleur. Il soupira doucement, repensant à cette vision dont Albus voulait parler. Comment lui en vouloir après tout ? Pourtant, ce n’était pas un souvenir agréable pour le repenti. Cela ne faisait aucun doute qu’il s’agissait désormais de sa plus grande peur, cet éclat vert qui faisait disparaître l’éclat malicieux des iris azurées de son homme. Pourtant, il lui devait des réponses. Même s’il feignait l’indifférence face à sa propre mort, Albus demeurait curieux, voire même soucieux sur comment sa vie pourrait prendre fin. Pendant quelques secondes, Gellert chercha comment tourner sa réponse. Si lui avouer l’âge potentiel qu’il avait n’allait pas accentuer le détachement évident du concerné. Entre deux bouchées de tartine, il finit par dire, toujours lové contre son homme :

— Tu étais effectivement plus vieux. Bien plus vieux. Tes cheveux et ta barbe étaient longs et argentés. Tu portais une robe de sorcier. En vrai, tu avais beaucoup changé mais tes yeux, je les aurai reconnu entre tous. Tu n’avais pas l’air spécialement paniqué ou défait. Tu étais calme, serein, presque résigné… Je…

Il marqua une pause, l’éclair vert hantant encore ses iris.

— Je t’avais laissé la vision dans la Pensine.

Ses yeux se voilèrent d’une peine certaine à revoir le corps sans vie de son homme basculer dans le vide. Après un profond soupir, il reprit :

— La vision est très courte. Il y avait beaucoup de silhouettes autour de toi mais je n’ai pu en distinguer aucune. Quelqu’un s’est rajouté, tu as dit « Severus »… Puis il y a eu quelques secondes de silence où tu semblais regarder ledit Severus. Tu as ajouté « je vous en supplie » et…

Sa voix se brisa, ne parvenant à continuer son récit.

— Je suis désolé, j’ai vu trop de personnes auxquelles je tenais mourir sous mes yeux. Tu as été celui de trop.

Il remarqua alors qu’il avait pris la main de son homme dans la sienne et jouait nerveusement avec ses doigts. Pourtant il reprit :

— À Azkaban, j’ai eu une vision du même genre. Ce n’était pas toi mais moi qui me faisait tuer. J’étais tout aussi vieux, peut-être même plus encore. Édenté, squelettique, au fond d’une cellule de prison qui n’était pas Azkaban – je l’ai vue pendant quinze ans, crois-moi je sais à quoi elle ressemblait. Déjà, là, j’avais un lit… Un homme cherchait quelque chose, un dénommé « Voldemort ». J’ai refusé de lui dire et il m’a tué. Mes souvenirs sont plus flous, j’ai oublié ce qu’il recherchait. C’est plus un songe qu’une vision mais j’étais à Azkaban depuis un moment, peut-être que c’était plus une hallucination qu’autre chose, je ne sais pas…

Il se replaça confortablement contre Albus afin de mieux voir son visage et sourit.

— En tout cas sache que le premier Severus qui a le malheur de croiser notre chemin, je m’occuperai de lui.

Tendrement, il déposa un baiser sur sa joue avant de susurrer à son oreille :

— Tu es à moi, Dumbledore. Personne ne t’arrachera à moi, pas même toi.

Avec un sourire, il plaça une main sur son cœur qu’il sentit battre sous paume. Un sourire espiègle se dessina sur ses lèvres tandis qu’il le regardait dans les yeux avec insolence et tendresse. Puis il se replaça confortablement et soupira, à l’aise.

— Je reprendrai bien une tartine, s’il te plaît.

Il reprit la main de son homme dans la sienne, posa sa tête contre la joue de son homme, l’appétit commençant à revenir à se manifester de manière sonore dans les entrailles à présent détendus de Grindelwald.
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MessageSujet: Re: So Come Rain On My Parade - Albus  So Come Rain On My Parade - Albus Icon_minitimeLun 2 Mai - 15:33



So Come Rain On My Parade

« Salle d’Etude des Runes »

Décembre 1942

Aux années perdues à tenter de ressembler
A tous les murs que je n’aurais pas su briser


- Ne dis pas cela…

Peu importait ce que la plèbe croyait qu’il mérite. Albus ne lui avait jamais voulu aucun mal. Il pesait déjà suffisamment à sa conscience de lui en avoir infligé ces jours derniers. Un sourire plus lumineux étira sa barbe aux reflets mordorés, à mesure que la colère de Gellert paraissait s’étioler sous la sincérité de son repentir. La naissance d’un rire clair vint même, timide, s’égrener au creux de la grisaille qui plombait l’atmosphère, éclaircie chétive, doucereuse, à la brièveté violente de leurs querelles qu’il détestait. La mine exaspérée de son fier homme, devant la quantité gargantuesque de victuailles que l’inquiétude entêtée d’Albus avait disposé, dans un dîner à la hâte qui semblait plus un ordre qu’une invitation. Car en effet, l’énorme tranche de pain glissée entre les doigts diaphanes n’aurait admis aucun refus. Mû par la faim, par la fatigue, et par le sentiment que son amant ne lâcherait sans doute rien, Gellert s’en saisit, mordit dedans avec un appétit qui sembla lui faire recouvrir le sourire et une certaine forme de sérénité.

Une lueur de malice, une insolence taquine au fond des lèvres. Gellert était revenu d’entre le marasme d’une déprime insondable, mordant la tartine à demi-mangée pour la coincer entre ses dents, libérant la fraîcheur de ses doigts de la douce étreinte d’Albus pour se lever. Doucement, langoureusement, avec cette grâce princière qui n’appartenait qu’à lui, le grand Gellert Grindelwald vint s’installer sur les genoux du non moins grand Albus Dumbledore, avec cette nonchalance insolente qui n’appartenait qu’à lui et dont le sage sorcier était tombé irrésistiblement amoureux. D’un geste distrait, empressé, Albus se débarrassa de sa tartine, la laissant choir sur la table avec indifférence, pour le miracle auquel il ne se faisait pas encore, de glisser ses bras autour de la taille frêle. Le regard planté l’un dans l’autre, Albus eut un sourire attendri en le laissant lui ôter une miette glissée au creux de sa toison mordorée, poussant un long soupir de reconnaissance, en sentant la nuque moite de son homme se nicher avec humilité dans le creux de son cou, à la naissance de sa barbe.

Là, les bras autour du corps grâcile de son homme, Albus n’avait rien d’autre à faire pour se sentir entier qu’à le contempler manger en bouchées avides, appétit recouvré, enfin, sa minceur fragile s’aggravant à chaque contrariété. Toujours lové contre lui, comme pour s’insuffler la force de parler de ce qui lui avait paru si insoutenable qu’il s’était immolé de lui-même aux crocs béants des Détraqueurs, Gellert lui confirma sa déduction. Albus fronça les sourcils, plus intrigué que chagriné ou effrayé, par cette prophétie étrange de la survenue d’un sorcier capable de le faire implorer pour sa vie de vieillard. La vision semblait bien plus insupportable au mage noir repenti, à sa voix entrecoupée qui se brisait, au courage qu’il lui semblait falloir pour extirper ce souvenir et le faire revivre à travers ses mots. Avec tendresse, Albus resserra quelque peu l’étreinte sur sa hanche de sa paume tiède, son autre main glissant vers la soie des cheveux de son amant, dont la blondeur polaire recouvrait sa nuque froide. Albus eut un sourire malicieux et tendre, cherchant à dédramatiser ce qui, incontestablement, était au-delà du supportable pour Gellert ;

- Je t’ai dit que je ne fouillerai aucun de tes souvenirs sans toi…Toutefois je suis curieux ; est-ce que je portais bien la robe de sorcier ? Et la barbe longue ? C’est que ces deux attributs me sont déjà venus à l’esprit, le premier pour le confort, le second pour l’apparence de vieux sage qui me siérait très bien…

Albus eut un tendre sourire malicieux, mais la vision de Gellert ne semblait pas vouloir laisser sa bonne humeur éclaircir les cieux lourds de mauvaises présages. Le sage patriarche lui abandonna ses doigts, avec lesquels, inconsciemment, Gellert trahissait sa nervosité. Derrière ses lunettes en demi-lune, Albus reprit un regard sérieux, pénétrant et qui se voulait rassurant ;

- Mon chéri, tâches de ne pas trop te tracasser. Je ne te ferais pas l’affront de te dire que ta vision est fausse, mais la divination n’est pas une science exacte, et je la juge nébuleuse non par condescendante, mais précisément parce que l’avenir n’est pas un chemin linéaire, mais un carrefour pétri de bifurcations. T’être jeté en pâture à Azkaban, d’où je t’ai sauvé in extremis, a très bien pu changer le cours du temps, et le destin qui t’as paru inéluctable, lors de ta vision. N’oublies pas que tu es avec moi désormais. S’il relevait déjà du miracle de parvenir à me vaincre, personne ne peut rien contre nous, ensemble.

Pourtant, comme il était aisé de distiller de sages conseils quand il ne s’agissait pas de soi-même ! Lorsque Gellert annonça sa propre mort d’une voix placide, Albus blêmit de s’imaginer son fier amant soumis aux affres du temps, lâchement achevé par cette homme dont le pseudonyme étrange fit courir un élan de colère insensé le long de ses veines. Son sourire restait tendre, pourtant, tandis qu’il lui faisait une promesse réciproque ;

- Je rétorque la même menace envers ce « Voldemort », qui qu’il soit. Nous ferons des recherches à ce sujet, en temps voulu.

Avec un soupir bienheureux, il le laissa déposer un baiser sur sa joue mangée de barbe. Eut un léger rire lorsque Gellert prit ce ton faussement menaçant pour le déclarer sa propriété, l’insolence brûlant la froideur de ses iris hétérochromes lorsqu’il réclama une seconde tartine. S’y entrechoqua la malice d’Albus, qui obéit sans mot dire, agitant son poignet pour que s’affaire le couteau en lévitant à tartiner de beurre une épaisse tranche de pain qu’il recouvrit de fromage, cette fois-ci. La tartine vint le narguer jusque devant son nez, mais Albus s’empara de ses doigts à la dernière seconde, l’empêchant de s’en saisir, tandis que son sourire se faisait plus mutin encore ;

- N’oublies jamais que tu es à moi, toi aussi, ô grand Grindelwald. Et que s’il faut que je devienne ton ombre pour te contraindre à trois repas par jour, tu m’auras sur ton sillage, que tu le veuilles ou non.

Doucement, les lèvres mangées de barbe se posèrent sur les doigts blancs, qu’il mit un temps fou à lâcher. Avec plus de tendresse encore, et une lenteur infinie, sa main se posa sur sa joue mal rasée, approchant son visage du sien, jusqu’à pouvoir se perdre dans la blondeur lunaire de ses cils. Une seconde de plus, et ses lèvres s’abreuvaient enfin aux siennes, prévenantes et douces, caresse délicate qui semblait mettre beaucoup de précautions à ne pas vouloir briser son roc qui lui semblait si frêle, ce soir. Albus ferma les paupières un instant, tout à l’étreinte du corps grâcile contre le sien, s’appliquant au baiser qui lui demandait pardon, jusqu’à ce que l’étreinte ne se brise, et que ses doigts à lui vinrent s’emparer de la tranche de pain suspendue entre eux, qu’il glissa lui-même dans les doigts de Gellert ;

- Manges. Et restes contre moi.

Un sourire attendri vint trahir l’autorité de la demande, qu’il avait appuyée d’une étreinte resserrée, comme pour l’empêcher de lui désobéir. Et soudain, ce fut au tour d’Albus de nicher son visage au creux de l’épaule de son homme, oasis retrouvé dans un soupir alangui, à sa place, enfin.
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